Fil d'Ariane
Examen de Chypre au Comité des droits de l’enfant : la prise en charge des migrants mineurs non accompagnés est particulièrement débattue et le pays est appelé à adopter une loi exhaustive et un plan d’action contre la discrimination
La volonté politique qui existe à Chypre de s’attaquer au problème de la discrimination et des préjugés, ainsi que d’œuvrer pour l’intégration des jeunes migrants, a été saluée par une experte du Comité des droits de l’enfant, alors qu’était examiné, hier et aujourd’hui, le rapport soumis par Chypre au titre de la Convention relative aux droits de l’enfant. Cependant, un certain nombre d’enfants roms, immigrés et turcs sont toujours confrontés à des incidents de discrimination à l’école, a regretté cette même experte.
La crise financière s’est accompagnée de discours xénophobes contre les migrants et les demandeurs d’asile, a poursuivi l’experte, avant de recommander que Chypre adopte une loi exhaustive et un plan d’action contre la discrimination.
S’agissant des questions migratoires, l’experte a fait état du surpeuplement de certaines structures d’accueil pour migrants, où – a-t-elle ajouté – des violences sexuelles et physiques ont été signalées. Elle a en outre regretté la longueur des procédures d’évaluation de l’âge des migrants, en cas de doute sur leur minorité.
L’experte a aussi regretté qu’il manque à Chypre une définition légale de l’intérêt supérieur de l’enfant, qui permette d’en donner des interprétations cohérentes.
Un autre membre du Comité a relevé qu’il semblait exister une lacune juridique dans la protection des jeunes de 16 à 18 ans contre les châtiments corporels. Cet expert a également indiqué que le Comité avait été informé de préoccupations relatives à des opérations chirurgicales inutiles pratiquées sur des enfants intersexes sans leur consentement informé.
Présentant le rapport de son pays, Mme Louiza Christodoulidou-Zannetou, Commissaire aux lois de la République de Chypre, a indiqué que Chypre avait adopté plusieurs loi importantes en 2021, concernant notamment la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique ou encore la répression du harcèlement. En 2021 également, une nouvelle loi a été adoptée concernant les droits des enfants en conflit avec la loi, qui établit un système de justice pénale adapté aux enfants. Le lancement de poursuites contre des enfants et en particulier la détention d’enfants sont utilisés comme mesures de dernier recours : les délinquants mineurs sont jugés par des tribunaux pour enfants qui peuvent imposer des mesures alternatives à la détention, a expliqué la Commissaire aux lois.
Mme Christodoulidou-Zannetou a d’autre part indiqué que des unités de police spécialisées dans les enquêtes sur la violence domestique et la maltraitance des enfants avaient été créées depuis 2020. Une stratégie nationale visant à prévenir et combattre la violence en milieu scolaire a été introduite en 2018, a-t-elle aussi fait savoir.
La mise en œuvre en 2019 du système général de santé de Chypre a permis d’assurer que tous les enfants, quel que soit leur statut légal, aient accès aux services de soins de santé, conformément à l’article 24 de la Convention, a d’autre part fait valoir la Commissaire aux lois.
Pour ce qui est des questions d’asile, les mineurs sont considérés comme vulnérables et leurs besoins sont identifiés par des agents spécialement formés à cet effet, a par ailleurs souligné Mme Christodoulidou-Zannetou. Les mineurs non accompagnés sont immédiatement placés sous la garde et la tutelle des services sociaux, garantissant l’accès à la santé, à l’éducation, au logement et aux loisirs, a-t-elle indiqué. Chypre interdit la détention d’enfants migrants, a insisté la cheffe de la délégation. Quel que soit le statut migratoire d’un parent, les enfants jouissent de leurs droits fondamentaux à la santé, à l’éducation et à l’aide sociale, a-t-elle fait valoir. Les enfants non accompagnés ou les familles avec enfants ne sont pas détenus et depuis 2014, en cas d’arrestation d’un parent d’un mineur suite à une décision d’éloignement, l’autre parent n’est pas détenu, a précisé Mme Christodoulidou-Zannetou, avant de préciser que lorsque les enfants sont accompagnés d’un parent seul, ce parent n’est pas détenu.
En outre, a indiqué Mme Christodoulidou-Zannetou, le Ministère de l’éducation accorde une attention spéciale à l’inclusion éducative des requérants d’asile et des enfants réfugiés.
La délégation chypriote était aussi composée de Mme Olympia Neocleous, Représentante permanente de Chypre auprès des Nations Unies à Genève, ainsi que de plusieurs autres représentants des Ministères des affaires étrangères ; de l’intérieur ; de l'éducation, de la culture, des sports et de la jeunesse ; et de la protection sociale. La police chypriote était aussi représentée.
Une experte ayant demandé si Chypre envisageait de supprimer les dispositions de la loi autorisant un mineur de 16 ans à se marier dans certaines circonstances, la délégation a indiqué, au cours du dialogue, que le pays avait entrepris une grande réforme du droit de la famille dont le but est notamment d’autoriser le mariage à partir de 17 ans et de supprimer les dispositions de la loi qui autorisent le mariage de jeunes dès 16 ans à titre exceptionnel et avec l’accord du représentant légal.
Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport de Chypre et les publiera à l’issue de sa session, le 3 juin prochain.
Cet après-midi à 15 heures, le Comité entamera l’examen du rapport du Canada.
Examen du rapport
Le Comité est saisi du rapport périodique de Chypre (CRC/C/CYP/5-6) ainsi que des réponses du pays à une liste de points à traiter qui avait été soumise par le Comité.
Présentation
Présentant le rapport de son pays, MME LOUIZA CHRISTODOULIDOU-ZANNETOU, Commissaire aux lois de la République de Chypre et cheffe de la délégation, a déclaré que le principal obstacle à l’exercice des droits de l'homme à Chypre était l'occupation illégale par la Turquie de plus de 36% du territoire de Chypre depuis 1974 et a souligné que le Gouvernement chypriote n’était pas en mesure d'assurer le respect des traités relatifs aux droits de l'homme, ni d'appliquer les lois et politiques y relatives, dans les territoires qui ne sont pas sous son contrôle effectif.
Chypre a adopté plusieurs loi importantes en 2021, concernant notamment la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique – le terme « femme » incluant ici toute jeune fille n'ayant pas atteint l'âge de 18 ans – ou encore la répression du harcèlement, a ensuite indiqué Mme Christodoulidou-Zannetou.
En 2021 également, une nouvelle loi a été adoptée concernant les droits des enfants en conflit avec la loi, qui établit un système de justice pénale adapté aux enfants. Le lancement de poursuites contre des enfants et en particulier la détention d’enfants sont utilisés comme mesures de dernier recours : les délinquants mineurs sont jugés par des tribunaux pour enfants qui peuvent imposer des mesures alternatives à la détention. La loi prévoit également la création d’un centre de détention spécial pour la réintégration des enfants condamnés à la détention, a précisé la Commissaire aux lois. Mme Christodoulidou-Zannetou a également fait état d’un amendement apporté en 2021 à la Loi sur l’organisation des sports à Chypre, qui introduit des dispositions destinées à combattre le harcèlement dans les sports : en cas d’incident, le Commissaire à la protection des droits de l’enfant est informé, a-t-elle indiqué. Elle a par ailleurs attiré l’attention sur l’amendement apporté en 2022 à la Loi sur la maternité, qui porte de 18 à 22 le nombre de semaines de congé de maternité pour un second enfant – et à 26 semaines pour un troisième. L’amendement apporté cette année à la Loi sur la protection de la paternité prévoit quant à lui deux semaines de congé de paternité à l’expiration du congé de maternité.
D’autre part, a poursuivi Mme Christodoulidou-Zannetou, le Gouvernement a créé, en 2018, un organisme (le Conseil « FONI ») chargé d’appliquer la Stratégie nationale pour la lutte contre les abus sexuels sur enfants, l’exploitation sexuelle des enfants et la pédopornographie – un nouveau plan d’action ayant été approuvé dans ce domaine en octobre 2021. Chypre dispense une éducation sexuelle obligatoire, claire et ciblée, dès le jardin d'enfants, en tant qu'outil essentiel pour la prévention des abus et de l'exploitation sexuels des enfants, a-t-elle en outre précisé.
La Commissaire aux lois a encore fait savoir que des unités de police spécialisées dans les enquêtes sur la violence domestique et la maltraitance des enfants avaient été créées depuis 2020. Chypre applique en outre le modèle Barnahus de Maison des enfants : ces établissements fournissent tous les services nécessaires à l'enfant victime, sous un même toit.
Les professionnels travaillant avec les enfants, tels que les enseignants, la police, les services sociaux, reçoivent une formation continue sur la violence familiale, les crimes sexistes, la violence à l'égard des femmes, la maltraitance des enfants, la traite et l'égalité des sexes, notamment. Une stratégie nationale visant à prévenir et combattre la violence en milieu scolaire a été introduite en 2018, a aussi fait savoir la cheffe de délégation.
Mme Christodoulidou-Zannetou a par ailleurs indiqué que la réforme de la loi sur la famille était devant le Parlement et a précisé que l’objectif de cette réforme était d’assurer non seulement l’égalité de traitement des parents en cas de dissolution du mariage ou du partenariat, mais aussi le plein respect des droits de l’enfant.
La mise en œuvre en 2019 du système général de santé de Chypre a permis d’assurer que tous les enfants, quel que soit leur statut légal, aient accès aux services de soins de santé, conformément à l’article 24 de la Convention relative aux droits de l’enfant, a d’autre part fait valoir la Commissaire aux lois. Toute tentative d'empêcher une mère d'allaiter en public est considérée comme une infraction pénale, a-t-elle ajouté. Elle a par ailleurs souligné que Chypre avait réalisé des progrès considérables dans le renforcement du cadre juridique national concernant la traite de personnes, les peines maximales encourues pour ce crime étant passées de 10 à 25 ans de prison, voire à l’emprisonnement à vie si la victime est un enfant.
Pour ce qui est des questions d’asile, les mineurs sont considérés comme vulnérables et leurs besoins sont identifiés par des agents spécialement formés à cet effet, a poursuivi Mme Christodoulidou-Zannetou. Un soutien individuel est fourni aux jeunes en fonction de leur âge et de leur sexe, entre autres facteurs et il existe une procédure permettant de certifier l’âge de la jeune personne avec son consentement s’il existe un doute raisonnable qu’elle ne soit pas mineure.
Chypre a connu une augmentation des flux migratoires en 2021-2022, a d’autre part souligné la Commissaire aux lois, avant d’ajouter que des procédures d’évaluation ont été mises en place pour prendre en charge les mineurs non accompagnés. Des agents des services sociaux (tuteurs) sont affectés, depuis 2020, dans le centre de premier accueil. Aussi, des agents institutionnels ont été nommés pour accompagner les mineurs hébergés dans la zone sécurisée du camp 24h/24 et 7j/7. Après la phase de sélection (évaluation), les mineurs sont transférés soit dans un foyer spécialement conçu pour les mineurs non accompagnés, soit dans les familles d’accueil ou en semi-autonomie. En raison du surpeuplement résultant de l’augmentation des flux, les mineurs sont actuellement transférés dans d’autres logements temporaires appropriés avant même l’achèvement des procédures. Les mineurs non accompagnés sont immédiatement placés sous la garde et la tutelle des services sociaux, garantissant l’accès à la santé, à l’éducation, au logement, aux loisirs, en fonction des intérêts individuels.
Chypre interdit la détention d’enfants migrants, a souligné la cheffe de la délégation. Quel que soit le statut migratoire d’un parent, les enfants jouissent de leurs droits fondamentaux à la santé, à l’éducation et à l’aide sociale, a-t-elle insisté. Les enfants non accompagnés ou les familles avec enfants ne sont pas détenus et depuis 2014, en cas d’arrestation d’un parent d’un mineur suite à une décision d’éloignement, l’autre parent n’est pas détenu, a précisé Mme Christodoulidou-Zannetou. Lorsque les enfants sont accompagnés d’un parent seul, ce parent n’est pas détenu, a-t-elle ajouté.
En outre, a indiqué Mme Christodoulidou-Zannetou, le Ministère de l’éducation accorde une attention spéciale à l’inclusion éducative des requérants d’asile et des enfants réfugiés.
Mme Christodoulidou-Zannetou a aussi fait savoir que Chypre avait pris des mesures pour aider les familles et les enfants à surmonter la crise sans précédent suscitée par la pandémie de COVID-19. Ces mesures concernent tous les domaines – santé, éducation, services sociaux et finances – et visent à protéger, avant tout la santé publique.
Questions et observations des membres du Comité
M. BRAGI GUDBRANDSSON, coordonnateur du groupe de travail chargé par le Comité d’examiner plus en détail le rapport de Chypre, a observé avec satisfaction que les mineurs pouvaient maintenant témoigner en justice depuis une salle située dans une Maison de l’enfant, et non plus obligatoirement au tribunal. Il a demandé quelles catégories d’enfants précisément les Maisons pouvaient accueillir.
L’expert a par ailleurs dit qu’il semblait exister une lacune juridique dans la protection des jeunes de 16 à 18 ans contre les châtiments corporels. Il a également indiqué que le Comité avait été informé de préoccupations relatives à des opérations chirurgicales inutiles pratiquées sur des enfants intersexes sans leur consentement informé. Certaines de ces interventions sont pratiquées en Grèce, a-t-il précisé.
M. Gudbrandsson a par la suite insisté sur l’importance d’éviter que les enfants ayant été victimes de violences ou d’abus sexuels n’aient à témoigner à plusieurs reprises devant les tribunaux.
M. Gudbrandsson a également demandé si la stratégie nationale de prévention et de lutte contre les abus sexuels et l'exploitation sexuelle des enfants s’appliquait aussi à l’industrie du tourisme.
MME HYND AYOUBI IDRISSI, également membre du groupe de travail chargé par le Comité d’examiner plus en détail le rapport de Chypre, a regretté que deux projets de loi sur le bien-être des enfants et sur la prise en charge de la protection des enfants n’aient toujours pas été adoptés. L’experte a en outre demandé comment était coordonnée l’action des instances chargées de l’application de la Convention et de ses trois Protocoles facultatifs. Elle a estimé qu’il manquait à Chypre d’une stratégie d’ensemble d’application de la Convention, assortie d’indicateurs.
L’experte a aussi demandé quelles mesures avaient été prises pour garantir les droits de l’enfant pendant la COVID-19 ; quels avaient été les effets de la crise financière sur l’exercice des droits de l’enfant ; et quelle part des dépenses publiques étaient consacrée aux droits de l’enfant, en particulier au financement de l’institution du Commissaire à la protection des droits de l’enfant.
Vu l’importance du secteur du tourisme et du voyage pour Chypre, Mme Ayoubi Idrissi a également voulu savoir si ce secteur avait adopté un code de bonne conduite pour veiller au respect des droits de l’enfant.
Mme Ayoubi Idrissi a ensuite demandé quel avait été l’effet des dispositions prises contre l’abandon scolaire ainsi que pour l’inclusion scolaire des enfants handicapés. Elle a également voulu savoir si les élèves prenaient part aux activités de gouvernance de leurs écoles.
D’autre part, l’experte a demandé ce qui serait fait pour mettre les textes chypriotes en conformité avec le Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés.
Mme Ayoubi Idrissi a en outre demandé comment les enfants avaient pu rattraper le temps scolaire perdu pendant le confinement.
MME FAITH MARSHALL-HARRIS, elle aussi membre du groupe de travail chargé par le Comité d’examiner plus en détail le rapport de Chypre, a salué la volonté politique qui existe à Chypre de s’attaquer au problème de la discrimination et des préjugés, ainsi que d’œuvrer pour l’intégration des jeunes migrants. Cependant, un certain nombre d’enfants roms, immigrés et turcs sont toujours confrontés à des incidents de discrimination à l’école, a regretté l’experte.
La crise financière s’est accompagnée de discours xénophobes contre les migrants et les demandeurs d’asile, a poursuivi Mme Marshall-Harris, avant de demander quelles mesures le Gouvernement prenait à cet égard. Elle a recommandé que Chypre adopte une loi exhaustive et un plan d’action contre la discrimination.
L’experte a aussi regretté qu’il manque à Chypre une définition légale de l’intérêt supérieur de l’enfant, qui permette d’en donner des interprétations cohérentes.
Mme Marshall-Harris a ensuite recommandé que des limites soient posées à la durée de détention préventive à laquelle un mineur peut être soumis.
S’agissant des questions migratoires, l’experte a fait état du surpeuplement de certaines structures d’accueil pour migrants, où – a-t-elle ajouté – des violences sexuelles et physiques ont été signalées. Elle a regretté la longueur des procédures d’évaluation de l’âge des migrants, en cas de doute sur leur minorité, et a demandé si les décisions en la matière pouvaient faire l’objet de recours.
Mme Marshall-Harris s’est aussi enquise des suites données au plan d’action national contre la traite des êtres humains, qui s’est achevé en 2021.
MME SOPIO KILADZE, membre du groupe de travail chargé par le Comité d’examiner plus en détail le rapport de Chypre, a demandé si Chypre envisageait de supprimer les dispositions de la loi autorisant un mineur de 16 ans à se marier dans certaines circonstances. Elle s’est ensuite interrogée sur la raison pour laquelle il n’existe pas de définition légale de l’apatridie à Chypre : elle a pointé les risques auxquels cette lacune pouvait exposer certains enfants nés de parents étrangers.
Mme Kiladze a également fait état de préoccupations s’agissant du respect des décisions de justice en matière de garde des enfants après le divorce.
Un autre expert a pointé un risque de discrimination et d’arbitraire dans les décisions relatives à l’acquisition de la nationalité, vu le manque de définition de l’apatridie. Il a été demandé dans quel délai les enfants étrangers nés à Chypre recevaient leur certificat de naissance.
La détention de mineurs en conflit avec la loi doit être exceptionnelle, a souligné un membre du Comité. Cet expert a par ailleurs espéré que les mineurs migrants hébergés dans des hôtels, faute de place dans les centres pour migrants, n’étaient pas abandonnés à eux-mêmes.
Réponses de la délégation
Concernant les deux projets de loi mentionnés par Mme Ayoubi Idrissi, la délégation a indiqué qu’ils étaient sur le point d’être promulgués et que l’aval du service juridique du Conseil des ministres devait être obtenu avant que le vote n’intervienne.
Un comité a été créé en 2012 pour coordonner l’action des ministères chargés d’appliquer les recommandations du Comité des droits de l’enfant, a indiqué la délégation.
Il est difficile, en l’état, de connaître précisément les affectations budgétaires spécifiquement destinées aux droits de l’enfant. Une réforme est en cours qui devrait permettre de communiquer des chiffres à cet égard. Cela étant, les budgets consacrés à la protection de l’enfance ont été préservés depuis cinq ans, malgré la récession, a souligné la délégation.
Les châtiments corporels à l’encontre des enfants de 0 à 18 ans sont interdits à Chypre dans tous les contextes, même à la maison, a par ailleurs fait valoir la délégation. Le Ministère de l’éducation a diffusé une circulaire à ce sujet auprès des enseignants, a-t-elle précisé.
Les témoignages d’enfants victimes de violence domestique sont toujours enregistrés par vidéo ; si la présence physique de l’enfant est nécessaire pour un contre-interrogatoire, il peut être entendu chez lui, avec l’assistance d’un psychologue et hors de la présence de l’auteur de l’infraction, a expliqué la délégation.
Une nouvelle stratégie a été adoptée en 2021 pour la prévention des abus sexuels sur les enfants, qui comprend aussi des mesures de sensibilisation et des formations destinées aux praticiens, a d’autre part indiqué la délégation.
Des campagnes sont aussi menées contre la violence à l’école et pour la sensibilisation au problème de l’exploitation sexuelle sur internet. En outre, toutes les écoles sont encouragées à appliquer le code de conduite contre le racisme à l’école et le protocole de signalement des incidents, a-t-il été précisé.
Le rapport soumis par Chypre au Comité a été traduit en grec ; il est disponible sur le site du Ministère de l’éducation. Les enseignants sont encouragés à dispenser un enseignement relatif à la Convention, elle aussi traduite.
Élaboré par l’Observatoire de la violence en milieu scolaire, un programme de deux ans est appliqué pour remédier au problème du harcèlement et de la violence en milieu scolaire. Dans ce cadre, les écoles sont encouragées à favoriser la médiation pour résoudre les différends entre élèves. Il est envisagé d’ériger le harcèlement à l’école en infraction pénale, a ajouté la délégation.
Le Ministère de l’éducation applique un programme d’inclusion scolaire des enfants migrants, comprenant l’apprentissage du grec en tant que seconde langue, l’analyse des besoins des enfants d’origine étrangère ainsi que la formation et la sensibilisation des enseignants.
Le Ministère de l’intérieur met l’accent sur la prise en compte des besoins des enfants migrants les plus vulnérables, a par ailleurs indiqué la délégation. Elle a assuré que l’État octroyait une assistance aux enfants indépendamment de leur statut migratoire et conformément au principe de l’intérêt supérieur de l’enfant. Les autorités veillent aussi à ce que les enfants migrants soient informés de leurs droits, que leurs opinions soient prises en compte et qu’ils puissent bénéficier du droit au regroupement familial.
Un expert du Comité s’étant inquiété de la surpopulation dans les centres pour migrants, la délégation a confirmé que Chypre avait dépassé sa capacité d’accueil de 310%. La majorité des requérants arrivent de la partie occupée de l’île et la situation s’est encore aggravée en 2022, a-t-elle ajouté. En outre, quelque 14 000 réfugiés ukrainiens sont arrivés depuis le début du conflit, a fait savoir la délégation.
Aux points d’entrée des migrants à Chypre, a poursuivi la délégation, des agents spécialisés (y compris des représentants du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés) sont chargés d’évaluer les migrants particulièrement vulnérables – les mineurs non accompagnés seront alors placés sous tutelle.
Vu la surpopulation des centres pour migrants, il est difficile de s’occuper des mineurs vulnérables ou non accompagnés ; un certain nombre d’entre eux hébergés au centre d’accueil pour migrants de Pournara seront déplacés vers des structures mieux adaptées ; d’autres ont déjà été déplacés, ou seront déplacés, vers des hôtels, après examen de leurs demandes de séjour – les jeunes ainsi hébergés sont suivis sept jours sur sept par les services sociaux. Le camp est en train de subir des travaux d’aménagement, d’assainissement et de rénovation, a aussi fait savoir la délégation.
D’autre part, les services sociaux ont signalé à la police des allégations d’abus sexuels commis, pendant leur voyage vers Chypre, sur des mineurs vivant dans ce camp, et la police enquête à ce sujet, a indiqué la délégation.
Pour la détermination de l’âge d’un requérant, les autorités procèdent d’abord à un examen non médical ; si son résultat n’est pas concluant, un examen médical peut être réalisé – examen des dents, par exemple – mais avec l’accord de la personne concernée, a expliqué la délégation. Le requérant est présumé mineur si cet examen médical n’est pas probant non plus. Le recours à l’examen médical n’est pas la règle, a précisé la délégation, ajoutant que des recours contre une décision en matière d’âge sont toujours possibles, comme pour toute décision administrative.
Des enquêteurs bien formés sont chargés de détecter et de questionner les mineurs migrants dont on soupçonne qu’ils pourraient être victimes de la traite, a par la suite indiqué la délégation.
Le plan d’action national contre la traite des êtres humains a été renouvelé pour deux ans supplémentaires, a fait savoir la délégation.
S’agissant de la justice pour mineurs, la délégation a rappelé que Chypre dispose de tribunaux pour mineurs. Le système judiciaire s’adapte aux besoins des mineurs, la détention des mineurs étant une mesure de dernier recours, a insisté la délégation. Lorsqu’ils sont détenus, les mineurs sont placés séparément des adultes, a-t-elle par ailleurs souligné. De nouveaux centres de détention pour mineurs sont en construction, a-t-elle indiqué.
La police distribue des documents résumant de quels droits disposent les mineurs en conflit avec la loi et les agents reçoivent une formation consacrée à la prise en charge de ces jeunes. Un dispositif particulier s’applique aux mineurs qui trafiquent des stupéfiants, a ajouté la délégation. Le casier judiciaire d’un mineur condamné à un travail d’intérêt collectif est effacé après deux ans, a-t-elle en outre précisé.
Les tribunaux de la famille ont donné une définition de l’ intérêt supérieur de l’enfant ayant force de loi à Chypre, a également fait savoir la délégation.
Lors d’un jugement relatif au divorce, le tribunal tient compte de l’intérêt supérieur de l’enfant pour décider de la garde de l’enfant. On considère qu’un enfant dès l’âge de huit ans environ peut être entendu par le juge, a précisé la délégation.
Chypre a entrepris une grande réforme du droit de la famille. Le but est notamment d’autoriser le mariage à partir de 17 ans et de supprimer les dispositions de la loi qui autorisent le mariage de jeunes dès 16 ans à titre exceptionnel, avec l’accord du représentant légal, a indiqué la délégation.
Toute personne née à Chypre peut demander la citoyenneté chypriote si l’un de ses parents est chypriote, a d’autre part indiqué la délégation.
Le Parlement des enfants rencontre des représentants des ministères pour discuter de questions intéressant les jeunes, a poursuivi la délégation.
La délégation a par ailleurs fait état de l’élaboration d’un projet de loi sur la « reconnaissance de genre » régissant, entre autres choses, les procédures chirurgicales sur des enfants intersexes.
La personne nommée Commissaire à la protection des droits de l’enfant assure le suivi de l’application des dispositions de la Convention et des textes européens en la matière. Elle sensibilise la population aux droits des enfants à tous les niveaux. Elle ne prépare pas le plan d’action national pour les enfants, mais émet des recommandations à l’intention du Gouvernement et les différents ministères prennent toujours ces recommandations en compte, a expliqué la délégation.
Le Ministère de la santé a pris, contre la pandémie de COVID-19, des mesures fondées sur des preuves scientifiques ; un comité d’experts a été créé pour informer la population et le Gouvernement, a poursuivi la délégation. Le Ministère de l’éducation a, pour sa part, renforcé l’éducation numérique, les compétences des élèves en matière d’apprentissage à distance, ainsi que la compétence des enseignants dans le même contexte. Les psychologues scolaires ont joué un rôle important pour aider les enfants à atteindre un état émotionnel sain dans le contexte de la nouvelle réalité, a ajouté la délégation.
Le Gouvernement a lancé un plan d’action national pour garantir l’accès des enfants de familles pauvres aux services publics essentiels. Entre autres prestations, des subventions sont accordées pour l’achat d’ordinateurs personnels, a fait savoir la délégation.
Un nombre très restreint de jeunes de 17 ans et demi sont enrôlés dans la garde nationale, a par ailleurs indiqué la délégation.
La délégation a répondu à d’autres questions et observations des experts du Comité concernant la promotion de l’allaitement maternel et les mutilations génitales féminines.
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