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Examen de Saint-Kitts-et-Nevis au Comité des droits de l’enfant : en dépit de programmes sociaux louables, des préoccupations subsistent s’agissant de la justice pour mineurs, des enfants handicapés, des châtiments corporels et de la violence criminelle

Compte rendu de séance

 

Le Comité des droits de l’enfant a examiné hier après-midi et cet après-midi le deuxième rapport périodique présenté par Saint-Kitts-et-Nevis au titre de la Convention relative aux droits de l’enfant.

À l’issue du dialogue noué entre les experts membres du Comité et la délégation venue soutenir ce rapport, une experte a recommandé que le pays avance encore dans la question de la justice pour les mineurs, et a salué les efforts déjà consentis en faveur de l’éducation et de la formation des jeunes. Au cours du dialogue, cette même experte a salué l’adoption par le pays d’une loi moderne relative à la justice pour mineurs, mais a regretté que les structures nécessaires à son application effective n’aient pas toutes été créées, y compris un tribunal spécialisé. Tout en jugeant positive l’adoption d’une loi sur la prévention de la violence des gangs, cette experte a par ailleurs mis en garde contre la possibilité que cette loi donne d’incriminer trop facilement un mineur. Il a en outre été jugé préoccupant qu’il soit possible, à Saint-Kitts-et-Nevis, de lancer des poursuites pénales contre des enfants âgés de 10 ans.

Ont d’autre part été salués les excellents plans et programmes en matière de protection sociale et d'éducation élaborés par le pays, mais il a été regretté que ceux-ci ne soient pas harmonisés dans le cadre d'un plan national. Une experte a fait état de difficultés dans l’intégration scolaire des enfants handicapés à Saint-Kitts-et-Nevis. Tout en saluant l’ouverture de structures de prise en charge des enfants handicapés, un expert a pour sa part déploré des lacunes juridiques en matière de protection des jeunes handicapés.

Un expert a pour sa part constaté qu’il n’y avait pas de loi interdisant la discrimination envers les enfants dans l’accès aux services publics, en particulier pour ce qui est de l’accès aux services de santé. Il a par ailleurs recommandé que le Gouvernement s’emploie à modifier les attitudes sociales à l’origine de la discrimination, du harcèlement ou encore du rejet dont les jeunes LGBTI sont victimes à Saint-Kitts-et-Nevis. L’expert a fait part de sa préoccupation face à la violence criminelle qui s’exerce contre les jeunes à Saint-Kitts-et-Nevis.

Plusieurs experts ont demandé s’il était envisagé d’interdire les châtiments corporels à Saint-Kitts-et-Nevis, tant à la maison qu’à l’école. A également été soulevée la question de l’âge du mariage.

Conduite par Mme Azilla Clarke, Secrétaire permanente du Ministère du développement social et des affaires de genre de Saint-Kitts-et-Nevis, la délégation kittitienne et névicienne était également composée de plusieurs représentants des Ministères du développement social, des affaires étrangères, de la justice et des affaires juridiques, de la santé, et de l’éducation, ainsi que du Département de la probation et des services de protection de l’enfance.

Au cours du dialogue, la délégation a notamment fait savoir qu’il était actuellement envisagé de relever l’âge de responsabilité pénale. La délégation a souligné que la loi sur la justice pour mineurs faisait l’objet d’une révision et que des efforts étaient consentis pour mieux en coordonner l’application des dispositions. Le Ministère de la justice a pour priorité d’améliorer les programmes de déjudiciarisation à l’intention des jeunes délinquants, et il a émis des propositions d’amendement relatives, entre autres, à l’âge du consentement et au système de tutelle, a d’autre part fait savoir la délégation.

Une loi est en chantier relativement aux châtiments corporels, a d’autre part fait savoir la délégation, avant d’ajouter que cette loi vise aussi à introduire parmi la population un changement de comportement dans ce domaine. Les châtiments corporels sont en l’état interdits dans la sphère publique ; une sensibilisation culturelle et religieuse est menée en vue de réduire leur incidence au foyer, a précisé la délégation.

Le problème du mariage d’enfants de moins de 18 ans n’est pas recensé à Saint-Kitts-et-Nevis, a d’autre part affirmé la délégation.

Plusieurs lois ou dispositions légales discriminatoires en matière d’orientation sexuelle ont été abrogées ces dernières années, a d’autre part fait valoir la délégation. L’orientation sexuelle n’est pas reconnue comme un motif de discrimination à Saint-Kitts-et-Nevis ; cependant, chaque personne dans ce pays bénéficie du droit de ne pas être victime de discrimination, a-t-il été précisé.

À Saint-Kitts-et-Nevis, pour des raisons liées aux traditions, le travail à temps partiel pendant les vacances est admis dès l’âge de 12 ans, a par ailleurs indiqué la délégation. Le Ministère du travail a chargé un comité de revoir les modalités du travail des mineurs, a-t-elle ajouté.

Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport de Saint-Kitts-et-Nevis et les rendra publiques à l’issue de sa session, le 31 janvier prochain.

 

Lundi après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l’examen du rapport du Pérou.

 

Examen du rapport de Saint-Kitts-et-Nevis

Le Comité est saisi du deuxième rapport périodique de Saint-Kitts-et-Nevis (CRC/C/KNA/2) ainsi que des réponses du pays à une liste de points à traiter soumise par le Comité.

Présentation

MME AZILLA CLARKE, Secrétaire permanente du Ministère du développement social et des affaires de genre de Saint-Kitts-et-Nevis, a brièvement présenté les membres de la délégation kittitienne et névicienne qu’elle préside. Elle a indiqué que le slogan de la stratégie nationale de protection sociale de la Fédération était « Faire de Saint-Kitts-et-Nevis le meilleur endroit où grandir et vieillir ».

Questions et observations des membres du Comité

Comme de coutume, le Comité avait chargé quatre de ses membres d’examiner plus avant le rapport de Saint-Kitts-et-Nevis : Mme Faith Marshall Harris, M. Rinchen Chophel, M. Benyam Dawit Mezmur et Mme Aissatou Alassane Sidikou.

Coordonnatrice de ce groupe de travail, MME MARSHALL HARRIS a salué l’adoption par la pays d’une loi moderne relative à la justice pour mineurs, mais a regretté que les structures nécessaires à son application effective n’aient pas toutes été créées, y compris un tribunal spécialisé. Des enfants de dix ans peuvent être poursuivis en justice, a par ailleurs regretté l’experte.

L’experte a d’autre part jugé positive l’adoption d’une loi sur la prévention de la violence des gangs, mais a mis en garde contre la possibilité que cette loi donne d’incriminer trop facilement un mineur.

Mme Marshall Harris a ensuite voulu savoir s’il était possible de contracter mariage à 15 ans avec l’autorisation d’un juge.

Une instance doit coordonner toutes les mesures prises pour donner effet à la Convention, a souligné la coordinatrice du groupe, se demandant si le Département de la probation et des services de protection de l’enfance pourrait remplir ce rôle, y compris s’agissant de la réception des plaintes déposées par les enfants. Elle s’est en outre enquise de l’existence d’un mécanisme national de collecte de données statistiques.

L’experte a par ailleurs fait état de difficultés dans l’intégration scolaire des enfants handicapés à Saint-Kitts-et-Nevis. Elle a ensuite salué la promulgation par Saint-Kitts-et-Nevis d’une loi contre la traite des êtres humains.

Mme Marshall Harris a recommandé que les autorités impliquent davantage les organisations de la société civile dans la protection des droits de l’enfant.

Mme Marshall Harris a salué le fait que le pays ait élaboré d'excellents plans et programmes en matière de protection sociale et d'éducation, mais a regretté que ceux-ci ne soient pas harmonisés dans le cadre d'un plan national. Le niveau de financement alloué à la santé, à l'éducation et à la protection sociale a été jugé encourageant.

Mme Marshall Harris a d’autre part jugé admirable que Saint-Kitts-et-Nevis accueille des migrants du Venezuela, de Cuba, d'Haïti et de la République dominicaine, qui peuvent y bénéficier de soins de santé et d'une éducation. Toutefois, la politique nationale en matière d'immigration doit être finalisée, a recommandé l’experte.

Mme Marshall Harris a par ailleurs rappelé que la Convention n°138 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) fixait à 15 ans l’âge minimal du travail. Elle a d’autre part demandé où en était la création du poste de médiateur pour les enfants.

M. CHOPHEL a constaté qu’il n’y avait pas de loi interdisant la discrimination envers les enfants dans l’accès aux services publics, en particulier pour ce qui est de l’accès aux services de santé. Il a par ailleurs recommandé que le Gouvernement s’emploie à modifier les attitudes sociales à l’origine de la discrimination, du harcèlement ou encore du rejet dont les jeunes LGBTI sont victimes à Saint-Kitts-et-Nevis. L’expert ensuite fait part de sa préoccupation face à la violence criminelle qui s’exerce contre les jeunes à Saint-Kitts-et-Nevis.

Tout en saluant l’ouverture de structures de prise en charge des enfants handicapés, M. Chophel a regretté des lacunes juridiques en matière de protection des jeunes handicapés.

L’expert a par ailleurs fait remarquer que l'âge du consentement à l'activité sexuelle était fixé à 16 ans, mais que le mariage pouvait être autorisé à 15 ans.

M. MEZMUR a pour sa part demandé si l’enregistrement des naissances était numérisé et gratuit à Saint-Kitts-et-Nevis et si le pays entendait ratifier la Convention de 1954 relative au statut des apatrides ainsi que la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie.

L’expert a par ailleurs demandé des informations sur l’ampleur du VIH/sida et des maladies transmissibles à Saint-Kitts-et-Nevis et s’est enquis des services publics proposés pour y faire face.

M. Mezmur a relevé avec satisfaction que le Parlement avait adopté, en 2018, une loi sur la liberté d'information permettant au public d'accéder aux documents du Gouvernement. Il a voulu savoir si cette loi avait contribué à améliorer la mise en œuvre des droits de l'enfant à Saint-Kitts-et-Nevis.

L’expert a par ailleurs voulu savoir comment l’État remédiait aux écarts en termes d’accès aux soins de santé entre les deux îles qui composent le pays.

MME SIDIKOU a quant à elle relevé que les enfants ayant besoin d’une protection de remplacement étaient tous pris en charge, à Saint-Kitts-et-Nevis, par des familles d’accueil, en l’absence d’autres structures adaptées. Elle a demandé ce qui était fait pour renforcer ce système et en améliorer la qualité, ainsi que pour venir en aide aux enfants dont les parents se sont expatriés.

L’experte s’est d’autre part enquise des mesures de protection sociale prises en faveur des enfants pauvres à Saint-Kitts-et-Nevis.

Mme Sidikou s’est ensuite enquise des normes et critères régissant le secteur de la protection de remplacement (soins de substitution) et de la manière dont la qualité des services fournis dans ce contexte était contrôlée.

En 2018, a fait remarquer l’experte, 17% des habitants de Saint-Kitts-et-Nevis vivaient dans la pauvreté, dont 42% étaient des enfants de moins de 14 ans. Aussi, Mme Sidikou s’est-elle enquise des mesures de protection sociale prises en faveur des familles concernées

Plusieurs experts ont demandé s’il était envisagé d’interdire les châtiments corporels à Saint-Kitts-et-Nevis, tant à la maison qu’à l’école.

Une experte a jugé préoccupant qu’il soit possible à Saint-Kitts-et-Nevis de lancer des poursuites pénales contre des enfants âgés de 10 ans.

Il a par ailleurs été demandé si le pays avait mené une réflexion au sujet de la ratification des Protocoles facultatifs concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, la vente d’enfants, et la compétence du Comité pour recevoir des plaintes individuelles ; et où en était la ratification de la Convention contre la torture, dans un contexte où, a souligné une experte, des châtiments corporels existent à Saint-Kitts-et-Nevis.

Réponses de la délégation

La délégation a indiqué que la loi sur la justice pour mineurs faisait l’objet d’une révision et que des efforts étaient consentis pour mieux en coordonner l’application des dispositions.

Le Ministère de la justice a émis des propositions d’amendement relatives, entre autres, à l’âge du consentement et au système de tutelle, a fait savoir la délégation.

Des aménagements matériels ont été apportés pour permettre aux enfants de témoigner en justice dans de bonnes conditions pour eux, a-t-il en outre été précisé.

Le Ministère de la justice a pour priorité d’améliorer les programmes de déjudiciarisation à l’intention des jeunes délinquants, a ajouté la délégation.

Il est actuellement envisagé de relever l’âge de responsabilité pénale, qui est fixé à 12 ans, a poursuivi la délégation. Dans des cas très graves, il est possible d’inculper un mineur de moins de 12 ans et de plus de 10 ans, a-t-elle indiqué ; dans ce cas, un certificat confirmant l’intention délictuelle du mineur doit être établi, a-t-elle précisé.

Une loi est en chantier relativement aux châtiments corporels, a d’autre part fait savoir la délégation, avant d’ajouter que cette loi vise aussi à introduire parmi la population un changement de comportement dans ce domaine. Les châtiments corporels sont en l’état interdits dans la sphère publique ; une sensibilisation culturelle et religieuse est menée en vue de réduire leur incidence au foyer, a précisé la délégation.

Le problème du mariage d’enfants de moins de 18 ans n’est pas recensé à Saint-Kitts-et-Nevis, a affirmé la délégation.

Le Gouvernement envisage de créer une entité de contrôle chargée de toutes les questions en lien avec la protection de l’enfance, a-t-il été indiqué.

Plusieurs lois ou dispositions légales discriminatoires en matière d’orientation sexuelle ont été abrogées ces dernières années, a d’autre part fait valoir la délégation. L’orientation sexuelle n’est pas reconnue comme un motif de discrimination à Saint-Kitts-et-Nevis ; cependant, chaque personne dans ce pays bénéficie du droit de ne pas être victime de discrimination, a-t-il été précisé.

Le Gouvernement est en train de mettre au point un plan d’action national contre la violence des gangs, a par ailleurs indiqué la délégation. Des journées d’élimination de la violence sont organisées et les autorités ont pris des mesures pour réprimer le recrutement de mineurs par des gangs et pour réinsérer les enfants qui en ont été victimes, a fait valoir la délégation.

La délégation a par ailleurs indiqué que le Gouvernement avait lancé un programme d’octroi de papiers d’identité numériques, et a assuré que l’apatridie n’est pas un problème à Saint-Kitts-et-Nevis.

La délégation a fait état de progrès importants dans la scolarisation des jeunes, ainsi que dans la révision des programmes scolaires, en vue notamment d’intégrer des enseignements sur l’environnement durable.

La délégation a fourni d’autres informations sur l’utilisation d’Internet par les jeunes et la protection dont ils bénéficient ce faisant.

Pour des raisons liées au manque de connaissance ou à la gêne, tous les adolescents ne profitent pas des services de santé dont ils peuvent bénéficier, a expliqué la délégation.

La loi protège les mineurs comme les adultes contre les effets de la fumée du tabac, a-t-il par ailleurs été précisé. La délégation a en outre fait part des mesures prises pour empêcher la vente d’alcool aux mineurs.

L’accès aux soins de santé à Saint-Kitts est gratuit pour les enfants, a souligné la délégation, précisant que les services ambulatoires sont gratuits pour les enfants des deux îles. Le dépistage volontaire du VIH/sida est offert dans tous les hôpitaux, a-t-elle ajouté. Les soins prénatals privés et publics sont semblables, tous les médecins du secteur public exerçant aussi dans le privé, a-t-il par ailleurs été indiqué.

Des initiatives ont été menées pour remédier aux pénuries d’eau potableet éviter le gaspillage de cette ressource, a d’autre part indiqué la délégation, avant d’ajouter que les écoles sont équipées de réservoirs d’eau.

Le Ministère du développement social veille aux besoins des enfants handicapés et des enfants vulnérables pendant et après les catastrophes naturelles, a poursuivi la délégation. Le Ministère emploie un certain nombre de fonctionnaires hispanophones pour veiller à ce que toutes les personnes puissent être correctement servies, a-t-elle ajouté.

Les écoles ne sont pas utilisées comme refuge à long terme en cas d’ouragan, le Gouvernement ayant pour priorité d’assurer une scolarité ininterrompue, a-t-il été précisé.

S’agissant des mesures de protection sociale, la délégation a notamment mentionné des aides pour les repas en cantine et l’achat d’uniformes scolaires, de même que l’octroi de subventions aux familles nombreuses. Avec le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), le pays applique une mesure d’évaluation des besoins basée sur des données qualitatives relatives aux ménages. Le but des autorités est d’instaurer un socle de protection sociale, a insisté la délégation.

À Saint-Kitts-et-Nevis, pour des raisons liées aux traditions, le travail à temps partiel pendant les vacances est admis dès l’âge de 12 ans, a par ailleurs indiqué la délégation. Le Ministère du travail a chargé un comité de revoir les modalités du travail des mineurs, a-t-elle ajouté.

Le corps des cadets, composé essentiellement de jeunes en formation, n’est pas armé, a d’autre part précisé la délégation en réponse à d’autres questions relatives au Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés.

Le nouveau Médiateur pour les enfants a été nommé : son bureau est ouvert à toute personne qui estime que ses droits ne sont pas respectés, a fait savoir la délégation.

Remarques de conclusion

MME MARSHALL HARRIS a recommandé que le pays avance encore dans la question de la justice pour les mineurs, et a salué les efforts déjà consentis en faveur de l’éducation et de la formation des jeunes.

MME CLARKE a remercié les membres du Comité pour leurs questions. Elle a fait part de la volonté de son pays de tenir compte, dans son développement, des besoins de sa population, qui est jeune, et de tenir compte du principe de l’intérêt supérieur de l’enfant.

 

 

Ce document produit par le Service de l’information des Nations Unies à Genève est destiné à l'information ; il ne constitue pas un document officiel. 

Les versions anglaise et française de nos communiqués sont différentes car elles sont le produit de deux équipes de couverture distinctes qui travaillent indépendamment. 

 

 

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