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Examen de l’Estonie devant le CEDAW : la protection contre la discrimination fondée sur le sexe est assurée dans le pays, mais des stéréotypes de genre y persistent et l'inégalité au détriment des femmes n'a pas été surmontée dans plusieurs domaines, est-il relevé

Compte rendu de séance

 

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes (CEDAW, selon l’acronyme en anglais) a examiné, aujourd'hui, le rapport présenté par l’Estonie sur les mesures prises par le pays pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Au cours du dialogue noué entre les membres du Comité et la délégation estonienne venue soutenir ce rapport, a notamment été jugée louable la position claire et ferme de l'Estonie concernant l'agression de la Fédération de Russie contre l'Ukraine, de même que la protection et l'intégration en Estonie des femmes et des enfants ukrainiens ayant souffert de la guerre.

Une experte a constaté avec satisfaction que la protection contre la discrimination fondée sur le sexe ou le genre était assurée en Estonie dans le contexte de l'emploi et dans tous les autres domaines. Toutefois, la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, l'âge, le handicap ou l'orientation sexuelle n'est interdite que dans le contexte de l'emploi et de la formation professionnelle, a-t-elle fait remarquer.

Au cours des dernières années, des progrès ont été réalisés en Estonie grâce à des modifications de la législation, s’agissant notamment de la loi sur l'égalité des chances, de la loi sur l'aide aux victimes, du Code pénal, des amendements à la législation du travail et des dispositions sur le congé parental, a poursuivi cette experte. Cependant, l’application concrète de la législation montre que l'inégalité au détriment des femmes n'a pas été surmontée dans plusieurs domaines, a-t-elle constaté. Ainsi, la discrimination des femmes liée à la grossesse et à la garde d'enfants reste un problème en pratique, tandis que la protection intégrale contre la violence liée au sexe nécessite encore des réformes juridiques et politiques.

L’experte a recommandé que les politiques et le cadre institutionnel relatifs à la promotion de l'égalité des sexes et à la sauvegarde des droits des femmes soient renforcés et mieux coordonnés.

Une experte a fait part de la préoccupation du Comité devant la persistance en Estonie des stéréotypes de genre, des messages patriarcaux et sexistes, et de la référence aux rôles et valeurs de genre qui désavantagent les femmes.

Tout en saluant le fait que l’Estonie soit le seul pays ayant une femme Présidente et une femme Première Ministre, une autre experte a fait remarquer que les hommes représentent encore la majorité des membres des conseils des collectivités locales et des postes élus. Une experte a en outre fait état de nombreux discours de haine envers les femmes engagées en politique en Estonie.

Il a par ailleurs été regretté que la loi estonienne limite l'accès des victimes de viol à la justice et aux réparations. Nombre de viols ne sont pas dénoncés à la justice et les survivantes qui s'adressent à la police sont souvent confrontées à des lacunes dans la procédure, a-t-il été observé.

Nombre d’apatrides vivant en Estonie étaient des citoyens de l’ancienne URSS et sont mal intégrés dans la société estonienne, a fait remarquer une experte. Elle s’est enquise des mesures prises, au profit des femmes et des filles, pour prévenir l'apatridie à la naissance.

Présentant le rapport de son pays, Mme Ulla Saar, Secrétaire générale adjointe au travail auprès du Ministère des affaires économiques et des communications de l’Estonie, a indiqué que la Direction des politiques en faveur de l'égalité avait été intégré au Ministère des affaires économiques et que la ratification par l'Estonie du Protocole facultatif à la Convention [qui institue une procédure de plainte individuelle devant le Comité], actuellement en phase préparatoire, pourrait avoir lieu au premier semestre 2025.

Mme Saar a ensuite indiqué que, depuis 2016, la politique estonienne en matière d'égalité entre les femmes et les hommes était mise en œuvre dans le cadre du Plan de développement en matière de protection sociale. Le Plan adopté à cet égard en 2023 cherche à atteindre l'égalité des sexes en renforçant l'égalité économique, en augmentant la participation des femmes aux processus décisionnels, en transformant les attitudes sociétales et en renforçant les capacités institutionnelles, a-t-elle précisé.

La Loi sur l'égalité des genres étant entrée en vigueur il y a vingt ans, un projet de loi est en cours de préparation pour fusionner cette Loi avec la Loi sur l'égalité de traitement, a poursuivi Mme Saar. Le nouveau texte élargira notamment la protection et les motifs de protection, de même que les compétences de la Commissaire à l'égalité des sexes et à l’égalité de traitement, a-t-elle précisé.

En 2022, a ajouté Mme Saar, des amendements à la Loi sur le droit de la famille ont relevé l'âge minimum du mariage de 15 à 18 ans, et, depuis 2024, le mariage est célébré entre deux personnes quel que soit leur sexe.

En matière de lutte contre la violence fondée sur le sexe, quatre ministres ont signé en 2023 l'accord de prévention de la violence domestique 2024-2027 qui définit deux objectifs principaux : la reconnaissance et la condamnation de la violence domestique, et la fourniture d'une assistance systématique adaptée aux besoins des personnes touchées. De plus, en 2023, la nouvelle Loi sur l'aide aux victimes est entrée en vigueur, élargissant la gamme des services d'aide aux victimes et le champ des récipiendaires. L’Estonie s'oriente vers l'introduction d'une définition du viol et de la violence sexuelle fondée sur le consentement, a ajouté Mme Saar.

Mme Saar a mentionné d’autres mesures ayant pour objectif de diminuer les stéréotypes de genre et de favoriser l'équilibre entre les sexes dans les secteurs marqués par une ségrégation notable, tels que les sciences et les technologies, ainsi que l'éducation, la santé et le bien-être.

Enfin, Mme Saar a évoqué les efforts de son pays pour apporter un soutien à l'Ukraine et a souligné que les Ukrainiens et les membres de leur famille se sont vu accorder une protection temporaire en Estonie : ils ont le droit de recevoir des allocations de subsistance, des allocations familiales, des prestations sociales, et ils bénéficient de l'accès aux services et au soutien du marché du travail, au même titre que les autres personnes vivant en Estonie. L'Estonie accueille à l’heure actuelle près de quarante mille réfugiés de guerre ukrainiens, tous sous protection temporaire avec des permis de résidence temporaire, dont environ 70% sont des femmes, a précisé Mme Saar.

La délégation estonienne était également composée, entre autres, de Mme Riia Salsa-Audiffren, Représentante permanente de l’Estonie auprès des Nations Unies, ainsi que de représentants du Ministère des affaires économiques et des communications, du Ministère des affaires sociales, du Ministère de l’éducation et de la recherche, et du Ministère de la justice, et d’une conseillère auprès de la Commissaire à l'égalité des sexes et à l’égalité de traitement.

Durant le dialogue, la délégation a notamment indiqué que le Gouvernement allait augmenter le budget de la Commissaire à l'égalité des sexes et à l'égalité de traitement et élargir son mandat afin qu’elle puisse agir en justice au nom des victimes de discrimination. La délégation a en outre expliqué que deux initiatives législatives en cours visaient à appliquer les directives européennes en matière de participation des femmes dans les conseils d’administration des grandes entreprises et des entreprises publiques. Le Gouvernement est en train de faire adopter un projet de loi introduisant la notion de consentement dans la définition du crime de viol, a d’autre part souligné la délégation. 

Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport de l’Estonie et les rendra publiques à l’issue de sa session, le 31 mai prochain.

 

Lundi prochain, 20 mai, à partir de 15 heures, le Comité auditionnera les organisations de la société civile des quatre pays sont les rapports seront examinés la semaine prochaine : Koweït, Malaisie, Brésil et Rwanda.

 

Examen du rapport

Le Comité est saisi du septième rapport périodique de l’Estonie (CEDAW/C/EST/7), rapport établi sur la base d’une points à traiter qui avait été soumise par le Comité.

Présentation

Présentant le rapport de son pays, MME ULLA SAAR, Secrétaire générale adjointe au travail auprès du Ministère des affaires économiques et des communications de l’Estonie, a d’abord précisé que la Direction des politiques en faveur de l'égalité avait été intégré au Ministère des affaires économiques dans le cadre d’une réforme gouvernementale de l'été dernier ; et que la ratification par l'Estonie du Protocole facultatif à la Convention, actuellement en phase préparatoire, pourrait avoir lieu au premier semestre 2025.

Mme Saar a ensuite indiqué que, depuis 2016, la politique estonienne en matière d'égalité entre les femmes et les hommes était mise en œuvre dans le cadre du Plan de développement en matière de protection sociale. Le Plan adopté à cet égard en 2023 cherche à atteindre l'égalité des sexes en renforçant l'égalité économique, en augmentant la participation des femmes aux processus décisionnels, en transformant les attitudes sociétales et en renforçant les capacités institutionnelles, a-t-elle précisé.

La Loi sur l'égalité des genres étant entrée en vigueur il y a vingt ans, un projet de loi est en cours de préparation pour fusionner cette Loi avec la Loi sur l'égalité de traitement, a poursuivi Mme Saar. Le nouveau texte élargira notamment la protection et les motifs de protection, de même que les compétences de la Commissaire à l'égalité des sexes et à l’égalité de traitement.

D’autres changements réglementaires importants ont eu lieu au cours de la période couverte par le rapport, a ajouté Mme Saar. Ainsi, en 2022, des amendements à la Loi sur le droit de la famille ont relevé l'âge minimum du mariage de 15 à 18 ans, et, depuis 2024, le mariage est célébré entre deux personnes quel que soit leur sexe. Dans le même temps, plusieurs changements ont été apportés au système de congé parental afin de le rendre plus flexible, un congé paternité de trente jours ayant aussi été introduit. Le Gouvernement a aussi pour priorité de combler le déficit en matière de garde d'enfants, a précisé Mme Saar.

En matière de lutte contre la violence fondée sur le sexe, quatre ministres ont signé en 2023 l'accord de prévention de la violence domestique 2024-2027, a poursuivi Mme Saar. L'accord définit deux objectifs principaux : la reconnaissance et la condamnation de la violence domestique, et la fourniture d'une assistance systématique adaptée aux besoins des personnes touchées par cette violence. De plus, en 2023, la nouvelle Loi sur l'aide aux victimes est entrée en vigueur, élargissant la gamme des services d'aide aux victimes et le champ des récipiendaires.

En mars dernier, le Gouvernement a décidé que les crimes contre l'autodétermination sexuelle, y compris le viol, devraient correspondre aux normes de la Convention d'Istanbul du Conseil de l'Europe : l’Estonie s'oriente ainsi vers l'introduction d'une définition du viol et de la violence sexuelle fondée sur le consentement, a souligné Mme Saar.

En ce qui concerne l’emploi, Mme Saar a indiqué qu’en 2023, l'écart de rémunération entre les hommes et les femmes avait atteint un niveau historiquement bas de 13,1%, soit une diminution de plus de dix points de pourcentage par rapport à la dernière décennie. Dans le même temps, l'écart entre les sexes dans le domaine de l’emploi est très faible, puisqu'il s'élève à 1,5% en 2023, a ajouté Mme Saar. Elle a décrit les mesures prises pour remédier à l'écart de rémunération entre les sexes, citant notamment la transposition en cours de la directive européenne sur la transparence des rémunérations.

Mme Saar a mentionné d’autres mesures ayant pour objectif de diminuer les stéréotypes de genre et de favoriser l'équilibre entre les sexes dans les secteurs marqués par une ségrégation notable, tels que les sciences et les technologies, ainsi que l'éducation, la santé et le bien-être.

Enfin, Mme Saar a évoqué les efforts de son pays pour apporter un soutien à l'Ukraine, y compris une aide humanitaire et des efforts de reconstruction de jardins d'enfants et de maisons familiales pour les jeunes orphelins. Les Ukrainiens et les membres de leur famille se sont vu accorder une protection temporaire en Estonie : ils ont le droit de recevoir des allocations de subsistance, des allocations familiales, des prestations sociales, et ils bénéficient de l'accès aux services et au soutien du marché du travail, au même titre que les autres personnes vivant en Estonie. L'Estonie accueille à l’heure actuelle près de quarante mille réfugiés de guerre ukrainiens, tous sous protection temporaire avec des permis de résidence temporaire, dont environ 70% sont des femmes, a précisé Mme Saar.

Questions et observations des membres du Comité

Une experte membre du Comité a constaté avec satisfaction que la protection contre la discrimination fondée sur le sexe ou le genre était assurée en Estonie dans le contexte de l'emploi et dans tous les autres domaines, et que cette protection englobait explicitement la discrimination d'une personne en rapport avec la grossesse et l'accouchement, la parentalité et l’accomplissement des tâches familiales. Toutefois, la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, l'âge, le handicap ou l'orientation sexuelle n'est interdite que dans le contexte de l'emploi et de la formation professionnelle, a fait remarquer cette experte.

Des progrès ont été réalisés grâce à des modifications de la législation au cours des dernières années, s’agissant notamment de la loi sur l'égalité des chances, de la loi sur l'aide aux victimes, du Code pénal, des amendements à la législation du travail et des dispositions sur le congé parental, a poursuivi l’experte. Cependant, l’application concrète de la législation montre que l'inégalité au détriment des femmes n'a pas été surmontée dans plusieurs domaines, a-t-elle constaté. Ainsi, la discrimination des femmes liée à la grossesse et à la garde d'enfants reste un problème en pratique, tandis que la protection intégrale contre la violence liée au sexe nécessite encore des réformes juridiques et politiques.

L’experte a recommandé que les politiques et le cadre institutionnel relatifs à la promotion de l'égalité des sexes et à la sauvegarde des droits des femmes soient renforcés et mieux coordonnés.

Des domaines importants restent sous-financés, notamment la protection contre la violence fondée sur le sexe, l'aide juridique pour les femmes – en particulier les femmes rurales – , ainsi que le travail important des organisations non gouvernementales (ONG) féminines pour l'autonomisation des femmes. La sensibilisation à la Convention et aux observations générales du Comité fait défaut, a ajouté l’experte, qui a aussi regretté que la Convention ne soit pas invoquée par les tribunaux en Estonie.

L’experte a demandé ce qui était fait pour que les femmes victimes de discrimination aient un accès effectif à la justice et à la réparation. Elle a aussi voulu savoir si les magistrats et les membres des forces de l’ordre étaient formés à la manière d’appliquer concrètement les dispositions de la Convention ainsi que du Protocole facultatif qui est en voie de ratification.

L’experte a par ailleurs jugé louable la position claire et ferme de l'Estonie concernant l'agression de la Fédération de Russie contre l'Ukraine, de même que la protection et l'intégration en Estonie des femmes et des enfants ukrainiens ayant souffert de la guerre.

Une autre experte a regretté que le projet de loi présenté en 2017 visant à accroître la représentation des femmes dans les conseils d'administration des entreprises d'État n’ait pas reçu de soutien. Elle a salué le fait que l’Estonie soit le seul pays ayant une femme Présidente et une femme Première Ministre, mais a fait remarquer que les hommes représentent encore la majorité des membres des conseils des collectivités locales et des postes élus.

Une experte s’est interrogée sur la participation concrète des femmes à l’élaboration des politiques publiques et a demandé comment l’État évaluait l’efficacité de son action en matière d’égalité des sexes.

Une experte a fait part de la préoccupation du Comité devant la persistance en Estonie des stéréotypes de genre, des messages patriarcaux et sexistes, et de la référence aux rôles et valeurs de genre qui désavantagent les femmes.

La même experte a d’autre part regretté que la loi estonienne limite l'accès des victimes de viol à la justice et aux réparations. Nombre de viols ne sont pas dénoncés à la justice et les survivantes qui s'adressent à la police sont souvent confrontées à des lacunes dans la procédure, a-t-elle indiqué.

L’experte a par ailleurs voulu savoir ce qui était fait pour durcir les politiques pénales contre le féminicide, dans un contexte où l’on avait recensé quatorze cas en 2020, contre sept en 2019. Elle a aussi demandé quel était le protocole de collecte de données sur la violence domestique, et pourquoi les ordonnances de restriction ou d'interdiction étaient si peu souvent prononcées.

Un expert a salué le fait que les victimes et victimes présumées de traite des êtres humains bénéficient de services de l’État, mais a fait état de problèmes d'accessibilité aux lignes téléphoniques d'urgence et aux refuges pour les femmes migrantes victimes de la traite. De plus, les ONG spécialisées dans la réhabilitation des victimes ne reçoivent pas de soutien financier adéquat, a ajouté l’expert.

Une experte a demandé si le Gouvernement estonien prenait des mesures pour remédier à la diminution signalée dans la représentation des femmes aux postes de décision, en particulier au sein du Parlement estonien. Elle a en outre fait état de nombreux discours de haine envers les femmes engagées en politique en Estonie.

Nombre d’apatrides vivant en Estonie étaient des citoyens de l’ancienne URSS et sont mal intégrés dans la société estonienne, a fait remarquer une experte. Elle s’est enquise des mesures prises, au profit des femmes et des filles, pour prévenir l'apatridie à la naissance. La même experte a par ailleurs prié la délégation de dire ce qui était fait pour intégrer les femmes ukrainiennes dans le marché du travail, l'éducation et la formation professionnelle.

Une experte a fait état d’une stagnation de la participation des écolières dans les branches scientifiques et techniques.

A par ailleurs été relevé un important écart dans le montant des pensions de retraite au détriment des femmes.

Une experte a estimé préoccupante la question des écarts salariaux, qui atteignent 13,4% en Estonie en 2023, voire davantage selon les secteurs. De plus, l’accès des femmes aux positions managériales de manière générale connaît une évolution négative préoccupante, la part des femmes y étant passée de 40% à 37,7% en 2023. L’experte a recommandé que les systèmes s’adaptent aux femmes s’agissant des questions relatives au travail, et non l’inverse. Elle a aussi voulu savoir comment l’Estonie organisait le retour en emploi des personnes ayant pris des congés parentaux.

L’experte a par ailleurs jugé remarquable ce que l’Estonie avait fait pour l’intégration des réfugiées ukrainiennes dans le marché du travail.

Une autre experte s’est enquise des mesures prises en Estonie pour sensibiliser les adolescentes et les jeunes à leurs droits en matière de santé sexuelle et procréative.

Une experte a fait remarquer que, faute d’établissements disponibles, les femmes en Estonie ne pouvaient pas bénéficier du régime qui permet aux personnes condamnées à la détention de purger une partie de leur peine dans des prisons ouvertes.

Une experte a demandé pourquoi les victimes de violences sexuelles ne bénéficiaient pas d’une aide juridictionnelle gratuite face à leurs agresseurs, et si les juges étaient formés à la manière de prendre en charge les victimes de violence domestique.

Réponses de la délégation

La délégation a d’abord indiqué que le Gouvernement de coalition s’était engagé à renforcer et à harmoniser la législation sur l’égalité entre les sexes, à supprimer les obstacles à cet égard, à assurer l’égalité des chances dans l’accès aux biens et aux services, et à permettre à toutes et à tous de participer à la vie sociale.

La délégation a souligné que la discrimination en fonction du genre était interdite dans tous les domaines de la vie.

La Convention est la base de la planification stratégique estonienne en matière de lutte la discrimination à l’égard des femmes, a-t-il été précisé. Le Protocole facultatif a déjà été traduit en estonien et une nouvelle traduction de la Convention elle-même est à l’étude, a ajouté la délégation.

La délégation a ensuite indiqué que le Gouvernement allait augmenter le budget de la Commissaire à l'égalité des sexes et à l'égalité de traitement et élargir son mandat afin qu’elle puisse agir en justice au nom des victimes de discrimination.

Le budget de la Direction des politiques en faveur de l’égalité est de 2,3 millions d’euros en 2024, a-t-il été indiqué. La délégation a précisé que le transfert de cette Direction au Ministère des affaires économiques n’avait pas suscité de perturbation dans son fonctionnement, les services concernés étant situés dans le même bâtiment.

La délégation a ensuite fait état d’une bonne coopération entre les Gouvernement et les organisations de la société civile qui défendent les droits des femmes, dans le cadre d’un partenariat stratégique institué en 2019, reconduit en 2022 et prévoyant, en particulier, des financements sur trois ans à l’intention des ONG. Pour garantir leur indépendance envers le Gouvernement, les ONG peuvent obtenir des financements d’autres sources, y compris des fonds européens, a-t-il été précisé.

La délégation a aussi fourni des explications concernant le système d’aide juridictionnelle gratuite en Estonie, indiquant en particulier que 40% des demandes en la matière portent sur des affaires familiales.

Les autorités organisent, à l’intention des fonctionnaires concernés, des cours portant sur la transversalisation des questions de genre, chaque ministère étant tenu de produire des rapports à ce sujet, a ensuite indiqué la délégation. S’agissant de l’évaluation des programmes, elle a précisé que le Gouvernement assurait un suivi de leur efficacité sur la base des résultats d’enquêtes menées auprès de la population sur des sujets tels que la perception des stéréotypes sexistes ou encore des écarts salariaux entre hommes et femmes.

La population partage, de manière générale, le sentiment que les femmes doivent participer davantage à la vie politique, a dit la délégation ; mais il est vrai que la question de l’introduction de quotas n’a pas été abordée publiquement, l’initiative dans ce domaine revenant aux partis politiques, a-t-elle ajouté. Certains partis se sont ainsi dotés de « listes zébrées » favorisant la participation égalitaire des femmes, a-t-elle souligné. Parallèlement, le Gouvernement diffuse des conseils pour encourager la participation des femmes à la vie politique.

S’agissant de la participation des femmes, la délégation a notamment précisé que les autorités visaient à parvenir à la parité entre les sexes dans les conseils d’administration des entreprises publiques. Quelque 63% des diplomates estoniens sont des femmes. Il est vrai que la part des femmes ambassadrices a reculé depuis quelques années, mais la parité entre les sexes règne désormais dans les postes de direction au siège du Ministère, a indiqué la délégation.

La délégation a expliqué par la suite que deux initiatives législatives en cours visaient à appliquer les directives européennes en matière de participation des femmes dans les conseils d’administration des grandes entreprises et des entreprises publiques. Le Gouvernement a lancé, par ailleurs, un programme de renforcement de la formation des plus de 140 conseillers et conseillères en matière de carrière en Estonie, afin qu’ils soient davantage sensibilisés aux questions relatives à la participation des femmes.

L’Estonie a aussi pour priorité d’augmenter le nombre de femmes et de filles dans les technologies de l’information et des télécommunications, a indiqué la délégation. Le nombre de femmes ayant obtenu un master dans ce domaine a beaucoup augmenté ces dernières années, a-t-elle fait valoir.

L’écart salarial entre les sexes en Estonie se réduit chaque année, a par ailleurs souligné la délégation. Des mesures ont été prises pour remédier aux causes de ce problème, de même que pour combler le déficit de présence des femmes dans les postes à responsabilités.

L’Estonie a entamé le processus de ratification de la Convention (n°190) de l’Organisation internationale du Travail concernant l’élimination de la violence et du harcèlement dans le monde du travail, a-t-il été indiqué en réponse à une autre question.

L’écart entre les sexes dans les pensions de retraite est faible, a assuré la délégation. Cependant, compte tenu de l’écart salarial actuel, la situation devrait se détériorer à l’avenir, a-t-elle reconnu : aussi le Gouvernement prend-il des mesures pour réduire cet écart, a souligné la délégation. Les femmes retraitées qui vivent seules bénéficient de prestations complémentaires pour parer au risque de pauvreté, a-t-elle en outre fait valoir.

Le Gouvernement veille à ce que les personnes qui reprennent leur emploi après un congé parental bénéficient des mêmes droits que leurs collègues, y compris s’agissant des promotions, a d’autre part souligné la délégation.

Le Gouvernement est en train de faire adopter un projet de loi introduisant la notion de consentement dans la définition du crime de viol, a poursuivi la délégation. Elle a fait état, en Estonie, d’une volonté politique forte non seulement d’aligner le Code pénal sur les dispositions de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul) relatives au viol, mais aussi de faire évoluer la perception de ce problème dans le système de justice lui-même.

La délégation a également mentionné la préparation en cours, avec la participation de médecins, d’un projet de loi destiné à améliorer encore la qualité des services offerts aux victimes de violence sexuelle.

Le Ministère de l’éducation et la Police sont, d’autre part, très impliqués dans la formulation du plan d’action national contre la violence familiale, lequel a pour but, entre autres, de modifier les perceptions selon lesquelles les victimes seraient en quelque sorte responsables de ce qui leur arrive, a indiqué la délégation.

Une femme a été assassinée en 2023 pour un motif lié au féminicide, a précisé la délégation.

Une étude récente a montré que plus de 82% de la population sait quels services sont offerts aux victimes de violence conjugale ou sexuelle, ce qui signale un changement positif de mentalité, a ajouté la délégation.

La délégation a ensuite indiqué que la police et des ONG faisaient partie du réseau mis en place par l’État pour venir en aide aux victimes de la traite des êtres humains. Elle a affirmé que les services d’aide étaient très faciles d’accès et a souligné que les services concernés allaient au contact des victimes potentielles pour les informer des choix qui leur étaient offerts. En 2023, a précisé la délégation, 84 cas de traite ont été enregistrés, les actes relevant du proxénétisme et de l’exploitation au travail étant aussi assimilés à la traite. Toute victime de traite en Estonie a le droit de rester dans le pays et d’obtenir réparation, a-t-il été souligné.

La délégation a d’autre part mentionné le recrutement de plusieurs femmes ukrainiennes chargées d’aider leurs compatriotes à s’intégrer dans le marché estonien du travail – sachant que plus de la moitié des réfugiés venus d’Ukraine travaillent déjà [en Estonie], a-t-il été précisé. Des programmes ont été lancés pour renforcer les compétences professionnelles des femmes ukrainiennes afin qu’elles puissent exercer leur profession en Estonie, dans le domaine médical en particulier.

L’Estonie considère que toutes les personnes ont le droit de choisir librement leur nationalité. Elle encourage les personnes apatrides à choisir la nationalité de l’Estonie ou celle d’un autre pays. Les résidents permanents en Estonie ont accès à tous les services publics, a précisé la délégation.

La délégation a donné d’autres renseignements sur la lutte contre les stéréotypes sexistes à l’école et dans les manuels scolaires, de même que sur le contenu du programme d’ éducation sexuelle enseigné dans les écoles, insistant en particulier sur le fait que ce programme portait aussi sur les grands enjeux de l’égalité entre les sexes.

En Estonie, la santé est l’un des seuls domaines dans lesquels les statistiques sont meilleures pour les femmes que pour les hommes, a par ailleurs indiqué la délégation. Des mesures ont notamment été adoptées pour assurer la gratuité du vaccin contre le papillomavirus et pour améliorer le dépistage du cancer du sein et du cancer du col de l’utérus, a-t-elle ajouté. L’assurance maladie ne couvre pas les accouchements à domicile étant donné les risques associés à cette pratique, a par ailleurs fait savoir la délégation en réponse à la question d’une experte.

La délégation a répondu à d’autres questions des expertes du Comité relatives à la disponibilité des services de garde de jeunes enfants, de même qu’à la prévention de l’exploitation sexuelle des jeunes filles dans le monde du sport.

 

 

 

 

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