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Examen de l’Érythrée au Comité des droits de l’enfant : sont notamment débattues les questions relatives aux pratiques préjudiciables, au service national, à la justice pour mineurs, à l’éducation et à la santé

Compte rendu de séance

 

Le Comité des droits de l’enfant a examiné hier après-midi et ce matin le document valant cinquième et sixième rapports périodiques présenté par l’Érythrée au titre de la Convention relative aux droits de l’enfant.

Au cours du dialogue noué entre les experts membres du Comité et la délégation érythréenne venue soutenir ce rapport, ont notamment été salués les efforts déployés par l’Érythrée pour mettre en place un système de gestion de l’information et, au niveau communautaire, pour venir en aide aux enfants en situation de rue. Ont également été salués les efforts consentis par le pays pour éliminer les mutilations génitales féminines et les mariages d’enfants. L’attention a toutefois été attirée sur la persistance des mariages polygames au sein de certaines communautés. Des préoccupations ont en outre été exprimées concernant les mariages précoces et les grossesses adolescentes et leur impact sur la scolarité des jeunes filles.

Une experte a voulu savoir si le pays étudiait la possibilité d’élaborer une loi globale sur les droits de l’enfant et si une évaluation de la politique nationale pour les enfants de 2016 était prévue et, le cas échéant, selon quel calendrier.

Abordant les questions de discrimination, cette experte a fait état de préoccupations concernant les enfants de groupes ethniques marginalisés, comme les Kunama et les Afar, ainsi que les enfants de parents disparus. Elle a en outre souhaité évoquer la question de la situation des enfants LGBTQI+ ou de parents LGBTQI+ en Érythrée, en raison de la criminalisation des comportements homosexuels.

L’experte s’est par ailleurs dite préoccupée par l’âge minimum de la responsabilité pénale, fixé à 9 ans. Elle a également évoqué les mauvaises conditions de détention des enfants, le manque d’assistance juridique gratuite et l’absence de tribunaux spécialisés pour mineurs.

En ce qui concerne l’implication d’enfants dans les conflits armés, cette experte s’est enquise des mesures pratiques et juridiques prises pour prévenir le recrutement d’enfants, et a fait état de rapports alarmants sur le sujet. Elle a demandé si, pour l’Érythrée, une enquête indépendante de l’ONU serait envisageable en vue d’examiner cette question.

Une autre experte a fait part de sa préoccupation concernant les violences, notamment sexuelles, exercées dans le cadre du service national et de l’entraînement militaire, et s’est enquise des poursuites judiciaires engagées face à ces infractions. A par ailleurs été soulevée la question de l’impact du service national obligatoire sur l’abandon scolaire.

Cette experte a par ailleurs évoqué les difficultés rencontrées en matière d’enregistrement des naissances en Érythrée, notamment pour les enfants nés en dehors des hôpitaux ou dans des zones reculées.

A d’autre part été soulignée la nécessité de promouvoir l’éducation inclusive et d’éviter que les enfants handicapés ne soient systématiquement scolarisés dans des établissements spécialisés.

Présentant le rapport de son pays, M. Mehreteab Fessehaye, Directeur général du Département de la protection sociale au Ministère du travail et de la protection sociale de l’Érythrée, a assuré que l’Érythrée reste fermement engagée dans la protection et la promotion des droits des enfants, conformément à la Convention. Il a indiqué que le pays s’efforce de garantir l’égalité des droits pour tous les enfants en interdisant la discrimination, les châtiments corporels et la violence, y compris les abus sexuels. Il a souligné que le Ministère de la justice mène des campagnes pour sensibiliser le public aux droits des enfants et qu’une attention particulière est accordée à la réhabilitation des jeunes délinquants, avec des alternatives à l’emprisonnement.

Le chef de la délégation a par ailleurs indiqué que des comités avaient été établis à tous les niveaux pour coordonner la mise en œuvre des programmes de protection des droits des enfants et des femmes.

S’agissant de l’élimination des pratiques néfastes, M. Fessehaye a mis en avant les progrès réalisés dans la lutte contre les mutilations génitales féminines (MGF). Une cartographie communautaire menée dans 20 sous-zones a montré que 42,4% des villages sont désormais exempts de MGF et que les taux de prévalence chez les filles de moins de 15 ans sont en baisse, a-t-il fait valoir. Il a en outre rendu compte des initiatives prises et des progrès réalisés en matière de santé et de nutrition.

M. Fessehaye a par ailleurs attiré l’attention sur le plan sectoriel pour l’éducation (2022-2026) élaboré par le Gouvernement érythréen afin d’améliorer l’accès à une éducation de qualité pour tous, notamment dans les régions rurales et pour les enfants en situation de handicap. S’agissant du soutien aux enfants vulnérables, il a insisté sur l’importance des programmes communautaires pour les enfants handicapés, orphelins ou issus de familles vulnérables, tout en reconnaissant les défis persistants, notamment en matière de logement et de fourniture d’équipements adaptés.

La délégation érythréenne était également composée, entre autres, de représentants du Ministère de la santé, du Ministère de l’éducation, du Ministère des affaires étrangères, et de l’Union nationale des femmes érythréennes.

Au cours du dialogue, la délégation a présenté le service national comme une institution cruciale pour l'Érythrée, intégrée dans la philosophie du développement national et axée sur la justice sociale. Initialement limité à 18 mois (6 mois de formation militaire et 12 mois de service social), sa durée a été prolongée en raison des conflits avec l'Éthiopie et du contexte géopolitique, a-t-elle précisé. Elle a rejeté les accusations assimilant ce service à du travail forcé, affirmant qu'il joue un rôle fondamental dans l'éducation civique et l'intégration sociale. Elle a en outre réfuté les accusations de militarisation de l’éducation, en précisant que le système éducatif relève exclusivement du Ministère de l’éducation.

S’agissant des pratiques préjudiciables, la délégation a assuré que des progrès significatifs ont été réalisés dans la lutte contre les mutilations génitales féminines et contre les mariages précoces. Pour autant, ces phénomènes persistent dans certaines zones rurales, a-t-elle reconnu, avant de souligner que des lois strictes, combinées à des programmes éducatifs et de sensibilisation, étaient en place pour éliminer ces pratiques, ce qui a permis de réduire leur prévalence.

La délégation a par ailleurs fait état d’un objectif ambitieux des autorités fixant à 90% le taux d’enregistrement des naissances d’ici 2028.

Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport de l’Érythrée et les rendra publiques à l’issue de sa session, le 31 janvier prochain.

 

Cet après-midi à 15 heureS, le Comité entamera l’examen du rapport du Honduras.

 

Examen du rapport 

Le Comité est saisi d’un document valant cinquième et sixième rapports périodiques de l’Érythrée (CRC/C/ERI/5-6) ainsi que des réponses du pays à une liste de points à traiter soumise par le Comité.

Présentation du rapport

Présentant le rapport de son pays, le chef de la délégation érythréenne, M. Mehreteab Fessehaye, Directeur général du Département de la protection sociale au Ministère du travail et de la protection sociale de l’Érythrée, a assuré que l’Érythrée reste fermement engagée dans la protection et la promotion des droits des enfants, conformément à la Convention relative aux droits de l’enfant. Il a exprimé sa gratitude pour ce dialogue constructif.

En ce qui concerne le cadre législatif et les initiatives législatives,M. Fessehaye a indiqué que le pays s’efforce de garantir l’égalité des droits pour tous les enfants en interdisant la discrimination, les châtiments corporels et la violence, y compris les abus sexuels. Il a souligné que le Ministère de la justice mène des campagnes pour sensibiliser le public aux droits des enfants et qu’une attention particulière est accordée à la réhabilitation des jeunes délinquants, avec des alternatives à l’emprisonnement.

Le chef de la délégation a ensuite indiqué que des comités avaient été établis à tous les niveaux pour coordonner la mise en œuvre des programmes de protection des droits des enfants et des femmes. Il a ajouté que des campagnes de sensibilisation avaient touché plus de 316 000 personnes en 2024, avec une participation importante des femmes.

S’agissant de l’élimination des pratiques néfastes, M. Fessehaye a mis en avant les progrès réalisés dans la lutte contre les mutilations génitales féminines (MGF). Une cartographie communautaire menée dans 20 sous-zones a montré que 42,4% des villages sont désormais exempts de MGF et que les taux de prévalence chez les filles de moins de 15 ans sont en baisse, a-t-il fait valoir.

Pour ce qui est des questions de santé et de nutrition, a-t-il poursuivi, le pays a atteint une couverture vaccinale de 95% et a introduit de nouveaux vaccins pour réduire la mortalité infantile. Les initiatives comprennent également des programmes nutritionnels, la lutte contre la transmission du VIH de la mère à l’enfant, et la promotion de l’allaitement exclusif jusqu’à six mois, a-t-il ajouté.

M. Fessehaye a par ailleurs attiré l’attention sur le plan sectoriel pour l’éducation (2022-2026) élaboré par le Gouvernement érythréen afin d’améliorer l’accès à une éducation de qualité pour tous, notamment dans les régions rurales et pour les enfants en situation de handicap. Il a souligné les efforts déployés pour réformer les programmes scolaires et former les enseignants afin d’assurer une éducation plus inclusive.

S’agissant du soutien aux enfants vulnérables, le chef de la délégation a insisté sur l’importance des programmes communautaires pour les enfants handicapés, orphelins ou issus de familles vulnérables, tout en reconnaissant les défis persistants, notamment en matière de logement et de fourniture d’équipements adaptés.

M. Fessehaye a conclu sa présentation en affirmant que l’Érythrée reste déterminée à garantir la santé, la sécurité et l’épanouissement de chaque enfant, tout en reconnaissant l’importance de la collaboration avec le Comité pour surmonter les défis restants.

Questions et observations des membres du Comité

Mme Mikiko Otani, coordonnatrice du groupe de travail chargé par le Comité d’examiner le rapport de l’Erythrée, a demandé si le Code pénal et le Code civil transitoires étaient toujours en vigueur et si un calendrier était prévu pour une réforme complète des lois et leur harmonisation avec la Convention. Elle a également voulu savoir si le pays étudiait la possibilité d’élaborer une loi globale sur les droits de l’enfant.

Concernant la coordination des politiques, l’experte s’est enquise de l’efficacité des comités sous-régionaux (ou comités de districts) et de la suffisance des ressources humaines et financières qui leur sont allouées. Elle a par ailleurs souhaité savoir si une évaluation de la politique nationale pour les enfants de 2016 était prévue et, le cas échéant, selon quel calendrier. Le budget de l’État comporte-t-il une ligne spécifique dédiée à la protection de l’enfance, a-t-elle également demandé ?

Mme Otani a ensuite abordé la question du renforcement des capacités institutionnelles dans la lutte contre la corruption, demandant des détails sur les progrès réalisés dans ce domaine. S’agissant de la collecte de données, elle a salué les efforts pour mettre en place un système de gestion de l’information, tout en demandant quelles priorités étaient envisagées pour combler les lacunes actuelles en la matière, notamment dans le domaine de la justice pour mineurs. Concernant l’accès à la justice, elle a demandé comment les 67 comités de district traitaient les plaintes des enfants et a insisté pour savoir si des ressources suffisantes étaient disponibles pour assurer leur fonctionnement. L’experte a également interrogé la délégation sur l’adaptation des services d’accès à la justice aux besoins des enfants.

Mme Otani a par ailleurs abordé les questions de discrimination et a fait état de préoccupations concernant les enfants de groupes ethniques marginalisés, comme les Kunama et les Afar, ainsi que les enfants de parents disparus. Elle a aussi souhaité évoquer la question de la situation des enfants LGBTQI+ ou de parents LGBTQI+ en Érythrée, en raison de la criminalisation des comportements homosexuels, et a demandé des éclaircissements sur l’application du principe de l’intérêt supérieur de l’enfant.

L’experte a en outre souhaité savoir si les enfants participaient aux processus décisionnels nationaux et régionaux les concernant.

Mme Otani a ensuite demandé si les enfants étaient protégés contre les pires formes de travail et les travaux dangereux et si la même protection s’appliquait aux enfants travaillant dans le secteur informel. Elle s’est également enquise des mesures de soutien mises en place pour les victimes du travail des enfants.

S’agissant des enfants en situation de rue, l’experte a reconnu les efforts communautaires dans ce domaine, mais a souhaité obtenir des informations sur les conditions de vie actuelles de ces enfants et les démarches prises afin de favoriser leur réunification familiale ou leur placement en protection de remplacement. Concernant la traite de personnes, Mme Otani a noté que peu de données étaient disponibles et a demandé des clarifications sur la collecte d’informations en la matière et la prise en charge des victimes.

S’agissant de la justice juvénile, l’experte s’est dite préoccupée par l’âge minimum de la responsabilité pénale, fixé à 9 ans selon le code pénal traditionnel, et a demandé des précisions sur les procédures appliquées aux enfants, en particulier pour ceux de 15 ans et plus qui pourraient être traités comme des adultes. Elle a également évoqué les mauvaises conditions de détention des enfants, le manque d’assistance juridique gratuite et l’absence de tribunaux spécialisés pour mineurs.

En ce qui concerne l’implication d’enfants dans les conflits armés, Mme Otani s’est enquise des mesures pratiques et juridiques prises pour prévenir le recrutement d’enfants, et a fait état de rapports alarmants sur le sujet. Elle a demandé si, pour l’Érythrée, une enquête indépendante de l’ONU serait envisageable pour examiner cette question.

Mme Suzanne Aho,membre du groupe de travail chargé par le Comité d’examiner le rapport de l’Érythrée, a évoqué les difficultés rencontrées en matière d’enregistrement des naissances en Érythrée, notamment pour les enfants nés en dehors des hôpitaux ou dans des zones reculées ; elle s’est enquise des mesures prises pour informer les populations et simplifier les démarches dans ce domaine. Elle s’est en outre enquise du coût des actes de naissance et de la relation entre ce coût et le loyer mentionné dans certains documents. Mme Aho a ensuite demandé des précisions sur les mesures prises pour garantir l’accès à la nationalité et à la carte d’identité, notamment en simplifiant les processus administratifs.

S’agissant de la liberté d’expression, l’experte a évoqué l’absence d’espaces pour permettre aux enfants de s’exprimer librement, ainsi que des discriminations envers des enfants Témoins de Jéhovah. Elle a en outre fait part de préoccupations concernant l’accès limité à Internet et aux médias pour les enfants, notamment dans les zones rurales.

S’agissant des violences faites aux enfants, Mme Aho a demandé des précisions sur les efforts entrepris pour interdire les châtiments corporels dans tous les contextes, y compris dans le cadre de la détention et de l’éducation. Elle a fait part de sa préoccupation concernant les violences, notamment sexuelles, exercées dans le cadre du service national et de l’entraînement militaire, et s’est enquise des poursuites judiciaires engagées face à ces infractions. Elle a interrogé la délégation sur les données disponibles concernant la violence faite aux enfants et sur l’existence de mécanismes de plainte respectueux des enfants.

En ce qui concerne les pratiques préjudiciables, Mme Aho a salué les efforts consentis par le pays pour éliminer les mutilations génitales féminines (MGF) et les mariages d’enfants, tout en demandant des précisions sur l’application des lois pertinentes et sur les programmes de sensibilisation existants. Elle a par ailleurs attiré l’attention sur la persistance des mariages polygames au sein de certaines communautés.

S’agissant des enfants handicapés, l’experte a souhaité obtenir des données statistiques plus détaillées les concernant, ainsi que des informations sur les ressources allouées à leur inclusion dans le système éducatif. Elle a insisté sur la nécessité de promouvoir l’éducation inclusive et d’éviter que les enfants handicapés ne soient systématiquement scolarisés dans des établissements spécialisés.

Mme Aho a par la suite souligné que les femmes accouchant hors des hôpitaux en zones reculées n'avaient pas toujours la possibilité d'enregistrer [la naissance de] leurs enfants et s’est enquise des mesures prises pour garantir un accès équitable aux services de santé dans ces régions.

Pour ce qui est de la santé des adolescents, l’experte a interrogé la délégation sur l'accès à l'information concernant la santé sexuelle et reproductive, ainsi que sur la distribution de préservatifs, la prévention des grossesses précoces. Elle a en outre souhaité en savoir davantage sur les dispositions relatives à la santé mentale, en particulier pour ce qui est de la séparation des enfants, des jeunes et des adultes dans les centres de prise en charge.

Mme Aho a d’autre part relevé que l’Érythrée est exposée au trafic de substances telles que le cannabis et a demandé comment la prévention et la réglementation étaient organisées pour protéger les enfants contre les drogues.

S’agissant de la santé environnementale et des changements climatiques, Mme Aho a évoqué les risques d’inondations, de sécheresses et de cyclones en Érythrée. Elle a demandé comment les enfants étaient impliqués dans la prévention et la gestion des risques et comment ils y étaient sensibilisés, notamment dans le cadre scolaire.

L’experte a également interrogé la délégation sur les politiques de lutte contre la pauvreté et sur les efforts déployés pour réduire la mortalité infantile.

M. Rinchen Chophel, membre du groupe de travail chargé par le Comité d’examiner le rapport de l’Érythrée, s’est enquis de l’organisation des droits parentaux en cas de divorce, ainsi que des mesures prises pour soutenir les parents dans leur rôle éducatif. Il a également interrogé la délégation sur les normes garantissant le respect des droits des enfants dans les foyers communautaires, et sur le mécanisme de plainte mis en place dans ces milieux.

L’expert a ensuite demandé des éclaircissements sur la notion de « parents adoptifs bénévoles » mentionnée au paragraphe 97 du rapport, ainsi que sur le cadre légal régissant l’adoption nationale et internationale. Il a également interrogé la délégation sur les lois existantes contre le transfert illicite d’enfants et sur la ratification des conventions de La Haye relatives à l’adoption internationale et à l’enlèvement international d’enfants.

M. Chophel a par ailleurs demandé des informations sur le nombre d’enfants accompagnant leurs mères en détention et sur les mesures alternatives envisagées pour éviter l’incarcération des mères avec leurs enfants.

Mme Hynd Ayoubi Idrissi, membre du groupe de travail chargé par le Comité d’examiner le rapport de l’Erythrée, a voulu savoir s’il existait une législation garantissant l’accès à l’éducation, l’obligation scolaire et la gratuité de l’éducation, notamment au niveau pré-primaire, et s’est enquise des mesures prises pour améliorer les infrastructures, former les enseignants et réduire les disparités entre les régions. Elle a également demandé des précisions sur les « coûts cachés » de l’éducation – tels que les fournitures scolaires et les uniformes – susceptibles d’impacter les familles vulnérables. L’experte s’est ensuite inquiétée de la situation des filles, lesquelles – a-t-elle fait observer – sont particulièrement affectées par des problématiques telles que les mariages précoces, les violences sur le chemin de l’école, ou encore les distances à parcourir. Elle a aussi soulevé la question de l’impact du service national obligatoire sur l’abandon scolaire et a demandé si des réformes étaient envisagées dans ce domaine.

S’agissant de l’éducation aux droits de l’homme, Mme Ayoubi Idrissi a demandé si des efforts étaient faits pour intégrer ce sujet dans les programmes scolaires. Concernant les loisirs et les activités culturelles, elle s’est enquise des mesures prises pour garantir un accès inclusif à ces activités pour les enfants en situation de handicap et les enfants issus de familles économiquement vulnérables.

Une experte a exprimé ses préoccupations concernant les mariages précoces et les grossesses adolescentes et leur impact sur la scolarité des jeunes filles, demandant si des soutiens spécifiques étaient mis en place pour permettre aux jeunes filles enceintes ou mariées de poursuivre leur éducation. L’experte a aussi demandé des précisions sur l’efficacité des programmes d’abstinence préconisés pour les jeunes en matière de prévention du VIH/sida.

Réponses de la délégation

La délégation a indiqué qu’un mécanisme multisectoriel a été mis en place pour coordonner la protection des enfants. Ce système comprend des comités aux niveaux national, régional, sous-régional et local, qui intègrent des représentants de divers secteurs : chefs religieux, juges, avocats, membres d’organisations de la société civile, ainsi que des enfants (de 12 à 17 ans), a-t-elle précisé. Ces comités jouent un rôle clé dans la mise en œuvre des politiques, bien qu’ils ne disposent pas de budgets propres, a-t-elle souligné, avant d’insister sur l’importance d’une approche communautaire où la famille et la communauté sont au cœur des efforts de protection.

S’agissant du cadre législatif, la délégation a indiqué que les codes civil et pénal transitoires restent en vigueur, et que de nouvelles lois sont en cours d’élaboration. Cependant, a-t-elle souligné, leur application dépend de plusieurs facteurs, notamment des campagnes de sensibilisation menées au niveau communautaire. La protection des droits de l’enfant est déjà intégrée dans le cadre juridique actuel, mais des améliorations restent nécessaires, a poursuivi la délégation. Concernant les politiques pour l’enfance, il a été précisé qu’une révision des politiques actuelles pourrait avoir lieu dans les trois à cinq prochaines années, mais qu’il n’est pas prévu d’en adopter de nouvelles à court terme.

En ce qui concerne les ressources financières et les priorités, la délégation a relevé que bien qu’il n’existe pas de budget spécifique pour la protection de l’enfance, des fonds sont alloués à des secteurs clés tels que l’éducation, la santé et les programmes de sensibilisation. L’éducation est gratuite ou presque, avec des frais symboliques pour l’inscription ; et la santé publique est également accessible à tous, a fait valoir la délégation. Différents programmes d’accès aux soins de santé visent particulièrement les zones habitées par des populations rurales et nomades, conformément à une stratégie de développement inclusif qui privilégie les régions éloignées, a précisé la délégation.

La famille, y compris la famille élargie, est perçue comme la principale institution de protection pour les enfants, a ensuite expliqué la délégation. En cas d’abandon [par leur famille], les enfants sont d’abord pris en charge par la communauté avant d’être transférés, si nécessaire, au centre de soins pour enfants à Asmara, a-t-elle indiqué. Les adoptions sont strictement encadrées par le Ministère du travail et de la protection sociale et nécessitent l’approbation des tribunaux, a-t-elle en outre fait savoir. La délégation a insisté sur l’importance de l’approche communautaire, où chaque enfant est perçu comme appartenant non seulement à sa famille, mais aussi à la communauté au sens large.

Par ailleurs, des efforts sont en cours pour renforcer les systèmes de gestion de l’information en matière de protection sociale et de protection de l’enfance, a poursuivi la délégation. Avec l’aide du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), un système de collecte de données est en développement, bien que des défis subsistent en termes d’infrastructures et de formation. La délégation a insisté sur la nécessité d’un système moderne pour mieux répondre aux besoins des enfants et des familles.

La délégation a d’autre part détaillé les initiatives visant à promouvoir la liberté d’expression et l’ accès à l’information pour les enfants, notamment à travers des émissions de télévision et de radio diffusées en plusieurs langues locales. Ces programmes couvrent des sujets variés tels que la santé, le sport et l’éducation.

En ce qui concerne les questions relatives aux communautés LGBTQI, la délégation a souligné que ces sujets ne sont pas reconnus en Érythrée en raison des normes culturelles et religieuses.

S’agissant des pratiques préjudiciables, la délégation a assuré que des progrès significatifs ont été réalisés dans la lutte contre les mutilations génitales féminines (MGF) et contre les mariages précoces, notamment dans certaines régions où les campagnes de sensibilisation ont permis de déclarer certaines zones exemptes de ces pratiques. Pour autant, ces phénomènes persistent dans certaines zones rurales, a reconnu la délégation, avant de souligner que des lois strictes, combinées à des programmes éducatifs et de sensibilisation, étaient en place pour éliminer ces pratiques, ce qui a permis de réduire leur prévalence.

La délégation a par la suite insisté sur les efforts entrepris pour éliminer non seulement les mariages précoces, mais aussi la violence sexuelle. Aucune violence sexuelle dans les écoles n’a jamais été signalée, du fait des normes culturelles strictes protégeant les filles, a indiqué la délégation.

L’Érythrée met l’accent sur l’éducation pour tous, y compris pour les enfants vivant dans des régions éloignées et pour ceux ayant des besoins spéciaux, a poursuivi la délégation. Des efforts sont faits pour inclure les enfants handicapés dans des écoles ordinaires, bien que des écoles spécialisées existent toujours pour certains types de handicaps, a-t-elle indiqué. Des campagnes de sensibilisation sont menées pour promouvoir l’éducation comme levier de transformation sociale, a-t-elle ajouté.

La délégation a mis en avant les efforts significatifs consentis par l’Érythrée pour garantir un accès équitable à une éducation de qualité. Le Gouvernement a donné la priorité aux régions rurales et marginalisées, avec la construction d’écoles, de salles de classe et de centres communautaires, a-t-elle indiqué. Des programmes ciblés ont été mis en place pour réduire le décrochage scolaire, particulièrement parmi les filles, lesquelles sont souvent confrontées à des obstacles liés aux mariages précoces ou à l’éloignement des écoles secondaires. Le taux de décrochage scolaire au niveau primaire a été réduit à 3,6%, a fait valoir la délégation. Elle a mentionné des initiatives visant à promouvoir l’éducation des filles en augmentant le nombre d’enseignantes et en soutenant les filles des communautés défavorisées grâce à des bourses.

La délégation a par la suite assuré que le système éducatif permettait aux jeunes filles enceintes de poursuivre leur scolarité et que des efforts étaient faits pour convaincre les familles de l’importance de l’éducation, même après un mariage précoce.

Les pensionnats, réservés aux enfants de 14 ans et plus, visent à fournir une éducation aux jeunes des régions reculées tout en maintenant leurs liens avec leurs familles, a d’autre part indiqué la délégation.

L’éducation pré-primairea également été renforcée avec des stratégies alternatives comme l’intégration de classes dans les écoles primaires et la mise en place de centres communautaires dans les zones reculées, a ajouté la délégation.

Le système éducatif favorise l’inclusion des enfants handicapés, avec des activités sportives et culturelles adaptées, a d’autre part fait valoir la délégation. Des écoles spécifiques existent pour les enfants malvoyants ou malentendants, tandis que des programmes sont en cours pour intégrer les enfants ayant des besoins spéciaux dans les écoles ordinaires, a-t-elle indiqué.

Revenant par la suite au soutien apporté aux enfants vulnérables, la délégation a précisé que plus de 7300 d’entre eux ont reçu du matériel scolaire grâce à des partenariats avec l’UNICEF. Les jeunes de plus de 15 ans, en particulier ceux ayant quitté l’école, bénéficient de formations professionnelles adaptées pour les aider à intégrer le marché du travail, a en outre indiqué la délégation.

La délégation a ensuite souligné que l’enregistrement des naissances est obligatoire dans le pays et que des efforts sont faits pour étendre la couverture de l’enregistrement à toutes les zones, y compris aux régions reculées. Une sensibilisation accrue est en cours pour informer les familles des procédures en la matière, a indiqué la délégation, avant de faire état d’un objectif ambitieux des autorités fixant à 90% le taux d’enregistrement des naissances d’ici 2028. Des coûts symboliques sont associés à cette procédure [d’enregistrement], mais des mesures sont prises pour rendre ces services accessibles à tous, a-t-elle ajouté.

S’agissant des conditions dans les centres de détention et de la lutte contre la traite des enfants, la délégation a assuré que des mesures robustes ont été mises en place pour prévenir les abus et protéger les enfants.

La délégation a réaffirmé son engagement envers les conventions internationales et régionales relatives aux droits de l’enfant, tout en précisant que certaines pratiques sont adaptées aux réalités culturelles et sociétales du pays.

La délégation a ensuite expliqué que le système de santé érythréen était inclusif et décentralisé, structuré sur trois niveaux (primaire, secondaire et tertiaire), afin de garantir l’accès universel aux soins, notamment dans les zones reculées. Les soins sont majoritairement gratuits ou à faible coût, ce qui a permis de fournir des services à près de 80% de la population, dans un rayon de 10 km autour du lieu de vie, a précisé la délégation. Des cliniques mobiles ont été déployées pour desservir les communautés nomades et rurales, a-t-elle complété.

Des progrès significatifs ont été réalisés en matière de lutte contre la mortalité infantile, avec une réduction constante des taux de mortalité des moins de cinq ans (passés à 28 pour 1000 naissances en 2022), a d’autre part fait valoir la délégation. Ces résultats sont attribués à une large couverture vaccinale (95%), à la promotion de l’allaitement exclusif (80% des enfants étant allaités dès la naissance) et à des programmes de prévention des maladies comme le paludisme et la diarrhée. La délégation a par ailleurs attiré l’attention sur l’augmentation de l’espérance de vie en Érythrée, qui est passée de 53 ans en 1995 à 67 ans en 2024.

S’agissant de la santé mentale, la délégation a fait état des efforts déployés pour intégrer des services de santé mentale dans tous les centres de santé, avec une attention particulière accordée aux enfants et aux adolescents. Dans ce domaine, des formations ont été dispensées aux professionnels de santé, tandis que des programmes scolaires pilotes ont été introduits pour sensibiliser les élèves et les enseignants, a-t-elle ajouté.

La délégation a ensuite rapporté des progrès notables dans l’accès à l’eau potable et à l’assainissement, avec 93% des villages déclarés exempts de défécation à l’air libre. Les moustiquaires imprégnées sont largement distribuées, avec un taux d’utilisation élevé parmi les enfants de moins de cinq ans, a-t-elle en outre souligné.

Pour ce qui est du VIH/sida, la stratégie nationale repose principalement sur la promotion de l’abstinence, justifiée par des considérations culturelles et religieuses, a indiqué la délégation, avant de faire état d’une baisse significative de la prévalence du VIH chez les jeunes – baisse qu’elle a attribuée à ces efforts.

Concernant la sécurité alimentaire et la lutte contre la pauvreté, la délégation a mis l’accent sur les efforts déployés par l’Érythrée pour moderniser l’agriculture et garantir une sécurité alimentaire pour tous. Cela inclut l’utilisation de technologies agricoles, la construction de barrages, ou encore le développement de cultures adaptées aux conditions climatiques difficiles, a-t-elle précisé. Un programme familial encourage les ménages à produire des aliments nutritifs, tels que des céréales, des fruits, des légumes et des produits animaliers, afin de promouvoir l’autosuffisance alimentaire et une meilleure nutrition, en particulier pour les enfants. Une attention particulière est portée aux 1000 premiers jours de vie des enfants, avec des campagnes visant à améliorer leur alimentation en insistant sur l’importance des protéines, vitamines et minéraux.

Pour ce qui est de la justice pour mineurs, la délégation a mis l’accent sur les progrès enregistrés dans l’adaptation des systèmes judiciaires aux besoins des enfants, tout en reconnaissant que des défis subsistent, concernant notamment l’âge de la responsabilité pénale.

La délégation a présenté le service national comme une institution cruciale pour l'Érythrée, intégrée dans la philosophie du développement national et axée sur la justice sociale. Institué en 1992 et amendé en 1995, le service national vise à mobiliser les ressources humaines pour le développement, la défense de la souveraineté, et la promotion de l'unité nationale dans ce pays à forte diversité ethnique. Initialement limité à 18 mois (6 mois de formation militaire et 12 mois de service social), sa durée a été prolongée en raison des conflits avec l'Éthiopie et du contexte géopolitique, a indiqué la délégation. Elle a rejeté les accusations assimilant ce service à du travail forcé, affirmant qu'il joue un rôle fondamental dans l'éducation civique et l'intégration sociale. Elle a en outre réfuté les accusations de militarisation de l’éducation, en précisant que le système éducatif relève exclusivement du Ministère de l’éducation.

Concernant l'émigration, la délégation a reconnu l'existence de facteurs internes – notamment des lacunes en matière de droits humains et de développement – incitant certains jeunes à quitter le pays. Elle a toutefois pointé du doigt des politiques internationales qu’elle a qualifiées de « vicieuses », en particulier celles du Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR) et de certains pays occidentaux qui, selon elle, ont encouragé une migration de masse en offrant l'asile aux Érythréens sans restriction. Elle a également dénoncé l'attribution du statut de réfugié à des personnes se faisant passer pour des Érythréens.

Malgré des sanctions internationales, des conflits et des défis économiques, l'Érythrée a préservé la paix et la stabilité grâce à une stratégie de développement rural inclusive, a affirmé la délégation. Cette stratégie, axée sur les zones marginalisées et reculées, vise à garantir que personne ne soit laissé pour compte, promouvant ainsi l’harmonie sociale et la cohésion, a­-t-elle ajouté.

La délégation a également mis en avant le rôle des femmes dans le développement, et a insisté sur l’importance des programmes qui visent à les autonomiser pour améliorer la nutrition et les conditions de vie des familles.

La délégation a insisté sur la nécessité pour chacun de vérifier les informations concernant l'Érythrée, dénonçant l’existence de campagnes de désinformation en ligne et dans des rapports internationaux qu’elle a jugés biaisés et motivés politiquement. Elle a exhorté le Comité à distinguer les faits réels des informations erronées issues d’intérêts externes.

S’agissant du travail des enfants, la délégation a souligné que la législation nationale interdit strictement toute forme de travail dangereux. Les corvées familiales, perçues comme une part de l’apprentissage traditionnel, n’entravent pas la scolarité des enfants, a-t-elle affirmé.

L’Érythrée est confrontée à des sécheresses récurrentes, à des invasions de sauterelles et à des inondations, a par ailleurs souligné la délégation, avant d’attirer l’attention sur les stratégies mises en œuvre pour renforcer la résilience face à ces catastrophes, notamment par la construction de barrages, la gestion des ressources en eau et la sensibilisation des enfants dans le cadre scolaire.

Face aux défis climatiques, l’Érythrée a investi dans des infrastructures de gestion de l’eau et dans l’agriculture durable ; ces initiatives ont permis de multiplier par sept la production alimentaire depuis 1990, a d’autre part indiqué la délégation.

La délégation a réaffirmé l’engagement de l’Érythrée à collaborer avec les partenaires internationaux pour surmonter les défis et garantir les droits de chaque enfant. Elle a reconnu que des efforts restent nécessaires pour améliorer les infrastructures, élargir l’accès aux services et éliminer les inégalités persistantes.

 

 

 

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