Fil d'Ariane
Examen des Seychelles au CMW : tout en jugeant remarquable l’encadrement juridique du travail domestique, les experts s’inquiètent de lacunes dans l’inspection du travail et dans les mesures de prévention de l’exploitation
Le Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (CMW, selon l’acronyme anglais) a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport initial présenté par les Seychelles au titre de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles.
Durant le dialogue noué entre les experts membres du Comité et la délégation seychellois venue soutenir ce rapport, une experte a jugé remarquable ce que les Seychelles ont fait pour encadrer juridiquement le travail domestique. Un expert a par ailleurs salué le fait que la loi seychelloise interdise explicitement la discrimination envers les travailleurs, estimant qu’il s’agissait là d’un élément essentiel pour le respect des droits des travailleurs migrants et de leur famille. Cet expert a cependant relevé que l’inspection des conditions de travail des migrants serait lacunaire aux Seychelles et qu’il reste à adopter des mesures de prévention de l’exploitation des travailleurs migrants.
D’autres difficultés ont en outre été signalées s’agissant de l’accès des migrants aux soins de santé, au regroupement familial et aux recours en cas de violation de leurs droits, a-t-il été relevé. La délégation a par ailleurs été interrogée sur les conditions de travail des migrants dans la zone franche seychelloise. Il a été observé que les travailleurs migrants employés par des entreprises multinationales recevaient souvent des salaires inférieurs à ceux des travailleurs nationaux.
Un expert a relevé que les Seychelles ne disposaient pas de loi spécifique sur les travailleurs migrants et a insisté sur l’importance de disposer de statistiques ventilées et fiables concernant les travailleurs migrants dans l’archipel. Cet expert s’est par ailleurs étonné que les Seychelles étant un petit État insulaire vulnérable aux effets des changements climatiques sur la migration, leur rapport ne dise rien sur cette question.
Une experte a relevé que, selon le rapport, les femmes migrantes sont particulièrement présentes dans le secteur manufacturier ; aussi, a-t-elle demandé comment ces femmes étaient protégées contre la discrimination au travail et a souhaité savoir si elles accédaient aux services de santé essentiels dans les mêmes conditions que les autres femmes aux Seychelles.
Les étrangers jouant un rôle important dans la création de richesses aux Seychelles, il serait utile non seulement de renforcer leurs compétences académiques, mais aussi d’élargir leur accès aux services de santé, a estimé un expert. Il a par ailleurs été demandé dans quelle mesure la diaspora seychelloise investissait dans le développement du pays.
À l’issue du dialogue, un membre du Comité a salué l’importance accordée par les Seychelles au fait de traiter les migrants comme des êtres humains.
Présentant le rapport de son pays, Mme Patricia Francourt, Ministre du travail et des affaires sociales des Seychelles, a indiqué que l'une des politiques fondamentales des Seychelles était le respect de la voie légale nationale pour la migration de la main-d'œuvre. Tous les travailleurs non seychellois qui viennent travailler doivent être en possession d'un permis de travail valide, a-t-elle souligné. L'employeur doit d'abord postuler auprès du Département de l'emploi, puis s'adresser au Département de l'immigration pour se voir délivrer le permis de travail [pour la personne qu’il souhaite employer]. Cette procédure garantit que les migrants qui viennent aux Seychelles sont en situation régulière et que, dans la mesure du possible, leur employeur respecte la législation nationale relative au travail, à l'immigration et à la santé, a expliqué la cheffe de délégation.
Par ailleurs, a poursuivi la Ministre, le Gouvernement a lancé en juillet 2024 la première politique nationale de la diaspora, qui vise la coordination et la connexion à long terme avec les Seychellois vivant à l'étranger. Le Conseil de gouvernance de la diaspora seychelloise sera officiellement mis en place l'année prochaine et présidé par le Président de la République, a-t-elle indiqué.
Mme Francourt a également informé le Comité du lancement en 2023 d’un programme d'initiation obligatoire « Travailler aux Seychelles » (WINS), qui vise à responsabiliser les travailleurs non seychellois et à les informer de leurs droits ainsi que de leurs conditions de travail et de vie quotidiennes aux Seychelles, en insistant sur l’importance de signaler tout problème, afin de préserver leur bien-être et de faciliter leur intégration.
Outre Mme Francourt et plusieurs de ses collaborateurs du Ministère du travail et des affaires sociales, la délégation seychelloise était également composée, entre autres, de représentants du Ministère de l’intérieur et de l’Office de la Présidence des Seychelles.
Pendant le dialogue, la délégation a notamment précisé que la diaspora seychelloise étant dispersée dans le monde entier, le Gouvernement a lancé en 2024 un processus d’identification des personnes concernées afin de déterminer si elles peuvent contribuer au développement du pays et de les inciter à le faire, le cas échéant.
La délégation a par ailleurs souligné que la loi garantit au système d’inspection du travail l’accès aux lieux de travail ; les enquêtes de l’inspection du travail sont concentrées sur les secteurs à problème ou sur les plaintes qui lui parviennent par l’intermédiaire de deux numéros gratuits dont les numéros sont communiqués dans le cadre du programme WINS, a-t-il été précisé.
Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport des Seychelles et les publiera à l’issue de sa session, le 13 décembre prochain, date de la prochaine et dernière séance publique de cette trente-neuvième session.
Examen du rapport des Seychelles
Le Comité est saisi du deuxième rapport périodique des Seychelles (CMW/C/SYC/2), établi sur la base d’une liste de points à traiter qui avait été soumise par le Comité.
Présentation du rapport
Présentant le rapport de son pays, MME PATRICIA FRANCOURT, Ministre du travail et des affaires sociales des Seychelles, a indiqué que dans l’archipel, qui compte 121 000 habitants, on recensait aujourd'hui environ 20 000 travailleurs non seychellois. Elle a en outre souligné que la croissance de l'économie dépendait fortement de la main-d'œuvre étrangère, afin de combler les lacunes du marché du travail et des compétences. Dans ce contexte, a-t-elle ajouté, la loi sur l'emploi offre une protection égale aux travailleurs migrants et aux travailleurs locaux afin de garantir leur traitement équitable sur le marché du travail.
La première politique nationale de migration de la main-d'œuvre, introduite en 2019, est guidée par quatre interventions stratégiques : la gouvernance de la migration de la main-d'œuvre ; la protection des droits des travailleurs migrants ; l'attraction, la rétention et les compétences ; et le recrutement équitable et efficace, a poursuivi Mme Francourt.
L'une des politiques fondamentales des Seychelles est le respect de la voie légale nationale pour la migration de la main-d'œuvre, a précisé la cheffe de délégation. Tous les travailleurs non seychellois qui viennent travailler doivent être en possession d'un permis de travail valide, a-t-elle souligné. L'employeur doit d'abord postuler auprès du Département de l'emploi, puis s'adresser au Département de l'immigration pour se voir délivrer le permis de travail [pour la personne qu’il souhaite employer]. Cette procédure garantit que les migrants qui viennent aux Seychelles sont en situation régulière et que, dans la mesure du possible, leur employeur respecte la législation nationale relative au travail, à l'immigration et à la santé, a expliqué Mme Francourt.
Par ailleurs, a poursuivi la Ministre, le Gouvernement a lancé en juillet 2024 la première politique nationale de la diaspora, qui vise la coordination et la connexion à long terme avec les Seychellois vivant à l'étranger. Ces personnes viennent s'ajouter au capital humain du pays et, par conséquent, leurs droits et leurs intérêts doivent également être promus et protégés, a-t-elle souligné. Le Conseil de gouvernance de la diaspora seychelloise sera officiellement mis en place l'année prochaine et présidé par le Président de la République, a-t-elle indiqué.
Mme Francourt a également mis en avant les efforts constants du Gouvernement pour assurer une vie décente à tous les résidents des Seychelles, y compris au travers de la lutte contre la traite des personnes. Depuis 2023, les Seychelles sont ainsi classées au niveau 1 dans le rapport du Département d’État des États-Unis sur la traite des personnes ; il s’agit du seul pays d'Afrique à avoir atteint ce niveau, a fait valoir la Ministre. Cette réussite bénéficie principalement à la communauté des travailleurs migrants, qui sont en effet malheureusement davantage susceptibles d'être victimes de la traite des êtres humains. Entre 2018 et 2024, il y a eu six condamnations pour des cas de traite des êtres humains, ce qui indique que le processus fonctionne, a affirmé la Ministre.
D’autre part, le Ministère du travail et des affaires sociales a introduit en 2019 des réglementations relatives aux travailleurs domestiques résidents, qui sont surtout des travailleurs migrants, a poursuivi Mme Francourt. Elle a en outre fait valoir qu’en janvier dernier, les Seychelles avaient ratifié la Convention n°189 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur les travailleuses et travailleurs domestiques, en reconnaissance de la valeur sociale et de la vulnérabilité de ces personnes.
Mme Francourt a également informé le Comité du lancement en 2023 d’un programme d'initiation obligatoire intitulé « Travailler aux Seychelles » (WINS, selon l’acronyme anglais de ce programme), qui vise à responsabiliser les travailleurs non seychellois et à les informer de leurs droits ainsi que de leurs conditions de travail et de vie quotidiennes aux Seychelles, en insistant sur l’importance de signaler tout problème, afin de préserver leur bien-être et de faciliter leur intégration.
La Ministre a d’autre part souligné que les Seychelles avaient la chance de recevoir une assistance technique de la part de leurs partenaires internationaux concernant le renforcement des capacités, l'évaluation des données migratoires, le profil migratoire, les accords bilatéraux en matière de migration de main-d'œuvre, ou encore le recrutement éthique, entre autres. En outre, au niveau régional, les Seychelles participent activement à la mise en œuvre du plan d'action sur les migrations de main-d'œuvre de la Communauté de développement de l'Afrique australe.
Mme Francourt a tenu à préciser que la faible population du pays devait être prise en compte au moment d’évaluer les effets des politiques nationales de migration.
Pour l’avenir, la Ministre a fait savoir qu’il était prévu de finaliser l'examen du texte de loi sur l'emploi – qui est presque achevé et sera présenté au Gouvernement et à l’Assemblée nationale l’an prochain – et de revoir d'autres textes législatifs qui régissent le cadre juridique intéressant la Convention. L'accent sera également mis sur l'application de la législation, la collaboration avec les pays d'origine, la finalisation de la proposition visant à étendre les cotisations de retraite aux travailleurs migrants et la sensibilisation à la Convention, a ajouté Mme Francourt.
Questions et observations des membres du Comité
Le Comité avait chargé deux de ses membres, M. Edgar Corzo Sosa et M. Can Ünver, d’examiner plus en détail le rapport des Seychelles.
M. ÜNVER a d’abord salué le fait que la loi seychelloise sur l’emploi interdise explicitement la discrimination envers les travailleurs, estimant qu’il s’agissait là d’un élément essentiel pour le respect des droits des travailleurs migrants et de leur famille.
L’expert a cependant relevé que l’inspection des conditions de travail des migrants serait lacunaire aux Seychelles et qu’il reste à adopter des mesures de prévention de l’exploitation des travailleurs migrants. D’autres difficultés ont été signalées s’agissant de l’accès des migrants aux soins de santé, au regroupement familial et aux recours en cas de violation de leurs droits, a indiqué M. Ünver.
M. Ünver a par la suite demandé ce qui était prévu sur les plans politique et institutionnel en vue de la réinstallation au pays des membres de la diaspora seychelloise.
M. CORZO SOSA s’est étonné que les Seychelles étant un petit État insulaire vulnérable aux effets des changements climatiques sur la migration, leur rapport ne dise rien sur cette question. Il a relevé que les Seychelles ne disposaient pas de loi spécifique sur les travailleurs migrants, et a demandé quand un texte à cet égard serait adopté.
M. Corzo Sosa a par ailleurs voulu savoir si le programme « Travailler aux Seychelles » (WINS), mentionné par la cheffe de la délégation, contenait un volet consacré à la Convention.
L’expert a par ailleurs insisté sur l’importance de disposer de statistiques ventilées et fiables concernant les travailleurs migrants aux Seychelles. Il s’est enquis des nombres de permis de travail octroyés et refusés dans le pays.
M. Corzo Sosa a également voulu savoir si les autorités seychelloises octroyaient un certificat de handicap permettant aux migrants concernés de bénéficier plus facilement des droits dont ils disposent. Il a par ailleurs prié la délégation de donner des explications complémentaires concernant les six condamnations qui ont été prononcées pour traite des êtres humains, s’agissant en particulier des sanctions infligées aux coupables et du soutien accordé aux victimes.
D’autres questions de M. Corzo Sosa ont porté sur les compétences et le degré d’autonomie de la Commission des droits de l’homme des Seychelles. L’expert a par ailleurs prié la délégation de dire si la société civile avait participé à la rédaction du rapport.
M. Corzo Sosa a demandé si les Seychelles allaient reconnaître la compétence du Comité pour recevoir des plaintes individuelles (communications) et interétatiques, telle que prévue aux articles 76 et 77 de la Convention.
L’expert a par ailleurs demandé ce qu’il en était de la situation des personnes originaires des Chagos, privées de leurs terres natales pendant cinquante ans et qui n’ont pu obtenir la nationalité seychelloise.
Le Comité contre la torture avait constaté, lors de l’examen des Seychelles en 2018, l’existence d’une situation de travail forcé, de traitements inhumains de travailleurs migrants et de traite des êtres humains à des fins d’exploitation au travail, a d’autre part rappelé M. Corzo Sosa, avant de demander si la situation avait évolué depuis.
De plus, lors de l’Examen périodique universel (EPU) des Seychelles en 2021, des inégalités de salaire au détriment de certaines catégories de travailleurs migrants avaient été pointées, a poursuivi l’expert.
Un autre expert a demandé s’il existait un service d’inspection du travail capable de veiller à ce que les travailleurs migrants puissent exercer les mêmes droits que les Seychellois. Il a par ailleurs voulu savoir auprès de qui les travailleurs migrants, y compris les travailleurs domestiques, pouvaient déposer plainte s’ils estiment que leurs droits ne sont pas respectés.
Une experte a relevé que, selon le rapport, les femmes migrantes sont particulièrement présentes dans le secteur manufacturier ; elle a demandé comment ces femmes étaient protégées contre la discrimination au travail et a souhaité savoir si elles accédaient aux services de santé essentiels dans les mêmes conditions que les autres femmes aux Seychelles.
S’agissant de l’accueil des réfugiés, il a été demandé combien de demandes provenant d’Afghanistan avaient été acceptées par les Seychelles.
Les étrangers jouant un rôle important dans la création de richesses aux Seychelles, il serait utile non seulement de renforcer leurs compétences académiques, mais aussi d’élargir leur accès aux services de santé, a estimé un expert. Le même expert s’est interrogé sur les conditions de travail des migrants dans la zone franche seychelloise.
Des experts ont demandé dans quelle mesure la diaspora seychelloise investissait dans le développement du pays et ont souhaité savoir si le Gouvernement facilitait les transferts de fonds.
Un expert a voulu savoir si le Gouvernement tenait compte des besoins des personnes qui ont été forcées à quitter le pays à la fin des années 1970.
Une experte a demandé comment les dispositions de la Convention avaient été intégrées dans le droit seychellois.
Un membre du Comité a relevé que les travailleurs migrants employés par des entreprises multinationales recevaient souvent des salaires inférieurs à ceux des travailleurs nationaux ; il a demandé si le Gouvernement contrôlait les salaires des travailleurs concernés aux Seychelles.
Un expert a voulu savoir si le pays avait mis en place une stratégie contre le travail des enfants. Il a par ailleurs été relevé que les Seychelles n’avaient pas ratifié les deux conventions de l’OIT sur les travailleurs migrants (à savoir les conventions n°97 et n°143).
Un expert a demandé pour quelles raisons – liées au salaire ou au niveau de qualification – les Seychelles recrutaient de nombreux migrants originaires de pays voisins pour travailler dans le secteur du tourisme.
Une experte a jugé remarquable ce que les Seychelles ont fait pour encadrer juridiquement le travail domestique.
Réponses de la délégation
La délégation a d’abord retracé l’histoire des Seychelles depuis 1977, date d’un coup d’État sanglant qui a entraîné jusqu’en 1993 – date de l’instauration du multipartisme – l’exil de nombreuses personnes craignant pour leur vie. En 2018, le Gouvernement a créé une commission de vérité pour faire la lumière sur ces événements, a rappelé la délégation. Dans son rapport, cette commission a insisté sur le fait que la tragédie du passé ne devait pas se reproduire et le Gouvernement qui a pris ses fonctions en 2020 a entrepris de mettre en place les mesures nécessaires, a indiqué la délégation.
Dans ce contexte, a poursuivi la délégation, la diaspora seychelloise étant dispersée dans le monde entier, le Gouvernement a lancé en 2024 un processus d’identification des personnes concernées afin de déterminer si elles peuvent contribuer au développement du pays et de les inciter à le faire, le cas échéant.
La délégation a par la suite évoqué avec émotion le départ forcé, pour des raisons politiques et autres, de nombreux Seychellois et Seychelloises en 1977. Elle a précisé que ces personnes s’étaient installées dans des pays occidentaux et européens mais que cet exil ne les avait pas empêchées de maintenir des liens avec leurs familles restées au pays et de leur venir en aide financièrement. Depuis lors, un processus de réconciliation et de prise de parole a été lancé, accompagné de mesures de réparation et de prise charge psychologique, a-t-il été précisé.
Aujourd’hui, le Gouvernement demande aux membres de la diaspora de partager leurs savoirs et compétences accumulés, et porte à leur connaissance les offres d’emploi qui pourraient les intéresser. Un plan d’action plus complet dans ce domaine sera adopté l’année prochaine, a indiqué la délégation.
Très important pour les travailleurs migrants, le programme « Travailler aux Seychelles » (ou WINS, Work in Seychelles) porte sur le bien-être et la sécurité de ces travailleurs et prévoit un dispositif pour dénoncer d’éventuelles violations de leurs droits, a ensuite souligné la délégation. Couvrant tout le processus de migration, ce programme est axé sur l’adaptation des personnes qui émigrent vers les Seychelles ; leur compréhension du pays ; la connaissance de leurs droits et des voies de recours judiciaires ; de même que leur intégration au travail ainsi que dans la communauté seychelloise, laquelle est un mélange de populations asiatiques, africaines et européennes. Le programme WINS contient aussi un volet consacré à la protection sociale et à la santé mentale, compte tenu du fait que l’émigration peut, pour tout individu, constituer un choc, a-t-il été précisé. Les employeurs sont aussi impliqués dans l’application du programme, a souligné la délégation.
Les travailleurs domestiques sont couverts par une loi et des règlements tenant compte de leur vulnérabilité induite par le fait qu’ils travaillent chez des particuliers, a d’autre part indiqué la délégation. Des exigences sont notamment posées en matière de gratuité et de qualité du logement, si le travailleur vit au domicile de son employeur, ainsi qu’en matière de congés annuels, a-t-elle précisé, avant d’ajouter que le respect des conditions est contrôlé. Le pays a ratifié la Convention n°189 sur les travailleuses et travailleurs domestiques de l’OIT, a rappelé la délégation.
On compte toujours plus de travailleurs migrants dans le secteur de la pêche, très important pour les Seychelles, où ils travaillent à tous les niveaux de la hiérarchie – du pêcheur au capitaine – a par ailleurs fait savoir la délégation, avant de préciser que la loi seychelloise s’applique aux navires battant pavillon seychellois. Avant de ratifier la Convention du travail maritime (2006) de l’OIT, le Gouvernement a demandé à des experts de l’orienter sur la manière de combler les lacunes dans la loi seychelloise en la matière, a d’autre part indiqué la délégation.
Le Gouvernement des Seychelles met tout en œuvre pour remplir les obligations du pays et répondre aux attentes des travailleurs migrants, qui sont considérés comme un pilier du développement de l’archipel, a assuré la délégation.
Le développement en cours de l’économie verte, bleue et circulaire devant entraîner le recrutement de davantage de migrants, au moins dans un premier temps, les autorités ont déjà pris des mesures pour assurer leur protection, a d’autre part indiqué la délégation. Elle a mentionné d’autres mesures prises par le secteur touristique en matière d’environnement, telles que l’installation de panneaux solaires sur le toit des hôtels.
Le pays est en train de déployer, avec le Bureau international du travail, un système d’information statistique sur le marché du travail, y compris la numérisation de l’octroi des permis. Une étude sur le marché du travail est par ailleurs effectuée chaque trimestre, contenant des données sur les travailleurs migrants, a fait savoir la délégation.
Les autorités connaissent le nombre de travailleurs migrants handicapés et leur sexe, mais pas le type de handicap, a-t-il été précisé.
La sécurité au travail est une autre priorité pour le Gouvernement, qui organise de nombreuses formations à l’intention des migrants : les autorités entendent que toutes les personnes qui viennent travailler aux Seychelles « en repartent vivantes », a par ailleurs insisté la délégation.
Le système d’ inspection du travail a pour tâche de protéger les droits de tous les travailleurs, y compris étrangers, la loi lui garantissant l’accès aux lieux de travail, a poursuivi la délégation. La pénurie de ressources humaines fait que ce service [d’inspection du travail] ne peut couvrir toutes les entreprises, raison pour laquelle ses enquêtes sont concentrées sur les secteurs à problème ou sur les plaintes qui lui parviennent par l’intermédiaire de deux numéros gratuits, a expliqué la délégation. les problèmes auxquels se heurtent les travailleurs migrants, en particulier le non-paiement des salaires, peuvent être dénoncés par ces lignes téléphoniques, dont les numéros sont communiqués dans le cadre du programme WINS, a-t-elle ajouté. L’inspection du travail mène ses visites avec d’autres services publics concernés, notamment les autorités sanitaires, a d’autre part indiqué la délégation.
Il a par la suite été précisé que l’inspection du travail disposait de bureaux sur les trois îles principales de l’archipel. Elle peut effectuer des visites inopinées et exiger la présentation des documents nécessaires, y compris dans la zone franche, a indiqué la délégation.
Le travail dans la zone franche des Seychelles est régi par une loi distincte qui reprend 90% des dispositions de la loi générale sur l’emploi, a d’autre part fait savoir la délégation. On compte environ 1500 travailleurs étrangers dans cette zone et 80% d’entre eux sont employés par la même usine, a-t-elle précisé. Les femmes qui travaillent dans cette usine sont très bien traitées : elles ont accès à un logement et au transport gratuits, a-t-elle ajouté.
Les habitants des Seychelles se plaignent souvent que les travailleurs immigrés sont davantage payés qu’eux, mais la loi impose un salaire égal pour un travail de valeur égale, a fait remarquer la délégation. Lorsque l’inspection du travail détecte des irrégularités, elle peut obliger l’employeur à remédier à la situation. En amont, le Ministère de l’emploi vérifie que tous les contrats respectent les exigences légales.
Il n’y a pas de problème de travail des enfants aux Seychelles, a assuré la délégation. La plupart [des enfants] vont à l’école, qui est gratuite ; dans certains cas rares, identifiés par l’inspection du travail, des mesures sont activées pour faire en sorte que la santé et la sécurité des jeunes employés de moins de 18 ans soit bien respectée. Une liste des emplois interdits aux mineurs a été établie en coordination avec l’OIT, a ajouté la délégation.
Une stratégie est à l’étude pour éliminer le travail informel, qui emploie entre 7000 et 8000 personnes aux Seychelles, a en outre fait savoir la délégation.
La loi sur l’emploi prévoit des congés annuels ainsi que des congés pour maternité, a ensuite souligné la délégation. Les travailleurs migrants ont aussi droit à un billet d’avion gratuit tous les deux ans pour rentrer passer leurs vacances dans leur pays, a-t-elle fait valoir. La majorité des travailleurs migrants ont accès à un logement gratuit, a-t-elle ajouté. Certains employeurs versent aussi un treizième salaire aux travailleurs migrants dont le salaire ne dépasse pas un certain montant, a indiqué la délégation.
La délégation a par la suite fait état d’une refonte complète en cours de la loi sur l’emploi – refonte aux termes de laquelle les travailleurs migrants devront obligatoirement disposer d’un compte bancaire, alors qu’un tribunal spécialisé sera chargé de traiter les litiges au travail, a-t-elle notamment précisé.
Une proposition est à l’examen, avec l’OIT, consistant à élargir la couverture sociale des travailleurs migrants, y compris s’agissant de la retraite, a par ailleurs indiqué la délégation.
Certains membres des familles des migrants peuvent entrer dans le pays (c’est-à-dire aux Seychelles) et y rester un an, compte tenu de l’offre limitée de logements et de services publics ; mais l’octroi d’un permis de travail n’est pas automatique, a expliqué la délégation.
Les enfants de parents étrangers nés aux Seychelles n’acquièrent pas automatiquement la nationalité seychelloise, le pays appliquant le droit du sang, a-t-il par ailleurs été précisé.
Les enfants nés aux Seychelles sont tous enregistrés à l’état civil, quel que soit leur statut migratoire, a ajouté la délégation.
En 2023, 223 passagers ont été interdits d’entrée aux Seychelles pour différents motifs, y compris la présentation de faux documents et le non-respect des prescriptions légales. Au 5 décembre 2024, 214 passagers ont été dans la même situation cette année ; en outre, 395 personnes frappées d’interdiction de séjour ont quitté le pays, a-t-il été précisé. Le droit de ces personnes à obtenir les conseils d’un avocat est garanti par un décret datant de 1979, a indiqué la délégation.
Le Gouvernement entend renforcer la collaboration entre les agences de l’État s’agissant de la collecte et du partage des données. En l’état, le service des migrations ne connaît pas, par exemple, le nombre de migrants ayant recouru aux services de santé nationaux, a-t-il été souligné.
Le Gouvernement prépare avec l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) une politique nationale de migration dont les principaux points saillants ont déjà été présentés au Cabinet des Ministres, a fait savoir la délégation.
Les instruments internationaux en matière d’asile ratifiés par les Seychelles n’ont pas encore été intégrés au droit national, mais des consultations à cette fin ont été initiées, a d’autre part indiqué la délégation. Le pays a reçu six demandes d’asile en 2024 : quatre ont été rejetées et deux personnes ont pu obtenir un permis de travail et rester aux Seychelles, a-t-il été précisé.
Dans le système seychellois, c’est le Département de l’emploi qui publie les offres de travail et le Département des migrations qui délivre les permis nécessaires, y compris aux proches des travailleurs, le cas échéant, a expliqué la délégation.
Quelque 22 079 personnes sont titulaires d’un permis de travail aux Seychelles en 2024 ; 254 travailleurs migrants sont employés comme domestiques et 8078 dans le secteur du bâtiment, a-t-il été précisé par la suite.
La lutte contre la traite des êtres humains aux Seychelles est axée sur quatre principes, a par ailleurs indiqué la délégation : prévention, poursuites, protection et partenariats. Les peines pour ce crime peuvent atteindre 14 ans d’emprisonnement, voire 25 ans en cas de traite d’un enfant, a-t-il été précisé. Les victimes de traite ne sont pas poursuivies et sont prises charge par les autorités, a-t-elle en outre souligné. La loi sur la traite des personnes sera révisée pour tenir compte des réalités du terrain et pour créer un fonds de compensation pour les victimes, a ajouté la délégation.
Les autorités seychelloises ont aidé le Sénégal à élaborer une note conceptuelle relative à la lutte contre la traite des êtres humains, a par la suite souligné la délégation.
La délégation a souligné que le Gouvernement avait intensifié, en 2020, ses efforts de lutte contre la traite des personnes. En 2023, les autorités ont édicté un protocole d’identification et de prise en charge des victimes. En outre, les contrôles aux frontières ont été intensifiés. Toutes les victimes sont impliquées de manière active dans les procédures les concernant, a ajouté la délégation.
La Commission seychelloise des droits de l’homme, créée en 2009, existe parallèlement à l’ancien Médiateur instauré par la Constitution, a d’autre part expliqué la délégation. Le mandat de la Commission a été renforcé en 2018 ; il couvre désormais treize thèmes, notamment le contrôle du respect des droits de l’homme dans les textes juridiques, a-t-il été précisé. Le Médiateur est, lui, plutôt chargé de venir en aide dans leurs démarches judiciaires aux personnes victimes de violations des droits de l’homme.
Les Seychelles sont les premières concernées par les effets des changements climatiques, les habitations et les entreprises étant installées sur le littoral et confrontées directement à la montée des eaux, aux épisodes de sécheresse et aux événements météorologiques extrêmes, a d’autre part rappelé la délégation, soulignant que le tourisme et l’exploitation des ressources halieutiques sont également menacés. Des mesures ont été prises pour mieux protéger les employés du secteur du bâtiment, très exposés aux chaleurs extrêmes, a-t-elle par ailleurs fait valoir. Le Plan d’urgence national contient des mesures pour venir en aide aux travailleurs confrontés aux catastrophes naturelles ou d’origine humaine, a ajouté la délégation.
La délégation a par ailleurs souligné que l’élaboration du présent rapport s’était faite en partenariat ou en consultation avec la Commission nationale des droits de l’homme, des organisations de la société civile, des syndicats et des représentants d’employeurs.
Une analyse est en cours concernant les lacunes qui empêchent encore les Seychelles d’intégrer à la loi les dispositions des conventions n°97 et n°143 de l’OIT, avant la ratification de ces deux instruments, a fait savoir indiqué la délégation.
Les Seychelles n’ont pas été en mesure d’accepter la compétence du Comité de recevoir des communications, a par ailleurs précisé la délégation.
Toutes les personnes originaires de Chagos autrefois déplacées vers les Seychelles ont obtenu automatiquement la nationalité seychelloise, a d’autre part indiqué la délégation.
La délégation a aussi fait état des mesures prises pour remédier au problème de la toxicodépendance et prendre en charge les personnes concernées, y compris lorsqu’il s’agit de travailleurs migrants.
Remarques de conclusion
M. CORZO SOSA a remercié la délégation d’avoir su montrer au Comité comment les Seychelles fonctionnent, ce qui s’y passe bien et ce qu’il faut améliorer. Il a salué l’importance accordée par les Seychelles au fait de traiter les migrants comme des êtres humains.
MME FRANCOURT a insisté sur l’équilibre durable que le Gouvernement seychellois entend instaurer entre les migrants et les citoyens, étant donné les ressources limitées du pays. Les Seychelles sont conscientes de leur dépendance à l'égard des travailleurs migrants pour combler les pénuries de main-d'œuvre, la vision du pays étant d'avoir un peuple seychellois plus autonome et plus résilient qui participe activement au développement national, a expliqué la Ministre. Dans le même temps, a-t-elle ajouté, le pays s’adapte aux circonstances émergentes dues à la migration, dans le but de répondre aux besoins fondamentaux des travailleurs migrants.
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