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LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT SE PENCHE SUR LE RESPECT ET LA VÉRIFICATION D'UN FUTUR TRAITÉ SUR LES MATIÈRES FISSILES

Compte rendu de séance

La Conférence du désarmement a poursuivi, ce matin, son débat structuré sur le traité d'interdiction de la production de matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires ou autres dispositifs explosifs nucléaires, en se concentrant simultanément sur les questions du respect et de la vérification en rapport avec un tel traité

La République populaire démocratique de Corée, le Mexique, les États-Unis, le Japon, l'Iran, l'Australie et l'Afrique du Sud ont fait des déclarations. Nombre d'intervenants ont jugé nécessaire qu'un futur traité d'interdiction de la production de matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires ou autres dispositifs explosifs nucléaires ait un certain nombre de caractéristiques et, en premier lieu, qu'il intègre un mécanisme efficace de vérification garantissant son respect. Il convient néanmoins de préciser ce que recouvre le concept de vérification, a-t-il été souligné. Une délégation a fait part de son point de vue selon lequel le futur traité ne devrait pas concerner les stocks existants, non plus que la production de matières fissiles destinées à des fins non-explosives et ne devrait contenir aucune disposition concernant les vérifications.

Pour la République populaire démocratique de Corée, la question nucléaire de la péninsule coréenne trouve sa source dans la politique anti-République populaire démocratique de Corée menée par les États-Unis, lesquels ont pris des sanctions financières contre la République populaire démocratique de Corée en dehors du cadre des Pourparlers à six, ce qui constitue une violation totale de la lettre et de l'esprit de la déclaration conjointe du 19 septembre 2005. La République populaire démocratique de Corée souligne qu'elle n'aura plus besoin de la dissuasion si elle juge que la menace nucléaire contre elle n'existe plus. La République populaire démocratique de Corée a indiqué que si les États-Unis vont preuve de la volonté politique de respecter la déclaration conjointe et la mettent en action, elle rejoindra le Traité de non-prolifération nucléaire, comme cela est dit dans la déclaration conjointe.

La Conférence pourrait tenir une séance plénière cet après-midi, à 15 heures: si des orateurs s'inscrivent sur la liste. La séance plénière suivante de la Conférence se tiendra lundi après-midi, à 15 heures.

Discussions

M. AN MYONG HUN (République populaire démocratique de Corée) a rappelé que les sincères efforts déployés pour se mettre d'accord sur un programme de travail complet et équilibré au sein de la Conférence n'ont pas porté les fruits attendus. La Conférence n'est pas une instance servant les intérêts unilatéraux d'un pays; elle ne peut être l'otage d'un pays, a-t-il ajouté. Pour sa part, a-t-il poursuivi, la République populaire démocratique de Corée attache une grande importance à la question du désarmement nucléaire et souhaite que les discussions et les négociations au sein de la Conférence soient orientées vers la réalisation du désarmement nucléaire complet. M. An a souligné que ce souhait de son pays se traduit par les efforts qu'il mène en vue de parvenir à la dénucléarisation de la péninsule coréenne. La question nucléaire de la péninsule coréenne trouve sa source dans la politique anti-République populaire démocratique de Corée menée par les États-Unis qui s'efforcent de nier l'idéologie et le système que le pays s'est choisi et de lui imposer les leurs. Aussi, la clef de la solution de la question nucléaire serait que les États-Unis renoncent à leur politique hostile, respectent la souveraineté de la République populaire démocratique de Corée et s'abstiennent d'entraver son développement politique, économique et social. Or, les États-Unis ont pris des sanctions financières contre la République populaire démocratique de Corée en dehors du cadre des pourparlers à six, ce qui constitue une violation totale de la lettre et de l'esprit de la déclaration conjointe du 19 septembre 2005.

Les États-Unis ne sont pas intéressés par la paix ni par la réunification de la péninsule coréenne, mais seulement par la poursuite de leur objectif stratégique. Aussi, cela ne manque-t-il pas de susciter de fortes appréhension quant à la possibilité de voir la déclaration conjointe être dûment mise en œuvre, même si les pourparlers reprennent. Cela ne revient pas à dire que le pays remet son sort entre les mains des pourparlers à six, a précisé le représentant. Nous avons la dissuasion nucléaire à la mesure de la menace qui pèse sur nous, a-t-il ajouté. Il est logique que la dissuasion soit renforcée aussi longtemps que persiste la menace nucléaire, a-t-il dit. Mais nous n'aurons plus besoin de la dissuasion si nous jugeons que la menace nucléaire contre notre pays n'existe plus, a-t-il insisté. Si les États-Unis font preuve de la volonté politique de respecter la déclaration conjointe et la mettent en action, la République populaire démocratique de Corée rejoindra le Traité de non-prolifération nucléaire, comme cela est dit dans la déclaration conjointe, a déclaré le représentant. Les États-Unis devraient renoncer aux sanctions financières, qui constituent une négation de la déclaration conjointe et vident de leur sens les pourparlers à six, a-t-il affirmé. Il ne s'agit pas d'une condition préalable pour la reprise des pourparlers, mais d'une question de principe, a précisé M. An.

M. PABLO MACEDO (Mexique) a affirmé que les discussions sur un traité sur les matières fissiles et les documents de travail présentés dans ce contexte sont extrêmement utiles. Néanmoins, si on ne dépasse pas l'étape de la réflexion et si on ne passe pas à une étape de négociations, la valeur ajoutée de tous ces efforts ne suffira pas à affronter les défis actuels en matière de sécurité. À cet égard, le Mexique rappelle que l'objectif immédiat de la Conférence est de parvenir à un accord sur un programme de travail.

De l'avis du Mexique, le cadre dans lequel s'inscrit la négociation d'un traité sur les matières fissiles se trouve dans le préambule du Traité de non-prolifération nucléaire et dans son article VI, dont les dispositions sont contraignantes pour tous les États parties. Le Mexique estime que la négociation d'un traité sur les matières fissiles constituerait un pas important sur la voie de l'objectif visant l'élimination totale des armes nucléaires. Cependant, pour atteindre cet objectif, il serait nécessaire que ce traité ait un certain nombre de caractéristiques et, en premier lieu, qu'il couvre les arsenaux existants et intègre un mécanisme efficace de vérification garantissant son respect. La vérification est un élément essentiel de tout traité international, surtout en matière de désarmement.

M. THOMAS CYNKIN (États-Unis) a réaffirmé l'engagement de son pays de conclure un traité d'interdiction de la production de matières fissiles dans les meilleurs délais. Le projet proposé par les États-Unis précise les éléments essentiels d'un tel instrument. Il interdirait ainsi, dès son entrée en vigueur, la production des matières fissiles nécessaires à la fabrication d'armes nucléaires de toute nature. Le traité ne concernerait pas les stocks existants, non plus que la production de matières fissiles destinées à des fins non-explosives. Le projet ne contient aucune disposition concernant les vérifications, ce qui est conforme à la position des États-Unis en la matière, qui a toujours été que la «vérification effective» des dispositions de tout traité. En outre, des mécanismes et mesures qui ne donneraient que l'apparence, et non la substance, d'une vérification effective, seraient probablement encore plus dangereux qu'une absence de mesures de contrôle explicites. Le risque serait en effet l'instauration d'un sentiment de sécurité trompeur, favorisant l'idée que les gouvernements n'auraient plus à se préoccuper de possibles violations.

La négociation autour d'une interdiction de la production future de matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires sera en tout état de cause ardue, a poursuivi M. Cynkin. Les États-Unis estiment à cet égard que l'on pourrait gagner un temps précieux en s'abstenant d'ouvrir la discussion sur une «vérification» par nature très peu effective. La Conférence du désarmement devrait, au contraire, se concentrer sur la réalisation d'objectifs réalistes pour créer les conditions nécessaires à la négociation d'un tel traité. Entre-temps, les États-Unis estiment que tous les États devraient décréter et respecter un moratoire sur la production des matières fissiles incriminées, comme les États-Unis l'ont fait depuis 1988.

M. YOSHIKI MINE (Japon) a indiqué que son pays souhaiterait que la négociation sur un traité d'interdiction de la production de matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires ou autres dispositifs explosifs nucléaires démarre aussitôt que possible. Il a attiré l'attention de la Conférence sur la nécessité de préciser ce que recouvre le concept de vérification. Interdire la production future de matières fissiles exige de mesurer les stocks afin de pouvoir dire s'ils n'ont pas augmenté, a-t-il notamment indiqué. Il faut aussi se pencher sur la question des excédents de matières fissiles, a-t-il ajouté.

M. HAMID ESLAMIZAD (Iran) a rappelé que le 30 mars dernier, lors de la dernière séance plénière de la première partie de sa session de 2006, la Conférence a entendu le Ministre des affaires étrangères de l'Iran présenter la position de l'Iran sur la question des matières fissiles. L'Iran a des doutes quant à la façon dont un traité d'interdiction de la production de matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires ou autres dispositifs explosifs nucléaires pourrait servir le désarmement nucléaire s'il ne couvre pas les énormes stocks de matières fissiles. En outre, un tel traité devrait être vérifiable pour instaurer la confiance, ce qui exige qu'il inclue des dispositions précises sur la vérification. À cet égard, l'Iran est favorable au mandat Shannon.

M. RUSSELL LESLIE (Australie) a souligné qu'un traité sur les matières fissiles viserait à donner la possibilité aux États de fournir à leurs partenaires du traité des assurances qu'ils acceptent la norme d'interdiction de la production de matières fissiles à des fins d'armement nucléaire. Pour ce qui est du Traité de non-prolifération nucléaire, il existe un mécanisme qui permet de fournir des assurances à la communauté internationale: il s'agit du régime de garanties de l'Agence internationale de l'énergie atomique, a-t-il rappelé. Il a toutefois insisté sur la valeur ajoutée qu'apporterait un traité sur la production de matières fissiles. La première étape consiste à assurer l'acceptation par les États de la norme interdisant la production de toute nouvelle matière fissile à des fins d'armement; sans cet engagement, il ne saurait y avoir de concept de respect.

M. JOHANN KELLERMAN (Afrique du Sud) a souscrit à l'idée qu'il existe un lien entre les questions de respect et de vérification dans le contexte d'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles à des fins d'armement nucléaire. L'élimination des armes nucléaires ne sera pas possible sans mise en place d'une vérification suffisante, a-t-il souligné. Un traité sur les matières fissiles devrait se baser sur des garanties vérifiées que les matières fissiles ne sont plus produites à des fins d'armement nucléaire. L'Afrique du Sud ne pense pas que la vérification d'un tel traité soit irréaliste, a insisté le représentant sud-africain. Le plus logique serait de choisir l'Agence internationale de l'énergie atomique comme entité chargée de la tâche de vérification d'un traité sur les matières fissiles, a-t-il ajouté.

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