Fil d'Ariane
Premier examen d’un rapport du Bénin devant le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale
Les questions relatives à la définition de la discrimination, à la traite transatlantique des esclaves et à la restitution des objets pillés par les anciens colonisateurs ont figuré en bonne place des sujets abordés lors de l’examen, hier après-midi et ce matin, du premier rapport présenté par le Bénin devant le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale. Plusieurs interrogations ont également été soulevées au sujet des droits des non-nationaux.
Au cours du débat, il a été relevé à plusieurs reprises que la définition de la discrimination donnée par la Constitution du Bénin n’était pas conforme à celle énoncée dans la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Un membre du Comité s’est enquis des mesures envisagées pour introduire dans la législation béninoise une définition de la discrimination raciale conforme aux articles premier, 2 et 4 de la Convention, incluant notamment les notions de discrimination directe et indirecte. Les dispositions constitutionnelles devraient contenir tous les motifs d’interdiction de la discrimination énumérés à l’article premier de la Convention, a insisté une experte. La définition de la discrimination sera réexaminée pour assurer qu’elle soit conforme à la Convention, a déclaré la délégation béninoise en réponse à ces préoccupations.
Un membre du Comité a voulu savoir comment l’esclavage, du point de vue béninois, était inscrit dans les programmes d’enseignement et ce qui était fait pour assurer le devoir de mémoire et la réconciliation. Il a par ailleurs demandé si des travaux étaient menés pour établir les responsabilités des rois locaux dans la traite des esclaves. Une experte a voulu savoir si les enfants étaient informés de ces questions et notamment des responsabilités respectives des Occidentaux et du Bénin ; elle a dit avoir constaté, sur place, une certaine colère contre les anciens rois. Cette experte a par ailleurs ajouté que demander des réparations n’était pas synonyme de mendicité.
Une autre experte a en outre demandé ce qui était fait pour réintégrer au contexte béninois actuel les œuvres pillées par les anciens colonisateurs et qui font actuellement l’objet de restitutions.
Un membre du Comité s’est enquis du droit des non-nationaux de créer des associations ou des syndicats et de s’y affilier, et d’accéder aux soins de santé. Selon certaines informations, a par ailleurs regretté une experte, les non-nationaux placés en quarantaine pendant la pandémie de COVID-19 ont dû régler eux-mêmes les frais liés à cette situation, alors que ces frais ont été pris en charge par l’État pour ce qui concerne les ressortissants béninois. Il a par ailleurs été demandé comment le Bénin protégeait les métis, les non-nationaux, les migrants et les apatrides contre les manifestation de haine xénophobe.
La délégation béninoise a fait savoir que le Gouvernement était en train de dresser un inventaire de tous les trésors nationaux pillés pendant la colonisation et qui se trouvent à l’étranger. Des demandes de restitution seront envoyées quand cet inventaire sera assez complet, sachant que le seul musée du quai Branly, à Paris, contient quelque trois mille objets intéressant le Bénin. La délégation a salué les restitutions déjà opérées par la France depuis 2021, avec un premier lot de vingt-six objets. Ces derniers ont été immédiatement inscrits au patrimoine national, conformément à la loi sur le patrimoine votée en octobre dernier. Une volonté politique très forte préside, au Bénin, à la question du retour des biens culturels, a souligné la délégation. La population est sensibilisée à l’importance de ces restitutions, qui sont envisagées comme un moyen de cimenter l’unité nationale.
Sur la question de l’esclavage, le Bénin a une vision très claire : le pays n’est pas demandeur de réparations systématiques. Pour le Bénin, l’important est que le phénomène ne se reproduise pas : il entretient donc la mémoire de la tragédie, qui a impliqué des habitants de la région et des étrangers. Un musée et un jardin du souvenir seront ouverts à Ouidah pour permettre aux gens de toucher au plus près la réalité de la traite.
Présentant le rapport de son pays, M. Séverin Maxime Quenum, Garde des Sceaux, Ministre de la justice et de la législation du Bénin, a assuré que son pays avait fait de la lutte contre toutes les formes de discrimination l'une de ses priorités. Ainsi, la « charte des partis politiques » adoptée en 2018 fait-elle obligation à tous les partis de proscrire dans leurs programmes et dans leurs activités l'intolérance, le régionalisme, l'ethnocentrisme, le fanatisme, le racisme, la xénophobie, l'incitation et/ou le recours à la violence sous toutes ses formes.
Le Ministre a aussi indiqué que, selon la Constitution béninoise, « l’État assure à tous l'égalité devant la loi, sans distinction d'origine, de race, de sexe, de religion, d'opinion politique ou de position sociale (…) » et « les étrangers bénéficient sur le territoire de la République du Bénin des mêmes droits et libertés que les citoyens béninois et ce, dans les conditions déterminées par la loi ».
Pendant le débat, la délégation a précisé que les mesures de quarantaine prises pendant la COVID-19 visaient toutes les personnes arrivant de l’étranger et testées positives à l’aéroport, sans discrimination. Aucun étranger n’a été victime, en tant que tel, de discrimination dans le cadre de ces mesures générales, a-t-elle insisté.
Outre M. Quenum, la délégation béninoise était notamment composée de M. Angelo Dan, Représentant permanent adjoint du Bénin auprès des Nations Unies à Genève (et représentant du pays auprès du Conseil des droits de l’homme), ainsi que de plusieurs autres représentants des Ministères des affaires étrangères et de la coopération ; de la justice et de la législation ; et de l’intérieur et de la sécurité publique.
Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport du Bénin et les publiera à l’issue de sa session, le 30 août prochain.
Cet après-midi à 15 heures, le Comité entamera l’examen du rapport du Nicaragua.
Examen du rapport
Le Comité était saisi du document valant premier à neuvième rapports périodiques du Bénin (CERD/C/BEN/1-9).
Présentation
M. SÉVERIN MAXIME QUENUM, Garde des Sceaux, Ministre de la justice et de la législation du Bénin, a précisé que le présent rapport couvrait la période allant de 2002 à 2015 et qu’il avait été élaboré suivant une approche inclusive et participative, conformément à la méthodologie recommandée par le Comité. En effet, les structures gouvernementales, l’institution nationale des droits de l’homme et les organisations de la société civile ont été intimement associées à chaque phase de son élaboration.
Après avoir brièvement présenté son pays, M. Quenum a assuré que le Bénin avait fait de la lutte contre toutes les formes de discrimination l'une de ses priorités. Ainsi, la « charte des partis politiques » adoptée en 2018 fait obligation à tous les partis de proscrire dans leurs programmes et dans leurs activités l'intolérance, le régionalisme, l'ethnocentrisme, le fanatisme, le racisme, la xénophobie, l'incitation et/ou le recours à la violence sous toutes ses formes.
Le Ministre a ensuite indiqué que la Constitution de 1990, modifiée en 2019, déterminait le cadre de la politique béninoise en matière de lutte contre toutes les formes de discrimination. Elle dispose ainsi, en son article 26, que « l’État assure à tous l'égalité devant la loi, sans distinction d'origine, de race, de sexe, de religion, d'opinion politique ou de position sociale (…) ». La Constitution énonce aussi, en ses articles 36 et 39, que « chaque Béninois a le devoir de respecter et de considérer son semblable sans discrimination aucune (…) » et que « les étrangers bénéficient sur le territoire de la République du Bénin des mêmes droits et libertés que les citoyens béninois et ce, dans les conditions déterminées par la loi ».
En outre, des mesures législatives et réglementaires ont été prises en matière de prévention et de répression de la discrimination raciale dans plusieurs domaines, dans le prolongement de la loi de 2018 portant Code pénal en République du Bénin, qui réprime tout acte de discrimination en ses articles 704 et 705. Les réformes intervenues à ce niveau ont permis au législateur d’incriminer plus strictement la discrimination, notamment en incluant l'état de santé aux côtés des critères traditionnels tels que la race, la religion et le sexe, et surtout d’incriminer les discours de haine et l’outrage à la tribu ou à l’ethnie, a indiqué M. Quenum.
M. Quenum a aussi fait savoir que la Commission béninoise des droits de l'homme avait été opérationnalisée en 2019, qu’elle jouissait d'une autonomie de gestion administrative et financière et qu’elle avait obtenu, en 2022, le statut A pour son accréditation auprès de l’Alliance mondiale des institutions nationales de droits de l’homme (GANHRI).
S’agissant de la mise en œuvre des droits garantis par la Convention, M. Quenum a précisé que des efforts étaient faits pour rapprocher les juridictions des justiciables. Le Bénin s’est ainsi doté d’une nouvelle cartographie judiciaire avec dix-sept tribunaux fonctionnels sur 28 de prévus, a-t-il fait valoir.
Par ailleurs, le Bénin poursuit ses actions en faveur du respect des droits des travailleurs migrants. La législation béninoise accorde à cette catégorie de personnes les mêmes droits qu’aux nationaux, à l’instar du droit de pratiquer librement sa religion ou encore du droit à la propriété, a indiqué le Ministre. La législation interdit toute discrimination à l’encontre des réfugiés et des demandeurs d’asile, fondée sur la race, le genre, la religion ou la nationalité, a-t-il précisé.
M. Quenum a également fait savoir que, pendant la période couverte par le rapport, le Bénin n’avait adopté aucun texte dans le but de détruire ou de compromettre la reconnaissance, la jouissance ou l'exercice, dans des conditions de non-discrimination et d'égalité, des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni pris aucune mesure spécifique visant la protection ou la promotion d’un groupe racial ou ethnique déterminé au détriment d’un autre.
Enfin, le Bénin demeure conscient des défis qui restent encore à relever en matière de lutte contre toutes les formes de discrimination raciale, a conclu le Ministre.
Questions et observations des membres du Comité
M. BAKARI SIDIKI DIABY, rapporteur du groupe de travail chargé par le Comité d’examiner plus en détail le rapport du Bénin, a d’abord précisé que l’objectif principal de ce dialogue serait d’analyser le rapport soumis par le Bénin. Ce rapport, reçu en octobre 2020, aurait dû être présenté en 2002, a-t-il rappelé en déplorant ce retard.
M. Diaby a ensuite prié la délégation béninoise de donner des exemples d’affaires dans lesquelles les dispositions de la Convention ont été invoquées et directement appliquées par les tribunaux nationaux, ainsi que des informations sur les mesures prises pour faire mieux connaître la Convention auprès des juges, des magistrats, des forces de l’ordre, des fonctionnaires et des avocats ainsi qu’auprès de la population. M. Diaby a aussi demandé des renseignements sur les recours utiles offerts aux victimes de la discrimination, et a souhaité savoir si le Bénin envisageait de faire la déclaration prévue à l’article 14 de la Convention afin de reconnaître la compétence du Comité pour recevoir des plaintes émanant de particuliers et de représentants de la société civile.
M. Diaby a ensuite demandé des informations sur les mesures envisagées ou prises pour introduire dans la législation béninoise une définition de la discrimination raciale conforme aux articles premier, 2 et 4 de la Convention, incluant notamment les notions de discrimination directe et indirecte.
L’expert s’est enquis du nombre de plaintes déposées devant les tribunaux et la Commission béninoise des droits de l’homme pour actes de discrimination raciale ainsi que pour discours et crimes de haine raciste, y compris sur Internet et dans les médias. Qu’en est-il du nombre d’enquêtes, de poursuites et de condamnations des auteurs suite à ces plaintes, a-t-il en outre demandé ? M. Diaby s’est aussi enquis des mesures prises pour prévenir le profilage racial par des agents de police.
M. Diaby a par ailleurs souhaité savoir comment le Gouvernement entend faire en sorte que la présence au sein de la Commission béninoise des droits de l’homme de personnes désignées par le Parlement n'affecte pas l’indépendance de cette institution. Quelles sont les activités de la Commission en matière de [lutte contre la] discrimination raciale, a-t-il demandé ?
Par la suite, M. Diaby a demandé s’il était prévu de donner une suite au plan national contre le racisme et la discrimination raciale adopté en 2014. Il s’est aussi enquis du droit des non-nationaux de créer des associations ou des syndicats et de s’y affilier, et d’accéder aux soins de santé.
Le rapporteur a posé d’autres questions concernant l’acquisition de la nationalité béninoise, et a voulu savoir si un calendrier avait été prévu pour octroyer le droit à la nationalité aux femmes et aux hommes sur un pied d’égalité.
M. Diaby s’est également enquis des mesures prises pour entretenir le site de Ouidah, un village qui a été l’un des points de départ de la traite transatlantique. Il a voulu savoir comment l’esclavage, du point de vue béninois, était inscrit dans les programmes d’enseignement et ce qui était fait pour assurer le devoir de mémoire et la réconciliation. Il a par ailleurs demandé si des travaux étaient menés pour établir les responsabilités des rois locaux dans la traite des esclaves et a souhaité savoir ce qui était fait pour panser les blessures et faire en sorte pour que plus jamais une ethnie ne mette en danger une autre ethnie. La Présidente du Comité, MME VERENE SHEPHERD, a demandé si les enfants étaient informés de ces questions et notamment des responsabilités respectives des Occidentaux et du Bénin – elle a dit avoir constaté, sur place, une certaine colère contre les anciens rois. Mme Shepherd a ajouté que demander des réparations n’était pas synonyme de mendicité.
MME MAZALO TEBIE, corapporteuse du groupe de travail chargé par le Comité d’examiner plus en détail le rapport du Bénin, a prié la délégation de fournir des données actualisées et ventilées sur les personnes déplacées, réfugiées et requérantes d’asile prises en charge au Bénin. En effet, les chiffres donnés par le rapport datent de plus de cinq ans et sont donc périmés, a-t-elle relevé. Elle a par ailleurs demandé comment le Bénin protégeait les métis, les non-nationaux, les migrants et les apatrides contre les manifestation de haine xénophobe.
Les dispositions constitutionnelles devraient contenir tous les motifs d’interdiction de la discrimination énumérés à l’article premier de la Convention, a en outre recommandé Mme Tebie.
Mme Tebie a ensuite voulu savoir ce qui était fait pour réintégrer au contexte béninois actuel les œuvres pillées par les anciens colonisateurs et qui font actuellement l’objet de restitutions.
Selon des informations, a par ailleurs regretté l’experte, les non-nationaux placés en quarantaine pendant la pandémie de COVID-19 ont dû régler eux-mêmes les frais liés à cette situation, alors que ces frais ont été pris en charge par l’État pour ce qui concerne les ressortissants béninois.
Mme Tebie s’est aussi enquise de l’intégration des peuples autochtones dans les politiques publiques de développement, s’agissant en particulier de leur accès aux terres – un accès garant du maintien de leur mode de vie traditionnel.
M. GUN GUT, rapporteur chargé du suivi des observations finales du Comité, a pour sa part décrit la procédure de rapport intermédiaire en vigueur, précisant qu’elle avait pour avantage de maintenir le dialogue entre le Comité et l’État partie entre deux rapports périodiques.
D’autre experts du Comité ont demandé si les enfants des personnes apatrides et migrantes au Bénin étaient scolarisés comme les enfants béninois.
Un expert a prié la délégation de décrire la situation des personnes atteintes d’albinisme au Bénin.
Plusieurs questions ont porté sur la vie des partis politiques au Bénin, en particulier sur la fonction de « chef de l’opposition ».
La définition de la discrimination donnée par la Constitution du Bénin n’est pas conforme à celle énoncée dans la Convention, a-t-il été souligné à plusieurs reprises.
La délégation a par ailleurs été priée de dire si le Bénin organisait, dans le cadre de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine, des activités en direction des membres de la diaspora béninoise.
D’autres questions des experts ont porté sur les conditions de détention, l’éducation des filles autochtones, les programmes d’enseignement des langues nationales ou encore l’accès des non-nationaux à l’aide juridictionnelle.
Réponses de la délégation
La définition de la discrimination sera réexaminée pour assurer qu’elle soit conforme à la Convention, a déclaré la délégation.
Toutes les conventions ratifiées par le Bénin font l’objet d’enseignements et de vulgarisation à l’intention des fonctionnaires concernés. Le Ministère de la justice mène des activités de sensibilisation et organise des formations et ateliers à cette fin. L’éducation aux droits humains est gérée par un plan décennal, a indiqué la délégation.
S’agissant du système judiciaire, la délégation a expliqué que le Gouvernement béninois organisait le recrutement de nouveaux juges pour pourvoir les juridictions en effectifs suffisants. Elle a ajouté que des juridictions avaient été créées pour lutter contre le terrorisme, contre la corruption et contre la violence à l’égard des femmes.
La délégation a par ailleurs indiqué que le Bénin examinerait la question de la reconnaissance de la compétence du Comité pour recevoir et examiner des plaintes individuelles (en vertu de l’article 14 de la Convention). Plusieurs voies de recours, judiciaires et non judiciaires, sont déjà ouvertes aux citoyens, y compris pour les affaires relatives à la discrimination. Le Médiateur de la République et la Commission (nationale) des droits de l’homme font partie des voies de recours non judiciaires, a précisé la délégation.
Plusieurs questions des experts du Comité ayant porté sur l’organisation de la vie politique au Bénin, la délégation a précisé que la loi sur le statut de l’opposition instaurait une fonction de chef de file de l’opposition. Il ne s’agit pas d’une nomination: c’est le chef du parti ayant le plus d’élus au Parlement qui est désigné. Le chef de l’opposition est consulté par le Gouvernement et peut remplir certaines missions bien définies.
Un expert du Comité s’étant ému de propos xénophobes tenus à l’encontre d’un candidat métis à l’élection présidentielle de 2016, la délégation a affirmé que les propos en question n'avaient pas porté sur la personne elle-même, mais sur son manque de connaissance de la réalité nationale.
La délégation a précisé que le système politique actuel au Bénin résultait non pas du discours de La Baule – comme l’a suggéré un expert du Comité durant ce dialogue – mais de la conférence nationale qui a eu lieu également en 1990, entre Béninois, pour libéraliser le pays et introduire le multipartisme. Le chemin parcouru n’est pas si mauvais, même s’il reste encore beaucoup à accomplir, a affirmé la délégation.
L’appartenance ethnique ne figure plus sur les documents d’identité : cette mention pouvait en effet donner lieu à des discriminations, a d’autre part fait savoir la délégation.
Les autorités béninoises s’efforcent de supprimer toute discrimination dans l’utilisation des langues nationales, a par ailleurs indiqué la délégation. Les communes veillent à la promotion des langues nationales et les candidats au baccalauréat peuvent désormais composer dans ces langues.
Toutes les populations locales au Bénin sont considérées comme autochtones, a ensuite souligné la délégation. L’introduction des langues nationales dans les écoles demandera davantage de temps et de moyens, a-t-elle ajouté, précisant que le Gouvernement doit élaborer des définitions et des outils pour chacune de ces langues, sans discrimination.
La délégation a aussi donné des précisions chiffrées sur le nombre de réfugiés acceptés au Bénin et sur l’intégration de ces personnes, avant d’assurer que la procédure de détermination du statut de réfugié était exempte de toute discrimination. L’intérêt supérieur des enfants migrants non accompagnés est pris en compte pendant la procédure d’asile, a-t-elle ajouté. Les enfants requérants accèdent à l’éducation et aux prestations sociales, a-t-elle fait valoir.
L’alimentation scolaire bénéficie à une majorité d’enfants au Bénin, sans aucune discrimination entre enfants béninois et étrangers, a d’autre part déclaré la délégation. Le budget consacré à l’alimentation scolaire est supérieur à celui du Ministère des affaires étrangères, a-t-elle fait observer, un expert du Comité jugeant pour sa part exemplaire le modèle d’alimentation scolaire du Bénin.
Un expert du Comité ayant demandé s’il était prévu de légiférer pour assurer la protection des défenseurs des droits de l’homme , la délégation a indiqué que les donneurs d’alerte étaient déjà protégés. En mars dernier, a-t-elle en outre rappelé, le Bénin a voté en faveur de la résolution du Conseil des droits de l’homme visant à reconnaître la contribution des défenseurs des droits de l’homme dans les situations de conflit et d’après-conflit.
La traite des êtres humains est réprimée par le Code pénal, de même que le mariage précoce et forcé, a souligné la délégation en réponse à d’autres questions. Un comité interministériel est chargé de lutter contre la traite des êtres humains et le Bénin a signé des accords bilatéraux dans ce domaine avec plusieurs autres pays.
Le plan national d’action 2014-2019 contre la discrimination raciale, lancé dans le sillage d’un séminaire organisé à Lomé par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, n’a pas été appliqué intégralement faute de financement suffisant. Le Bénin élaborera un nouveau plan pour appliquer les recommandations formulées par le Comité à l’issue du présent dialogue, a indiqué la délégation.
La délégation a fait savoir que le Gouvernement était en train de dresser un inventaire de tous les trésors nationaux pillés pendant la colonisation et qui se trouvent à l’étranger. Des demandes de restitution seront envoyées quand cet inventaire sera assez complet, sachant que le seul musée du quai Branly, à Paris, contient quelque trois mille objets intéressant le Bénin.
La délégation a salué les restitutions déjà opérées par la France depuis 2021, avec un premier lot de vingt-six objets. Ces derniers ont été immédiatement inscrits au patrimoine national, conformément à la loi sur le patrimoine votée en octobre dernier. Une volonté politique très forte préside, au Bénin, à la question du retour des biens culturels, a souligné la délégation. La population est sensibilisée à l’importance de ces restitutions, qui sont envisagées comme un moyen de cimenter l’unité nationale.
Sur la question de l’esclavage, le Bénin a une vision très claire : le pays n’est pas demandeur de réparations systématiques. Pour le Bénin, l’important est que le phénomène ne se reproduise pas : il entretient donc la mémoire de la tragédie, qui a impliqué des habitants de la région et des étrangers. Un musée et un jardin du souvenir seront ouverts à Ouidah pour permettre aux gens de toucher au plus près la réalité de la traite. Le projet de l’UNESCO de « Route de l’esclave » a été lancé à Ouidah par le Bénin et par Haïti, a rappelé la délégation.
Le Bénin favorise aussi le retour de Béninois de la diaspora qui le souhaitent. Plusieurs familles jamaïcaines sont installées au Bénin et sont en train d’être naturalisées, a d’autre part indiqué la délégation.
Les mesures de quarantaine prises pendant la COVID-19 visaient toutes les personnes arrivant de l’étranger et testées positives à l’aéroport, sans discrimination, a expliqué la délégation. Aucun étranger n’a été victime, en tant que tel, de discrimination dans le cadre de ces mesures générales, a-t-elle insisté.
Le profilage racial tel que constaté dans certains pays occidentaux n’existe pas au Bénin, a dit la délégation.
Le projet de loi sur l’aide juridictionnelle n’établit aucune discrimination au détriment des étrangers, a-t-elle en outre précisé.
Le 19 juillet, le Bénin célèbre officiellement la journée de sensibilisation aux personnes atteintes d’albinisme, a d’autre part indiqué la délégation, avant de faire valoir que trois personnes ont été traduites en justice pour violences sur personnes atteintes d’albinisme.
S’agissant des questions foncières, la délégation a expliqué que les non-nationaux ont accès au foncier en milieu urbain dans la mesure où les Béninois bénéficient du même droit dans les pays tiers concernés.
Remarques de conclusion
M. DIABY a fait observer que les réparations ne sont pas uniquement de nature pécuniaire : elles peuvent consister en mesures spéciales en faveur des personnes qui sont toujours atteintes par les séquelles de l’esclavage.
M. Diaby a par ailleurs salué les efforts du Gouvernement béninois en matière de politiques publiques et de réformes législatives. Le Comité, a-t-il ajouté, n’est pas un tribunal : il a pour rôle d’aider le Gouvernement à se conformer aux obligations découlant de la Convention.
M. QUENUM a remercié les membres du Comité et a indiqué que le Bénin s’engage à prendre en compte les recommandations du Comité et à répondre par écrit aux questions qui n’ont pas trouvé de réponse.
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