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Session extraordinaire du Conseil sur la situation des droits de l’homme dans l’est de la République démocratique du Congo : M. Türk alerte sur le risque d’escalade de la violence dans toute la sous-région
![Room XX](/sites/default/files/styles/max_width/public/2024-10/Human%20Rights%20Council.jpg?itok=uR-oWkKN)
Le Conseil des droits de l’homme a ouvert ce matin sa trente-septième session extraordinaire, consacrée à la situation des droits de l’homme dans l’est de la République démocratique du Congo. Dans sa déclaration d’ouverture de la session, M. Volker Türk, Haut-Commissaire aux droits de l’homme, a rappelé que le Haut-Commissariat aux droits de l’homme avait tiré la sonnette d’alarme à l’égard de cette crise depuis longtemps.
Depuis le début de l’année, a indiqué M. Türk, le groupe armé M23, soutenu par les Forces rwandaises de défense, a intensifié son offensive dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu. En ce moment, les tensions augmentent dans le Sud-Kivu et, si rien n’est fait, le pire est peut-être encore à venir pour les habitants de l’est, mais aussi au-delà de la RDC, a-t-il déclaré.
Il y a eu des attaques par le M23 et leurs alliés, des armes lourdes utilisées dans des zones peuplées, et des combats intenses avec les forces armées de la RDC et leurs alliés, a poursuivi le Haut-Commissaire. « Tout cela est gravement préoccupant quant au respect des droits humains, et du droit international humanitaire et je condamne toutes les violations et abus », a-t-il déclaré, soulignant qu’encore une fois dans ce conflit accablant, les civils sont pris au piège de la spirale de violence.
Depuis le 26 janvier, près de 3000 personnes ont été tuées et 2880 blessés, a indiqué M. Türk, avant d’ajouter que les chiffres réels sont probablement beaucoup plus élevés et de se dire horrifié par la propagation des violences sexuelles. Plus de 500 000 personnes ont été déplacées depuis le début du mois de janvier, et cela s’ajoute aux plus de 6,4 millions de personnes déjà déplacées, a par ailleurs fait observer le Haut-Commissaire.
Le risque d'escalade de la violence dans toute la sous-région n'a jamais été aussi élevé, a affirmé M. Türk. Tous ceux qui exercent une influence sur les parties impliquées doivent redoubler leurs efforts pour éviter une conflagration et soutenir les processus de paix, a-t-il plaidé.
Dans sa déclaration, M. Surya Deva, Président du Comité de coordination des procédures spéciales, a notamment insisté sur la vulnérabilité des femmes et des enfants, exposés aux violences de genre, à l’esclavage sexuel et à la traite des êtres humains. Il a alerté sur le recrutement forcé d’enfants à Goma et dans les régions environnantes et a dénoncé les bombardements indiscriminés de zones densément peuplées, y compris des camps de personnes déplacées. Il a également fait état d’exécutions sommaires, ainsi que de conscription et de travail forcés. Il a ajouté que le M23 avait démantelé des sites de personnes déplacées se trouvant sous son contrôle, forçant des personnes à rentrer chez elles sans garantie de sécurité ni de dignité. M. Deva a soutenu l’appel du Secrétaire général demandant au Rwanda de cesser tout soutien au M23 et de se retirer du territoire de la RDC. Il a en outre insisté sur la nécessité d’établir des mécanismes solides de responsabilité afin de prévenir l’impunité et de garantir la justice aux victimes.
Pour sa part, la Représentante spéciale du Secrétaire général en République démocratique du Congo et Cheffe de la Mission de l’ONU pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), Mme Bintou Keita, a dénoncé l’avancée sans précédent du M23 et des forces armées rwandaises, soulignant que les combats ayant conduit à la prise de Goma le 27 janvier avaient causé la mort d’au moins 2900 personnes et fait plus de 3000 blessés. Elle a alerté sur la crise humanitaire aggravée par ces violences, avec des déplacements massifs, l’interruption des services de base et des risques accrus d’épidémies comme le choléra et le Mpox. La Représentante spéciale a plaidé pour une aide humanitaire immédiate et pour la réouverture de l’aéroport de Goma. Elle a en outre attiré l’attention sur l’augmentation des violences sexuelles et de genre.
Mme Keita a ensuite insisté sur la nécessité de reprendre les négociations diplomatiques entre la RDC et le Rwanda dans le cadre du processus de Luanda, et a mis en garde contre une expansion régionale du conflit. La Représentante spéciale a en outre demandé la fin des représailles contre les défenseurs des droits humains, les journalistes et les acteurs de la société civile.
La République démocratique du Congo et le Rwanda ont fait des déclarations en tant que pays concernés.
De nombreuses délégations* ont ensuite pris part au débat.
Le Conseil poursuivra cet après-midi, à partir de 15 heures, les travaux de cette trente-septième session extraordinaire.
Déclaration liminaires
M. VOLKER TÜRK, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, a rappelé suivre de près, depuis des années, la situation des droits humains en République démocratique du Congo (RDC), au sujet de laquelle il s’est dit « énormément inquiet ». Il a souligné que le Haut-Commissariat aux droits de l’homme avait tiré la sonnette d’alarme à l’égard de cette crise depuis longtemps et s’est dit « profondément perturbé » de voir encore une fois cette escalade de violence.
Depuis le début de l’année, le groupe armé M23, soutenu par les Forces rwandaises de défense, a intensifié son offensive dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, a relevé le Haut-Commissaire. En ce moment, les tensions augmentent dans le Sud-Kivu et, si rien n’est fait, le pire est peut-être encore à venir pour les habitants de l’est, mais aussi au-delà de la RDC, a-t-il déclaré.
Il y a eu des attaques par le M23 et leurs alliés, des armes lourdes utilisées dans des zones peuplées, et des combats intenses avec les forces armées de la RDC et leurs alliés, a poursuivi le Haut-Commissaire. « Tout cela est gravement préoccupant quant au respect des droits humains, et du droit international humanitaire et je condamne toutes les violations et abus », a-t-il déclaré, soulignant qu’encore une fois dans ce conflit accablant, les civils sont pris au piège de la spirale de violence.
Depuis le 26 janvier, près de 3000 personnes ont été tuées et 2880 blessés, a indiqué M. Türk, avant d’ajouter que les chiffres réels sont probablement beaucoup plus élevés. « Je suis horrifié par la propagation des violences sexuelles, qui sont un élément effroyable de ce conflit depuis longtemps [et qui] risquent de s’aggraver dans les circonstances actuelles », a déclaré le Haut-Commissaire. Selon des autorités judiciaires, a-t-il indiqué, lors de l’évasion massive de la prison de Munzenze à Goma le 27 janvier, au moins 165 prisonnières ont été violées ; la plupart d’entre elles auraient été tuées par la suite, dans un incendie dont les circonstances restent floues. M. Türk a ajouté que son équipe était en train de vérifier de multiples allégations de viol, de viol collectif, et d’esclavage sexuel à travers les zones de combat.
« Des centaines de défenseurs des droits humains, de journalistes et de membres de la société civile ont signalé à mon Bureau qu’ils sont menacés ou recherchés par le M23 et les forces rwandaises », a d’autre part indiqué le Haut-Commissaire. « Je suis également très préoccupé par la prolifération d’armes et le risque élevé de recrutement et de conscription forcé d'enfants », a-t-il déclaré.
Les combats ont exacerbé une crise humanitaire chronique, qui est le résultat de violations persistantes des droits humains, a poursuivi M. Türk, avant de préciser que plus de 500 000 personnes ont été déplacées depuis le début du mois de janvier, et que cela s’ajoute aux plus de 6,4 millions de personnes déjà déplacées.
Le risque d'escalade de la violence dans toute la sous-région n'a jamais été aussi élevé, a affirmé le Haut-Commissaire. Tous ceux qui exercent une influence sur les parties impliquées doivent redoubler leurs efforts pour éviter une conflagration et soutenir les processus de paix, a-t-il plaidé. Il est aussi fondamental d’analyser l’économie politique de ce conflit, a-t-il déclaré, se disant « frappé par le fait que la population de l’est souffre terriblement, tandis que beaucoup de produits qu’on consomme ou qu’on utilise, comme les téléphones portables, sont nourris par les minéraux de l’est ». « Nous sommes donc impliqués toutes et tous », a insisté M. Türk.
« Ceux qui pensent trouver la solution par la voie militaire ont tort. Un conflit encore plus profond et large aurait des conséquences dévastatrices sur les civils », a déclaré le Haut-Commissaire. « J’appelle toutes les parties à déposer les armes et de reprendre le dialogue dans le cadre des processus de Luanda et de Nairobi », a-t-il indiqué, exprimant l’espoir qu’il y ait des résultats concrets lors de la réunion à Dar-es-Salam aujourd’hui. Entre-temps, toutes les parties au conflit doivent respecter les droits humains et le droit international humanitaire, a-t-il insisté.
Insistant par ailleurs sur la nécessité cruciale d’établir les faits et de traduire les auteurs de violations en justice, M. Türk a jugé nécessaire d’ouvrir une enquête indépendante et impartiale sur les violations des droits humains et du droit international humanitaire commises par toutes les parties. Il a indiqué offrir le soutien du Haut-Commissariat à cet égard. Il a d’autre part réitéré l’appel du Secrétaire général de l’ONU aux Forces rwandaises de défense de cesser tout soutien au M23 et de se retirer de la RDC. « La voie militaire n’est pas non plus une réponse aux défis politiques, sociaux et économiques, y compris l'exploitation illégale des ressources naturelles, qui sont à l’origine de ce conflit », a souligné M. Türk. Selon les principes de diligence raisonnable, a-t-il ajouté, les pays doivent s'assurer que tout soutien financier ou autre n'alimente pas la commission de graves violations des droits humains.
Il faut aussi combattre la corruption au sein des institutions de l'État, les rendre efficaces, et rétablir la cohésion sociale dans le pays, a souligné le Haut-Commissaire. La liberté de la presse et l’espace civique doivent être préservés, a-t-il ajouté. Les discours de haine et autres incitations à la discrimination et à la violence alimentent le conflit et les tensions politiques ; ils sont totalement inacceptables, a en outre déclaré le Haut-Commissaire, appelant les responsables politiques et communautaires à jouer un rôle positif dans la promotion de la cohésion sociale.
M. Surya Deva, Président du Comité de coordination des procédures spéciales, a salué la décision du Conseil des droits de l’homme de tenir une session spéciale sur la situation dans l’est de la République démocratique du Congo, face à une crise en constante aggravation et à de graves violations des droits humains, notamment au Nord et au Sud-Kivu. Il a indiqué que les titulaires de mandats au titre des procédures spéciales [du Conseil] suivaient de près la situation et a exprimé son inquiétude face à l’intensification des hostilités, en particulier après la nouvelle offensive du M23, soutenu par le Rwanda, relevant que la violence avait atteint un niveau sans précédent.
M. Deva a insisté sur la vulnérabilité des femmes et des enfants, exposés aux violences de genre, à l’esclavage sexuel et à la traite des êtres humains. Il a alerté sur le recrutement forcé d’enfants à Goma et dans les régions environnantes et a rapporté que plus de 700 000 personnes avaient été récemment déplacées, portant à 6,7 millions le nombre total de personnes déplacées à l’intérieur du pays en RDC.
Le Président du Comité de coordination des procédures spéciales a dénoncé les bombardements indiscriminés de zones densément peuplées, y compris des camps de personnes déplacées, causant des pertes massives parmi les civils. Il a également fait état d’exécutions sommaires, ainsi que de conscription et de travail forcés. Il a ajouté que le M23 avait démantelé des sites de personnes déplacées se trouvant sous son contrôle, forçant des personnes à rentrer chez elles sans garantie de sécurité ni de dignité.
M. Deva a signalé que les hôpitaux étaient débordés, confrontés à des pénuries de personnel et de matériel médical, tandis que les violences sexuelles et sexistes, les enlèvements et les arrestations arbitraires visant les personnes déplacées internes continuaient d’augmenter. Il a par ailleurs dénoncé les restrictions sévères à l’accès humanitaire. M. Deva a exhorté toutes les parties à respecter leurs obligations en vertu du droit international et a plaidé pour la cessation immédiate des attaques contre les civils, pour la protection des infrastructures essentielles et pour que soit assuré un accès humanitaire sans entrave. Il a soutenu l’appel du Secrétaire général demandant au Rwanda de cesser tout soutien au M23 et de se retirer du territoire de la RDC.
M. Deva a rappelé que la communauté internationale avait une obligation morale et légale d’agir. Il a appelé à un financement humanitaire accru, à des efforts diplomatiques coordonnés et à des enquêtes indépendantes sur les violations des droits humains. Il a insisté sur la nécessité d’établir des mécanismes solides de responsabilité afin de prévenir l’impunité et de garantir la justice aux victimes.
Enfin, M. Deva a réaffirmé l’engagement des procédures spéciales à collaborer avec le Conseil et avec les autres acteurs concernés.
Mme Bintou Keita, Représentante spéciale du Secrétaire général en République démocratique du Congo et Cheffe de la Mission de l’ONU pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), a remercié le Conseil des droits de l’homme pour la tenue de cette séance d’urgence. Elle a exprimé ses condoléances aux victimes du conflit, rappelant que la population congolaise vit dans la peur depuis 30 ans. Elle a dénoncé l’avancée sans précédent du M23 et des forces armées rwandaises, soulignant que les combats ayant conduit à la prise de Goma le 27 janvier avaient causé la mort d’au moins 2900 personnes et fait plus de 3000 blessés.
Mme Keita a alerté sur la crise humanitaire aggravée par ces violences, avec des déplacements massifs, l’interruption des services de base et des risques accrus d’épidémies comme le choléra et le Mpox. Elle a attiré l’attention sur l’augmentation des violences sexuelles et de genre, ainsi que sur la prolifération des armes abandonnées et l’évasion de plus de 4000 prisonniers à Goma.
Mme Keita a insisté sur la nécessité de reprendre les négociations diplomatiques entre la RDC et le Rwanda dans le cadre du processus de Luanda. Elle a mis en garde contre une expansion régionale du conflit et a dénoncé la reprise des combats malgré le cessez-le-feu unilatéral du M23 et de l’Alliance Fleuve Congo (AFC), qui – a-t-elle regretté – n’a tenu qu’un jour. La Représentante spéciale a demandé la fin des représailles contre les défenseurs des droits humains, les journalistes et les acteurs de la société civile et a appelé à la levée des restrictions sur les réseaux sociaux imposées par les autorités congolaises.
Mme Keita a d’autre part fait part de son inquiétude face aux attaques à caractère ethnique et a encouragé l’adoption d’une loi contre le tribalisme, le racisme et la xénophobie. Elle a qualifié la situation humanitaire à Goma de catastrophique, évoquant la présence de corps en décomposition et le manque de carburant pour les générateurs des hôpitaux. Elle a plaidé pour une aide humanitaire immédiate et pour la réouverture de l’aéroport de Goma.
Enfin, Mme Keita a insisté sur la nécessité de protéger les populations déplacées que le M23 oblige à un retour forcé sans garantie de sécurité ni assistance. Elle a salué le rôle des femmes congolaises dans la promotion de la paix et des droits humains et a exhorté le Conseil à prendre des mesures concrètes pour mettre fin aux souffrances du peuple congolais et favoriser un développement inclusif et durable.
Pays concernés
M. Patrick Muyaya Katembwe, Ministre de la communication et des médias de la République démocratique du Congo, a remercié le Conseil des droits de l’homme pour la tenue de cette session spéciale, qui, a-t-il déclaré, répond à « l’urgence de la situation actuelle et aux violations massives des droits de l’homme […] qui frappent les populations du Nord et du Sud-Kivu, résultant de l’agression des Forces rwandaises de défense et de leurs supplétifs du M23 et de l’AFC ».
Les bombardements indiscriminés contre des camps de déplacés et des zones d’habitation civiles ont exacerbé une crise humanitaire déjà catastrophique, a poursuivi le Ministre. Il a rapporté qu’au moins 3000 personnes avaient été tuées et 3000 blessées lors de l’agression qui a conduit à l’occupation de Goma. Les attaques ciblant les civils, les déplacements forcés et les attaques contre les camps de personnes déplacées internes témoignent d’une brutalité inacceptable, a-t-il déclaré, faisant état de meurtres, de viols, de massacres et de recrutement forcé d’enfants. En soutenant activement ces groupes armés, le Rwanda porte une responsabilité directe dans ces violations, a-t-il ajouté, avant de dénoncer les attaques contre la MONUSCO et contre les forces régionales de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC).
Face à cette situation, le Ministre a appelé à la mise en place d’une commission internationale d’enquête pour examiner les violations des droits de l’homme commises dans le pays. Il a également appelé à l’adoption de mesures concrètes pour prévenir de telles violations à l’avenir. Il est aujourd’hui impératif de garantir un accès humanitaire immédiat et sans restriction, a-t-il ajouté. Il a dénoncé le soutien logistique, militaire et financier du Rwanda aux groupes armés opérant sur le territoire de la RDC - soutien documenté par l’ONU, a-t-il rappelé –, et a appelé le Conseil à tenir le Rwanda responsable de ses crimes, « notamment le dépeuplement forcé des populations congolaises ».
Il est urgent d’exercer une pression internationale pour que le Rwanda cesse immédiatement son soutien aux groupes armés [susmentionnés] et se retire immédiatement du territoire congolais, a insisté M. Katembwe. L’adoption par consensus de la résolution [qui sera aujourd’hui soumise au Conseil des droits de l’homme] serait un signe de solidarité pour les millions de Congolais qui vivent aujourd’hui sous l’occupation du Rwanda, a-t-il conclu.
M. James Ngango, Représentant permanent du Rwanda auprès des Nations Unies à Genève, a souligné que la crise dans l’est de la RDC constituait une menace régionale, en particulier pour le Rwanda, et a affirmé qu’il convenait de donner une chance à l’importante initiative régionale qui se tient aujourd’hui [à Dar es Salam] et de ne pas en préempter ici les résultats.
M. Ngango a affirmé que les causes profondes du conflit résidaient, d’une part, dans le maintien du FDLR – « un groupe qui a commis le génocide au Rwanda en 1994 » – en RDC, où ce groupe fait peser une menace existentielle sur la sécurité du Rwanda et, d’autre part, dans la marginalisation, par le Gouvernement de la RDC, de certaines communautés parlant le kinyarwanda, notamment tutsies. « Chacun ici se souvient que des citoyens congolais, pour la simple raison qu’ils avaient l’air tutsis, ont été abominablement massacrés, lynchés, brûlés et cannibalisés », a poursuivi le Représentant permanent, déplorant qu’il n’y ait alors eu ni réunion urgente ni session spéciale.
M. Ngango a catégoriquement rejeté la tentative de la RDC de décrire le Rwanda comme étant responsable de l’instabilité dans l’est de la RDC, affirmant qu’il s’agit là d’une tactique de diversion visant pour les autorités de Kinshasa à échapper à toute responsabilité concernant les atrocités qu’elles et leurs groupes armés alliés infligent à leurs propres citoyens. Ce qui est clair, en revanche, c’est la menace imminente que la situation fait peser sur le Rwanda, a poursuivi le Représentant permanent, affirmant que suite à la chute de Goma, de nouvelles preuves sont apparues mettant en lumière l’imminence d’une attaque à grande échelle contre le Rwanda. Le Rwanda n’attendra pas que cette menace se matérialise, a déclaré le Représentant permanent, expliquant que c’est pour cette raison que son pays maintiendra des mesures proportionnelles, ponctuelles et dynamiques à la frontière. Le Rwanda reste engagé en faveur de la recherche d’une solution politique au conflit, a-t-il conclu, indiquant rejeter catégoriquement l’utilisation de cette session spéciale pour créer des mandats qui se chevaucheraient et, par conséquent, rejeter le projet de résolution soumis aujourd’hui au Conseil des droits de l’homme.
Aperçu du débat
De nombreuses délégations ont exprimé leur profonde inquiétude face à l’intensification du conflit dans l’est de la République démocratique du Congo, soulignant que la situation sécuritaire, humanitaire et des droits de l’homme était de plus en plus critique. Plusieurs intervenants ont dénoncé les attaques ciblées contre les civils, les exécutions sommaires, l’enrôlement forcé d’enfants et les violences sexuelles, notamment à la prison de Goma, où des abus de grande ampleur ont été signalés. L’urgence d’une réponse internationale forte a été mise en avant pour faire face aux atrocités commises.
L’implication du Rwanda dans le conflit a été largement évoquée. Plusieurs délégations ont condamné le soutien militaire et logistique apporté par les Forces rwandaises de défense au groupe armé M23, dénonçant une violation du droit international et de la souveraineté de la République démocratique du Congo. Il a été demandé au Rwanda de cesser tout appui au M23 et de retirer immédiatement ses forces du territoire congolais. Certains intervenants ont mis en garde contre l’intensification des tensions entre les deux pays et le risque d’une extension du conflit à l’ensemble de la région des Grands Lacs.
La crise humanitaire a été décrite comme catastrophique, avec des centaines de milliers de nouvelles personnes déplacées en quelques semaines, portant le nombre total de personnes déplacées internes à plus de 6,4 millions. L’insécurité persistante et la destruction des infrastructures essentielles empêchent l’acheminement de l’aide humanitaire, exacerbant les souffrances des populations civiles. Plusieurs intervenants ont demandé la réouverture immédiate de l’aéroport de Goma et l’établissement de couloirs humanitaires pour garantir un accès sans entrave aux secours.
Les violences sexuelles et basées sur le genre ont également été au cœur des préoccupations, eu égard aux signalements d’abus systématiques contre les femmes et les filles, notamment dans les camps de personnes déplacées. Plusieurs délégations ont insisté sur la nécessité d’une réponse immédiate et coordonnée pour protéger les survivantes et leur fournir un accompagnement médical et psychologique.
La nécessité d’un retour au dialogue a été soulignée par plusieurs intervenants, qui ont appelé à une relance des processus diplomatiques de Luanda et de Nairobi pour parvenir à une désescalade. D’aucuns ont insisté sur l’importance d’une approche inclusive impliquant tous les acteurs concernés, tout en veillant à ce que les voix des femmes et des communautés locales soient entendues dans les négociations de paix.
Les débats ont également mis en avant l’importance du respect du droit international humanitaire. Plusieurs délégations ont plaidé pour que soient menées des enquêtes indépendantes et impartiales sur les violations des droits de l’homme commises et pour que soit mis en place un mécanisme international d’établissement des faits. Il a été souligné que l’impunité pour les crimes commis ne ferait qu’alimenter davantage la violence et que des sanctions ciblées pourraient être envisagées contre les auteurs de ces violations.
Certains intervenants ont plaidé pour une action plus ferme, incluant des sanctions et un renforcement des pressions diplomatiques sur le Rwanda, tandis que d’autres ont mis en garde contre toute initiative qui pourrait compromettre les efforts régionaux en cours.
De très nombreuses délégations ont défendu l’urgence d’une intervention coordonnée pour mettre fin aux souffrances des populations civiles et éviter une nouvelle escalade du conflit.
*Liste des intervenants : Suède (au nom d’un groupe de pays), Union européenne, Maroc, Kenya, France, Macédoine du Nord, Espagne, Ghana, Allemagne, Suisse, Albanie, Chypre, Belgique, Costa Rica, Burundi, Japon, Brésil, République de Corée, Chine, Éthiopie, Mexique, Pays-Bas, Afrique du Sud, Algérie, Gambie, Kirghizistan, Bulgarie, Malawi, Bolivie, Colombie, Liechtenstein, Luxembourg, Irlande, Fédération de Russie, République de Moldova, Royaume-Uni, Égypte, Sierra Leone, Italie, Saint-Siège, Autriche, Ukraine, Cameroun, Uruguay, Ouganda, Canada, Australie, Paraguay, Türkiye, Guatemala, Zambie, Pakistan, Inde, Mauritanie, Angola, Malte, Pérou, Zimbabwe, Timor-Leste, Slovénie, République-Unie de Tanzanie, Soudan du Sud, ainsi que Human Rights Watch, Fédération internationale des ligues des droits de l’homme, Organisation mondiale contre la torture, Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme, Interfaith International, Centre du Commerce International pour le Développement, Amnesty International, International Bar Association , Fédération internationale de l’ACAT (Action des chrétiens pour l’abolition de la torture), Bureau international catholique de l’enfance, International Human Rights Council, TRIAL International.
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