Fil d'Ariane
LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME TIENT UN DIALOGUE INTERACTIF AVEC LE CONSEILLER SPÉCIAL SUR LA PRÉVENTION DU GÉNOCIDE
Le Conseil des droits de l'homme a tenu, cet après-midi, un dialogue interactif avec le Conseiller spécial du Secrétaire général sur la prévention du génocide, M. Juan E. Méndez, qui a présenté le rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre du plan d'action en cinq points pour la prévention du génocide. Le Conseil a auparavant achevé l'examen du rapport présenté ce matin par la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, Mme Louise Arbour, concernant ses récentes missions ainsi que les activités du Haut Commissariat aux droits de l'homme. Il a par ailleurs entendu le Ministre des affaires étrangères des Maldives, M. Ahmed Shaheed, qui a notamment fait part des défis auxquels est confronté son pays et des efforts déployés pour les relever.
Présentant le rapport du Secrétaire général sur la prévention du génocide, M. Méndez a notamment rappelé que son mandat est préventif et que sa tâche n'implique pas de déterminer si certaines situations constituent ou non un génocide en vertu de la Convention de 1948. Il a par ailleurs indiqué avoir attiré l'attention du Secrétaire général sur un certain nombre de situations qui suscitent des préoccupations dans une perspective de prévention du génocide. Il a notamment écrit au Secrétaire général avec l'intention de communiquer au Conseil de sécurité des informations portant sur les situations au Darfour et en Côte d'Ivoire, a-t-il précisé. Il a enfin souhaité encourager un échange de vues sur les possibilités de coopération future du Conseiller spécial avec le Conseil, en matière d'alerte précoce et de prévention des violations graves et massives des droits de l'homme et du droit humanitaire international.
Dans le cadre du dialogue interactif qui a suivi, des délégations ont souhaité que le Conseiller spécial présente des recommandations quant aux mesures d'alerte précoce qui pourraient être prises afin de prévenir le génocide. Les représentants des pays suivants sont intervenus: Canada, Finlande (au nom de l'Union européenne), Suisse, Azerbaïdjan, Argentine, Arménie, Israël et Chine. Sont également intervenues la Commission internationale de juristes, United Nations Watch, et la Commission colombienne de juristes. Présentant des observations de conclusion du dialogue interactif, M. Méndez a notamment indiqué, s'agissant du Darfour, que la violence y prend un caractère de plus en plus ethnique. Au cours de ces dernières semaines, la situation a évolué de manière insoutenable et la population civile doit être protégée, a-t-il affirmé.
Les délégations des États membres suivants ont fait part de leurs commentaires s'agissant du compte rendu de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme sur ses activités récentes et des situations et questions qui y sont abordées, en particulier celles du Darfour, du Proche-Orient, du Sri-Lanka, d'Haïti, du Népal ou encore du mécanisme d'examen périodique universel devant être mis en place par le Conseil: Philippines, Pays-Bas, Argentine, Cuba, Équateur et Pologne. Sont également intervenus les représentants des pays suivants: Iraq, Népal, Soudan, Haïti, Israël, Australie, Chili, Suède, Iran, Norvège, Égypte, Costa Rica, Nouvelle-Zélande, États-Unis, Venezuela et Panama. Le représentant de la Palestine est également intervenu, ainsi que les organisations non gouvernementales suivantes: Association pour l'éducation d'un point de vue mondial (au nom également de l’Union mondiale pour le judaïsme libéral); Organisation internationale des femmes sionistes; Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples - MRAP (au nom également de plusieurs organisations non gouvernementales1); Commission internationale de juristes; United Nations Watch; Fédération internationale des ligues des droits de l'homme - FIDH; Forum asiatique pour les droits de l'homme et le développement (au nom également de Amnesty International); Human Rights Watch; Amnesty International; et Indian Movement Tupaj Amaru (au nom également du Conseil mondial de la paix).
La Haut-Commissaire aux droits de l'homme a fait des remarques de conclusion, suivie par des délégations qui ont exercé le droit de réponse : Algérie, Royaume-Uni, Canada, Chine et Iran.
Demain matin, à 10 heures, le Conseil doit se pencher sur les questions relatives aux méthodes de travail et à l'ordre du jour.
Déclaration du Ministre des affaires étrangères des Maldives
M. AHMED SHAHEED (Ministre des affaires étrangères des Maldives) a déclaré que son pays a la volonté de reconnaître ses problèmes et la détermination de les combattre. Au cours des trente dernières années, cette ouverture et cette détermination ont été clairement mises en évidence dans le domaine du développement social et économique. Les Maldives ont un défi unique à relever: plus de 99 % du pays est constitué de mer et la terre représente seulement 0,3 % de sa surface. Une terre divisée en 1190 petites îles. La population, qui compte 300 000 personnes, est répartie sur environ 200 de ces îles, ce qui pose des problèmes significatifs quant à la communication, les transports, le commerce et les services sociaux. Malgré ces défis, les Maldives ont réussi à atteindre un niveau remarquable de croissance économique et de développement au cours des vingt dernières années.
Le Ministre a souligné que la volonté de reconnaître les problèmes et les défis et la détermination pour les résoudre sont appliquées de manière aussi vigoureuse dans le domaine des droits de l'homme. En juin 2004, le Président Maumoon Abdul Gayoom a annoncé des programmes afin de procéder à des réformes profondes dans les cadres constitutionnel et démocratique, ainsi que dans les rouages des droits de l'homme. L'objectif est clair: créer un nouveau système plus démocratique et plus moderne qui répondra parfaitement aux normes et standards internationaux des droits de l'homme. Pour cela, une feuille de route a été établie avec des dates butoirs pour aboutir, entre autres, à des élections multipartites qui auront lieu en juillet ou octobre 2008.
En matière de réforme constitutionnelle, l'assemblée constitutionnelle poursuit l'examen des 31 propositions du Président pour amender la Constitution. Dans le domaine de la protection des droits de l'homme, un nombre important de mesures de première importance a été pris, notamment pour renforcer la Commission des droits de l'homme et la mettre en concordance avec les Principes de Paris. Le droit d'association est également dorénavant clairement définit avec un cadre réglementaire encore provisoire mais qui sera bientôt modifié. En matière de justice pénale, le système devrait bientôt être conforme aux normes internationales. Un nouveau Code de procédure pénal sera aussi bientôt présenté. Dans le domaine politique, un nouveau cadre pour le fonctionnement des partis politiques est en train d'être mis en place. Il prévoit pour la première fois plusieurs partis. Enfin, en matière de liberté de la presse, plusieurs lois récemment adoptées en assurent la liberté, a précisé le Ministre des affaires étrangères.
Les Maldives s'efforcent de faire de leur pays un pays démocratique, a assuré le Ministre. Cette occasion lui est aujourd'hui donnée, mais les Maldives ne peuvent relever seules ces défis. La taille et la complexité des tâches demandent une coopération étroite entre les Maldives et la communauté internationale, dont le Conseil des droits de l'homme. «De notre côté, le Gouvernement est prêt à s'engager avec le Conseil de manière positive et dans un cadre constructif et ouvert», a conclu M. Shaheed.
Suite de l'examen du rapport d'activités de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme
M. ENRIQUE MANALO (Philippines), remerciant la Haut-Commissaire pour sa mise à jour, s'est dit particulièrement préoccupé par la situation des enfants en Haïti. S'agissant de l'examen périodique universel, il a rappelé le point de vue son pays, à savoir que cet outil devait favoriser l'application effective des droits de l'homme. Le représentant des Philippines a, par ailleurs, recommandé qu'une assistance technique soit octroyée sans conditions aux pays qui en ont besoin. Finalement, la délégation philippine a dit que les méthodes de travail du Conseil sont un élément essentiel dans l'édification de sa nouvelle architecture.
M. BOUDEWIJN J. VAN EENENNAAM (Pays-Bas) a déclaré être préoccupé par la dégradation de la situation des droits de l'homme dans le nord de Sri Lanka. Son pays a reçu des informations selon lesquelles toutes les parties au conflit ont commis des violations aux droits de l'homme. Le représentant a rappelé qu'en accord avec le Gouvernement sri-lankais, il a été décidé de mettre en place une commission d'enquête internationale dont les modalités en vue d'assurer sa crédibilité seront bientôt fixées. Un expert doit aussi être bientôt nommé pour présider cette commission d'enquête, laquelle devrait pouvoir commencer ses travaux dès que possible. S'agissant du Darfour, le représentant néerlandais a rappelé qu'en vertu de la résolution portant création du Conseil, il est tenu d'intervenir pour remédier à cette situation grave et urgente. Le Conseil des droits de l'homme ne peut pas passer sous silence les violations terribles et systématiques commises au Darfour. Toutefois, il convient de garder à l'esprit que les gouvernements concernés sont responsables au premier chef de la sécurité de leurs citoyens, a conclu le représentant.
M. SERGIO CERDA (Argentine) s'est réjoui que chaque réunion du Conseil bénéficie désormais de la présentation de rapports actualisés de la part de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme. Il a par ailleurs exprimé l'espoir que le Conseil disposerait de ressources suffisantes pour donner suite à la mise sur pied du mécanisme d'examen périodique universel.
M. JUAN ANTONIO FERNÁNDEZ PALACIOS (Cuba) a relevé qu'il existe manifestement une ligne de démarcation entre les pays pauvres et les pays riches. Le Conseil ne peut ignorer cette réalité, a-t-il dit. Le groupe des pays riches et puissants au passé colonial se concerte pour défendre ses privilèges, et non pas pour défendre les principes des droits de l'homme. Le représentant a appelé à édifier un Conseil qui n'applique pas le principe de «deux poids, deux mesures», propre à l'ancienne Commission. Les critiques émises à l'encontre du Conseil, a-t-il dit, proviennent de ceux qui tentent de mettre des bâtons dans les roues de l'institution. Le représentant a encore regretté que les mécanismes du Conseil n'aient pas fait l'objet d'un examen minutieux et que les disparités régionales n'aient pas été corrigées. Il a appelé le Conseil à devenir une instance de dialogue.
Le représentant cubain a attiré l'attention sur une situation de violations massives et flagrantes des droits de l'homme, qui ne fait pas l'objet, comme certains voudraient le faire croire, d'une résolution «par pays»; il s'agit de la grave situation dont souffre le peuple palestinien sous occupation étrangère. S'il a fallu convoquer trois sessions extraordinaires du Conseil sur la situation dans la région, c'est précisément en raison de la nature exceptionnelle de ce qui s'y déroule depuis 40 ans. S'agissant du Darfour, le représentant cubain a souligné que le Conseil n'est pas resté silencieux et estimé que la résolution qui a été adoptée hier sur cette situation offrait une approche régionale et fondée sur la coopération sur cette situation complexe. Il a, finalement, évoqué des situations de violations des droits de l'homme passées sous silence; il y a des prisons où des actes de torture sont commis, a-t-il souligné, et des bombardements visant la population civile. Il faut que le système soit modifié, revitalisé, et qu'il corresponde aux aspirations de nos peuples, a conclu le représentant.
M. GALO LARENAS SERRANO (Équateur) a dit être satisfait que la Haut-Commissaire aux droits de l'homme se soit rendue en Haïti et dans le territoire palestinien occupé. S'agissant d'Haïti, Mme Arbour a établi un lien direct entre la pauvreté et les droits de l'homme. L'Équateur estime qu'il convient de rechercher une solution structurelle à ces problèmes. Le représentant a également déclaré que son pays juge très grave la situation des droits de l'homme dans le territoire palestinien occupé. Les négociations devraient être relancées entre toutes les parties au conflit. Concernant le Darfour, l'Équateur appuie la mise en œuvre intégrale de l'accord de paix et estime qu'une session extraordinaire du Conseil des droits de l'homme devrait être convoquée à ce sujet. Les coupables de graves violations des droits de l'homme devraient également être traduits devant la Cour pénale internationale. Quant à la question du remaniement institutionnel des droits de l'homme, l'Équateur est favorable à une coopération de tous pour se doter d'un mécanisme différent. Enfin, l'Équateur accorde une importance particulière à l'examen périodique universel, a conclu le représentant.
M. ZDZISLAW RAPACKI (Pologne) s'est dit préoccupé par la situation très grave qui prévaut actuellement au Darfour et par les atrocités commises dans cette région. À cet égard, a-t-il précisé, la Pologne partage l'avis du Secrétaire général concernant la nécessité pour le Conseil de convoquer une session extraordinaire sur le Darfour. Le représentant polonais a estimé que le mécanisme d'examen périodique universel ne doit pas remplacer les procédures spéciales car il s'agit là de deux procédures complémentaires.
Interventions de non-membres
M. MOHAMMAD ABU-KOASH (Palestine), se référant aux déclarations de la Haut-Commissaire des droits de l'homme suite à sa récente mission en Palestine, a relevé que l'on tente de comparer l'incomparable, soit une population occupée avec la puissance occupante. La déclaration de la Haut-Commissaire, a-t-il relevé, tout en consignant certaines violations israéliennes, ne mentionne pas le fait qu'Israël est puissance occupante et omet d'aborder le problème des colonies. La Haut-Commissaire, a-t-il ajouté, parle du mur en le nommant «une barrière»; le mur de Berlin était-il aussi une «barrière»? Le représentant a aussi regretté que le rapport de la Haut-Commissaire ne mentionne pas l'avis de la Cour internationale de justice qui a déclaré illégale la construction du mur.
Le représentant palestinien a indiqué que ce jour marque la journée de solidarité avec le peuple palestinien, qui coïncide avec l'anniversaire de la création de l'État d'Israël. Il a rappelé aux représentants des États membres du Conseil que beaucoup d'entre eux ne seraient pas présents dans cette salle s'ils ne s'étaient battus contre l'occupation de leur pays; de la même manière, a-t-il insisté, les Palestiniens ont le droit de résister à l'occupation.
M. OMER BERZINJI (Iraq) a fait valoir que Mme Arbour a relevé le sérieux du Gouvernement iraquien dans ses efforts pour résoudre les problèmes et sa volonté de poursuivre ses efforts pour lutter contre le terrorisme. L'Iraq invite donc la communauté internationale à soutenir ses efforts. Le Gouvernement iraquien cherche à réaliser la paix et la stabilité, a déclaré son représentant. Des réunions internationales sont d'ailleurs prévues pour chercher à instaurer la paix et la sécurité en Iraq et dans la région. L'Iraq cherche à lutter contre le terrorisme qui le menace, à réaliser la réconciliation nationale et à faire participer toutes les parties iraqiennes, a précisé le représentant. Les procès ont lieu dans le respect des lois et des procédures. «Depuis 2003, l'Iraq fait face au terrorisme, c'est la raison pour laquelle nous vous demandons de coopérer avec nous et de nous appuyer afin de sortir de cette crise», a déclaré le représentant.
M. GYAN CHANDRA ACHARYA (Népal) a remercié la Haut-Commissaire pour la mise à jour qu'elle a fournie concernant la situation au Népal. Comme l'a indiqué Mme Arbour, un accord a été signé au Népal qui comporte différents aspects relatifs aux droits de l'homme. Les dispositions de cet accord relatives aux droits de l'homme sont soumises à la supervision du bureau du Haut Commissariat aux droits de l'homme au Népal, a rappelé le représentant. Le pays se trouve dans une phase de transition cruciale; en fait, nous sommes dans un processus de transition générale qui doit ouvrir une ère nouvelle pour le pays, notamment par le biais d'une restructuration de l'ensemble de l'État, a-t-il déclaré. Un accord a même été signé hier 28 novembre par les deux parties, accord portant sur la maîtrise des armes, a-t-il en outre fait valoir. Le Népal en appelle au soutien et à la solidarité de l'ensemble de la communauté internationale dans le contexte de la transition actuelle que connaît le pays.
M. MUSTAFA FARAH (Soudan), Vice-Gouverneur de l'État du Sud Darfour, a regretté qu'une campagne ait été engagée pour disséminer au sein de la communauté internationale de fausses informations sur la situation qui prévaut au Darfour. Il a mis en doute les estimations de la Haut-Commissaire, affirmant que, contrairement à ce qui avait été dit, la situation s'est de fait améliorée suite à l'accord de paix signé en mai 2006. L'Union africaine, qui est l'instance la plus crédible du fait de son rôle sur le terrain, a attesté de cette amélioration. L'amélioration en matière de nutrition en témoigne également. Les personnes déplacées bénéficient même d'un meilleur accès à l'eau que le reste de la population, et a permis une baisse de la mortalité. Sept municipalités, a encore dit le représentant, connaissent une situation de tension et ce sont précisément celles qui ont refusé de s'associer à l'accord intervenu en mai dernier.
Le représentant soudanais a précisé que seule une réconciliation entre tribus permettrait de régler la situation. À cet égard, sur 39 conflits tribaux, le Gouvernement a été en mesure d'en régler 32, a-t-il fait valoir. Par ailleurs, une enquête menée conjointement par les Nations Unies et l'Union africaine avait montré que les rumeurs de viols propagées par une organisation non gouvernementale qui a, depuis, été expulsée du Soudan, étaient fausses. Le travail de la Cour pénale internationale doit pouvoir se poursuivre de manière indépendante; de son côté, la justice suit son cours au Darfour. Le Soudan accepte la coopération avec la communauté internationale, contrairement à d'autres pays, a fait valoir le représentant. Il a finalement exprimé le souhaité que soient organisées des rencontres officieuses avec les représentants des pays européens et invité ceux-ci à venir se rendre compte de la situation sur le terrain.
M. JEAN-CLAUDE PIERRE (Haïti) a remercié Mme Arbour d'avoir accepté de se rendre en Haïti en vue d'encourager la réforme du système judiciaire. La Haut Commissaire a pu bénéficier d'échanges ouverts. Les autorités haïtiennes partagent ses préoccupations quant à la pauvreté qui sévit dans le pays. S'agissant de la question de la détention préventive prolongée, les autorités travaillent sans relâche sur cette épineuse question, a assuré le représentant. Les réformes de la police nationale et du système judiciaire paraissent indispensables. Cependant, le manque de moyens financiers et de ressources humaines qualifiées empêche le pays d'aller vite, a estimé le représentant. C'est pourquoi un projet de coopération avec le Haut-Commissariat aux droits de l'homme aux fins d'assistance technique serait souhaitable, a-t-il déclaré. En conclusion, le représentant haïtien a tenu à remercier le Canada pour sa promesse de soutien financier et le Mexique, les Philippines et l'Équateur pour avoir accordé une attention à Haïti dans leurs interventions.
M. ITZHAK LEVANON (Israël) s'est réjoui de ce que la visite de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme puisse contribuer à ouvrir les yeux du Conseil sur les réalités du terrain. Celles-ci, a-t-il affirmé, sont plus contrastées et équilibrées que le Conseil veut bien l'admettre. Le représentant a rappelé que la population israélienne était, elle aussi, en proie à la violence et à la peur face aux attaques palestiniennes, comme la Haut-Commissaire a pu s'en rendre compte. Il a appelé le Conseil à agir de manière non sélective et à examiner la situation de la population israélienne de manière impartiale.
M. Levanon a rappelé que la visite de la Haut-Commissaire dans la région avait coïncidé avec un cessez-le-feu, valable à ce jour, et qui augurait, espérait-il, d'une reprise de négociations porteuses d'espoir, conformément à la Feuille de route. Le représentant israélien a assuré le Conseil de la volonté de son pays d'œuvrer dans ce sens et appelé les Palestiniens à saisir la chance qui s'offrait aujourd'hui. Il a finalement invité les autorités palestiniennes à s'abstenir de tout acte de violence et à démontrer leur volonté de mettre en place des solutions réalistes afin de garantir l'établissement d'une paix juste et durable.
MME CAROLINE MILLAR (Australie) a remercié Mme Arbour pour ses mises à jour précieuses concernant des situations de droits de l'homme dans le monde. S'agissant de Sri Lanka, elle a rappelé que l'Australie a soutenu la mise en place d'un mécanisme indépendant de surveillance des droits de l'homme dans ce pays. En ce qui concerne le Soudan, et en dépit de certaines affirmations contraires avancées aujourd'hui, il est clair que la situation sur le terrain au Darfour ne s'améliore pas, a poursuivi la représentante australienne. L'Australie est déçue de constater que le Conseil des droits de l'homme ne soit pas parvenu à prendre les mesures adéquates face à cette situation très grave du point de vue des droits de l'homme. L'Australie soutient pleinement l'appel lancé en faveur de la convocation d'une session extraordinaire du Conseil sur le Darfour.
M. JUAN MARTABIT (Chili) a félicité Mme Arbour pour la clarté de son rapport et remercié la Haut-Commissaire d'avoir attiré l'attention sur la situation en Haïti. Le représentant a rappelé l'engagement du Chili au sein de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH). Par ailleurs, le rapport montre à quel point la situation s'est dégradée entre la Palestine et Israël. S'agissant du Darfour, le Chili partage pleinement l'appel lancé en faveur d'une session extraordinaire. Le Chili appuie l'examen en session extraordinaire des situations graves, comme la Palestine et le Liban. Le Conseil des droits de l'homme ne doit pas hésiter à traiter également des questions complexes et urgentes comme le Darfour. Le représentant chilien a rappelé que les membres du Conseil ont une véritable responsabilité historique de veiller à ce que l'objectif central des travaux du Conseil des droits de l'homme soit la promotion des droits de l'homme et la protection des victimes.
MME ELISABET BORSIIN BONNIER (Suède) a remercié la Haut-Commissaire pour l'examen clair et objectif qu'elle a fait de la situation des droits de l'homme dans plusieurs régions du monde. La représentante de la Suède a estimé que le Darfour constituait l'un des cas les plus brûlants de violations des droits de l'homme. Toutes les parties, a-t-elle dit, sont responsables, citant, au nombre des violations commises, les exécutions extrajudiciaires, les viols et la violation du droit à l'alimentation. L'impunité doit cesser et les responsabilités doivent être clairement définies, a-t-elle dit, exprimant l'espoir que l'enquête menée par la Cour pénale internationale aboutira à désigner les coupables. La représentante a estimé que la résolution adoptée hier par le Conseil n'était pas suffisante et a invité celui-ci à organiser une session extraordinaire sur le Darfour. Elle a finalement dit que la Suède partageait l'analyse du Secrétaire général et a invité le Conseil à réfléchir aux conseils qu'il avait prodigués.
M. MOSTAFA ALAEI (Iran) a remercié Mme Arbour pour son rapport très clair concernant la visite qu'elle a effectuée dans le territoire palestinien occupé. Néanmoins, cette visite ne saurait constituer un substitut aux mandats du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967 et de la Commission d'enquête. L'Iran espère que le prochain rapport de la Haut-Commissaire sera tout aussi équilibré et conforme à la réalité sur le terrain que celui qu'elle a présenté ce matin. L'Iran espère que très prochainement, Mme Arbour sera en mesure de rendre compte de sa visite au Canada et de la situation des populations autochtones dans ce pays.
MME ASTRID HELLE AJAMAY (Norvège) a déclaré que son pays a pris note avec intérêt du message du Secrétaire général qui souhaite qu'une session spéciale soit consacrée à la situation au Darfour. La Norvège partage également le souci de la Haut-Commissaire en ce qui concerne les éléments internationaux du conflit. Si la situation n'est pas saisie à bras le corps, elle pourrait avoir des répercussions sur d'autres pays de la région, a estimé la représentante norvégienne qui a demandé à toutes les parties de mettre en œuvre aussi rapidement que possible l'accord d'Addis-Abeba.
M. SAMEH SHOUKRY (Égypte) a remercié la Haut-Commissaire pour le rapport qu'elle a présenté après sa visite dans le territoire palestinien occupé. Il a rappelé l'épisode de Beit Hanoun dans lequel 18 civils sont morts suite à une attaque israélienne. Il a fait remarquer que si les deux parties sont comptables de la situation de la population palestinienne, il faut établir une juste distinction entre l'agresseur et la victime. Le droit des Palestiniens à résister à l'occupation n'a pas été évoqué par la Haut-Commissaire, a déploré le représentant, qui a appelé le Conseil à adopter une approche objective.
M. LUIS VARELA QUIRÓS (Costa Rica) a indiqué que sa délégation partage la préoccupation de la Haut-Commissaire s'agissant de la grave détérioration des droits économiques et sociaux à Haïti. Il a demandé à la communauté internationale d'apporter de toute urgence son soutien au peuple haïtien. S'intéressant à la situation du Moyen-Orient, il s'est montré en faveur de la tenue d'une enquête transparente et indépendante sur les faits survenus à Beit Hanoun. La paix dans le monde passe par la paix au Moyen-Orient, a-t-il estimé, et il faut que toutes les parties concernées trouvent une issue au conflit qui permettra à Israël et à la Palestine de vivre en paix, côte à côte. Le représentant a souhaité que le Conseil trouve des moyens créatifs et constructifs pour assurer la protection et le renforcement des droits de l'homme. Ceci contribuera, de manière certaine, à la paix dans le monde, a-t-il précisé. Enfin, il a souligné que sa délégation partage la préoccupation de la Haut-Commissaire s'agissant de la situation des droits de l'homme dans le monde. À chaque fois que les droits d'un enfant, d'une femme ou d'un homme sont bafoués, ce sont les droits de tous qui sont bafoués, a-t-il insisté.
MME WENDY HINTON (Nouvelle-Zélande) a dit partager les préoccupations qui émaillent le rapport présenté ce matin par la Haut-Commissaire aux droits de l'homme. La culture de l'impunité prévaut dans bon nombre de régions du monde, a-t-elle déploré. La représentante a demandé instamment à toutes les parties à des conflits de respecter le droit humanitaire international et le travail du personnel humanitaire. En ce qui concerne le mécanisme d'examen périodique universel devant être mis en place par le Conseil, la Nouvelle-Zélande aimerait savoir comment l'on pourrait disposer d'un mécanisme qui pourrait soutenir efficacement le travail du Conseil.
M. WARREN W. TICHENOR (États-Unis) a souligné que, dans le contexte de violence sans fin au Moyen-Orient, il est urgent de renforcer les efforts de paix. Il a rappelé qu'il s'agit là d'un but primordial pour son pays et estimé que la Feuille de route reste le document de base pour permettre à Israël et à la Palestine de vivre, côte à côte, dans la paix et la sécurité. Les États-Unis demandent au Président de l'Autorité palestinienne et au Premier ministre israélien de s'entendre sur un cessez-le-feu durable à Gaza, a poursuivi M. Tichenor, ajoutant qu'il est essentiel que l'Autorité palestinienne renonce à la terreur et devienne un partenaire œuvrant pour la paix. Israël, a-t-il ajouté, a le droit de défendre ses citoyens des attaques, mais en le faisant, il doit, comme tout autre État, respecter les obligations du droit de la guerre, et notamment celle de viser uniquement des cibles militaires.
Le représentant des États-Unis a aussi regretté que le Conseil n'ait pas réussi à répondre de manière efficace aux souffrances endurées par les populations du Darfour. Il a exhorté le Gouvernement soudanais à s'acquitter de sa responsabilité de protéger les civils contre les violations, y compris contre l'utilisation du viol comme arme contre les femmes ou le recrutement illégal d'enfants soldats. Il faut en finir avec ces années d'impunité, a-t-il insisté. Le représentant américain s'est montré en faveur de l'envoi d'une force de maintien de la paix qui veillerait, en collaboration avec l'Union africaine, à ramener l'espoir dans cette région du monde. Pour conclure, il a exhorté le Conseil à soutenir les efforts du Haut-Commissariat au Darfour et souligné qu'il prenait note de la demande du Secrétaire général de consacrer une session spéciale à cette question.
M. GABRIEL SALAZAR (Venezuela) a estimé que le traitement du conflit israélo-arabe est de moins en moins impartial mais que cette question ne devrait cependant pas monopoliser les travaux du Conseil: il est temps que ce nouvel organe prenne des mesures efficaces pour remplir son mandat. Face à la situation au Darfour, une solution doit être trouvée qui tienne compte des efforts déjà accomplis. Le Venezuela estime également que le regroupement des pays en développement pourrait être un point positif pour le fonctionnement du Conseil des droits de l'homme. Il convient aussi de veiller à assurer l'universalité des droits de l'homme, et en particulier le droit au développement, a rappelé le représentant. Le Venezuela estime que le nouveau mécanisme d'examen périodique universel devrait être mis en place de façon transparente. Le représentant vénézuelien a rappelé que les États devaient veiller ensemble à la protection des normes internationales.
MME UNA ALFU DE REYES (Panama) a salué le message du Secrétaire général transmis par la Haut-Commissaire. Elle a approuvé la collaboration du Haut-Commissariat avec le Conseil, réclamant qu'une attention spéciale soit portée à la situation des femmes et des enfants. La représentante du Panama a joint sa voix à celle des pays ayant appelé à une action urgente sur le Darfour. S'agissant du fonctionnement du Conseil, elle a appelé à plus de contenu et de consistance et souhaité que le Conseil tienne compte de toutes les situations graves avec la même attention et le même sentiment d'urgence. Évoquant l'importance de l'examen périodique universel, elle a attiré l'attention des membres du Conseil sur la nécessité pour celui-ci de disposer de toutes les ressources nécessaires pour mener cette activité au mieux. Le Panama, qui a connu une sombre période de déni des droits de l'homme, suit avec attention le processus de consolidation du Conseil. La représentante a finalement invité les membres du Conseil à garder à l'esprit que les victimes de violations des droits de l'homme doivent être au centre du travail du Conseil.
Déclarations d'organisations non gouvernementales
M. DAVID LITTMAN (Association pour l'éducation d'un point de vue mondial, au nom également de l'Union mondiale pour le judaïsme libéral) a attiré l'attention de Conseil sur la tragédie du Darfour, relevant que Mme Arbour a elle-même déclaré que les atrocités dans cette région doivent cesser. Le Secrétaire général a de son côté estimé que la situation au Darfour devrait faire l'objet d'une session extraordinaire de ce Conseil. Il faut par ailleurs condamner clairement les appels à tuer au nom d'une religion. Aujourd'hui, la violence au nom d'une foi ou d'un Dieu se déchaîne au Moyen-Orient. Il faut que ceux qui appellent au meurtre au nom d'une religion, d'une foi ou d'une croyance sectaire soient mis au ban de la civilisation.
MME RAMA ENAV (Organisation internationale des femmes sionistes) a montré à quel point les bombardements par missiles Qassam exerçaient une pression terrible sur les enfants d'Israël. La représentante a lancé un appel à l'Autorité palestinienne pour qu'elle accepte la paix et dit espérer que les enfants de Sderot et de Gaza puissent vivre dans la sécurité.
M. GIANFRANCO FATTORINI (Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples - MRAP, au nom également de plusieurs organisations non gouvernementales1) a évoqué la mort, sous les tirs chinois, de plusieurs Tibétains qui tentaient de franchir la frontière népalaise. Le représentant a souhaité connaître les mesures prises par le Haut-Commissaire pour faire la lumière sur cet incident grave.
MME SUSAN APPLEYARD (Commission internationale de juristes) a fait part de la profonde préoccupation de son organisation face à la situation des droits de l'homme à Sri Lanka. Le Conseil doit continuer à suivre cette situation afin de définir comment mettre en place une opération internationale visant à la protection des droits de l'homme sur le terrain. L'impunité est systématique au Sri Lanka, a déploré la représentante.
M. TOBY FRANKENSTEIN (United Nations Watch) a regretté que le Soudan conteste les faits présentés cette semaine par plusieurs États membres au sujet de la situation au Darfour. La représentante a également regretté que la majorité qui régente ce Conseil s'apprête à rejeter la tentative de rendre le Soudan responsable de ses actes. UN Watch exhorte le Conseil à tenir une session extraordinaire sur la question du Darfour. L'organisation demande également que soit traitée la question des missions d'enquête du Conseil, lesquelles ne sont créées après qu'un verdict de culpabilité ait été rendu.
MME SOUHAYR BELHASSEN (Fédération internationale des ligues des droits de l'homme - FIDH) a demandé que soit envoyée en Iraq une commission d'enquête pour faire la lumière sur les violations des droits de l'homme dans ce pays. Elle a, par ailleurs, exprimé le sentiment que la résolution sur le Darfour que le Conseil a votée hier 28 novembre est tout à fait insuffisante. Elle a appelé le Conseil à organiser, sans retard, une réunion extraordinaire sur ce sujet. S'agissant de la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés, elle a indiqué que la situation était pire que jamais et invité les États parties, en vertu de l'obligation de protection qui leur incombe, à assurer le déploiement d'une force d'interposition internationale pour protéger les populations civiles palestinienne et israélienne.
MME RAMNI MUTTETUWEGAMA (Forum asiatique pour les droits de l'homme et le développement, au nom également de Amnesty International) a attiré l'attention du Conseil sur la dégradation de la situation des droits de l'homme et du droit international humanitaire à Sri Lanka depuis le début du mois de septembre dernier, soulignant que plus de 300 civils ont été tués pour le seul mois d'octobre 2006. Des enfants ont été recrutés par les LTTE et par la faction Karuna, qui agit avec la complicité des troupes gouvernementales. Le Conseil doit insister pour que les parties reviennent à la table des négociations et appliquent l'accord de cessez-le-feu.
MME MARIETTE GRANGE (Human Rights Watch) a déclaré que des témoignages oculaires recueillis récemment attestent de bombardements opérés par le Gouvernement soudanais sur des civils dans des villages soudanais et tchadiens. Le Conseil a manqué à ses devoirs à l'égard du peuple du Darfour et a ainsi entamé sa propre crédibilité. Le Conseil devrait réagir immédiatement et demander au Gouvernement soudanais de mettre fin à ses offensives militaires. Des sanctions doivent aussi être infligées aux Soudanais responsables de violations. S'agissant de Sri Lanka, la situation s'est dégradée. Le Gouvernement a mis en place une commission d'enquête, dont le représentant d'Human Rights Watch a dit espérer qu'elle aboutirait au lancement de poursuites judiciaires. Mais la commission risque de se heurter à des tergiversations politiques. Human Rights Watch exhorte enfin le Conseil à élaborer avec le Gouvernement sri lankais une mission de surveillance sur le terrain.
M. PETER SPLINTER (Amnesty International) a vivement regretté que le Conseil ait manqué l'occasion d'envoyer un message clair au Gouvernement du Soudan pour qu'il fasse cesser les violations dont la population du Darfour est victime. La journée d'hier, a dit le représentant d'Amnesty International, a été une nouvelle journée sombre pour la population du Darfour, mais aussi pour le Conseil des droits de l'homme qui n'a pas su faire la preuve de sa crédibilité. Se référant aux propos de l'ambassadeur d'Algérie mettant en doute la collusion entre le Gouvernement soudanais et les milices, il a demandé ce qu'il fallait faire pour prouver les faits, et suggéré à la Haut-Commissaire qu'elle fasse témoigner, devant le Conseil, des victimes, des collaborateurs d'organisation humanitaires et des membres de la force d'interposition africaine, des pillages et viols commis par les milices soudanaises.
M. LAZARO PARY (Mouvement indien «Tupaj Amaru», au nom également du Conseil mondial de la paix) a indiqué que son organisation aurait souhaité recevoir de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme davantage de preuves matérielles concernant les violations graves de droits de l'homme commises en Palestine et en Iraq. On ne pourra jamais résoudre les questions telles que celles de la Palestine et de l'Iraq s'il n'y a pas de réelle volonté politique de la part de tous les États, a dit le représentant. Aujourd'hui, le peuple palestinien est victime d'un véritable génocide, d'une véritable extermination, a-t-il conclu.
Conclusion du débat par la Haut-Commissaire
MME LOUISE ARBOUR, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, a remercié les délégations qui ont pris la parole cet après-midi et qui ont montré leur engagement à trouver une solution aux problèmes qui retiennent l'attention du Conseil.
Mme Arbour a donné des précisions sur les sources d'informations dont elle dispose et sur la base desquelles elle peut établir une analyse des situations. S'agissant du Soudan, les sources d'informations sont notamment celles du Rapporteur spécial sur le Soudan. Le rapport présenté par le Haut Commissariat diffusé se fonde sur des informations de première main, fiables et crédibles qui viennent des témoignages de victimes. Les représentants institutions des droits de l'homme procèdent aussi à des vérifications d'informations avec les autorités locales, a déclaré Mme Arbour. Les allégations reçues sont portées à l'attention des autorités locales qui donnent leur avis sur la situation, a précisé la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, qui a rappelé qu'elle a mandaté deux missions dans le Darfour, au cours desquelles elle a essayé de vérifier la qualité des opérations. Toutefois, Mme Arbour a estimé que ces brèves visites n'étaient pas suffisantes en soi pour une appréciation complète de la situation et qu'elle était donc fortement dépendante des représentants sur le terrain et des partenaires. Mme Arbour a également souhaité donner au Conseil des informations sur les moyens et les capacités en Irak. Le Bureau des droits de l'homme a été établi en 2004 avec pour mandat la promotion des droits de l'homme en Iraq. Le Bureau compte deux unités qui assurent la supervision des droits de l'homme et la reconstruction des institutions humanitaires irakiennes. En dépit de difficultés évidentes, le Bureau publie des informations essentielles, a expliqué la Haut-Commissaire.
Exercice du droit de réponse
M. IDRISS JAZAÏRY (Algérie), rappelant que son expérience au sein des Nations Unies dépassait sans conteste celle du représentant du Royaume-Uni, a contesté ses affirmations selon lesquelles l'Algérie accuserait les Nations Unies de vouloir établir «une tutelle» sur le Soudan. Il a précisé qu'il avait indiqué que certains pays décrivent la situation au Soudan comme étant pire qu'elle n'est en réalité, adoptant le point de vue de ceux qui voient le verre à moitié vide plutôt qu'à moitié plein.
M. NICHOLAS THORNE (Royaume-Uni) a confirmé que «l'Ambassadeur d'Algérie est effectivement plus âgé que moi».
M. TERRY CORMIER (Canada) a répondu à une déclaration faite cet après-midi par l'Iran, qui disait attendre avec impatience un rapport de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme sur la situation des populations autochtones au Canada, en faisant observer que le Canada est une démocratie pluraliste dont les fondements reposent sur la règle du droit. Le Canada possède une longue tradition de dialogue avec les peuples autochtones. Des problèmes restent à résoudre en ce qui concerne les peuples autochtones, a admis le représentant, faisant valoir que son pays est résolu à œuvrer dans ce domaine en les prenant à bras le corps. Les autochtones au Canada ne sont pas jetés en prison pour s'être librement exprimés, a rappelé le représentant canadien.
MME LI NAN (Chine) a déclaré que l'organisation non gouvernementale ayant fait état d'un incident au sujet de gardes frontières chinois sur la frontière tibétaine a soulevé une question qui n'a pas été mentionnée dans la présentation de la Haut-Commissaire; elle est donc hors sujet. La délégation chinoise est très déçue de voir que, trop fréquemment, il n'est pas tenu compte des procédures officielles qui devraient pourtant être respectées. S'agissant de la participation des organisations non gouvernementales aux travaux du Conseil des droits de l'homme, des incidents tels que celui qui vient de se produire sont préoccupants, a déclaré la délégation chinoise. S'agissant du fond de l'affaire évoquée, la représentante de la Chine a précisé qu'une enquête est en cours.
Présentation du rapport sur la prévention du génocide
Présentant le rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre du plan d'action en cinq points pour la prévention du génocide (E/CN.4/2006/84), M. JUAN E. MÉNDEZ, Conseiller spécial du Secrétaire général, a rappelé que la prévention du génocide est un impératif à la fois juridique et moral. Le préambule de la Charte des Nations Unies rappelle que les Nations Unies ne devraient pas - et même ne peuvent pas - laisser un groupe humain, défini par sa race, sa religion, son appartenance ethnique ou son origine nationale, être détruit en totalité ou en partie. Pourtant, nous sommes honteux de n'avoir pas fait assez pour empêcher le génocide de se produire encore au XXe siècle, en dépit des leçons de l'holocauste. En réaction aux échecs du passé récent et de l'existence de lacunes dans la capacité des Nations Unies à lancer une alerte précoce, à l'occasion du dixième anniversaire du génocide au Rwanda, le Secrétaire général a annoncé la création d'un poste de Conseiller spécial sur la prévention du génocide, dans le contexte plus large d'un plan d'action impliquant l'ensemble des Nations Unies et articulé en cinq points: prévention des conflits armés; protection des civils dans les conflits armés; cessation de l'impunité; alerte précoce; et action décisive. M. Méndez a ainsi rappelé que la source de son mandat réside dans la résolution n°1366 (2001) du Conseil de sécurité. Il a souligné que sa tâche n'implique pas de déterminer si certaines situations constituent ou non un génocide en vertu de la Convention de 1948 sur la prévention et la punition du crime de génocide. L'objet de son mandat est préventif, a insisté le Conseiller spécial: il lui est demandé de fournir au Secrétaire général et, par son truchement, au Conseil de sécurité, des informations sur les situations de violations graves ou massives de droits de l'homme et du droit humanitaire international, tout en présentant des recommandations susceptibles d'empêcher qu'une situation donnée ne prenne les dimensions d'un génocide.
La prévention du génocide requiert de recourir à l'alerte précoce sur la base d'indicateurs ou de signaux d'alerte pour les situations qui risquent de dégénérer, a poursuivi M. Méndez. Il a indiqué qu'il avait choisi de ne pas se fonder sur des modèles statistiques quantitatifs pour évaluer le risque de génocide ou pour mettre sur pied un système d'alerte précoce pour la prévention du génocide au sein de son bureau – bureau composé de trois personnes en sus du Conseiller spécial. M. Méndez a indiqué avoir préféré considérer son rôle comme étant celui d'un bureau de liaison passant en revue les informations et analyses émanant du système des Nations Unies et d'autres sources extérieures. Le Conseiller spécial a indiqué s'être saisi de situations de pays au cas par cas, sur la base d'informations laissant apparaître l'existence d'un groupe national, ethnique, racial ou religieux qui serait menacé. Il a précisé s'être concentré sur les cas les plus évidents de violations massives qui risquent de dégénérer en génocide, plutôt que d'adopter une approche plus diffuse qui privilégierait l'implication précoce dans des situations où une discrimination pourrait exister, mais où l'on ne serait pas en présence de violations massives et graves.
M. Méndez a indiqué avoir transmis au Secrétaire général un certain nombre de notes sur des situations qui ont été portées à son attention et suscitent des préoccupations dans une perspective de prévention du génocide. Certaines de ces notes ont été partagées, de manière informelle, avec le Conseil de sécurité. Jusqu'ici, a précisé M. Méndez, «j'ai écrit spécifiquement au Secrétaire général avec l'intention de communiquer au Conseil de sécurité des informations portant sur des situations qui figurent déjà à son ordre du jour». Tel est le cas avec les situations au Darfour, où M. Méndez a indiqué s'être rendu à deux reprises depuis sa nomination, et en Côte d'Ivoire, où il a indiqué avoir effectué une visite. Il a par ailleurs rappelé que le Secrétaire général avait nommé en mai dernier un Comité consultatif sur la prévention du génocide afin d'orienter et de soutenir les travaux du Conseiller spécial sur la prévention du génocide, tout en contribuant aux efforts plus larges déployés par les Nations Unies pour prévenir le génocide. Ce Comité a présenté au Secrétaire général un rapport contenant des recommandations spécifiques quant à la manière d'améliorer la capacité des Nations Unies en matière d'alerte précoce et de prévention du génocide. La décision concernant l'application de ces recommandations appartiendra probablement au nouveau Secrétaire général des Nations Unies, a souligné M. Méndez. Il a enfin souhaité encourager un échange de vues sur les possibilités de coopération future du Conseiller spécial avec le Conseil, en matière d'alerte précoce et de prévention des violations graves et massives des droits de l'homme et du droit humanitaire international. À cet égard, il a souhaité explorer les moyens par lesquels le bureau du Conseiller spécial pourrait coopérer avec le Conseil pour identifier les situations préoccupantes et pour définir des approches pratiques qui permettraient d'éviter une détérioration des situations susceptibles de mener à un génocide si elles ne font pas l'objet d'une surveillance.
Débat interactif avec le Conseiller spécial
M. TERRY CORMIER (Canada), félicitant le Conseiller spécial pour son rapport, et rappelant que la communauté internationale a le devoir d'agir lorsqu'un État manque à son devoir de protéger sa population civile, a demandé au Conseiller spécial de quelle manière le Conseil pouvait appuyer et soutenir sa mission. Il a aussi demandé si les nouveaux principes ayant trait à la responsabilité de protection ont affecté le travail de ses services.
MME JOHANNA SUURPÄÄ (Finlande, au nom de l'Union européenne) a réaffirmé le ferme engagement de l'Union européenne à lutter contre le génocide. La responsabilité essentielle de cette lutte incombe aux pays eux-mêmes. La situation tragique au Darfour représente l'une des urgences humanitaires les plus graves. La résolution 1674 du Conseil de sécurité marque une étape importante. Le défi est clair: il faut assurer une meilleure protection sur le terrain.
M. JEAN-DANIEL VIGNY (Suisse) a jugé nécessaire de compléter les procédures dont s'est dotée la justice pénale internationale par une politique de prévention des génocides. La Suisse estime important que le système des Nations Unies prévoie des procédures permettant de détecter au plus tôt les crises susceptibles de dégénérer en génocide. La Suisse suggère que le Conseiller spécial propose des mesures concrètes de prévention du génocide, définies en coopération avec les procédures spéciales telles que celles chargées des minorités, des personnes déplacées, des exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et des autochtones.
M. ELCHIN AMIRBAYOV (Azerbaïdjan) soulignant que les populations de son pays ont été, à diverses reprises, victimes de génocides, a estimé que la mesure la plus efficace pour prévenir le génocide est d'identifier à un stade précoce les sociétés qui se rendent coupables de discriminations envers leurs minorités et tentent de mettre en place un État «monoethnique». Ces pratiques, a-t-il dit, sont très répandues dans le monde et il faut les combattre. Le représentant a demandé au Conseiller spécial quel était son rôle dans le processus d'identification des cas extrêmes. Se référant à l'idée de mettre en place un groupe consultatif intégrant des chercheurs et organisations et participant à la réflexion sur la lutte contre le génocide, il a demandé quel était l'état actuel des travaux, comment les membres de ce groupe seraient désignés et comment ils pourraient aider le Conseiller spécial dans l'accomplissement de ses tâches.
M. SERGIO CERDA (Argentine) a déclaré que son pays apporte toute sa coopération à l'examen de la question de la prévention du génocide. Le représentant a souhaité savoir quelle image se fait M. Méndez du rôle du comité consultatif envisagé par le Conseil pour remplacer la Sous-Commission des droits de l'homme.
M. ZOHRAB MNATSAKANIAN (Arménie) a observé que le mandat du Conseiller spécial sur la prévention du génocide a été entériné par tous les membres des Nations Unies. Il s'est félicité du travail intense réalisé par le Conseiller spécial durant la première année de son mandat. L'Arménie souhaiterait connaître l'avis de M. Méndez au sujet du statut actuel et du renforcement des dispositifs d'action en matière de prévention du génocide. Le spectre du génocide continue de nous hanter, a ajouté le représentant arménien.
M. ITZHAK LEVANON (Israël) a regretté que le Conseiller spécial n'ait pas fait mention des propos du président iranien demandant qu'Israël soit rayé de la carte et accusant Israël d'exploiter le mythe de l'Holocauste, en violation flagrante de la Charte et de l'essence des Nations Unies. Si l'on admet que de telles déclarations sont des signes d'alerte, à partir de quel moment estimez-vous urgent d'enquêter à leur propos, a demandé le représentant israélien à M. Méndez.
M. KE YOUSHENG (Chine) s'est félicité du travail accompli par M. Méndez depuis son entrée en fonction ainsi que du plan d'action en cinq points du Secrétaire général. La Chine estime qu'il convient notamment de se concentrer sur l'élimination de la pauvreté et sur le développement, la pauvreté étant la cause profonde des conflits. Les zones où des conflits se produisent sont en proie à la haine. La communauté internationale doit œuvrer à éradiquer cette haine, afin de favoriser la paix et le développement, a déclaré le représentant chinois. Enfin, adopter une approche partiale à l'égard des conflits est le plus sûr moyen de les exacerber, a observé le représentant de la Chine.
M FEDERICO ANDREV-GUSMAN (Commission internationale de juristes) a insisté sur l'importance de l'alerte précoce pour prévenir l'occurrence de génocides. Il faut arriver à déceler les indices montrant qu'un génocide se profile, a affirmé le représentant. Les procédures spéciales sont bien placées pour donner l'alerte et il n'est pas inutile de rappeler que le Conseil a une fonction de prévention. Le Conseil ne doit pas seulement se doter d'un cadre de prévention: il doit aussi agir.
M. TOBY FRANKENSTEIN (United Nations Watch) a souligné que le Président de l'Iran avait lancé des appels répétés au génocide contre Israël: le représentant a estimé qu'une diplomatie de haut niveau beaucoup plus énergique était souhaitable pour aborder ce grave problème. À cet égard, elle a demandé au Conseiller spécial ce qu'il avait entrepris, et ce qu'il comptait entreprendre, dans le domaine de l'incitation à la haine d'Israël à laquelle se livre l'Iran.
M. ANDRÉS SÁNCHEZ (Commission colombienne de juristes) a déclaré que la prévention du génocide constituait l'un des grands défis des Nations Unies. Les organisations non gouvernementales ont toujours signalé les situations d'alerte, notamment lorsqu'elles concernaient des communautés vulnérables. Il faut, de manière préventive, demander au Conseil de prendre des mesures sur la base des informations reçues.
Présentant des observations de conclusion au dialogue interactif, le Conseiller spécial du Secrétaire général sur la prévention du génocide, M. JUAN E.MÉNDEZ, a jugé important de pouvoir entretenir des communications régulières avec le Conseil des droits de l'homme. Il a exprimé le souhait d'avoir un rapport plus fréquent avec le Conseil et a indiqué qu'il demeurait à sa disposition.
S'agissant du Darfour, M. Méndez a affirmé que la violence y prend un caractère de plus en plus ethnique. Au cours de ces dernières semaines, la situation a évolué de manière insoutenable et la population civile doit être protégée, a déclaré le Conseiller spécial. Il a indiqué avoir demandé que tout soit fait pour faciliter et assurer l'acheminement de l'aide humanitaire. Il faudrait en outre un mécanisme de vérification solide confié à l'Union africaine et il faudrait aussi désarmer les milices, a ajouté M. Méndez.
Exercice du droit de réponse
M. MOSTAFA ALAEI (Iran) a déclaré que les déclarations d'Israël et de certaines organisations non gouvernementales portant sur une déclaration du Président iranien étaient sélectives. Le Président iranien n'a en effet jamais parlé du peuple juif, dont des membres vivent d'ailleurs en paix sur le sol iranien. Il considère, par contre, qu'un régime qui se fonde sur l'occupation et sur l'expansionnisme, sur le versement de sang arabo-musulman ne devrait plus exister. Le Président iranien n'a pas employé le terme de «génocide», estimant que le régime criminel dont il est question doit être renvoyé par la voie électorale, a expliqué le représentant de l'Iran.
Déclaration conjointe1: Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (MRAP); Asian Indigenous and Tribal Peoples Network; Forum asiatique pour les droits de l'homme et le développement; Société pour les peuples en danger; Mouvement international de la réconciliation; Interfaith International; Organisation mondiale contre la torture; Pax Romana; International Educational Development; International Federation for the Protection of the Rights of Ethnic, Religious, Linguistic & Other Minorities Transnational Radical Party; France Libertés – Fondation Danielle Mitterrand; Habitat International Coalition; Saami Council; Fédération Internationale des Mouvements d'adultes Ruraux Catholiques (FIMARC); Centre international des droits de la personne et du développement démocratique (Droits et Démocratie); et Transnational Radical Party.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
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