Fil d'Ariane
LE CONSEIL SE PENCHE SUR LES DROITS DE L’HOMME DES DÉTENUS ET NOTAMMENT DES FEMMES DÉTENUES
Il entame par ailleurs un dialogue sur la situation des droits de l’homme au Venezuela
Le Conseil des droits de l’homme a tenu ce matin sa réunion-débat annuelle consacrée à la coopération technique et au renforcement des capacités, consacrée cette année à défense des droits de l’homme des détenus, notamment des femmes détenues et délinquantes, dans le cadre de l’application des Règles Mandela et des Règles de Bangkok. Le Conseil a ensuite entamé son dialogue sur la situation des droits de l’homme au Venezuela, après que la Haute-Commissaire adjointe aux droits de l’homme, Mme Nada Al-Nashif, eut présenté le rapport de la Haute-Commissaire sur la question, conformément à la résolution 42/4 du Conseil.
Ouvrant la réunion-débat annuelle sur la coopération technique et le renforcement des capacités, Mme Georgette Gagnon, Directrice de la Division des opérations sur le terrain et de la coopération technique au Haut-Commissariat aux droits de l'homme, a fait observer qu’à l'échelle mondiale, les femmes représentent entre 2 et 10% de la population carcérale, mais que leur nombre augmente rapidement - plus rapidement que celui des détenus de sexe masculin. De nombreuses détenues subissent des traitements inhumains et dégradants lors de leur arrestation, de leur interrogatoire et de leur détention, a-t-elle souligné.
Partout dans le monde, la « sur-incarcération » entraîne une surpopulation dans les lieux de détention et un large éventail de préjudices sociaux graves. La COVID-19 rend encore plus urgent de promouvoir des formes alternatives de sanction, a fait observer Mme Gagnon.
Animé par M. Sek Wannamethee, Représentant permanent de la Thaïlande auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, le débat a également compté avec la participation des panélistes suivants, qui ont fait des exposés : M. Wisit Wisitsora-At, Secrétaire permanent au Ministère de la justice de la Thaïlande ; M. Sabri Bachtobji, Représentant permanent de la Tunisie auprès des Nations Unies à Genève ; Mme Olivia Rope, Directrice de la stratégie et du plaidoyer international chez Penal Reform International ; et M. Sven Pfeiffer, spécialiste de la prévention du crime et de la justice pénale à la Section de la justice de la Division des opérations de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC). Un grand nombre de délégations* ont ensuite pris part au débat. Des recherches spécifiques s’avèrent nécessaires pour identifier pourquoi les femmes sont de plus en plus souvent incarcérées, a-t-il notamment été souligné.
Présentant le rapport sur la situation des droits de l’homme au Venezuela, la Haute-Commissaire adjointe aux droits de l'homme a d’abord salué les efforts du Gouvernement vénézuélien pour coopérer avec le Haut-Commissariat et indiqué que ce rapport prend note des efforts du Gouvernement pour améliorer l'accès à la justice et l'indépendance du système judiciaire, ainsi que pour enquêter sur les violations des droits de l'homme qui auraient été commises par les forces de sécurité. Le rapport expose en outre les facteurs attentatoires à l'indépendance des juges, a-t-elle toutefois ajouté.
Le rapport relève par ailleurs le recours au système de justice militaire pour les civils, alors qu’il devrait être exceptionnel. En outre, depuis 2018, les tribunaux antiterroristes sont de plus en plus utilisés pour poursuivre des affaires politiquement sensibles, a poursuivi Mme Al-Nashif. D’autre part, a-t-elle indiqué, le manque de transparence sur les activités minières dans l'Arco Minero a empêché le Haut-Commissariat de déterminer dans quelle mesure le Gouvernement est parvenu à régulariser le secteur et à freiner l'exploitation illégale.
Rejetant ce rapport comme la résolution qui en est à l’origine, le Venezuela a ensuite fait une déclaration en tant que pays concerné, avant qu’un certain nombre de délégations** ne s’expriment.
Cet après-midi, à 15 heures, le Conseil doit achever ce dialogue concernant la situation des droits de l’homme au Venezuela, avant d’entendre la présentation du rapport du Groupe de travail sur la question des droits de l’homme et des sociétés transnationales et autres entreprises, et de tenir un dialogue avec la Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines de racisme.
Les séances de la quarante-quatrième session du Conseil sont retransmises sur le site UN Web TV .
Réunion débat annuel consacré à la coopération technique et au renforcement des capacités : «Défendre les droits de l’homme des détenus, notamment des femmes détenues et délinquantes, dans le cadre de l’application des Règles Mandela et des Règles de Bangkok
Déclaration d’ouverture
Mme Georgette Gagnon, Directrice de la Division des opérations sur le terrain et de la coopération technique au Haut-Commissariat aux droits de l'homme , a déclaré que le thème de la discussion de cette année est particulièrement pertinent compte tenu des défis que pose la COVID-19, en termes de contagion et de traitement, dans les prisons et les centres de détention.
Cette année marque le 10ème anniversaire des Règles des Nations Unies pour le traitement des femmes détenues et les mesures non privatives de liberté pour les femmes délinquantes - connues sous le nom de Règles de Bangkok – et c’est également le 65ème anniversaire de l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus ( Règles Nelson Mandela , adoptées lors du premier Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants), a rappelé Mme Gagnon. Sur la base de la dignité et de l’égale valeur inhérentes à tous les êtres humains, les Règles Nelson Mandela fournissent aux États des directives détaillées pour protéger les droits des personnes privées de liberté. Ces directives interdisent la torture et d'autres formes de mauvais traitements et offrent des conseils pratiques sur des questions allant des mesures disciplinaires aux services médicaux, a précisé Mme Gagnon.
À l'échelle mondiale, a poursuivi la Directrice de la Division des opérations sur le terrain et de la coopération technique, les femmes représentent entre 2 et 10% de la population carcérale, mais leur nombre augmente rapidement - plus rapidement que celui des détenus de sexe masculin. De nombreuses détenues subissent des traitements inhumains et dégradants lors de leur arrestation, de leur interrogatoire et de leur détention : fouilles corporelles invasives ; viol et menaces de viol ; «tests de virginité» ; et autres actes, insultes et humiliations à caractère sexuel. Les Règles de Bangkok répondent aux besoins spécifiques des femmes détenues et exigent les États de réfléchir aux conséquences de leur incarcération.
L'expérience du Haut-Commissariat, à travers de nombreux programmes de coopération technique de par le monde, montre que les projets d'assistance directe peuvent avoir un large impact positif sur le traitement des détenus, a souligné Mme Gagnon.
Partout dans le monde, la « sur-incarcération » entraîne une surpopulation dans les lieux de détention et un large éventail de préjudices sociaux graves. La COVID-19 rend encore plus urgent de promouvoir des formes alternatives de sanction, a fait observer Mme Gagnon.
Animant le débat, M. SEK WANNAMETHEE, Représentant permanent de la Thaïlande auprès de l’Office des Nations Unies à Genève , a affirmé que les Règles Nelson Mandela et les Règles de Bangkok ont démontré leur pertinence et leur efficacité.
Exposés des panélistes
Dans une déclaration enregistrée concernant l’application pratique des Règles de Bangkok, M. WISIT WISITSORA-AT, Secrétaire permanent du Ministère de la justice de la Thaïlande, a fait état des réalisations de son pays concernant la santé des personnes détenues, avec notamment la fourniture d'équipements et de matériel médical ainsi que des synergies entre les secteurs public et privé. Grâce à ces efforts, parmi d’autres, la Thaïlande ne recense que deux prisonniers infectés par la COVID-19, sur 380 000 détenus, a-t-il fait valoir.
Les autorités travaillent aussi à l’agrandissement des dortoirs pour respecter la distanciation sociale en période de pandémie et améliorer la ventilation et les conditions de couchage, pour mise en conformité avec les dispositions des Règles Nelson Mandela, a poursuivi le Secrétaire permanent. Enfin, la Commission nationale pour la gestion de l'administration de la justice a approuvé un projet de loi sur le casier judiciaire dont l'objectif est d'améliorer la collecte, la gestion et les mesures de divulgation du casier judiciaire afin de ne pas stigmatiser les anciens détenus et de leur donner un nouveau départ dans la vie, a-t-il indiqué.
M. SABRI BACHTOBJI, Représentant permanent de la Tunisie auprès des Nations Unies à Genève , a déclaré que la pandémie actuelle ne faisait qu’accroitre les problèmes des personnes les plus vulnérables, notamment dans le domaine des droits de l’homme. La Tunisie a développé un plan national en réponse à la COVID-19 qui couvre notamment le domaine des prisons.
S’agissant du droit des détenus, a poursuivi le Représentant permanent de la Tunisie, tous les détenus ont le droit d’être représentés par un avocat. Une loi de 2002 prévoit par ailleurs une amélioration importante de la condition des prisonniers, a-t-il indiqué. S’agissant plus particulièrement des femmes détenues, de nombreuses mesures ont été prises pour mettre en œuvre les Règles Mandela aux fins notamment du respect de tous leurs droits, du respect des normes d’hygiène dans tous les endroits de la prison, et de l’accueil des enfants des prisonnières. Les détenues ont le droit de travailler dans des ateliers et de recevoir une contrepartie pécuniaire, a ajouté M. Bachtobji. La Tunisie est disposée à faire part de son expérience dans ce domaine à la communauté internationale, a-t-il déclaré.
MME OLIVIA ROPE, Directrice de la stratégie et du plaidoyer international chez Penal Reform International , a souligné que, depuis l'apparition de la COVID-19, de nombreuses personnes détenues sont soumises à des régimes d’isolement pour les protéger d'une infection. Or, ces régimes auront des conséquences potentiellement catastrophiques sur la santé mentale des prisonniers et du personnel pénitentiaire, a-t-elle averti. En l’état actuel des choses, à notre connaissance, au moins 102 000 personnes en prison auraient été testées positives à la COVID-19 dans 88 pays, et plus de 1500 personnes sont mortes dans les prisons de 36 pays, a indiqué Mme Rope.
Une réforme urgente et systémique est donc nécessaire et c'est là qu'interviennent les Règles Nelson Mandela et les Règles de Bangkok, a poursuivi Mme Rope. Ces normes doivent guider les autorités non seulement en "temps normal", mais aussi en temps de crise, a-t-elle souligné. Les mesures d’isolement cellulaire ne devraient être prises que dans des circonstances exceptionnelles et après avis médical, a-t-elle indiqué. Mme Rope a d’autre part fait observer que si la surpopulation carcérale ne diminue pas, il sera difficile de mettre en place un régime carcéral basé sur la réhabilitation qui puisse protéger la santé des détenus. Les efforts visant à inverser l'augmentation de la population carcérale féminine – laquelle est en grande partie due aux politiques de lutte contre la drogue et à la criminalisation de la pauvreté – sont dans ce contexte essentiels.
M. SVEN PFEIFFER, spécialiste de la prévention du crime et de la justice pénale à la Section de la justice de la Division des opérations de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), a indiqué qu’en tant que gardien des Règles Nelson Mandela, des Règles de Bangkok et des Règles de Tokyo (Règles minima des Nations Unies pour l'élaboration de mesures non privatives de liberté), l’Office soutient actuellement plus de quarante États membres dans le monde entier en termes de coopération technique et de renforcement des capacités.
Les Règles de Bangkok jouent un rôle essentiel dans l’effort visant à tenir compte des besoins des femmes détenues, a souligné le spécialiste. Bien que le nombre de femmes détenues ait continué à augmenter de manière disproportionnée, l’ONUDC a documenté plusieurs bonnes pratiques en prison, allant de services de soins de santé spécifiques au genre à des espaces dédiés aux enfants vivant avec leur mère détenue, a-t-il fait savoir.
Un autre enseignement important est que la réforme des prisons concerne autant les droits de l'homme des détenus à titre individuel que la sécurité et la santé publiques, a poursuivi M. Pfeiffer. En fait, il a été prouvé que les investissements dans le traitement approprié des prisonniers réduisent la récidive à leur libération, a-t-il souligné. Quant aux répercussions de la COVID-19, le virus s'est rapidement propagé parmi les prisonniers dans plus de 80 pays, ce qui non seulement a affecté la santé des prisonniers et du personnel pénitentiaire, mais a aussi fait des prisons surchargées un risque pour la santé publique de tous.
L'UNODC aide les États Membres à affronter ces problèmes en fournissant aux prisons des équipements de protection individuelle (EPI) et des conseils techniques. Le cours en ligne sur les Règles Nelson Mandela de l'UNODC a été suivi, jusqu’en en juillet 2020, par plus de 25 000 utilisateurs dans 90 pays, a précisé M. Pfeiffer.
Aperçu du débat
Le rôle important que jouent l'ONUDC et d’autres organisations internationales compétentes pour soutenir les Etats dans le cadre de leurs mandats respectifs a été souligné. En effet, de nombreux pays en développement ne sont pas en mesure d'appliquer pleinement les Règles de Bangkok en raison de contraintes budgétaires, a-t-il été rappelé. Un groupe d’États a insisté sur le fait que la fourniture de l’assistance technique devait se faire à la demande et en partenariat avec les pays bénéficiaires, et dans le respect de leur souveraineté. Plusieurs pays se sont réjouis de l’assistance technique apportée par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme pour les aider à mettre en œuvre les Règles de Bangkok et les Règles Mandela.
Plusieurs délégations ont souligné que les mesures prises pour contenir la pandémie de COVID-19 ne devaient pas porter atteinte aux droits fondamentaux des personnes détenues. Au regard de la propagation de la COVID-19 en milieu carcéral, beaucoup d’États ont souscrit à l’appel de la Haute-Commissaire aux droits de l’homme visant à réduire la surpopulation dans les prisons et autres centres fermés, a fait observer une délégation.
ONU Femmes a pour sa part demandé aux parties responsables de garantir la santé et la sécurité des femmes privées de liberté. En outre, pour éviter de plonger les femmes qui sortent de prison dans la détresse économique et sociale, leur remise en liberté doit s'accompagner d’aides économiques et de services de protection sociale efficaces, a-t-il été souligné. Préoccupée par l'augmentation constante de la population carcérale féminine dans le monde, une délégation a estimé que des recherches spécifiques à chaque pays sont nécessaires pour expliquer pourquoi les femmes sont de plus en plus souvent incarcérées.
Une délégation s’est enquise de la manière de faire respecter les Règles Nelson Mandela dans les territoires sous occupation ou contestés.
Des organisations non gouvernementales ont appelé le Brésil à contenir la progression de la pandémie de coronavirus au sein de la population carcérale et à appliquer les Règles Mandela et les Règles de Bangkok. Une ONG a décrit l’aide technique qu’elle fournit à plusieurs pays pour la prise en charge des enfants en conflit avec la loi.
*Liste des intervenants : Union européenne, Azerbaïdjan (au nom du Mouvement des non-alignés), Viet Nam (au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est), ONU Femmes, Qatar, Pakistan, Sénégal, Arménie, Venezuela, Inde, Philippines, Iran, Cuba, Botswana, Costa Rica, Iraq, Maroc, Égypte, Népal, Indonésie, Vanuatu, Maldives, Cambodge, Jordanie, Brésil, Conectas Direitos Humanos, Comité consultatif mondial de la Société des amis - Quakers, Justiça Global, International Service for Human Rights, IDPC Consortium,Americans for Democracy & Human Rights in Bahrain Inc, Global Institute for Water, Environment and Health, Institut international pour les droits et le développement.
Conclusion des panélistes
M. PFEIFFER a notamment indiqué que l’ONUDC veillait à promouvoir et protéger les droits des enfants dont les mères sont en prison. L’Office soutient l’idée d’élaborer un manuel dans ce domaine, a-t-il précisé.
Les États devraient effectivement, comme cela a été suggéré durant ce débat, mener des analyses afin d’identifier les causes de l’augmentation du nombre de détenues dans les prisons, a poursuivi M. Pfeiffer, faisant état de premières études en la matière qui laissent apparaître que la majorité des femmes qui se retrouvent en prison sont issues de milieux défavorisées ou de minorités et sont incarcérées pour des délits souvent mineurs liés à la drogue. M. Pfeiffer a indiqué que l’ONUDC avait publié des recommandations concernant les mesures alternatives à l’emprisonnement.
MME ROPE a fait observer que bon nombre de dispositions des Règles Mandela et des Règles de Bangkok peuvent être appliquées sans financement supplémentaire. Penal Reform International a développé en la matière différents outils dont peuvent s’inspirer les États.
La surpopulation carcérale est le défi le plus important, au regard du nombre record de femmes emprisonnées actuellement, a poursuivi Mme Rope, faisant en outre observer que les peines prononcées deviennent de plus en plus lourdes : le nombre de personnes condamnées à perpétuité a augmenté de 84% en 14 ans.
Il faut analyser de manière globale l’ensemble des conséquences de la COVID-19 sur la situation des détenus et des détenues, a ajouté Mme Rope.
M. BACHTOBJI a quant à lui déclaré qu’il fallait réfléchir au type de société auquel le monde aspire. Il faut désenclaver l’univers carcéral et donc permettre l’accès aux prisons, afin de lutter contre les abus et de pouvoir apprécier la situation des prisonniers qui s’y trouvent, a-t-il indiqué. Il faut en outre laisser la possibilité de réhabiliter les détenus une fois qu’ils sortent de prison, a également souligné le Représentant permanent de la Tunisie. Il a par ailleurs plaidé pour la mise en œuvre de mesures alternatives à la privation de liberté.
Dialogue sur la situation des droits de l’homme au Venezuela
Présentation du rapport
Le Conseil est saisi d’un rapport du Haut-Commissariat sur la situation des droits de l’homme en République bolivarienne du Venezuela, mettant l’accent sur l’indépendance du système judiciaire et l’accès à la justice, notamment en ce qui concerne les violations des droits économiques et sociaux, ainsi que sur la situation des droits de l’homme dans la région d’Arco Minero del Orinoco ( A/HRC/44/54 , en anglais).
Présentant ce rapport, MME NADA AL-NASHIF, Haute-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, a d’abord salué les efforts du Gouvernement vénézuélien pour coopérer avec le Haut-Commissariat. Le rapport note les efforts du Gouvernement pour améliorer l'accès à la justice et l'indépendance du système judiciaire, ainsi que pour enquêter sur les violations des droits de l'homme qui auraient été commises par les forces de sécurité, a ajouté la Haute-Commissaire adjointe. Le rapport expose en outre les facteurs attentatoires à l'indépendance des juges, telles que les conditions de nomination et les pressions politiques, y compris les menaces de révocation, a-t-elle fait observer.
Le rapport, a poursuivi Mme Al-Nashif, constate que des réformes doivent être appliquées pour que le pouvoir judiciaire remplisse son rôle de garant des droits de l'homme, contribue à la responsabilisation en cas de violation de ces droits et facilite l'accès à la justice pour les victimes, y compris les femmes. Le rapport relève par ailleurs le recours au système de justice militaire pour les civils, alors qu’il devrait être exceptionnel. En outre, depuis 2018, les tribunaux antiterroristes sont de plus en plus utilisés pour poursuivre des affaires politiquement sensibles.
D’autre part, a indiqué Mme Al-Nashif, le manque de transparence sur les activités minières dans l'Arco Minero a empêché le Haut-Commissariat de déterminer dans quelle mesure le Gouvernement est parvenu à régulariser le secteur et à freiner l'exploitation illégale. Selon des témoignages, une grande partie des activités minières reste sous le contrôle d'éléments criminels organisés ou armés. Le rapport met en évidence un modèle d'exploitation du travail, y compris le travail des enfants, et fait référence à des cas de traite des êtres humains et d'exploitation sexuelle. Le rapport constate également que les mineurs doivent donner une grande partie de l'or qu'ils extraient à des groupes criminels et armés. Malgré la présence de forces militaires et de sécurité dans la zone d'Arco Minero, les autorités ne se sont pas encore pleinement acquittées de leur obligation de prévenir, d'enquêter et de sanctionner les violations des droits de l'homme liées aux opérations minières, constate le rapport.
Le rapport propose des recommandations au Gouvernement pour faire face à l'ensemble des problèmes de droits de l'homme documentés. Le Haut-Commissariat est prêt à continuer à fournir une assistance technique aux autorités et à soutenir les efforts visant à améliorer la situation des droits de l'homme au Venezuela, a assuré Mme Al-Nashif.
Pays concerné
Le Venezuela a exprimé son rejet des résolutions qui vise un pays spécifique sans l’accord de celui-ci et a plaidé pour une approche non sélective et non politisée s’agissant des questions de droits de l’homme. C’est une résolution adoptée par un petit nombre de pays qui traînent de lourdes casseroles qui a donné lieu à cette enquête ; en fait, ces pays veulent cacher leur propre crise sociale, a déclaré la délégation vénézuélienne, avant de déplorer le gaspillage de ressources auquel donne lieu la mise en œuvre cette résolution. Les auteurs de la résolution 42/4 du Conseil visent en fait à entraver le dialogue et c’est pourquoi le Venezuela a rejeté ce rapport : à aucun moment le pays n’a consenti à participer à son élaboration et il rejette toutes les recommandations qu’il contient. Le Venezuela est victime d’une agression multiple dirigée contre lui par les États-Unis et constitutive de crime contre l’humanité, a déclaré la délégation.
Aperçu du dialogue
Les délégations se sont généralement félicitées de la coopération du Gouvernement du Venezuela avec le Haut-Commissariat et ont appelé à la poursuite de cette collaboration, soutenant notamment l’ouverture d’un bureau sur place par le Haut-Commissariat.
Mais les délégations ont aussi exprimé leur préoccupation face à ce qu’elles ont considéré comme une répression exercée contre les opposants politiques au Venezuela, avec des cas persistants de détention arbitraire et de torture, et des exécutions extrajudiciaires de la part des forces de sécurité. Ont également été jugées préoccupantes les violations des droits économiques et sociaux, les restrictions et les attaques croissantes visant la liberté d'expression et la liberté des médias, ainsi que la détérioration de la situation des droits de l'homme des peuples indigènes.
Plusieurs délégations ont fait part de leur inquiétude face à l'aggravation de la crise politique et la poursuite du rétrécissement de l'espace démocratique et politique au Venezuela. Il a été rappelé que la crise doit être résolue par une solution fondée sur des élections crédibles, la reconnaissance du rôle et de l'indépendance de toutes les institutions démocratiquement élues – notamment l'Assemblée nationale – et la libération de tous les prisonniers politiques.
Un intervenant a déploré la décision de l’Assemblée nationale constituante vénézuélienne – qu’il a qualifiée d’illégitime – de lancer des poursuites pénales contre José Guerra, Tomás Guanipa, Juan Pablo García et Rafael Guzmán. La nomination «unilatérale» d'un nouveau Conseil électoral national par la Cour suprême de justice a été critiquée à plusieurs reprises, de même que le «manque d’indépendance» de la justice vénézuélienne.
Mais d’autres délégations ont, pour leur part, condamné des approches «motivées par des considérations politiques» au sein du Conseil – approches qu’elles ont jugées contre-productives et nuisibles. Elles ont appelé le Haut-Commissariat à respecter les principes de souveraineté des États et de non-ingérence dans leurs affaires intérieures. Un intervenant a critiqué les «révolutions de couleur» d'inspiration extérieure, qui détruisent les fondements de l'État en favorisant le double pouvoir et en refusant le «gouvernement légitime».
Une autre délégation a condamné les intentions de certains d'utiliser ce Conseil pour mener «une guerre non conventionnelle contre le Venezuela» ; elle a condamné une «campagne sans précédent de diabolisation politique et médiatique avec laquelle les États-Unis cherchent à justifier une agression militaire» contre le Venezuela.
Enfin, il a été souligné que l'exploitation minière illégale et le crime organisé non seulement menacent les droits des travailleurs, des peuples indigènes et des habitants de l'Arc minier de l'Orénoque, mais privent aussi tous les Vénézuéliens de ressources, par la corruption.
Ce dialogue se poursuivra cet après-midi à 15 heures.
**Liste des intervenants : Union européenne, Pérou (au nom d’un groupe de pays), Allemagne, République populaire démocratique de Corée, Japon, France, Fédération de Russie, Équateur, Australie, Portugal, Espagne, Luxembourg, Brésil, Colombie, Croatie, République tchèque, Danemark, Pays-Bas, Autriche, Slovénie, Uruguay, Suisse et Géorgie.
HRC20/075F