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Examen du Pérou au CESCR : la situation de la société civile, la violence domestique, les violences sexuelles contre les enfants à l’école, le travail des enfants, la place de l’économie informelle et la pollution environnementale sont au cœur du dialogue
![Treaty Bodies](/sites/default/files/styles/max_width/public/2024-09/CESCR_5.jpg?itok=LURxox-o)
Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels (CESCR, selon l’acronyme en anglais) a examiné, hier matin et ce matin, le rapport périodique présenté par le Pérou au titre du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
Au cours du dialogue noué entre les experts membres du Comité et la délégation péruvienne venue soutenir ce rapport, un expert a exprimé son inquiétude face à l’espace de plus en plus restreint accordé à la société civile au Pérou et a fait part de préoccupations concernant les conditions de travail des défenseurs des droits de l’homme dans ce pays. Il a par ailleurs demandé des explications concernant la déclaration de l’état d’urgence dans le cadre des manifestations sociales, et a rappelé que cette mesure devait rester exceptionnelle.
Le même expert a ensuite fait part de préoccupations liées à l’exploitation minière et aux conflits environnementaux, soulignant que certains territoires autochtones étaient menacés par des activités économiques non réglementées. Il s’est enquis des garanties mises en place pour protéger ces communautés et s’assurer que leurs droits soient respectés.
L’attention a d’autre part été attirée sur le taux élevé de la population exposée à la contamination par des métaux lourds, y compris le mercure, ainsi que sur la déforestation due à l'exploitation minière illégale.
Une experte s’est enquise des mesures prises pour lutter contre le travail des mineurs dans les secteurs dangereux. Un autre membre du Comité a également interrogé la délégation sur l’inaction présumée du Gouvernement face au travail des enfants, notamment dans le secteur minier.
Il a par ailleurs été relevé que les quotas d'emploi pour les personnes handicapées étaient peu respectés, faute de sanctions, et que beaucoup de ces personnes étaient contraintes de travailler dans le secteur informel, avec des salaires inférieurs à ceux des autres travailleurs. Une experte a souligné que l'économie informelle occupe toujours plus de 60% de la population active et que la taxation des étrangers non-résidents au Pérou était un frein à l'officialisation de leur emploi. Elle a demandé si le Gouvernement envisageait de rendre le système fiscal plus équitable et de mieux encadrer les contrats saisonniers.
Un expert a voulu savoir pourquoi les féminicides et les violences conjugales persistent au Pérou en dépit des modifications apportées à la législation. Il s’est enquis des mesures mises en place pour garantir l’accès effectif des femmes victimes de violences aux services de protection et de justice.
Plusieurs experts se sont inquiétés de l’ampleur des violences sexuelles dans les écoles – et notamment dans certaines écoles amazoniennes –, un expert faisant observer que le nombre de cas signalés en 2023 et 2024 est resté élevé, avec plus de 19 000 signalements annuels. La délégation a été interrogée sur les mesures prises dans ce contexte pour garantir l’accès des enfants victimes à la justice, notamment en milieu rural et autochtone.
Une experte a par ailleurs interrogé la délégation sur la limitation du droit de grève et les représailles subies par les travailleurs syndiqués ; elle a notamment voulu savoir si la loi péruvienne sur les grèves allait être réformée.
Il a aussi été demandé si le Pérou entendait ratifier le Protocole facultatif se rapportant au Pacte, en vertu duquel les citoyens péruviens seraient habilités à déposer des plaintes individuelles auprès du Comité.
Présentant le rapport de son pays, M. Luis Fernando Domínguez Vera, Directeur général de la Direction générale des droits de l’homme du Ministère de la justice et des droits de l’homme du Pérou, a souligné que la pandémie de COVID-19 avait constitué un obstacle majeur à l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels, mais que des efforts importants avaient été déployés pour en limiter les effets.
Le chef de délégation péruvienne a par ailleurs fait état de l’adoption d’un protocole intersectoriel contre le travail forcé et a souligné que le taux de travail infantile a été réduit de 5,8 points de pourcentage entre 2012et 2023. Il a d’autre part fait valoir que des politiques nutritionnelles avaient été mises en œuvre pour lutter contre l’anémie infantile et améliorer la santé des femmes enceintes et des jeunes enfants.
M. Domínguez Vera a en outre expliqué que des politiques nationales sectorielles avaient été adoptées pour combler les écarts dans le domaine de l’éducation, notamment en matière d’éducation bilingue et de lutte contre le décrochage scolaire. Il a par ailleurs attiré l’attention sur les efforts déployés en faveur de l’accès à l’eau potable et à l’assainissement, avec des projets bénéficiant à environ 300 000 personnes dans les provinces de Lima et Callao. Il a affirmé que le Pérou était engagé dans une transition vers un développement plus durable, et a souligné qu’en 2024, avaient été approuvés quelque 161 instruments de gestion environnementale qui optimiseront les projets d’investissement, à hauteur de plus de 14 milliards de dollars, dans des secteurs clefs tels que les mines, les transports, l’électricité, les hydrocarbures, l’agriculture, l’assainissement et la santé.
Il est par ailleurs prévu de mener à bien le processus de consultation préalable autour de la proposition de Politique nationale des peuples autochtones ou originaires, élaborée de manière participative avec les organisations autochtones nationales et dans laquelle ont été identifiés les services publics susceptibles de renverser les situations d’inégalité et de promouvoir le développement économique et social de ces populations, a ajouté M. Domínguez Vera. Il a d’autre part fait état de l’adoption de la Stratégie « Pérou sans racisme » à l’horizon 2030, dont l’objectif est d’appliquer des mesures destinées à améliorer les procédures afin de garantir aux citoyens qu’une attention opportune est accordée aux cas de discrimination ethnique et raciale.
L’État péruvien réaffirme son engagement en faveur de la construction d’une société plus juste, inclusive et équitable et, dans ce sens, a approuvé la Politique nationale multisectorielle des droits de l’homme à l’horizon 2040, a conclu le chef de délégation.
Durant le dialogue, la délégation péruvienne – également composée de représentants de la Mission permanente du Pérou auprès des Nations Unies à Genève – a notamment indiqué que la prévention du travail des enfants et des adolescents dans des emplois dangereux est une priorité des autorités péruviennes ; elle a fait état de l’adoption de directives nationales et de la délégation de compétences aux collectivités territoriales dans ce domaine.
La délégation a par ailleurs souligné que la loi sur la formalisation de l'économie a permis une augmentation du nombre de travailleurs passant du secteur informel au secteur formel.
Concernant la protection des défenseurs des droits de l’homme, la délégation a fait état de la mise en place d’un mécanisme de signalement des menaces, actif 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, qui offre des mesures de protection aux personnes à risque. Une plate-forme virtuelle permet également de signaler tout acte d’intimidation ou de harcèlement, et des antennes locales ont été ouvertes dans les régions où ces risques sont les plus élevés, a-t-elle ajouté.
La délégation a d’autre part souligné que les activités illégales minières étaient poursuivies en vertu du Code pénal et que l’extraction minièreartisanale est maintenant régie par un nouveau code qui promeut notamment la diminution de l’utilisation de mercure.
Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport du Pérou et les rendra publiques à l’issue de sa session, le 28 février prochain.
Demain matin, à partir de 10 heures, le Comité achèvera l’examen du rapport du Royaume-Uni, entamé ce matin.
Examen du rapport
Le Comité est saisi du cinquième rapport périodique du Pérou (E/C.12/PER/5) ainsi que des réponses du pays à une liste de points à traiter qui lui avait été soumise par le Comité.
Présentation du rapport
Présentant le rapport de son pays, M. Luis Fernando Domínguez Vera, Directeur général de la Direction générale des droits de l’homme du Ministère de la justice et des droits de l’homme du Pérou, a déclaré que le Pérou était un État démocratique, social et souverain, fondé sur le respect des droits de l’homme et la séparation des pouvoirs.
Le chef de la délégation a souligné que la pandémie de COVID-19 avait constitué un obstacle majeur à l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels, mais que des efforts importants avaient été déployés pour en limiter les effets. Il a précisé qu’entre 2021 et 2024, plus de 41,5 millions de vaccins avaient été administrés et que des mesures avaient été prises pour garantir la continuité de l’éducation des élèves grâce à la télévision, la radio et Internet. Il a ajouté que des politiques avaient été mises en place pour protéger les populations les plus vulnérables et réduire la pauvreté, notamment à travers un programme de protection sociale destiné aux personnes en situation d’extrême pauvreté.
M. Domínguez Vera a ensuite expliqué que, pour faciliter l’accès aux services publics dans les régions isolées, des plates-formes itinérantes avaient été mises en place à l’aide de bâtiments de la marine et de l’armée et que, grâce à ces dispositifs, plus de 68 000 personnes dans les provinces de Loreto, Ucayali et Puno avaient pu bénéficier de prestations essentielles.
Le chef de délégation a par ailleurs fait état de l’adoption d’un protocole intersectoriel contre le travail forcé obligeant les institutions à mettre en œuvre des mesures multisectorielles en faveur des victimes. Depuis 2023, a-t-il indiqué, le Comité directeur national pour la prévention et l’éradication du travail des enfants assure la coordination multisectorielle des institutions publiques et privées sans but lucratif qui mènent d’intenses activités dans ce domaine, et une politique nationale multisectorielle pour la prévention et l’éradication du travail infantile est en train d’être élaborée, a indiqué M. Domínguez Vera, avant de souligner que le taux de travail infantile a été réduit de 5,8 points de pourcentage entre 2012et 2023.
Il a par ailleurs fait valoir que des politiques nutritionnelles avaient été mises en œuvre pour lutter contre l’anémie infantile et améliorer la santé des femmes enceintes et des jeunes enfants. Plus de 500 000 enfants âgés de 0 à 12 mois ont bénéficié de ces programmes, et plus de 6,8 millions de visites à domicile ont été réalisées jusqu’en novembre 2024, a-t-il précisé.
M. Domínguez Vera a d’autre part expliqué que des politiques nationales sectorielles avaient été adoptées pour combler les écarts dans le domaine de l’éducation, notamment en matière d’éducation bilingue et de lutte contre le décrochage scolaire. Le programme Route Solidaire, en place depuis 2012, a permis aux jeunes vivant dans des zones reculées de poursuivre leur scolarité, y compris dans les régions amazoniennes et les bassins fluviaux, a-t-il indiqué.
Le chef de la délégation a par ailleurs attiré l’attention sur les efforts déployés en faveur de l’accès à l’eau potable et à l’assainissement, avec des projets bénéficiant à environ 300 000 personnes dans les provinces de Lima et Callao. Il a affirmé que le Pérou était engagé dans une transition vers un développement plus durable, et a souligné qu’en 2024, avaient été approuvés quelque 161 instruments de gestion environnementale qui optimiseront les projets d’investissement, à hauteur de plus de 14 milliards de dollars, dans des secteurs clefs tels que les mines, les transports, l’électricité, les hydrocarbures, l’agriculture, l’assainissement et la santé.
Il est par ailleurs prévu de mener à bien le processus de consultation préalable autour de la proposition de Politique nationale des peuples autochtones ou originaires, élaborée de manière participative avec les organisations autochtones nationales et dans laquelle ont été identifiés les services publics susceptibles de renverser les situations d’inégalité et de promouvoir le développement économique et social de ces populations, a ajouté M. Domínguez Vera. Il a d’autre part fait état de l’adoption de la Stratégie « Pérou sans racisme » à l’horizon 2030, dont l’objectif est d’appliquer des mesures destinées à améliorer les procédures afin de garantir aux citoyens qu’une attention opportune est accordée aux cas de discrimination ethnique et raciale.
L’État péruvien réaffirme son engagement en faveur de la construction d’une société plus juste, inclusive et équitable et, dans ce sens, a approuvé la Politique nationale multisectorielle des droits de l’homme à l’horizon 2040, a conclu le chef de délégation.
Questions et observations des membres du Comité
M. Michael Windfuhr, membre de l’équipe spéciale du Comité chargée de l’examen du rapport du Pérou, a souhaité en savoir davantage quant à l’applicabilité du Pacte dans l’ordre juridique interne. Il a notamment voulu savoir si les tribunaux pouvaient invoquer cet instrument et si des formations étaient dispensées aux agents du système judiciaire pour leur permettre de mieux en comprendre et appliquer les dispositions. L’expert a également demandé combien de plaintes pour violation des droits économiques, sociaux et culturels avaient été enregistrées et quelles autorités étaient chargées de les traiter.
M. Windfuhr a par ailleurs évoqué un projet de loi, en cours d’examen au Parlement, sur la nomination du Bureau du Médiateur et a interrogé la délégation sur l’état d’avancement de ce texte.
L’expert a ensuite exprimé son inquiétude quant à l’espace de plus en plus restreint accordé à la société civile. Il a demandé des explications concernant la déclaration de l’état d’urgence dans le cadre des manifestations sociales, et a rappelé que cette mesure devait rester exceptionnelle. Comment le Gouvernement péruvien compte-t-il prévenir les violences et garantir le respect des droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique, a-t-il demandé ? M. Windfuhr a relevé que la Commission interaméricaine des droits de l’homme avait critiqué le Pérou pour avoir qualifié certaines manifestations d’actes terroristes. Il a demandé si des mesures avaient été prises pour rectifier cette approche et garantir un traitement plus équitable des protestataires.
L’expert a d’autre part abordé la question du financement des organisations de la société civile et a demandé si le Gouvernement envisageait de garantir leur autonomie et leur liberté d’action. Il a également fait part de préoccupations concernant les conditions de travail des défenseurs des droits de l’homme – lesquels seraient soumis à des actes de harcèlement, d’intimidation et de représailles, a-t-il indiqué. Aussi, s’est-il enquis des mesures prévues pour assurer leur protection.
M. Windfuhr a souhaité savoir si le Pérou entendait ratifier le Protocole facultatif se rapportant au Pacte, en vertu duquel les citoyens péruviens seraient habilités à déposer des plaintes individuelles auprès du Comité.
L’expert a par ailleurs demandé des précisions sur la mise en œuvre du principe de consultation libre, préalable et éclairée des peuples autochtones, ainsi que sur les recours dont ces populations disposent en cas de violation de leurs droits. Il a fait part de préoccupations liées à l’exploitation minière et aux conflits environnementaux, soulignant que certains territoires autochtones étaient menacés par des activités économiques non réglementées. Il s’est enquis des garanties mises en place pour protéger ces communautés et s’assurer que leurs droits soient respectés.
M. Windfuhr a également posé des questions sur la lutte contre la pauvreté, sur les inégalités sociales et sur la fiscalité. Il a demandé des statistiques détaillées sur les budgets alloués aux services publics et aux programmes sociaux et a voulu savoir quelles mesures étaient prévues pour lutter contre la corruption et protéger les lanceurs d’alerte.
MME Karla Vanessa LEMUS DE VÁSQUEZ, membre de l’équipe spéciale du Comité chargée de l’examen du rapport du Pérou, a souhaité savoir si un nouveau plan d'action de lutte contre le travail forcé avait été mis en place après l'expiration du troisième plan (2019-2022) et si des mesures avaient été prises pour renforcer la Commission nationale de lutte contre le travail forcé.
L’experte a ensuite relevé que les quotas d'emploi pour les personnes handicapées étaient peu respectés, faute de sanctions, et que beaucoup de ces personnes étaient contraintes de travailler dans le secteur informel, avec des salaires inférieurs à ceux des autres travailleurs.
Mme Lemus de Vásquez a d’autre part souligné que l'économie informelle occupe toujours plus de 60% de la population active et que la taxation des étrangers non-résidents au Pérou était un frein à l'officialisation de leur emploi. Elle a demandé si le Gouvernement envisageait de rendre le système fiscal plus équitable et de mieux encadrer les contrats saisonniers.
L’experte a par ailleurs interrogé la délégation sur la limitation du droit de grève et les représailles subies par les travailleurs syndiqués. Elle a demandé si la loi péruvienne sur les grèves allait être réformée et comment l'État comptait améliorer la protection des travailleurs face à la discrimination syndicale.
Mme Lemus de Vásquez a d’autre part demandé des informations sur les mesures prises pour lutter contre le travail des mineurs dans les secteurs dangereux et pour garantir des conditions de travail décentes.
Pour sa part, M. Ludovic Hennebel, membre de l’équipe spéciale du Comité chargée de l’examen du rapport du Pérou, s’est enquis des mesures mises en place pour garantir l’accès effectif des femmes victimes de violences aux services de protection et de justice. Il a voulu savoir pourquoi les féminicides et les violences conjugales persistent en dépit des modifications apportées à la législation et de la mise en place d’un protocole interinstitutionnel dans ce domaine. S’inquiétant par ailleurs de violences sexuelles systématiques dans certaines écoles amazoniennes, l’expert s’est enquis des mesures prises pour garantir l’accès des enfants victimes à la justice, notamment en milieu rural et autochtone.
M. Hennebel a ensuite interrogé la délégation sur l’inaction présumée du Gouvernement face au travail des enfants, notamment dans le secteur minier.
L’expert a d’autre part demandé des précisions sur la mise en œuvre de l’arrêt de la Cour interaméricaine des droits de l’homme dans l’affaire des habitants de La Oroya, notamment en ce qui concerne l’accès aux soins pour les populations affectées par la pollution industrielle. Au regard du taux élevé de la population exposée à la contamination par des métaux lourds, il s’est enquis des mécanismes prévus pour assurer une distribution équitable de l’eau potable aux populations vulnérables.
S’agissant de la sécurité alimentaire et nutritionnelle, M. Hennebel s’est enquis des résultats obtenus par les programmes de lutte contre la faim et la malnutrition, en particulier après la pandémie et dans le contexte de la crise alimentaire et énergétique.
L’expert a par ailleurs posé plusieurs questions sur le droit à la santé, en interrogeant la délégation sur les efforts entrepris pour garantir un accès universel aux soins, en particulier en milieu rural et autochtone.
S’agissant de la santé sexuelle et reproductive, il s’est enquis des mesures prises pour garantir l’accès aux contraceptifs et aux services de santé sexuelle, notamment pour les adolescentes et les femmes en zone rurale.
M. Santiago Manuel Fiorio Vaesken, membre de l’équipe spéciale du Comité chargée de l’examen du rapport du Pérou, a demandé des précisions sur les dépenses publiques en matière d’éducation pour 2024 et 2025, et sur la part du PIB que l’État y consacre. Il a exprimé son inquiétude quant à la baisse de la qualité de l’éducation après la pandémie, due au manque d’entretien des infrastructures éducatives, et a interrogé la délégation sur les mesures concrètes mises en place pour remédier à cette situation, notamment en ce qui concerne l’apprentissage en lecture et en mathématiques. Il a également évoqué la fracture numérique, rappelant qu’un nombre significatif d’élèves et de foyers ne disposaient pas d’ordinateurs ni d’un accès à Internet pendant la pandémie.
L’expert s’est d’autre part inquiété de la persistance des violences scolaires et des violences sexuelles dans les écoles, soulignant que le nombre de cas signalés en 2023 et 2024 est resté élevé, avec plus de 19 000 signalements annuels. Il s’est en outre inquiété des déclarations officielles qui auraient attribué certaines pratiques à des traditions culturelles, notamment dans la province de Condorcanqui, où plus de 600 cas d’abus sexuels par des enseignants ont été signalés au cours des quinze dernières années. M. Fiori Vaesken a également fait part de préoccupations concernant la nouvelle loi sur le statut des enseignants dont les dispositions, a-t-il fait observer, pourraient entraver les procédures disciplinaires [à l’encontre d’enseignants] et poser des obstacles à des sanctions appropriées.
L’expert a ensuite abordé la question des salaires des enseignants, demandant s’ils sont compétitifs par rapport au salaire moyen et s’il existe des perspectives de carrière dans ce métier.
L’expert a par ailleurs exprimé de vives préoccupations concernant le programme national d’alimentation scolaire, qui vise à fournir des repas aux enfants des écoles publiques : il a évoqué des cas de corruption, ainsi que de graves manquements dans la qualité des aliments fournis.
Un autre expert a attiré l’attention sur la déforestation due à l'exploitation minière illégale, indiquant que jusqu'à 30 000 hectares de forêts auraient disparu dans la région de Madre de Dios. Cet expert a demandé quelles mesures le Gouvernement prenait pour lutter contre cette destruction environnementale et les violations des droits humains y associées.
Un autre expert a déploré la pollution au mercure en Amazonie péruvienne, indiquant que quelque 3000 tonnes de mercure auraient été déversées en vingt ans. Il a demandé quelles actions concrètes le Pérou entreprend pour enrayer le commerce illégal à l’origine de cette pollution et ses conséquences.
Un expert a interrogé la délégation sur la réduction du budget destiné aux actions en faveur des personnes handicapées, prévue par la loi de finances pour 2025.
Qu’en est-il des projets législatifs en rapport avec l'identité de genre, a-t-il en outre été demandé ?
Un expert a souhaité en savoir davantage sur la possible suppression du Ministère de la femme et son intégration dans un autre ministère, ainsi que sur les impacts que cela pourrait avoir sur la protection des droits des femmes.
Réponses de la délégation
La délégation péruvienne a assuré que le Pérou est une démocratie pleinement fonctionnelle, respectueuse des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Elle a rejeté toute déclaration laissant entendre que le pays se livrerait à des violations systématiques des droits fondamentaux, notamment en matière de libertés d’expression et de réunion pacifique.
La délégation a précisé qu’une commission multisectorielle avait été créée afin d’examiner les événements ayant conduit à la mort de 17 manifestants et d’assurer une indemnisation aux familles des victimes. Une unité de procureurs spécialisés a été mise en place pour enquêter sur les violences liées aux manifestations de 2022 et 2023, a-t-elle ajouté.
Le Gouvernement a alloué un budget important pour former les forces de l’ordre à l’encadrement des manifestations, en mettant l’accent sur l’usage proportionné de la force et le respect des droits humains, a poursuivi la délégation. Le Gouvernement a instauré un bureau des droits de l’homme au sein de la Police nationale pour garantir la mise en œuvre de ces formations ainsi que la conformité des interventions avec les normes internationales, a-t-elle précisé.
La délégation a souligné que la Constitution péruvienne intégrait les principes des traités internationaux relatifs aux droits de l’homme, permettant ainsi leur application directe dans l’ordre juridique interne. Les juges péruviens peuvent donc invoquer ces instruments dans leurs décisions.
Concernant la protection des défenseurs des droits de l’homme, la délégation a fait état de la mise en place d’un mécanisme de signalement des menaces, actif 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, qui offre des mesures de protection aux personnes à risque. Une plate-forme virtuelle permet également de signaler tout acte d’intimidation ou de harcèlement, et des antennes locales ont été ouvertes dans les régions où ces risques sont les plus élevés, a-t-elle ajouté.
La délégation a évoqué les avancées réalisées en ce qui concerne la question des entreprises et des droits de l’homme – progrès dont témoignent un rapport publié sur le sujet ainsi que l’organisation de 197 ateliers de formation en 2023.
La délégation a par la suite souligné que les activités illégales minières étaient poursuivies en vertu du Code pénal. L’extraction minière artisanale est maintenant régie par un nouveau code qui promeut notamment la diminution de l’utilisation de mercure, a-t-elle en outre indiqué.
S’agissant de la lutte contre la pauvreté, la délégation a reconnu que la pandémie de COVID-19 avait eu un impact considérable, mais a souligné que des politiques publiques avaient été mises en place pour en atténuer les effets. Elle a notamment mentionné la mise en place de filets de protection sociale prenant en compte des critères multidimensionnels tels que le genre, le handicap et l’appartenance ethnique, ainsi que l’attention accordée aux populations les plus vulnérables. Elle a en outre évoqué la refonte du programme de cantines scolaires, qui mobilise plusieurs secteurs pour assurer une alimentation équilibrée aux enfants.
Concernant la lutte contre les discriminations, la délégation a mis en avant le rôle de la Commission nationale multisectorielle contre la discrimination, qui développe des actions de sensibilisation, coordonne la réponse gouvernementale et suit les cas de discrimination. Une plate-forme virtuelle a été créée pour permettre aux citoyens de signaler des cas de discrimination et de bénéficier d’un suivi, a-t-elle ajouté. La délégation a aussi évoqué le lancement de l’initiative "Pérou sans racisme", qui a permis de toucher plus de six millions de personnes autochtones en 2023 et de sensibiliser les forces de l’ordre aux enjeux de diversité et d’égalité.
S’agissant du consentement préalable des communautés affectées par des projets, la délégation a confirmé qu'il existe un cadre normatif et une voie de recours judiciaire pour garantir son application.
Pour ce qui est des peuples autochtones, une base de données a été mise en place pour recenser les informations socioéconomiques les concernant et faciliter l’élaboration de politiques publiques adaptées à leurs besoins, a ensuite indiqué la délégation.
Des mesures spécifiques ont été adoptées pour garantir la protection sociale, notamment en situation d’urgence, avec un cadre législatif dédié à la prestation de services aux populations vulnérables, a d’autre part souligné la délégation.
S’agissant du handicap, la délégation a notamment mentionné l'existence d'un Observatoire national sur le handicap et la publication de rapports accessibles en ligne sur les politiques mises en œuvre dans ce domaine entre 2020 et 2023. Elle a par la suite également mentionné plusieurs initiatives, dont la plate-forme “Jeunes productifs” qui accompagne les jeunes en situation de vulnérabilité vers l'emploi formel. La délégation a détaillé les efforts déployés par le pays pour améliorer l’accès à l’emploi des personnes en situation de handicap. En 2024, a-t-elle indiqué, plus de 2300 personnes handicapées se sont inscrites volontairement sur les listes du Ministère du travail, et près de 1500 d’entre elles ont trouvé un emploi. Des sanctions ont été prises à l’encontre des entreprises et entités publiques ne respectant pas les quotas légaux d’embauche de travailleurs handicapés, a par ailleurs souligné la délégation.
S’agissant de la fusion du Ministère de la femme au sein d’un autre ministère, la délégation a expliqué que l'annonce faite par le Gouvernement à cet égard visait à améliorer l'efficacité de l'administration publique, et a assuré que la protection des droits des femmes resterait une priorité, quelle que soit la structure ministérielle retenue.
La délégation a par ailleurs indiqué qu'un nouveau plan national plurisectoriel de lutte contre le travail forcé était en cours d'élaboration et que nouveau plan tiendrait compte des enseignements tirés du précédent. Elle a confirmé que la Commission nationale de lutte contre le travail forcé reste un mécanisme de coordination essentiel.
La délégation a d’autre part souligné que les inspections ont été renforcées et que des actions de sensibilisation sont menées pour prévenir le travail des enfants dans les secteurs à risque. La prévention du travail des enfants et des adolescents dans des emplois dangereux est une priorité des autorités péruviennes, a insisté la délégation, faisant état de l’adoption de directives nationales et de la délégation de compétences aux collectivités territoriales dans ce domaine.
Concernant l'économie informelle, la délégation a rappelé que la loi sur la formalisation de l'économie a permis une augmentation du nombre de travailleurs passant du secteur informel au secteur formel. Elle a ajouté que plusieurs campagnes de sensibilisation ont été menées pour informer les travailleurs de leurs droits et les inciter à se régulariser.
Le Gouvernement met en place des mesures pour faciliter le passage de l’économie informelle à l’économie formelle, notamment en promouvant un modèle d’auto-entrepreneuriat et en établissant des réglementations garantissant des conditions de travail décentes, a par la suite complété la délégation.
Pour ce qui est du droit de grève, des réformes ont été entreprises pour améliorer le dialogue social et prévenir les représailles à l'encontre des travailleurs grévistes, a affirmé la délégation. L'État encourage la création de syndicats et le taux de syndicalisation a augmenté ces dernières années, a-t-elle ajouté.
En matière de protection des droits syndicaux, le Pérou a révisé sa réglementation sur les conventions collectives afin d’intégrer les recommandations de l’Organisation internationale du Travail et de garantir la liberté syndicale, a par ailleurs souligné la délégation.
La délégation a d’autre part attiré l’attention sur la mise en œuvre d’un plan national d’adaptation aux changements climatiques et sur l’adoption d’une stratégie à l’horizon 2050 visant à limiter les émissions de gaz à effet de serre.
La délégation a ensuite détaillé les actions entreprises pour lutter contre les violences faites aux femmes. Elle a notamment fait valoir la mise en place d’un système national de justice spécialisé dans la répression des violences de genre et la protection des victimes.
La lutte contre le féminicide est une priorité, a poursuivi la délégation, évoquant la mise en place d’un protocole intersectoriel à cette fin et l’accompagnement des proches des victimes. Un programme de soutien financier a également été instauré pour les enfants des victimes, afin d’assurer leur protection et leur accès aux soins de santé et à l’éducation.
La délégation a également détaillé les efforts déployés pour lutter contre la violence sexuelle, notamment dans les écoles et au sein des communautés autochtones. Un plan d’action multisectoriel a été adopté pour la province de Condorcanqui, qui comprend des mesures dans les domaines de la santé, de l’éducation et de la protection des enfants, a-t- elle précisé. Des sanctions ont été appliquées aux enseignants impliqués dans des violences sexuelles, et un programme de formation a été mis en place pour sensibiliser les communautés autochtones aux droits des enfants et des femmes.
Insistant par la suite sur les efforts déployés par le Gouvernement pour lutter contre ces violences, et notamment contre les abus sexuels contre les enfants et les adolescents, la délégation a évoqué la mise en place de mesures prioritaires visant à prévenir et réprimer la violence sexuelle, avec la création d’une commission multisectorielle et d’un secrétariat technique. Quelque 33 mesures ont été adoptées, couvrant la santé, l’éducation, la participation communautaire et la coordination institutionnelle, a-t-elle indiqué.
Sur le plan judiciaire, l’accent est mis sur la lutte contre l’impunité et sur l’amélioration de l’accès à la justice pour les victimes, a poursuivi la délégation. Un système de signalement et de prévention a été instauré pour empêcher les enseignants sous le coup de procédures judiciaires de continuer à exercer, a-t-elle souligné. S’agissant des sanctions disciplinaires contre les enseignants, la délégation a souligné que toute forme de maltraitance à l’égard des élèves est considérée comme grave.
Le budget alloué au secteur de l’éducation a augmenté et un plan d’action contre la fracture numérique a été mis en place depuis 2022, afin de fournir aux élèves des outils numériques et des ressources éducatives en ligne via la plate-forme "Peru Educa", a d’autre part fait valoir la délégation
Pour ce qui concerne les infrastructures scolaires, a-t-elle ajouté, l’État a lancé un plan national visant à réhabiliter et moderniser les établissements d’ici 2025, en attribuant des financements selon un ordre de priorité basé sur les besoins les plus urgents.
En ce qui concerne la lutte contre la corruption dans le programme national d’alimentation scolaire, la délégation a indiqué que des sanctions avaient été appliquées aux fournisseurs et fonctionnaires impliqués dans des actes frauduleux.
S’agissant plus généralement de la lutte contre la corruption, la délégation a fait valoir la mise en œuvre d’une politique nationale d’intégrité axée sur la prévention, ainsi que la création d’un secrétariat de l’intégrité publique et la nomination d’agents spécialisés (sur cette question) dans les institutions publiques.
La délégation a par ailleurs fait valoir les avancées réalisées en matière d’accès à l’eau potable et à l’assainissement, en particulier dans les zones urbaines – des efforts restant en effet nécessaires pour améliorer la situation dans les zones rurales, a-t-elle reconnu.
Un cadre législatif a été adopté pour encourager la construction de logements sociaux et réduire les inégalités dans l’accès aux infrastructures essentielles, a d’autre part indiqué la délégation.
Ce document produit par le Service de l’information des Nations Unies à Genève est destiné à l'information ; il ne constitue pas un document officiel.
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CESCR25.003F