Fil d'Ariane
POUR LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT, LA VIOLENCE À L’ENCONTRE DES ENFANTS AU BÉLARUS RESTE SOURCE DE PRÉOCCUPATION
Le côté sombre du Bélarus reste la violence exercée à l’encontre des enfants et il y a très peu de motifs de satisfaction à relever dans ce domaine. C’est ce qu’a affirmé une experte du Comité des droits de l'enfant alors qu’était examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport présenté par ce pays au titre de la Convention relative aux droits de l'enfant.
Il existe des allégations émanant de quatre titulaires de mandats différents concernant de nombreux cas de violences à l’encontre des enfants au Bélarus, a insisté l’experte. Il semble qu’il existe une volonté au Bélarus de durcir les conditions de détention des délinquants jusqu’à les rendre invivables, a-t-elle poursuivi. De nombreux rapports font état de châtiments inhumains ou dégradants dans l’ensemble des institutions dites fermées du pays, notamment dans les centres éducatifs fermés. Il n’y a pas possibilité pour les familles d’effectuer des visites [auprès des enfants placés] dans ces institutions, a ajouté l’experte. Dans la pratique, contrairement à la loi, il n’y a parfois pas de programmes d’enseignement dans ces institutions, ou alors cela relève du bon vouloir du personnel. Quant à l’accès aux soins de santé ou aux médicaments, il est également restreint dans ce type d’établissement et, ici encore, c’est le personnel de l’institution qui a le pouvoir discrétionnaire de donner ou non des médicaments aux enfants.
À l’issue de l’examen du rapport bélarussien, ce midi, l’experte a toutefois admis que beaucoup de travail avait été accompli par le Bélarus depuis l’examen du précédent rapport du pays et que beaucoup de progrès avaient été faits dans le domaine des droits des enfants. Les changements, lorsqu’ils demandent à être pleinement intégrés par la population, demandent beaucoup de temps, et cela vaut notamment pour ce qui concerne les questions liées à la violence, a-t-elle reconnu. Il reste néanmoins de nombreux défis à relever dans ce domaine, a-t-elle insisté.
Parmi les autres questions soulevées par les membres du Comité, ont figuré le taux de suicide très élevé parmi les adolescents ; l’accès à l’école, voire aux centres de santé, pour les enfants touchés par le VIH/sida ; l’enregistrement des naissances des enfants roms ; ou encore l’approche des autorités bélarussiennes concernant la politique familiale. Est-il vrai que certains parents se voient retirer la garde des enfants en raison d’une situation d’endettement ou de chômage, ou encore en raison de leur état de santé, a-t-il notamment été demandé?
Le système de placement systématique des enfants handicapés en institution va-t-il être revu, a pour sa part demandé une experte ?
Présentant le rapport de son pays, M. Igor Karpenko, Ministre de l’éducation du Bélarus, a notamment indiqué que la République du Bélarus travaille en permanence sur la révision du cadre juridique national pour garantir sa conformité avec les dispositions de la Convention.
En janvier 2019, a-t-il poursuivi, a été adoptée la résolution du Gouvernement sur la reconnaissance des enfants à risque, qui a notamment modifié les approches concernant les activités de prévention auprès des familles dysfonctionnelles afin d’accroître l'efficacité de l'assistance interministérielle pour sortir les familles des situations défavorisées et pour que les enfants continuent à vivre au sein de leur famille. La mise en œuvre d'une nouvelle approche de l'orphelinat social a permis de réduire le nombre d'enfants retirés de leur famille en vertu des décisions des commissions responsables de la prise de décision pour les mineurs.
Un projet de loi portant modification du code de l'éducation a été élaboré et a fait de l'inclusion dans le secteur de l'éducation l'un des principes fondamentaux de l'État dans ce domaine, a également souligné M. Karpenko.
Le Ministre a ensuite expliqué que la Commission nationale des droits de l'enfant joue un rôle de coordination pour assurer la protection des droits et des intérêts légitimes des enfants. Quant au bureau du Procureur de la République du Bélarus, il contrôle régulièrement la mise en œuvre des dispositions de la Convention. À l'initiative de ce bureau, en avril 2020, la Commission nationale examinera la mise en œuvre des activités de lutte contre la violence à l'égard des enfants et de création d'un environnement favorable à la vie et au développement de l'enfant. Le Bélarus accorde en outre une grande attention à la prévention de la violence contre les mineurs, a assuré M. Karpenko.
La délégation bélarussienne était également composée, entre autres, du Représentant permanent du Bélarus après des Nations Unies à Genève, M. Yuri Ambrazevich, ainsi que de représentants des ministères bélarussiens des affaires étrangères, de l’éducation, de l’intérieur, de la santé, et du travail et de la protection sociale. Le pouvoir judiciaire, le Centre national de la législation et de la recherche juridique, ainsi que le Comité exécutif de la région de Brest étaient également représentés.
La délégation a notamment répondu aux questions soulevées par les membres du Comité s’agissant du système des procureurs spécialisés ; de l’intérêt supérieur de l’enfant, notamment dans le contexte de la politique familiale et du placement d’enfants ; des enfants handicapés ; des mineurs en conflit avec la loi ; du suicide des jeunes ; de la lutte contre les stupéfiants ; ou encore de l’enregistrement des naissances.
Le Comité adoptera ultérieurement ses observations finales sur le Bélarus et les rendra publiques à l’issue de la session, le vendredi 7 février prochain.
Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l’examen du rapport du Costa Rica.
Présentation du rapport
Le Comité est saisi du document regroupant les cinquième et sixième rapports périodiques (CRC/C/BLR/5-6) du Bélarus, ainsi que des réponses du pays à une liste de points à traiter qui lui avait été soumise.
M. IGOR KARPENKO, Ministre de l’éducation du Bélarus, a indiqué que le rapport contient des informations détaillées sur les mesures législatives, institutionnelles, administratives et autres prises en République du Bélarus pour mettre en œuvre la Convention relative aux droits de l'enfant.
Il a ensuite expliqué que la République du Bélarus travaille en permanence sur la révision du cadre juridique national pour garantir sa conformité avec les dispositions de la Convention.
En janvier 2019, a-t-il poursuivi, a été adoptée la résolution du Gouvernement du Bélarus sur la reconnaissance des enfants à risque, qui a notamment modifié les approches concernant les activités de prévention auprès des familles dysfonctionnelles, afin d’accroître l'efficacité de l'assistance interministérielle pour sortir les familles des situations défavorisées et pour que les enfants continuent à vivre au sein de leur famille.
Le décret du Président de la République sur "le capital familial" a été adopté pour développer un soutien à long terme aux familles nombreuses, stimuler la croissance du taux de natalité et promouvoir les valeurs familiales, a ajouté M. Karpenko.
Un projet de loi portant modification du code de l'éducation de la République du Bélarus a été élaboré et a fait de l'inclusion dans le secteur de l'éducation l'un des principes fondamentaux de l'État dans ce domaine. L'inclusion dans l'éducation garantit un accès égal à l'apprentissage et à la formation pour tous les étudiants et stagiaires, en tenant compte de la diversité des besoins individuels spécifiques en termes d’apprentissage et des capacités de chaque étudiant et stagiaire, a indiqué le Ministre.
Le chef de la délégation a en outre expliqué que la Commission nationale des droits de l'enfant, dirigée par le Vice-Premier Ministre de la République du Bélarus, joue un rôle de coordination pour assurer la protection des droits et des intérêts légitimes des enfants. Composée de représentants des établissements d'enseignement et des organisations non gouvernementales, cette Commission nationale examine lors de ses réunions un large éventail de questions liées à la protection de l'enfance ; ses membres visitent diverses organisations et institutions afin d’apprendre les meilleures pratiques pour créer des conditions favorables à la vie et au développement des enfants.
Le bureau du Procureur de la République du Bélarus contrôle régulièrement la mise en œuvre des dispositions de la Convention. À l'initiative de ce bureau, en avril 2020, la Commission nationale examinera la mise en œuvre des activités de lutte contre la violence à l'égard des enfants et de création d'un environnement favorable à la vie et au développement de l'enfant.
Les bureaux de la Commission nationale opèrent dans toutes les régions du pays, où les membres de la Commission tiennent des réunions mensuelles avec les enfants, leurs représentants légaux et d'autres citoyens sur les questions liées à l'exercice des droits de l'enfant.
Le Bélarus accorde par ailleurs une attention particulière à l'amélioration des connaissances juridiques des enfants et des parents, s’agissant notamment de la Convention relative aux droits de l'enfant, a ajouté M. Karpenko.
Divers organes de consultation des jeunes ont été créés dans le pays, a poursuivi le Ministre, citant les parlements de jeunes, le Conseil public républicain des étudiants, ou encore le Conseil républicain des jeunes stagiaires et des jeunes travailleurs. En 2019, les membres du Conseil public républicain des étudiants sont devenus des participants actifs à l'élaboration d’un projet de loi portant modification du code de l'éducation de la République du Bélarus.
La plateforme « Ville amie des enfants et des adolescents » est mise en œuvre en coopération avec le Fonds des Nations pour l’enfance (UNICEF) et fait office de mécanisme de coordination et de suivi des droits de l'enfant au niveau local, a d’autre part expliqué le Ministre. Aujourd'hui, ce sont au total 24 villes et villages qui ont obtenu le titre honorifique de « ville adaptée aux enfants et aux adolescents », a-t-il précisé.
La mise en œuvre d'une nouvelle approche de l'orphelinat social a permis de réduire le nombre d'enfants retirés de leur famille en vertu des décisions des commissions responsables de la prise de décision pour les mineurs, a poursuivi le chef de la délégation. La République du Bélarus garantit la mise en œuvre du droit de chaque enfant à vivre et à être élevé dans une famille, comme le stipule la Convention, a-t-il assuré.
Le Bélarus accorde en outre une grande attention à la prévention de la violence contre les mineurs, a indiqué M. Karpenko. En 2018, la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la question de la violence contre les enfants, Mme Marta Santos Pais, a effectué une visite officielle au Bélarus ; elle a visité des établissements d'enseignement public et a rencontré des élèves ainsi que des représentants des conseils des enfants et des jeunes, des organismes nationaux d'administration publique, et de l'UNICEF. Lors de sa visite, Mme Santos Pais a notamment appris comment fonctionnait le système des établissements d'enseignement s’agissant des mesures préventives, de la détection et de l'élimination de la violence contre les enfants et de ses causes, ainsi que des activités liées à l'assistance aux mineurs victimes de violence.
La République du Bélarus met en œuvre un système d'information des personnes concernées, notamment à l’intention des parents et des policiers, s’agissant des signes de violence contre les enfants et les adolescents. La médiation, en tant que l'un des moyens de règlement efficace des différends avec la participation d'une tierce partie neutre, est activement mise en œuvre, a indiqué le Ministre. En 2019, des projets de services de médiation scolaire ont démarré dans 58 établissements d'enseignement, ce qui a permis d'enseigner aux enfants la manière de surmonter les crises et de réduire le nombre de conflits scolaires.
Par ailleurs, le Bélarus est engagé à mettre en œuvre les dispositions de la Convention s’agissant de l’amélioration de la santé et de la formation à un mode de vie sain pour les enfants et les adolescents, a ajouté M. Karpenko. La campagne nationale d'amélioration de la santé de l'été 2019 a concerné environ 400 000 enfants et adolescents, a-t-il précisé.
Le pays accorde en outre une grande attention au soutien psychologique nécessaire aux enfants et adolescents. En 2019, le Centre républicain de soutien psychologique a ouvert ses portes et sa principale activité consiste à assurer un soutien psychologique, social et pédagogique. En 2020, le Ministère de l'Éducation prévoit d'étudier de manière approfondie les meilleures pratiques internationales de soutien psychologique pour les enfants et les adolescents et de mettre en œuvre un certain nombre de projets pilotes dans ce domaine afin d'améliorer les services de soutien psychologique.
Examen du rapport
Questions et observations des membres du Comité
MME AMAL SALMAN ALDOSERI, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport du Bélarus, s’est enquise des mécanismes chargés de vérifier la conformité de la législation interne du Bélarus aux dispositions de la Convention et a souhaité savoir si une révision exhaustive de toutes les lois relatives aux enfants était en cours afin de les rendre compatibles avec la Convention. Elle a également voulu savoir si suffisamment de fonds avaient été prévus pour la mise en œuvre des différents plans d’action nationaux dans le domaine des droits de l’homme.
L’experte a ensuite demandé si les budgets alloués à la mise en œuvre de la Convention étaient étudiés en fonction des besoins. Mme Aldoseri a en outre voulu savoir où en était le projet de création d’une institution nationale des droits de l’homme, en discussion depuis plus de huit ans. En l’absence d’une telle institution, quelle institution est-elle chargée de contrôler la mise en œuvre de la Convention et de recueillir les plaintes des enfants, a-t-elle demandé ?
La corapporteuse a également souhaité savoir si l’ensemble des professionnels intervenant dans le domaine de l’enfance était formé aux dispositions de la Convention et de ses Protocoles.
Mme Aldoseri s’est par ailleurs enquise des mécanismes mis en place pour permettre aux enfants d’exprimer librement leur opinion.
Relevant par ailleurs le taux de suicide très élevé parmi les adolescents, la corapporteuse a souligné qu’il s’agissait de la première cause de décès dans cette tranche d’âge. Elle s’est enquise des résultats des éventuelles études sur ce phénomène menées dans le pays.
Mme Aldoseri s’est ensuite enquise des mesures prises pour contrer la propagation du VIH/sida chez les filles.
L’experte a également souhaité connaître les causes de l’abandon scolaire chez les enfants roms.
MME AISSATOU ALASSANE MOULAYE SIDIKOU, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport du Bélarus, a regretté que les enfants touchés par le VIH/sida n’aient pas accès à l’école, ni à certains centres de santé. Elle a par ailleurs demandé si les autorités bélarussiennes envisageaient d’amender la législation afin d’opter pour des mesures alternatives à la privation de liberté pour les enfants migrants.
Mme Sidikou a ensuite relevé l’existence d’une inégalité de genre dans les activités visant à favoriser l’apprentissage précoce des enfants à la maison et a par ailleurs souhaité savoir ce qui était fait pour accroître la responsabilité des pères.
La corapporteuse s’est d’autre part enquise des mesures prises pour favoriser l’allaitement (exclusivement) maternel. Elle s’est en outre enquise de ce qui était fait au Bélarus pour assurer la participation de tous les enfants, notamment des enfants handicapés ou défavorisés.
MME VELINA TODOROVA, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport bélarussien, s’est pour sa part enquise des mesures prises pour améliorer l’enregistrement des naissances des enfants roms. Qu’est-ce qui est prévu par le Gouvernement pour améliorer la collecte des données concernant les personnes apatrides ou encore pour prévenir l’apatridie des enfants sans papiers, a-t-elle également demandé ? Elle a en outre voulu savoir comment le droit des enfants à l’information était garanti, en particulier sur Internet.
Mme Todorova a ensuite fait observer que le Comité avait reçu de nombreuses plaintes concernant l’approche des autorités bélarussiennes en matière de politique familiale. Elle a souhaité savoir quelle est l’autorité qui, au niveau local, est chargée d’évaluer une situation familiale et de décider de l’éventuel retrait de l’enfant de sa famille. Est-il vrai que certains parents se voient retirer la garde des enfants en raison d’une situation d’endettement ou de chômage, voire en raison de leur état de santé ? La corapporteuse a en outre demandé si la désinstitutionalisation était inscrite dans les plans d’action nationaux intéressant les droits des enfants. Elle a en outre souhaité savoir si la terminologie relative aux personnes handicapées utilisée dans la législation du pays allait être amendée et si le système de placement systématique des enfants handicapés en institution allait être revu.
Pour ce qui est du Protocole facultatif (à la Convention) sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, Mme Todorova a recommandé au pays de passer en revue les différentes infractions relevant de ce Protocole et d’adopter les définitions pertinentes telles que prévues dans cet instrument. Elle a souhaité obtenir davantage d’informations concernant les affaires judiciaires relatives à ce type d’infractions.
MME RENATE WINTER, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport du Bélarus, a affirmé que le côté sombre du Bélarus restait la violence à l’encontre des enfants et a souligné qu’il y avait très peu de motifs de satisfaction à relever dans ce domaine. Elle a néanmoins salué la création d’une ligne d’assistance téléphonique pour les enfants, avant de déplorer qu’il n’existe pas de mécanisme visant à permettre aux enfants de vivre dans un monde sans violence. Il existe des allégations émanant de quatre titulaires de mandats différents concernant de nombreux cas de violences à l’encontre des enfants dans le pays, a insisté la corapporteuse.
Il semble qu’il existe une volonté au Bélarus de durcir les conditions de détention des délinquants jusqu’à les rendre invivables, a poursuivi Mme Winter. De nombreux rapports font état de châtiments inhumains ou dégradants dans l’ensemble des institutions dites fermées du pays, notamment dans les centres éducatifs fermés. Il n’y a pas possibilité pour les familles d’effectuer des visites [auprès des enfants placés] dans ces institutions. Dans la pratique, contrairement à la loi, il n’y a parfois pas de programmes d’enseignement dans ces institutions, ou alors cela relève du bon vouloir du personnel. L’accès aux soins de santé ou aux médicaments est restreint dans ce type d’établissement, a insisté l’experte ; ici encore, c’est le personnel de l’institution qui a le pouvoir discrétionnaire de donner ou non des médicaments aux enfants.
Mme Winter a d’autre part souhaité savoir pourquoi l’âge de la responsabilité pénale avait été abaissé pour certains délits.
La corapporteuse s’est en outre enquise des mesures envisagées pour interdire tous les types de châtiments corporels à l’encontre des enfants.
En ce qui concerne le Protocole facultatif sur l'implication d'enfants dans les conflits armés, Mme Winter a demandé si le pays envisageait de revoir l’âge minimum d’entrée à l’école militaire pour le porter à 18 ans, comme le prévoit le Protocole, au lieu de 17 ans comme cela est actuellement le cas. Elle a par ailleurs relevé que le recrutement d’enfants dans des forces armées ou dans des groupes armés étrangers n’était pas constitué en infraction dans le Code pénal.
Un autre membre du Comité s’est enquis des mesures prises pour lutter contre les abus sexuels à l’encontre des enfants et des mécanismes de soutien des victimes existants.
Une experte a voulu savoir s’il existait un système de recueil de données concernant les enfants migrants. Elle s’est également enquise des mesures prises pour lutter contre la traite et l’exploitation des enfants.
Réponses de la délégation
La délégation a expliqué qu’un système de procureurs spécialisés avait été mis en place dans le pays pour assurer la protection des droits des enfants. Ces procureurs exercent leurs fonctions sur l’ensemble du territoire ; ils sont dotés de pouvoirs étendus et ont le droit d'inspecter tout organisme ou institution d'État, y compris les institutions dites « fermées ».
Tout enfant peut demander l’appui du procureur pour la protection de ses droits et il est de la responsabilité des citoyens, des organisations et des fonctionnaires de signaler les violations des droits de l’enfant au Procureur, a poursuivi la délégation. En 2019, a-t-elle précisé, les procureurs ont enquêté sur environ 500 plaintes liées à des violations des droits des enfants ; environ 300 actions en justice ont été engagées dans l'intérêt des mineurs et plus de 2000 inspections ont été menées, a insisté la délégation.
La protection efficace des droits de l’enfant dans le pays est le fruit du travail conjoint des autorités chargées des poursuites, des ministères, des institutions, des autorités locales, des organismes publics, des citoyens et des enfants., a affirmé la délégation. Le Gouvernement travaille en étroite collaboration avec le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) dans ce domaine.
Pour ce qui est de l’aspect législatif, la délégation a fait valoir qu’un amendement récent apporté au Code de la famille a consacré le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant dans les décisions qui le concernent.
D’autre part, le Bélarus a préparé un projet de loi sur les droits des enfants handicapés et leur intégration sociale, a indiqué la délégation, avant de préciser que ce projet consacre le fait que les enfants handicapés ont les mêmes droits que les autres et que le principe de l’intérêt supérieur des enfants est maintenu s’agissant des décisions qui les concernent. Ce projet définit également la discrimination au motif du handicap.
Le Bélarus met en œuvre l’éducation inclusive, a par la suite indiqué la délégation, soulignant qu’un institut a été spécialement créé pour former des pédagogues à ce type d’éducation. L’éducation inclusive des enfants handicapés est considérée comme prioritaire, a-t-elle insisté, précisant que 5000 places à cette fin ont été ouvertes dans les écoles. Les enfants handicapés bénéficient du soutien nécessaire, en fonction de leur handicap, pour suivre les cours avec les autres enfants, a ajouté la délégation, avant de faire état du plan d’éducation inclusive 2016-2020 et d’un autre plan, en cours d’élaboration, pour la période 2020-2024.
Conformément à la loi de 1993 relative aux droits de l’enfant, l’État protège l’enfant contre toute forme d’exploitation, y compris l’exploitation sexuelle et la maltraitance physique. Le Bélarus a mené un travail ciblé pour lutter contre toutes les formes de violence à l’encontre des enfants. Ce travail est mené de manière constante avec tous les professionnels du secteur de l’enfance.
Au Bélarus, la violence est interdite et des sanctions, notamment administratives, sont prévues en cas de violence à l’encontre des enfants. Des enquêtes sont ouvertes en cas de suspicion de maltraitance infligées à des enfants par leurs parents ou tuteurs ; en pareil cas, les enfants peuvent alors être retirés temporairement de leur famille.
La délégation a ensuite évoqué le plan d’action national destiné à améliorer la situation des enfants, soulignant qu’il veille notamment à renforcer le cadre juridique de protection de l’enfant, à renforcer la qualité de l’enseignement et à garantir la protection sociale de tous les enfants.
La législation prévoit un mécanisme d’activités de réhabilitation pour les jeunes et mineurs en conflit avec la loi, a d’autre part indiqué la délégation, avant d’insister sur le travail de prévention individuelle mené auprès des mineurs.
Chaque année, de nombreux enfants sont envoyés en « réadaptation » dans des maisons d’éducation et aujourd’hui, les enfants placés dans ces institutions ne voient pas leur droit de recevoir de la correspondance refusé. L’État s’assure en outre que ces mineurs ne soient pas victimes de violence, a assuré la délégation. Les jeunes concernés peuvent recevoir une formation professionnelle durant leur séjour dans un tel établissement, a ajouté la délégation.
En 2019, une nouvelle loi amendant le Code pénal a été adoptée qui prévoit que les mineurs ayant commis des crimes autres que graves ou très graves doivent être remis en liberté et ne peuvent désormais plus être condamnés à des peines privatives de liberté.
La délégation a par ailleurs indiqué que les mineurs détenus peuvent suivre des formations professionnelles à distance. Tous les mineurs ont aussi la possibilité de poursuivre leur enseignement secondaire en détention, a ajouté la délégation.
La Commission nationale des droits de l’enfant a le droit de se rendre dans tous les lieux de privation de liberté où sont placés des mineurs pour y évaluer les conditions de détention. Les mineurs en conflit avec la loi ont droit à une aide juridictionnelle et à un avocat, a précisé la délégation.
La délégation a ensuite affirmé que tout citoyen au Bélarus peut créer une association et recevoir des moyens de l’État pour la faire vivre.
La délégation a expliqué que le pays veillait à assurer une égalité de genre dans la prise en charge des enfants, notamment en permettant aux parents de se partager un congé parental d’une durée totale de trois ans.
La délégation a ensuite souligné qu’il était difficilement acceptable de séparer les enfants de leurs parents ; c’est pourquoi l’état et diverses organisations viennent en soutien aux familles qui sont en situation de «danger social». La décision de séparation (du mineur de sa famille) est prise en dernier recours, a assuré la délégation. Une mesure temporaire de séparation peut être prise par l’autorité administrative locale en cas de danger potentiel pour les enfants ; les parents peuvent durant cette période suivre une formation pour les amener à vivre dans la non-violence ou soigner leur alcoolisme. Cette mesure temporaire est d’une durée maximale de six mois ; au-delà de cette période, c’est au tribunal qu’il revient de décider du retrait ou non de l’autorité parentale. Il n’y a pas de privation des droits parentaux pour les parents qui ne peuvent pas mener à bien l’éducation de leurs enfants pour des raisons de santé ou pour des raisons économiques, a précisé la délégation. En outre, le nombre de décisions de retrait de l’autorité parentale est en baisse depuis plusieurs années, alors qu’augmente parallèlement le nombre de décisions de restitution de l’autorité parentale, a fait valoir la délégation.
Pour ce qui est des questions de santé, le Bélarus informe les mères des avantages de l’allaitement maternel, conformément à la Convention, a d’autre part assuré la délégation. Elle a également assuré que les soins apportés aux enfants atteints par le VIH/sida se font conformément aux dispositions de la Convention. Toutes les personnes touchées par le virus ont accès à des traitements modernes, a insisté la délégation.
La délégation a par ailleurs souligné qu’il y a quelques années, le pays était confronté à une augmentation sensible du nombre de cas de consommation de psychotropes par les jeunes. Les autorités ont alors décidé de modifier la législation s’agissant de la lutte contre le trafic de stupéfiants, ce qui a permis d’assainir la situation. Le nombre de crimes en lien avec les stupéfiants a été très sensiblement réduit ces dernières années ; il a même été divisé par cinq pour ce qui est des délits de ce type commis par des jeunes. En outre, le nombre d’overdoses a été divisé par quatre depuis 2014, a fait valoir la délégation, avant d’indiquer que l’an dernier, le pays avait pu modifier le Code pénal pour atténuer les peines encourues pour consommation de stupéfiants.
La délégation a reconnu que le phénomène des suicides chez les jeunes était très inquiétant. Une étude a été menée sur cette question, en coopération avec l’UNICEF : elle a montré que le sentiment de solitude et les conflits avec les parents étaient les principales causes de ces suicides. Une campagne d’information à destination des parents est en cours d’élaboration, a précisé la délégation.
Le travail de recueil de données ventilées concernant les enfants s’améliore, a d’autre part expliqué la délégation, avant d’indiquer qu’en septembre 2019, les autorités du pays avaient rencontré des experts de l’UNICEF pour débattre de toutes les questions relatives aux données statistiques aux fins de la protection des enfants. Le Comité national des statistiques du Bélarus a terminé son travail de recueil de données statistiques pour évaluer la situation des enfants et des femmes dans le pays, a ajouté la délégation.
Pratiquement tous les enfants sont enregistrés à la naissance dans les délais prévus par la loi, a en outre fait valoir la délégation. Un nouveau système d’enregistrement électronique est en cours d’élaboration qui permettra que tous les enfants soient automatiquement inscrits dans le registre de la population, a-t-elle indiqué.
Le Bélarus continue de se poser la question de la pertinence de créer une institution nationale des droits de l’homme. En effet, les citoyens bélarussiens peuvent saisir toute une série d’autres institutions en cas de violation de leurs droits. En effet, existent notamment la Commission nationale des droits de l’enfant, le Conseil national de la politique relative aux questions de genre, le Conseil consultatif interconfessionnel, ou encore le Conseil public de coordination pour l’écologie.
Un décret ministériel de 2018 exclut la possibilité de faire participer des enfants de moins de 14 ans à des travaux agricoles ; et au-delà de 14 ans, il faut que le mineur soit au bénéfice d’un contrat de travail reconnu, a en outre indiqué la délégation.
La délégation a par ailleurs expliqué qu’il y avait très peu de mineurs non accompagnés qui arrivaient au Bélarus ; en 2003, seuls trois sont arrivés et ils ont obtenu une protection particulière.
La délégation a ensuite assuré qu’étaient inscrites dans le Code pénal toutes les infractions figurant dans le Protocole facultatif sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants. Le nombre d’enfants victimes d’exploitation est en baisse au Bélarus, avec une trentaine de cas recensés en 2019, a-t-elle précisé. Ces enfants victimes ont accès à une protection appropriée et à un programme de réhabilitation, a-t-elle ajouté.
La délégation a indiqué que le pays avait développé le concept de responsabilité sociale des entreprises, notamment dans le domaine des droits des enfants. Des consultations vont être menées afin de mettre en œuvre les Principes directeurs des Nations Unies dans ce domaine.
Remarques de conclusion
MME WINTER a remercié la délégation bélarussienne pour ce dialogue interactif. Elle a admis que beaucoup de travail avait été accompli par le Bélarus depuis l’examen du précédent rapport du pays et que beaucoup de progrès avaient été faits dans le domaine des droits des enfants. Les changements, lorsqu’ils demandent à être pleinement intégrés par la population, demandent beaucoup de temps, et cela vaut notamment pour ce qui concerne les questions liées à la violence, a reconnu l’experte. Il reste néanmoins de nombreux défis à relever dans ce domaine, a-t-elle insisté, tout en indiquant qu’elle avait confiance dans le pays pour qu’il prenne les mesures nécessaires à l’amélioration de la situation des enfants au Bélarus. Mme Winter a dit espérer que lors de l’examen du prochain rapport du pays, la délégation bélarussienne s’exprimera davantage au passé qu’au futur pour évoquer les mesures prises pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention.
M. Yuri Ambrazevich, Représentant permanent du Bélarus après des Nations Unies à Genève, a souligné que son pays échangeait beaucoup avec les autres pays concernant les bonnes pratiques, notamment dans le domaine des droits des enfants. Il s’est dit d’accord avec Mme Winter quant au fait que tout changement demande du temps. Il a par ailleurs fait observer que son pays avait obtenu de bons résultats en matière de mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, notamment dans le domaine de l’égalité des sexes.
Sans stabilité et sans paix, il ne peut y avoir de développement durable, a poursuivi le Représentant permanent ; c’est pourquoi la jeunesse du pays doit comprendre ce qu’est la paix, a-t-il insisté. Cette question fait ainsi partie du programme scolaire, a-t-il ajouté. Minsk est une plateforme de pourparlers, notamment pour ce qui se passe à l’Est de l’Ukraine, a rappelé le Représentant permanent. Il a invité les experts à ne pas faire uniquement des raisonnements théoriques et a rappelé que l’objectif est de partager leur expertise afin que le pays puisse obtenir des résultats tangibles sur terrain.
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