Fil d'Ariane
LE CONSEIL DIALOGUE AVEC LES EXPERTS INDÉPENDANTS SUR LES SITUATIONS DES DROITS DE L’HOMME AU SOUDAN ET EN SOMALIE
Le Soudan indique que la signature définitive de l’accord de paix du 31 août dernier doit intervenir demain, samedi 3 octobre
Le Conseil des droits de l’homme a tenu cet après-midi, au titre de l’assistance technique et du renforcement des capacités, un dialogue renforcé avec l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme au Soudan, M. Aristide Nononsi, et un dialogue avec l’Experte indépendante sur la situation des droits de l’homme en Somalie, Mme Isha Dyfan.
S’agissant du premier pays, outre M. Nononsi, ont également nourri le dialogue les présentations de Mme Michelle Bachelet, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, et de M. Ali Ibn Abi Talib Abdelrahman Mahmoud, Représentant permanent du Soudan auprès des Nations Unies à Genève.
M. Mahmoud a indiqué que la signature définitive de l’accord de paix du 31 août dernier doit intervenir demain, samedi 3 octobre. Le Représentant permanent du Soudan s’est dit fier du travail accompli par son Gouvernement dans la reconstruction du système des droits de l'homme et du système de justice.
Mme Bachelet a remercié le Gouvernement du Soudan de son soutien à l’ouverture du Bureau du Haut-Commissariat à Khartoum. Elle a également salué l’accord de paix conclu cet été, de même que la décision du Soudan de créer un tribunal pénal spécial pour les crimes commis au Darfour et de coopérer avec la Cour pénale internationale. La Haute-Commissaire s’est néanmoins dite très préoccupée par des violences intercommunautaires dans l'est du Soudan et par des attaques contre des civils au Darfour.
M. Nononsi a pour sa part salué les mesures prises par le Gouvernement soudanais qui – a-t-il affirmé – constituent un progrès historique vers la réforme du système de justice pénale dans le pays. L’Expert indépendant a toutefois constaté que la discrimination et l'inégalité continuaient de sévir dans la société soudanaise et a souligné que les disparités sont toujours les causes profondes des troubles civils et des conflits au Soudan.
De nombreuses délégations* ont pris part au débat qui a suivi.
S’agissant de la Somalie, Mme Dyfan a constaté que cette année, le conflit armé prolongé et les crises humanitaires chroniques avaient été aggravés par la pandémie de COVID-19 et par une invasion de criquets pèlerins. Ces chocs ont fait peser un fardeau insupportable sur les infrastructures et les institutions déjà fragiles de la Somalie, a relevé la nouvelle Experte indépendante. Elle a jugé essentiel de veiller à ce que les auteurs de violations des droits de l'homme perpétrées en Somalie contre les défenseurs des droits de l'homme et les journalistes rendent compte de leurs actes.
La Somalie a fait une déclaration à titre de pays concerné, avant que de nombreuses délégations** n’engagent le dialogue avec l’Experte indépendante.
Lundi matin, à 10 heures, le Conseil se réunira en salle XIX du Palais des Nations pour entendre une mise à jour orale de la mission d’enquête qu’il avait chargée d’établir les faits et les circonstances de la situation des droits de l’homme dans toute la Libye. Le Conseil examinera ensuite les rapports issus de l’Examen périodique de la Guinée-Bissau et du Guyana. Le Conseil doit se prononcer, mardi et mercredi prochains, sur les quelque 36 projets de résolution et de décision dont il est saisi pour la présente session.
Les séances de la quarante-quatrième session du Conseil sont retransmises sur le site UN Web TV.
Dialogue renforcé sur la situation des droits de l’homme au Soudan
Dans sa résolution 42/35 (2019), le Conseil des droits de l’homme avait prié l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme au Soudan de lui présenter, dans le cadre d’un dialogue approfondi, un rapport (A/HRC/45/53 et Add.1 contenant les observations de l’État concerné en anglais) sur l’exécution de son mandat comprenant des recommandations relatives à l’assistance technique et au renforcement des capacités. Le Conseil tient aujourd’hui ce dialogue approfondi avec la participation de la Haute-Commissaire aux droits de l’homme, de l’Expert indépendant et du Représentant permanent du Soudan auprès des Nations Unies à Genève.
Présentations
MME MICHELLE BACHELET, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, a d’abord remercié le Gouvernement du Soudan de son soutien à l’ouverture du Bureau du Haut-Commissariat [à Khartoum], qui est maintenant opérationnel. Ce Bureau travaille en étroite collaboration avec la section des droits de l'homme de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD) et participe également à la mise en place de la Mission intégrée des Nations Unies pour l'assistance à la transition au Soudan (MINUATS).
La Haute-Commissaire a ensuite salué la signature d’un accord de paix il y a quelques semaines. En attendant un accord définitif, elle a félicité les parties d'avoir placé la justice et les droits de l'homme au cœur de cet accord et d'avoir accepté de créer un tribunal pénal spécial pour les crimes commis au Darfour et de coopérer avec la Cour pénale internationale.
Les récentes inondations sont très préoccupantes, surtout dans le contexte de la COVID-19, a poursuivi la Haute-Commissaire. Malgré les efforts du Gouvernement pour faire face à la pandémie, notamment par le biais de son programme de protection sociale pour les groupes vulnérables, la crise pourrait compromettre les progrès vers les objectifs de développement durable, a mis en garde Mme Bachelet.
Mme Bachelet s’est par ailleurs dite très préoccupée par les informations faisant état de violences intercommunautaires dans l'est du Soudan et d'attaques contre des civils au Darfour. Si la réaction du Gouvernement s'est améliorée, la répétition des violences met en évidence certains griefs fondamentaux, ce qui laisse penser que l'ambitieux programme de réforme doit encore se traduire par des améliorations sur le terrain.
En outre, les progrès inégaux du programme de réformes entre le niveau fédéral et les États (soudanais) se traduisent par des réponses qui sont loin de répondre aux attentes légitimes de la population en matière d'amélioration de la sécurité et des droits de l'homme, a constaté Mme Bachelet. Ainsi, les sit-in de protestation à Kutum et El Fasher ont mis en évidence des préoccupations en matière de protection des droits de l'homme, a estimé la Haute-Commissaire.
D’autre part, le retard dans l'administration de la justice pour les victimes de la dispersion violente de la manifestation pacifique à Khartoum, le 3 juin 2019, est également préoccupant. La Haute-Commissaire a prié le Gouvernement de soutenir la commission d'enquête nationale indépendante, pour que les victimes disposent de voies de recours efficaces.
Présentant ensuite son rapport, M. ARISTIDE NONONSI, Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme au Soudan, a salué les mesures prises par le Gouvernement, lesquelles – a-t-il affirmé – constituent un progrès historique dans le pays vers la réforme du système de justice pénale. M. Nononsi a invité le Gouvernement soudanais à réformer également la Commission nationale des droits de l’homme et à lui donner un mandat conforme aux Principes de Paris ; il l’a également invité à ratifier les instruments internationaux des droits de l’homme auxquels le Soudan n’est pas encore partie.
L’Expert indépendant s’est ensuite dit préoccupé par la décision du Comité national sur le démantèlement de l'ancien régime, le 22 août dernier, de relever le conseil d'administration de la Commission nationale des droits de l’homme et de placer ses locaux à Khartoum sous le contrôle militaire : cette décision constitue une violation de l'indépendance de l'institution nationale des droits de l'homme. De même, il semble que le Comité national sur le démantèlement de l'ancien régime ait décidé, toujours le 22 août, de révoquer 152 juges, ce qui constitue une violation de l'indépendance du pouvoir judiciaire, a mis en garde M. Nononsi.
D’autre part, la discrimination et l'inégalité continuent de sévir dans la société soudanaise, a constaté M. Nononsi. Les régions touchées par le conflit sont particulièrement défavorisées, l'extrême pauvreté restant très répandue et l'accès à la nourriture, à l'éducation, aux services de santé et à l'eau potable limité. Ces disparités sont toujours les causes profondes des troubles civils et des conflits au Soudan, a souligné l’Expert. En outre, le maintien du Soudan sur la liste des États soutenant le terrorisme établie par les États-Unis affecte la capacité du pays à accéder pleinement au système financier international, a noté M. Nononsi.
Enfin, face aux nombreux incidents de violence intercommunautaire qui ont été signalés dans les régions touchées par les conflits, l’Expert indépendant a recommandé au Gouvernement soudanais non seulement de mettre rapidement en œuvre sa stratégie globale de protection des civils, pour répondre au besoin immédiat de protection des civils au Soudan, mais aussi d’envisager d’autres mesures pour améliorer durablement la situation.
M. ALI IBN ABI TALIB ABDELRAHMAN MAHMOUD, Représentant permanent du Soudan auprès des Nations Unies à Genève, a précisé que l’accord de paix [mentionné par la Haute-Commissaire] avait été signé le 31 août après des négociations qui ont duré près d'un an avec le Front révolutionnaire soudanais, une alliance comprenant de nombreux mouvements armés dans les régions du Darfour et du Nil Bleu. La signature définitive de l’accord doit intervenir demain, samedi 3 octobre à Juba, capitale du Soudan du Sud. Dans la même volonté de parvenir à la paix et de mettre fin aux conflits armés, le Premier Ministre a signé un accord avec le Mouvement populaire de libération du Soudan/Nord dirigé par Abdulaziz Al-Hilu, a fait savoir le Représentant permanent.
Le Représentant permanent s’est dit fier du travail accompli en peu de temps par son Gouvernement dans la reconstruction du système des droits de l'homme et de justice, en faveur notamment de l'indépendance de la justice, de la primauté du droit et du principe de responsabilité (obligation redditionnelle). Des amendements ont été apportés au Code pénal, avec notamment l'abolition de la peine de mort pour les crimes commis par des mineurs, a ajouté le Représentant permanent du Soudan.
Le Gouvernement de transition a également œuvré à l'amélioration du statut des femmes dans la société, a-t-il poursuivi. Les lois discriminatoires contre les femmes ont été abolies, tandis que les mutilations génitales féminines sont désormais punies et que la loi a été modifiée pour permettre aux femmes de voyager avec leurs enfants sans le consentement préalable du père, a-t-il fait valoir. D’autres améliorations sont à signaler en ce qui concerne la garantie de la liberté de religion et de conviction, a-t-il ajouté.
Le Soudan souffre, depuis plusieurs décennies, de difficultés économiques dues à la guerre et aux sanctions qui lui ont été imposées, outre son inclusion dans la liste des États soutenant le terrorisme, a d’autre part souligné le Représentant permanent. Malgré cela, le Gouvernement de transition met tout en œuvre pour alléger ce lourd fardeau qui pèse sur les citoyens, sans compter les problèmes engendrés par la pandémie de COVID-19.
Le Gouvernement a également adopté un plan pour assurer la protection des civils au Darfour, a ajouté le Représentant permanent. S’agissant d’événements survenus dans un camp d'El Geneina, dans l'État du Darfour occidental, et impliquant des forces gouvernementales, il a indiqué que le commandement avait pris des mesures disciplinaires pour que les comportements incriminés ne se reproduisent pas.
Le Représentant permanent a enfin fait savoir que son Gouvernement avait lancé des invitations ouvertes aux procédures spéciales du Conseil.
Débat
Un groupe de pays a salué l’engagement du Gouvernement du Soudan en faveur des droits de l’homme et de la paix, engagement dont témoignera la signature demain de l’accord de paix. Les efforts du Gouvernement en faveur de la transition démocratique ont eux aussi été salués. Cependant, la situation économique difficile, la COVID-19 et des inondations catastrophiques rendent la vie très difficile pour la population soudanaise, a relevé ce groupe d’États. Comme de nombreux autres intervenants cet après-midi, il a appelé au retrait du Soudan de la liste des États qui soutiennent le terrorisme, pour l’aider à surmonter ses difficultés.
Un autre groupe d’États a salué les mesures encourageantes prises en moins d’une année par le Gouvernement soudanais, en particulier sa coopération avec le Haut-Commissariat aux droits de l’homme. Ce groupe d’États a appelé à la levée des sanctions économiques contre le Soudan et à l’allégement de sa dette extérieure.
Plusieurs orateurs ont appelé le Gouvernement soudanais à poursuivre ses efforts de paix en direction des groupes qui ne seront pas parties prenantes à l’accord qui doit être signé demain, 3 octobre 2020.
La nomination, pour la première fois au Soudan, de deux femmes à des postes de gouverneurs a été saluée, de même que la criminalisation des mutilations génitales féminines.
Des délégations ont fait observer que la persistance de violations des droits de l’homme et de violences sexuelles au Darfour, d’arrestations arbitraires et d’inégalités montrait qu’il reste au Soudan des progrès à accomplir. En outre, les institutions chargées de faire valoir la primauté du droit ont encore des difficultés à protéger les droits des civils, a-t-il été souligné. Une délégation a encouragé le Gouvernement à poursuivre ses efforts en matière de justice transitionnelle afin que les responsables de violations des droits de l'homme répondent de leurs actes et que ces violations ne se reproduisent plus. Plusieurs intervenants ont espéré que l’ancien Président du Soudan, M. Al-Bashir, serait traduit en justice.
Des organisations non gouvernementales (ONG) ont regretté que les services de renseignement continuent de procéder à des arrestations et à des tortures d’opposants au Soudan. D’autres menaces persistent contre certains chefs religieux, tandis que l’athéisme et le blasphème sont toujours interdits par le Code pénal, a-t-il été déploré.
Les ONG ont pointé une situation sécuritaire encore instable, en particulier dans les zones de conflit armé où des personnes sont déplacées de force, et plus récemment dans l'est du Soudan, où des civils ont été tués dans des conflits entre communautés. Il a été demandé que les violences contre les civils soient systématiquement sanctionnées.
L'assistance technique doit être adaptée aux besoins et aux priorités des États, et elle doit être fournie avec le consentement de l'État concerné, ont souligné plusieurs intervenants. Dans cette optique, la coopération du Soudan avec le Haut-Commissariat aux droits de l'homme permettra d'améliorer la promotion et la protection des droits de l'homme, a-t-il été affirmé. Un intervenant a demandé que le mandat de l’Expert indépendant sur le Soudan soit supprimé, compte tenu de l’ouverture du Bureau du Haut-Commissariat à Khartoum.
La communauté internationale a été appelée à aider le Soudan pour qu’il atteigne ses objectifs. Le Conseil a été prié, par plusieurs ONG, de maintenir la situation au Soudan à son ordre du jour.
*Liste des intervenants: Koweït (au nom du Groupe arabe), Union européenne, Islande, Burkina Faso (au nom du Groupe africain), Jordanie, Qatar, Allemagne, Sierra Leone, Belgique, France, Japon, Arabie saoudite, Libye, Sénégal, Iraq, Mauritanie, Maroc, Chine, Australie, Botswana, Arménie, Suisse, Pays-Bas, République de Corée, Bahreïn, Venezuela, Éthiopie, Fédération de Russie, Irlande, Yémen, Royaume-Uni, Soudan du Sud, Égypte, Espagne, Émirats arabes unis, Iran, Afghanistan, Érythrée, Tchad, Brésil, Algérie, Tunisie, Christian Solidarity Worldwide, World Evangelical Alliance, East and Horn of Africa Human Rights Defenders Project, British Humanist Association, Fédération internationale des ligues de droits de l’homme, Human Rights Watch, Next Century Foundation, Human Rights Information and Training Center, Amnesty International et Organisation mondiale contre la torture.
Réponses et conclusions
MME BACHELET a notamment indiqué que le Haut-Commissariat aiderait le Gouvernement soudanais à atteindre ses priorités, notamment pour ce qui est du renforcement de l’état de droit et de la prévention des violations des droits de l’homme.
Pour M. NONONSI, le plus important pour le Gouvernement soudanais est de mettre fin à l’impunité grâce au système de justice transitionnelle qui doit être créé, de protéger les civils et d’appliquer les dispositions de l’accord de paix. Cela nécessitera l’aide de la communauté internationale, a souligné l’Expert indépendant.
M. MAHMOUD a assuré que son Gouvernement était conscient des progrès qu’il lui reste à faire pour respecter les engagements pris lors de l’élection du Soudan au Conseil, l’an dernier. Le Soudan entend en particulier traduire en justice les auteurs de violations des droits de l’homme, y compris pour les crimes commis au Darfour, a assuré le Représentant permanent.
Dialogue avec l’Experte indépendante sur la situation des droits de l’homme en Somalie
Présentation du rapport
Le Conseil est saisi du Rapport de l’Experte indépendante chargée d’examiner la situation des droits de l’homme en Somalie (A/HRC/45/52)
MME ISHA DYFAN, Experte indépendante chargée d’examiner la situation des droits de l’homme en Somalie , a expliqué qu’étant donné la pandémie de COVID-19, elle n'a pas pu entreprendre une mission en Somalie et que son rapport est donc basé sur des consultations menées en ligne.
Cette année, a-t-elle poursuivi, le conflit armé prolongé et les crises humanitaires chroniques ont été aggravés par la pandémie COVID-19 et l’invasion de criquets pèlerins. Ces différents chocs ont fait peser un fardeau insupportable sur les infrastructures et les institutions déjà fragiles de la Somalie, a-t-elle souligné.
Tout en saluant les efforts des autorités somaliennes et de leurs partenaires internationaux pour faire face à la pandémie dans le contexte du conflit armé prolongé et de la crise humanitaire, elle s’est dite préoccupée par les attaques contre les travailleurs de la santé et les travailleurs humanitaires ; par un usage excessif de la force par les forces de l'ordre, entraînant la mort de civils ; par des violations du droit à la liberté d'expression et d'opinion ; et par une augmentation de la violence sexuelle et sexiste et des expulsions forcées pendant la pandémie.
Mme Dyfan a regretté que les progrès vers la création de l'institution nationale des droits de l'homme restent bloqués. Toutefois, elle s’est félicitée de la récente nomination d'un procureur spécial chargé d'enquêter sur les assassinats de journalistes et d'en assurer le suivi, afin de traduire en justice les personnes qui ont organisé, planifié et perpétré ces assassinats.
Il reste par ailleurs beaucoup à faire pour lutter contre les préjugés, la discrimination et la violence profondément enracinés auxquels les femmes et les filles continuent d'être soumises au quotidien dans le pays, a poursuivi l’Experte indépendante. Elle a en outre fait part de son extrême préoccupation suite au rejet par le Parlement fédéral du projet de loi sur les infractions sexuelles qui portait réforme de la loi en la matière – une loi dont les dispositions autorisant le mariage des enfants et le mariage forcé ont un impact négatif sur le bien-être des filles et des femmes et sur leurs droits à bénéficier des normes les plus élevées possibles en matière de santé physique et mentale et d'éducation.
Ces développements sont malheureusement des signes d'une possible régression des autorités somaliennes par rapport à leur engagement envers le droit international des droits de l'homme, a-t-elle estimé. Il est essentiel de protéger les femmes et les enfants et de garantir le respect de la liberté d'opinion et d'expression, notamment en veillant à ce que les auteurs de violations des droits de l'homme perpétrées contre les défenseurs des droits de l'homme et les journalistes rendent compte de leurs actes et en élargissant l'environnement jusqu’ici restrictif dans lequel ils opèrent, d'autant plus que la Somalie se prépare à ses prochaines élections.
Pays concerné
La Somalie a déclaré que la pandémie de COVID-19 a été freinée et réduite drastiquement grâce à l’action du Gouvernement. Les autorités durant cette période ont tout mis en œuvre pour préserver les droits, notamment des femmes, des enfants et des personnes âgées. Le pays va continuer d’œuvrer au renforcement du système de santé, a indiqué la délégation somalienne.
Le plan de développement national à l’horizon 2024 a développé une approche axée sur les droits de l’homme, a poursuivi la délégation. Est aussi prévue la création d’une institution nationale des droits de l’homme conforme aux Principes de Paris.
Les systèmes juridiques et sécuritaires ont été réformés afin de créer dans le pays un environnement social respectueux de tous les individus, a d’autre part fait valoir la délégation somalienne. Il reste néanmoins des défis à relever dans le domaine du climat ou dans celui du terrorisme, mais le pays doit pouvoir surmonter ces difficultés grâce au plan national de développement, a-t-elle assuré. Un consensus – validé par le Parlement – a par ailleurs pu être trouvé pour l’organisation des prochaines élections, a-t-elle souligné. La Somalie a affiché sa volonté de coopérer avec les différents mécanismes des droits de l’homme et s’est dite attachée à respecter ses engagements internationaux dans ce domaine.
Débat
Plusieurs délégations ont salué les efforts et les progrès de la Somalie dans le domaine de la promotion et de la protection des droits de l’homme. L’une d’elles a mis en exergue le plan national de développement comme preuve de la bonne volonté des autorités somaliennes dans ce domaine.
Néanmoins, nombre d’intervenants ont dénoncé l’augmentation des violences sexuelles et des mariages forcés. La Somalie devrait adopter le projet de loi sur les mutilations génitales féminines, ont par ailleurs plaidé plusieurs délégations. A par ailleurs été regrettée l’absence dans la législation du pays d’une définition de l’enfant, ce qui n’est pas en adéquation avec les normes internationales. De nombreuses délégations ont dénoncé le projet de loi sur le mariage, qui autorise le mariage des enfants, et ont invité le pays à adopter le projet de loi criminalisant les violences sexuelles.
Plusieurs délégations ont condamné les détentions arbitraires et les menaces de mort visant des journalistes et des défenseurs des droits de l’homme. Il faut que les autorités somaliennes créent un environnement favorable aux médias et à la société civile, a-t-il été souligné. Une ONG a relevé que la Somalie était le pire pays d’Afrique pour ce qui concerne la sécurité des journalistes.
La Somalie doit lutter contre l’impunité notamment en adoptant un nouveau code pénal et en réformant le domaine de la justice, a-t-il également été affirmé.
Plusieurs délégations ont demandé que des élections libres se tiennent dans les délais prévus et ont souligné le rôle des Nations Unies et de l’Union africaine dans ce processus.
Plusieurs délégations ont condamné les attentats ayant endeuillé le pays qui ont été perpétrés par des groupes terroristes, notamment Al-Shabaab.
La communauté internationale doit respecter la souveraineté de l’État et soutenir la Somalie dans ses efforts, eu égard aux circonstances difficiles que traverse ce pays, a-t-il également été déclaré.
**Liste des intervenants : Suède (au nom d’un groupe de pays), Union européenne, Burkina Faso (au nom du Groupe africain), Qatar, Fonds des Nations Unies pour l’enfance, Italie, Sierra Leone, Belgique, France, Libye, Sénégal, Mauritanie, Chine, Australie, Botswana, Pays-Bas, Venezuela, Espagne, Éthiopie, Fédération de Russie, Soudan, Irlande, Yémen, Royaume-Uni, Égypte, Turquie, Érythrée, East and Horn Africa Human Rights Defenders Project, Reporters sans frontières international, The Next Century Foundation, Elizka Relief Foundation, Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme, Ingénieurs du monde, Fédération internationale des journalistes, Institut national pour les droits et le développement.
Réponses et conclusion de l’Experte indépendante
MME DYFAN a indiqué qu’elle veillerait au suivi du projet de loi sur les violences sexuelles afin de vérifier qu’il soit bel et bien étudié et finalement adopté par le Parlement. Elle a ajouté qu’elle s’intéresserait à la question des mariages précoces et forcés. L’Experte indépendante a souhaité que l’aide de la communauté internationale à la Somalie s’inscrive dans la durée.
HRC20.116F