Fil d'Ariane
Examen de la Mongolie devant le CEDAW : des progrès importants ont été réalisés dans le cadre juridique, mais l’égalité de jure doit se traduire en égalité de fait
Des progrès importants ont été réalisés dans le cadre juridique de la Mongolie s’agissant de l’application de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes: la question est maintenant de savoir comment l’égalité de jure se traduit en égalité de fait. C’est ce qu’a souligné une experte membre du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) alors qu’était examiné, hier matin et ce matin, le rapport périodique soumis par la Mongolie au titre de la Convention.
Constatant, d’autre part, que la Mongolie ne disposait pas de loi pénalisant la discrimination et qu’aucune affaire de discrimination n’avait été portée devant les tribunaux du pays, une experte a demandé pourquoi la Mongolie n’avait pas adopté la définition de la discrimination donnée par la Convention. Elle a rappelé que la Mongolie, en ratifiant cet instrument, avait contracté des obligations en matière d’élimination de la discrimination à l’égard des femmes.
Une experte a fait part de sa préoccupation devant le taux élevé de violence sexiste et la faible autonomisation des femmes en Mongolie, y compris leur faible participation au marché du travail. Le pouvoir judiciaire ne semble pas assez efficace dans la lutte contre la violence sexiste, a-t-il été observé. Une autre experte a regretté que les éleveuses ne bénéficient pas d'un soutien suffisant.
Il a par ailleurs été jugé regrettable que les médias mongols diffusent encore des messages très prescriptifs quant aux rôles des deux sexes. D’autres questions ont porté sur la participation des femmes à la vie politique et dans la fonction publique ; et sur la lutte contre la traite des êtres humains et l’exploitation par le travail – un problème dont seraient victimes des ressortissantes mongoles dans plusieurs pays voisins de la Mongolie, a-t-il été observé.
La délégation mongole était conduite par M. Sarkhad Zulpkhar, Ministre adjoint du travail et de la protection sociale. Pendant le débat avec les membres du Comité, la délégation a notamment précisé que si la Mongolie n’avait pas adopté de loi contre la discrimination, la Constitution et plusieurs textes de loi permettaient cependant déjà de lutter contre la discrimination envers les femmes. La Constitution prévoit, en particulier, l’instauration d’un environnement social et culturel au sein duquel les hommes et les femmes devraient jouir des mêmes droits, a-t-il été souligné.
La délégation a aussi mentionné le lancement de campagnes de sensibilisation pour éradiquer les stéréotypes sexistes.
La délégation a par ailleurs fait savoir que les policiers recevaient des formations sur la violence familiale et que le Gouvernement avait ouvert 35 centres de crise et d’accueil, qui prennent en charge de 5000 à 6000 femmes chaque année. D’autre part, le Gouvernement a publié des protocoles et directives pour l’identification des victimes de la traite des êtres humains et la police a créé une unité spécialisée contre la traite, a indiqué la délégation.
Outre M. Zulpkhar, la délégation mongole était composée, entre autres, de Mme Davaasuren Gerelmaa, Représentante permanente de la Mongolie auprès des Nations Unies à Genève, ainsi que de représentants des Ministères des affaires étrangères ; de la justice et de l’intérieur ; de la défense ; des finances ; de la santé ; de l’environnement et du tourisme ; et du travail et de la protection sociale. La Cheffe du secrétariat de la Commission nationale sur l’égalité des sexes faisait aussi partie de la délégation.
Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport de la Mongolie et les publiera à l’issue de sa session, le 1 er juillet prochain.
Cet après-midi à 15 heures, le Comité doit achever l’examen du rapport de la Bolivie, entamé hier.
N.B. : les services d’interprétation ayant renoncé à interpréter en français la deuxième séance d'examen du rapport, en raison de la mauvaise qualité de la connexion avec la délégation à Oulan-Bator, nous ne sommes pas en mesure de rendre compte de l’intégralité du dialogue.
Examen du rapport
Le Comité est saisi du dixième rapport périodique de la Mongolie (CEDAW/C/MNG/10), établi sur la base d’une liste de points à traiter qui avait été préalablement soumise au pays.
M. SARKHAD ZULPKHAR, Ministre adjoint du travail et de la protection sociale de la Mongolie, a présenté les membres de la délégation mongole.
Questions et observations des membres du Comité
Constatant que la Mongolie ne disposait pas de loi pénalisant la discrimination et qu’en outre aucune affaire de discrimination n’avait été portée devant les tribunaux du pays, une experte du Comité a demandé pourquoi la Mongolie n’avait pas adopté la définition de la discrimination donnée par la Convention. Elle a rappelé que la Mongolie, en ratifiant cet instrument, avait contracté des obligations en matière d’élimination de la discrimination à l’égard des femmes. D’autre part, le pouvoir judiciaire ne semble pas assez efficace dans la lutte contre la violence sexiste, a regretté l’experte.
Une autre experte du Comité a fait état de progrès importants dans le cadre juridique mongol. La question est maintenant de savoir comment l’égalité de jure se traduit en égalité de fait, a-t-elle toutefois souligné. Elle a demandé comment la politique en faveur du genre était appliquée et si la Commission nationale sur l’égalité des sexes avait procédé à des évaluations à cet égard. Quelles mesures ont-elles été prises pour améliorer le fonctionnement de cette Commission afin qu’elle réponde mieux aux besoins des femmes, en particulier des femmes éleveuses, a-t-il également été demandé ?
La même experte a ensuite souhaité savoir combien de plaintes avaient été traitées par la Commission nationale des droits de l’homme de Mongolie. Elle a attiré l’attention de la délégation sur le fait que l’Alliance mondiale des institutions nationales des droits de l’homme avait recommandé que le recrutement des membres de la Commission tienne mieux compte de la parité entre les sexes.
La délégation a aussi été priée de dire quelles mesures temporaires spéciales – telles que définies par l’article 4 de la Convention – ont été adoptées pour remédier aux inégalités entre les hommes et les femmes en Mongolie.
Une experte a constaté qu’un nombre important de femmes subissaient toujours des violences physiques et émotionnelles en Mongolie. Elle a fait état d’informations parvenues au Comité selon lesquelles les programmes de changement de comportement destinés aux auteurs de crimes sexistes seraient inefficaces. L’experte a ensuite demandé ce qui avait été fait pour renforcer les abris destinés aux femmes victimes de la violence.
Une experte a souhaité savoir si les « guichets uniques » pour les services sociaux créés par le Gouvernement répondaient aussi aux besoins des femmes LBTI. Il est regrettable que les médias mongols diffusent encore des messages très prescriptifs quant aux rôles des deux sexes, tandis que la communauté LGBT est absente des médias, a-t-il été souligné.
D’autres questions ont porté sur la lutte contre la traite des êtres humains et l’exploitation par le travail – un problème dont seraient victimes des ressortissantes mongoles dans plusieurs pays voisins de la Mongolie, a-t-il été observé. Une experte a demandé si le Gouvernement appliquait un système d’identification des victimes aux frontières et s’il envisageait d’ouvrir des abris à l’intention de ces victimes.
A également été soulevée la question de la participation des femmes à la vie politique et dans la fonction publique – participation dont une experte a estimé qu’elle était encore faible. On compte une seule femme ministre en Mongolie, a-t-il été relevé.
Une experte a félicité l'État partie pour les progrès qu'il a réalisés dans la promotion de l'égalité des sexes et la lutte contre la violence sexiste en créant des refuges, des centres de crise et d'autres services de soutien. Elle a aussi jugé positif que le Gouvernement procède à des évaluations de ces mécanismes de soutien. Mais l’experte a toutefois regretté que les éleveuses ne bénéficient pas d'un soutien suffisant et qu’un pourcentage important de femmes soient toujours victimes de violences sexistes.
La participation des femmes à la vie politique s’est améliorée, a constaté une experte. Néanmoins, a-t-elle ajouté, la part des candidates élues – 17% – est inférieure au quota de 25%. L’experte a demandé quelles mesures étaient prises pour améliorer ce pourcentage et pour soutenir financièrement les candidates, étant donné que seules les personnes disposant de fonds suffisants semblent pouvoir être élues.
Une experte a fait part de sa préoccupation devant le taux élevé de violence sexiste et la faible autonomisation des femmes en Mongolie, y compris leur faible participation au marché du travail. Elle a demandé quels objectifs spécifiques le Gouvernement a définis pour améliorer la situation des femmes.
Une experte a demandé comment les autorités protégeaient la santé des femmes et des filles rurales contre la pollution de l’environnement suscitée par les activités de l’industrie minière.
Une experte a recommandé à la Mongolie d’adopter des politiques éducative qui tiennent compte des besoins des filles. Il a été demandé si le programme scolaire contenait des enseignements sur la santé sexuelle et procréative. Une autre experte s’est enquise des mesures prises pour éliminer la discrimination et la violence subies par les femmes vivant avec le VIH.
Réponses de la délégation
La délégation a d’abord confirmé que la Mongolie n’avait pas adopté de loi contre la discrimination. Cependant, la Constitution et plusieurs textes de loi permettent déjà de lutter contre la discrimination envers les femmes et les enfants, a-t-elle souligné. En parallèle, la Constitution prévoit l’instauration d’un environnement social et culturel au sein duquel les hommes et les femmes devraient jouir des mêmes droits, a-t-elle ajouté. En outre, un projet de loi est en cours d’examen pour mieux lutter contre la discrimination et la violence motivées par le genre de la victime, a indiqué la délégation.
La Mongolie, a poursuivi la délégation, a créé une commission chargée de transposer dans le droit interne les définitions données par les instruments internationaux qu’elle a ratifiés, notamment la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. La Cour suprême de Mongolie a enjoint aux autorités de respecter ces définitions.
La loi sur la violence familiale (2017) précise le rôle joué par la police et la justice contre ce problème, a d’autre part indiqué la délégation. Les policiers reçoivent régulièrement des formations sur cette question. Les plaintes reçues par la police sont enregistrées ; les informations nécessaires sont ensuite transmises au procureur ; et une base de données recense toutes les victimes et les services qui leur ont été fournis, a expliqué la délégation.
Le Gouvernement, a ensuite rappelé la délégation, a lancé en 2017 des services d’assistance aux femmes victimes de violence familiale, notamment grâce à l’ouverture de 35 centres de crise et d’accueil, financés au niveau local et qui prennent en charge de 5000 à 6000 femmes chaque année. Huit lignes téléphoniques d’urgence ont en outre été ouvertes. Les autorités ont publié des directives pour la prise en charge de ces personnes, a précisé la délégation.
La délégation a d’autre part indiqué que le Gouvernement mongol s’apprête à évaluer le programme national relatif à l’égalité des sexes (2017-2021) qui a été appliqué en vertu de la loi de 2017 sur le même sujet.
La Commission nationale sur l’égalité des sexes est intervenue concrètement par le passé pour que, progressivement, la dimension de genre soit intégrée dans toutes les politiques publiques, a par ailleurs expliqué la délégation, avant d’indiquer que son Gouvernement avait également entrepris d’établir une budgétisation elle aussi sensible au genre. La Commission souffre d’un manque de ressources financières et humaines, a ensuite reconnu la délégation.
Le Gouvernement s’efforce de parvenir à un meilleur équilibre entre les sexes parmi les membres de l’ institution nationale des droits de l’homme, a poursuivi la délégation, avant de préciser que cette institution coopère étroitement avec la Commission nationale sur l’égalité des sexes. L’institution nationale de droits de l’homme a reçu 37 plaintes pour discrimination au motif du sexe, a indiqué la délégation.
Les organisations de la société civile mongole sont très actives et bénéficient pleinement du droit de réunion pacifique, a en outre fait savoir la délégation en réponse à des questions d’expertes du Comité.
Pour favoriser la participation des femmes, le Gouvernement a décidé en 2020 d’élargir l’accès aux structures de garde d’enfants, afin que davantage d’entre eux puissent être pris en charge et permettre ainsi aux femmes d’aller travailler, a fait valoir la délégation.
Elle a par ailleurs mentionné le lancement de campagnes de sensibilisation pour éradiquer les stéréotypes sexistes. La Commission nationale sur l’égalité des sexes a donné des conseils au Gouvernement s’agissant de la lutte contre les stéréotypes sexistes à l’école, a par la suite précisé la délégation ; elle collabore aussi avec les médias pour éliminer ces stéréotypes dans la presse, a-t-elle ajouté. Le Ministère de la culture est très impliqué dans la démarche de sensibilisation de la population aux dégâts que peuvent causer les stéréotypes sexistes, a également indiqué la délégation.
La Mongolie contrôle la réalisation des objectifs de développement durable par l’intermédiaire d’une politique générale de développement comptant plus de 400 indicateurs, a-t-il en outre été précisé.
D’autres informations ont été données sur les démarches du Gouvernement en faveur des femmes éleveuses : a notamment été évoqué un projet de loi introduisant, en leur faveur, un départ à la retraite possible à 50 ans.
La délégation a par la suite indiqué que les familles d’éleveurs peuvent recevoir des aides directes pour acheter des têtes de bétail. L’objectif des autorités est de faire en sorte que les familles d’éleveurs soient autosuffisantes ; des formations à l’économie domestique sont organisées à l’intention des éleveuses, en particulier, a ajouté la délégation. Une ligne d’appel d’urgence gratuite est à la disposition des éleveurs, au travers de laquelle ils peuvent s’informer, notamment, du prix des matières premières sur le marché, a-t-elle en outre précisé.
En 2017, le Gouvernement a approuvé son premier programme de lutte contre la traite des personnes, doté d’un budget équivalent à 200 000 dollars des États-Unis ; ce programme soutient l’action des organisations non gouvernementales actives dans ce domaine. Le Gouvernement a publié des protocoles et directives pour l’identification des victimes, et la police, pour sa part, a créé une unité spécialisée contre la traite. Il est aussi prévu que la police gère des centres d’accueil et de protection pour les victimes. Onze personnes soupçonnées de traite sont actuellement en jugement, a précisé la délégation.
Les femmes qui se livrent à la prostitution ne sont pas considérées comme des criminelles mais comme des victimes et, à ce titre, peuvent bénéficier de mesures de soutien, a indiqué la délégation en réponse à des questions de membres du Comité.
La délégation a par ailleurs confirmé l’existence d’un écart de salaires entre les hommes et les femmes en Mongolie. Le Gouvernement mongol a donc introduit dans le Code du travail le principe de salaire égal pour un travail de valeur égale et il a diffusé des directives sur l’application de ce principe, a-t-elle expliqué.
De même, les autorités ont procédé à un amendement du Code pénal en vue de sanctionner le harcèlement sexuel, y compris au travail, a ajouté la délégation.
La Mongolie a aussi introduit un congé de maternité de 120 jours, a poursuivi la délégation. Les mères qui prennent soin de leurs enfant reçoivent une subvention. La délégation a aussi indiqué que le Parlement avait accepté un projet de loi visant l’extension du réseau de crèches, avec la création de quelque 12 000 places et le recrutement de nouveaux personnels.
Pour réduire le chômage, les autorités misent en particulier sur l’élévation du niveau de formation des femmes et sur l’ouverture de places dans les crèches, a ajouté la délégation.
La Loi sur l’égalité contient des mesures pour favoriser la participation des femmes, a en outre indiqué la délégation, citant notamment l’application de quotas et précisant qu’un tiers des postes électifs au niveau local sont occupés par des femmes.
Le Gouvernement favorise l’autonomisation économique des femmes en les aidant à créer leurs propres entreprises de même qu’à accéder au crédit, a d’autre part fait valoir la délégation.
Une experte ayant demandé quelle aide était apportée aux mères célibataires, la délégation a mentionné l’octroi de subventions et autres prestations sociales.
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CEDAW22.022F