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LE CONSEIL DES DROITS DE L’HOMME TIENT UNE RÉUNION-DÉBAT A L’OCCASION DU 25E ANNIVERSAIRE DE LA DÉCLARATION ET DU PROGRAMME D’ACTION DE BEIJING

Compte rendu de séance

Le Conseil des droits de l'homme a tenu, ce matin, une réunion-débat pour commémorer le vingt-cinquième anniversaire de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing, adoptés à l’occasion de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes tenue à Beijing du 4 au 15 septembre 1995.

La réunion a été ouverte par Mme Elisabeth Tichy-Fisslberger, Présidente du Conseil des droits de l’homme. Mme Michelle Bachelet, Haute-Commissaire aux droits de l’homme, ainsi que Mme Trine Rask Thygesen, Secrétaire d’État de la politique de développement du Danemark, et M. Xu Chen, Représentant permanent de la Chine auprès des Nations Unies à Genève, ont fait des déclarations liminaires.

Ont ensuite fait des exposés en tant que panélistes: Mme Phumzile Mlambo-Ngcuka, Directrice exécutive d’ONU-femmes ; Mme Bandana Rana, Vice-Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes ; et Mme Magalys Arocha-Dominguez, Experte sur les droits de l’homme et l’égalité de genre.

Soulignant le caractère « révolutionnaire » des textes de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing, Mme Bachelet a notamment rappelé que les droits des femmes sont des droits humains et que leur universalité et leur diversité ne sont plus négociables. La Déclaration et le Programme d’action de Beijing ne sont pas une concession des États mais la reconnaissance pure et simple d’une réalité, a-t-elle insisté.

Mme Thygesen a invité à mettre un terme à la régression constatée au niveau mondial s’agissant des progrès accomplis et à réfléchir à la manière de tenir les promesses faites à Beijing.

M. Xu Chen a notamment fait valoir que depuis la Conférence de Beijing, 78% des Etats ont mis en place des programmes spécifiques visant l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes.

Mme Mlambo-Ngcuka a fait observer que pas un seul pays n’a encore réalisé l’égalité entre hommes et femmes et que les progrès sont lents et inégaux, sans compter que des reculs importants ont été constatés ces dernières années. De son côté, ONU-Femmes essaie de coordonner son action pour mobiliser des parties prenantes qui n’étaient pas à Beijing, comme la jeunesse et les religieux, afin de faire émerger de nouvelles idées et ressources, a-t-elle indiqué.

Mme Rana a souligné qu’avec son cadre législatif contraignant, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes est le mécanisme le plus solide pour la promotion et la protection des droits fondamentaux des femmes.

Mme Arocha Dominguez a évoqué les pressions croissantes des mouvements réactionnaires et de certaines autorités religieuses qui veulent remettre les acquis en question et a souligné que tant que les inégalités demeureront, tant que les richesses seront concentrées dans les mains de quelques-uns, tant que les comportements machistes continueront, il n’y aura pas d’égalité entre hommes et femmes.


De nombreux intervenants* ont pris part au débat qui a suivi ces interventions.
À partir de 11 heures, le Conseil devait poursuivre son débat de haut niveau entamé hier.


Réunion débat de haut niveau à l’occasion de la célébration du vingt-cinquième anniversaire de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing

Déclarations d’ouverture

MME MICHELLE BACHELET, Haute-Commissaire des Nations Unies aux drroits de l’homme, a déclaré que la Conférence de Beijing et les autres conférences mondiales l’ayant précédée ont vu l’émergence du mouvement féministes sous le cri de ralliement : « les femmes ont des droits humains » et ne recherchent pas de « droits particuliers ». Elles ont conspué les comportements sexistes et discriminatoires à leur encontre et exigé des changements concrets. Il y a 25 ans, la Déclaration et le Programme d’action de Beijing ont constitué des textes « révolutionnaires » qui ont ouvert la voie à la récolte de davantage de données ventilées [sur ces problématiques]. Depuis, les Etats membres de l’Organisation internationale du Travail (OIT), par exemple, ont adopté des résolutions reconnaissant les droits des travailleuses, y compris migrantes et domestiques.

S’est en outre opéré un changement en ce qui concerne les législations relatives aux pratiques préjudiciables (aux femmes et aux filles) et à l’accès équitable à la justice, à l’éducation et à la santé, a poursuivi la Haute-Commissaire. Les droits des femmes sont des droits humains et leur universalité et leur diversité ne sont plus négociables, a-t-elle souligné, avant d’attirer l’attention sur les droits relatifs à la santé génésique et reproductive. La Déclaration et le Programme d’action de Beijing ne sont pas une concession des Etats mais bien la reconnaissance pure et simple d’une réalité, a conclu Mme Bachelet, avant d’encourager à davantage d’action.

MME TRINE RASK THYGESEN, Secrétaire d’Etat pour la politique de développement du Danemark, a rappelé que le Danemark avait accueilli en 1980 la Deuxième Conférence mondiale sur les femmes et a souligné que le pays travaille activement, sur son territoire et à l’étranger, pour s’assurer que les femmes et les filles aient le droit de décider de leur propre corps.
Dans deux pays sur trois, autant de filles que de garçons sont aujourd’hui scolarisés au niveau du primaire ; beaucoup plus de femmes sont désormais entrées sur le marché du travail et la mortalité maternelle a chuté de 40%, s’est félicitée la Secrétaire d’Etat. Mais une femme sur trois subit encore des violences physiques ou sexuelles de son vivant et, en moyenne, les hommes touchent 63% de plus [en termes de salaires] que les femmes, a-t-elle regretté, estimant que l’engagement pris à Beijing reste plus pertinent que jamais. Il convient de mettre un terme à la régression constatée au niveau mondial s’agissant des progrès accomplis et réfléchir à la manière de tenir les promesses, a-t-elle poursuivi. Nous avons promis l’égalité des droits et des chances il y a 25 ans à Beijing : il faut maintenant en faire une réalité, a-t-elle conclu.

M. XU CHEN, Représentant permanent de la République populaire de Chine auprès des Nations Unies à Genève, a indiqué que depuis la Conférence de Beijing, 78% des Etats ont mis en place des programmes spécifiques visant l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes. La Chine adhère au principe constitutionnel d’égalité des femmes et a aménagé sa législation à cet égard, a-t-il poursuivi, avant d’ajouter que la condition de la femme a fait un bond en avant et de rappeler qu’à l’heure actuelle, les femmes médecins et les infirmières travaillent dur pour parer au coronavirus.

D’autre part, a poursuivi le Représentant permanent de la Chine, les droits en matière de partage des ressources sont chaque jour davantage reconnus dans le monde. Cependant, la communauté internationale doit encore mener une action concertée, par la promotion du droit au développement, sur la base du Programme d’action de Beijing. Il s’agit en particulier de prendre des mesures appropriées consacrant l’accès à l’éducation, à la santé et au développement, ainsi que d’accroître la coopération en prenant en considération les besoins des femmes, en particulier dans le contexte du changement climatique, de la migration et des réfugiés.

Exposés des panélistes

MME PHUMZILE MLAMBO-NGCUKA, Directrice générale d’ONU-Femmes a noté que les efforts pour l’égalité entre hommes et femmes se sont accélérés dans de nombreux pays, y compris par un processus de révision des lois qui étaient discriminatoires à l’égard des femmes et par le biais d’investissements dans l’éducation et la santé. Mais, malgré cela, pas un seul pays n’a réalisé l’égalité entre hommes et femmes, a-t-elle fait observer. Les progrès sont lents et inégaux et des reculs importants ont été constatés ces dernières années, a-t-elle ajouté.
Sur le front économique, a poursuivi la Directrice générale d’ONU-Femmes, les progrès ont été lents, avec un écart [entre les sexes] dans le taux d’emploi qui s’est certes réduit ces dernières années, mais dans un contexte où de nombreuses femmes exercent un emploi informel et assurent un travail domestique non rémunéré. En outre, La violence faite aux femmes et aux filles persiste et reste une crise endémique au niveau mondial, a fait observer la Directrice générale. Davantage de mesures doivent être adoptées et les Etats Membres doivent réaffirmer avec force les engagements du Programme d’action de Beijing, a-t-elle souligné. De son côté, a-t-elle indiqué, ONU-Femmes essaie de coordonner son action pour mobiliser des parties prenantes qui n’étaient pas à Beijing, comme la jeunesse et les religieux, afin de faire émerger de nouvelles idées et ressources.

MME BANDANA RANA, Vice-Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, a rappelé qu’en 1995, elle était une jeune journaliste du Népal couvrant la Quatrième Conférence mondiale sur les femmes (Beijing). L’euphorie et le pouvoir issus de l’édification d’un mouvement collectif étaient tels qu’après son retour – a-t-elle expliqué –, elle avait quitté le milieu des médias, dominé par les hommes, pour fonder des foyers et travailler à l’échelle locale, nationale et internationale afin de jeter les bases de réseaux féminins, restés pertinents pour lutter contre les discriminations et l’exploitation auxquelles les femmes et les filles sont encore assujetties aujourd’hui.

Mme Rana a souligné qu’en tant que membre du Comité, elle se sent au bon endroit au bon moment puisqu’elle est en mesure d’évaluer le chemin parcouru et d’œuvrer – ici à Genève – pour que les engagements qui avaient été pris à Beijing aient davantage d’impact. En effet, les travaux du Comité sont cruciaux pour le renforcement de l’obligation redditionnelle des Etats parties du point de vue de la mise en œuvre des engagements de Beijing. Avec son cadre législatif contraignant, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes est le mécanisme le plus solide pour la promotion et la protection des droits fondamentaux des femmes, a souligné la Vice-Présidente du Comité.

Avec ses 189 Etats parties – et avec le soutien de centaines de militants, d’organisations de la société civile et d’organisations régionales qui n’ont de cesse de plaider pour sa mise en œuvre – la Convention est devenue la force motrice de la traduction au quotidien du slogan « Les droits des femmes sont des droits humains », a insisté Mme Rana, ajoutant que cet instrument ne saurait être appliqué si les progrès ne sont pas quantifiables. Pour cela, le Comité, à travers un dialogue constructif et des recommandations pratiques, aide les Etats à jauger leurs progrès et à identifier les champs où des efforts restent à fournir, a indiqué Mme Rana.

MME MAGALYS AROCHA DOMINGUEZ, Experte sur les droits humains et l’égalité de genre, a exposé le point de vue des ONG sur le parcours réalisé depuis la Conférence de Beijing. Elle a salué le travail des femmes précurseuses dans la défense des droits. Elle a souligné l’importance des Conférences de Mexico, de Copenhague et de Nairobi [les trois premières conférences mondiales sur les femmes], qui – a-t-elle expliqué – permettent de mieux comprendre celle de Beijing [la quatrième]. Il s’agissait alors d’une période faste pour les droits des femmes, a-t-elle déclaré, indiquant que les femmes sont arrivées à Beijing unies dans leurs différences. Les ONG étaient puissantes et ont fait entendre leurs voix de manière forte, malgré les pressions réactionnaires.

Malgré Beijing, a poursuivi Mme Arocha Dominguez, la situation n’est pas encore satisfaisante aujourd’hui, notamment en ce qui concerne la pauvreté féminine ou encore les questions de paix. Dans le secteur du travail domestique, les femmes sont réduites à un quasi esclavage et, par ailleurs, beaucoup de filles se retrouvent enceintes et avec une enfance volée en raison de violences sexuelles, a dénoncé l’experte. Elle a plaidé pour l’adoption d’une position commune ferme s’agissant des stéréotypes et a dénoncé les pressions croissantes des mouvements réactionnaires et de certaines autorités religieuses qui veulent remettre les acquis en question. Tant que les inégalités demeureront, tant que les richesses seront concentrées dans les mains de quelques-uns, tant que les comportements machistes continueront, il n’y aura pas d’égalité entre hommes et femmes, a-t-elle conclu.

Aperçu du débat

Après avoir salué les avancées réalisées grâce à la Déclaration et au Programme d’action de Beijing, de nombreuses délégations ont regretté que 25 ans après Beijing, les fossés demeurent entre les hommes et les femmes. Les femmes ont un accès inégal à l’agriculture, notamment du point de vue de la propriété foncière, alors qu’elles représentent près de 50% de la force de travail dans ce secteur, a-t-il été souligné.

Plusieurs pays ont fait part de leur engagement en faveur de l’autonomisation des femmes et des mesures qu’ils ont prises pour relever ce défi. Ont également été réitérés les engagements en faveur de l’égalité de genre et de la lutte contre les discriminations au motif du genre. Plusieurs délégations ont fait part de la ratification par leur pays de la plupart des traités internationaux relatifs aux droits des femmes et à la lutte contre les violences à leur encontre. Certaines délégations ont indiqué avoir pris des mesures spécifiques pour assurer les droits des femmes vulnérables, notamment les femmes issues des minorités et les femmes handicapées.

Il a été souligné qu’aujourd’hui, les femmes rencontrent encore des difficultés à avoir accès à leur droit en matière de santé génésique et sexuelle et à disposer librement de leur corps.

À l’avenir, il faut davantage intégrer les jeunes dans le cadre de Beijing, a-t-il en outre été souligné. Il convient en outre de s’assurer que les organisations représentant les femmes soient davantage incluses dans le processus Beijing+25, a-t-il été affirmé. Certains ont insisté sur l’importance de veiller à ce que les femmes soient davantage représentées dans les parlements et dans les postes de prise de décisions.

Enfin, plusieurs délégations ont insisté sur la nécessité d’inclure les femmes dans les programmes de lutte contre le réchauffement climatique et dans les programmes d’urgence en cas de catastrophes naturelles.

*Liste des intervenants ayant pris la parole: Afrique du Sud, Organisation internationale de droit du développement (IDLO), Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Brésil, Mozambique, France, Namibie, Monténégro, Luxembourg (au nom du Bénélux), Brésil (au nom de la Communauté des pays de langue portugaise, CPLP), Pakistan, Australie (au nom d’un groupe de pays), Angola, Qatar, Union européenne, Uruguay (au nom d’un groupe de pays), Bangladesh (au nom d’un groupe de pays), Djibouti (au nom de la Francophonie), Burkina Faso (au nom du Groupe africain), Bahamas (au nom de la Communauté des Caraïbes - CARICOM), Maldives (au nom des petits États insulaires en développement - PEID), République de Corée (au nom d’un groupe de pays), Suède (au nom des pays nordiques et baltes), Azerbaïdjan (au nom du Mouvement des non-alignés et de l’Union européenne), Malaisie (au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est - ANASE),

Liste des organisations non gouvernementales ayant pris la parole :The Center for Reproductive Rights, Inc.; Action Canada pour la population et le développement; Commission internationale de juristes; Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté; Women@TheTable; et le Make Mothers Matter.


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