Fil d'Ariane
L’OCCUPATION ISRAÉLIENNE REND DIFFICILE LA MISE EN ŒUVRE DE LA CONVENTION ET IL Y A DES PROBLÈMES DE DROITS DE L’HOMME AU NIVEAU DES PALESTINIENS EUX-MÊMES
Tous les rapports internationaux concernant la Palestine reconnaissent deux problèmes : d’une part, que les colonies de peuplement sont illégales en droit international et qu’elles représentent un obstacle à la jouissance des droits de l’homme de toute la population et, d’autre part, qu’il y a différents problèmes de droits de l’homme au niveau des Palestiniens eux-mêmes. C’est ce qu’a rappelé Mme Chung Chinsung - rapporteuse du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale chargée de l’examen du rapport initial de l’État de Palestine – à l’ouverture du dialogue avec la délégation palestinienne.
Mme Chung a relevé que l’occupation [israélienne] rendait difficile la mise en œuvre de la Convention et a également relevé l’absence d’une définition complète de la discrimination raciale dans la législation palestinienne.
Il ne serait pas juste d’imputer la responsabilité de la persistance du conflit israélo-palestinien à un seul de ses protagonistes alors qu’aussi bien l’un que l’autre [des deux protagonistes] sont pris dans un engrenage infernal, a, pour sa part, déclaré un membre du Comité, avant de constater qu’il y a [dans le rapport présenté par l’État de Palestine] foison d’informations concernant les territoires sur lesquels les autorités palestiniennes n’exercent pas une juridiction effective et très peu d’informations, en revanche, sur leurs propres pratiques dans les autres territoires.
On ne peut nier le fait qu’il y a un occupant et un occupé : ce fait a été reconnu par divers organes des Nations Unies tels que le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale, a quant à elle souligné la délégation palestinienne, avant d’ajouter qu’avancer un quelconque prétexte d'équivalence morale entre l'occupant et l'occupé ne favoriserait pas le dialogue. D’une part, une puissance occupante exerce un contrôle absolu sur une nation toute entière ; de l’autre, une nation se voit privée de l’ensemble de ses droits fondamentaux, notamment de son droit à l’autodétermination, a rappelé la délégation.
Sur deux séances, hier après-midi et ce matin, le Comité examinait le rapport de l’Etat de Palestine sur les mesures qu’il a prises pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.
Présentant le rapport de son pays, M. Ammar Hijazi, Ministre adjoint du secteur des affaires multiculturelles au Ministère des affaires étrangères et des expatriés de l’État de Palestine, a indiqué qu’il rendait compte de toutes les réalisations majeures et des défis qui restent à relever dans la voie de la mise en œuvre des dispositions de la Convention.
Le chef de la délégation palestinienne a ensuite rappelé que l’État de Palestine vivait une situation particulière en raison de l’occupation prolongée par la puissance occupante. De nombreuses tentatives ont été faites de faire disparaître l’identité palestinienne, a-t-il souligné ; le peuple a été déraciné de sa terre et des millions de réfugiés vivent encore les effets du déplacement et sont empêchés de retourner sur leurs terres.
M. Hijazi a ensuite souligné qu’il existe une relation organique entre l’occupation d’une puissance étrangère et la discrimination et l’apartheid. Il s’agit en l’occurrence d’une occupation coloniale de la Palestine par Israël – une occupation qui contrevient aux principes des Nations Unies ainsi qu’à la Déclaration universelle des droits de l’homme. Cette occupation contrevient au droit à l’autodétermination du peuple palestinien, a insisté le Ministre adjoint ; par conséquent, a-t-il ajouté, il est juridiquement contraignant pour la communauté internationale de protéger ce droit.
L’institution nationale des droits de l’homme de la Palestine a complété cette présentation.
La délégation palestinienne était également composée, entre autres, de représentants d’organes chargés des affaires judiciaires et religieuses, du Bureau central des statistiques, ainsi que des ministères des affaires étrangères et des expatriés, du travail, de la santé, de l’intérieur, du développement social, de la justice, des affaires des femmes, et de l’éducation.
La délégation a répondu aux questions et observations des experts concernant, entre autres, les pratiques d’Israël en tant que puissance occupante, notamment les destructions de logement ; la prévention des discours de haine et de l’antisémitisme ; le contenu des programmes scolaires ; la question des réfugiés palestiniens ; l’interdiction de la discrimination raciale ; et les données relatives aux groupes protégés par la Convention.
Les autorités palestiniennes luttent contre toutes les formes d’antisémitisme, a notamment assuré la délégation, avant de déplorer que certains individus tentent d’amalgamer les critiques légitimes d'Israël et de son occupation avec l'antisémitisme.
Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport de l’Etat de Palestine et les rendra publiques à l’issue de la session, le jeudi 29 août prochain.
Cet après-midi à 15 heures, le Comité entamera l’examen du rapport de l’Islande (CERD/C/ISL/21-23).
Présentation du rapport
Le Comité est saisi du document regroupant le rapport initial et le deuxième rapport périodique de l’État de Palestine (CERD/C/PSE/1-2).
Présentant ce document, M. AMMAR HIJAZI, Ministre adjoint du secteur des affaires multiculturelles au Ministère des affaires étrangères et des expatriés de l’État de Palestine, a indiqué qu’il rendait compte de toutes les réalisations majeures et des défis qui restent à relever dans la voie de la mise en œuvre des dispositions de la Convention. Il a réaffirmé la volonté de l’État de Palestine de coopérer avec le Comité pour donner effet au contenu de la Convention.
Le chef de la délégation a ensuite rappelé que l’État de Palestine vivait une situation particulière en raison de l’occupation prolongée par la puissance occupante. De nombreuses tentatives ont été faites de faire disparaître l’identité palestinienne, a-t-il souligné ; le peuple a été déraciné de sa terre et des millions de réfugiés vivent encore les effets du déplacement et sont empêchés de retourner sur leurs terres. Le peuple est néanmoins encouragé à faire valoir son droit à l’autodétermination. L’Organisation de libération de la Palestine est le seul mouvement représentatif du peuple palestinien, a ajouté M. Hijazi.
Israël ne doit pas nier les responsabilités qui, au regard du droit international et de la Convention, sont les siennes en raison de l’occupation, a poursuivi le Ministre adjoint, avant de réaffirmer le droit pour la population palestinienne de jouir des droits énoncés dans la Convention, y compris le droit pour le peuple palestinien de revenir sur ses terres.
Le système démocratique palestinien respecte les avis de la majorité et des minorités ; il est basé sur le principe de la justice sociale, a d’autre part déclaré M. Hijazi. La Constitution garantit l’État de droit et l’indépendance de la justice, a-t-il ajouté. L’État de Palestine est attaché à la Déclaration universelle des droits de l’homme, a-t-il par ailleurs assuré. L’État de Palestine a ainsi adhéré à une série d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et a consolidé les droits garantis par ces textes.
M. Hijazi a ensuite indiqué que l’État de Palestine venait de reconnaître la compétence du Comité pour recevoir des plaintes individuelles (communications). Il a précisé que la Commission nationale des droits de l’homme de Palestine assurerait le suivi de ces plaintes. L’État de Palestine a par ailleurs ratifié l’amendement à l’article 8 de la Convention, afin de renforcer le travail du Comité en vue de face aux pratiques discriminatoires.
Le processus d’élaboration du présent rapport a permis à l’État de Palestine de se livrer à une introspection concernant la mise en œuvre de la Convention, a fait valoir le Ministre adjoint, avant de préciser que l’État de Palestine entendait harmoniser l’ensemble de ses lois avec la Convention et amender toutes les politiques qui pourraient être discriminatoires. Il a en outre précisé que ce rapport avait été préparé par un comité gouvernemental en coopération avec les organisations concernées de la société civile ainsi que des représentants des différents groupes ethniques de Palestine. Certaines organisations de la société civile ont néanmoins été empêchées de venir en Cisjordanie pour débattre de ce rapport et ont donc dû intervenir par vidéoconférence, a expliqué le chef de la délégation palestinienne.
M. Hijazi a ensuite souligné qu’il existe une relation organique entre l’occupation d’une puissance étrangère et la discrimination et l’apartheid. Il s’agit en l’occurrence d’une occupation coloniale de la Palestine par Israël – une occupation qui contrevient aux principes des Nations Unies ainsi qu’à la Déclaration universelle des droits de l’homme. Cette occupation contrevient au droit à l’autodétermination du peuple palestinien, a insisté le Ministre adjoint ; par conséquent, a-t-il ajouté, il est juridiquement contraignant pour la communauté internationale de protéger ce droit.
Bien que l’État de Palestine soit, en ce qui le concerne, toujours resté attaché au droit international, la situation se détériore étant donné qu’Israël continue d’occuper la Palestine et de commettre des violations du droit international et de mépriser les normes internationales – notamment les Conventions de Genève ainsi que la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, a poursuivi le chef de la délégation.
L’élargissement des colonies, le mur de séparation, le déplacement forcé des Palestiniens - notamment - sont le fruit de politiques illégales, a insisté M. Hijazi. La puissance occupante détient annuellement plus de six mille personnes qui sont soumises à la torture et à des traitements inhumains et dégradants. En outre, la bande de Gaza est assiégée, a ajouté le Ministre adjoint.
Toutes les politiques et lois qui sont appliquées par la puissance occupante visent à institutionnaliser le manque de prise en considération des vies palestiniennes et la privation du peuple palestinien de toute voie de recours, afin d’asseoir l’apartheid, a également déclaré le chef de la délégation palestinienne. Israël cherche à pousser les Palestiniens à fuir, afin de servir ses intérêts expansionnistes et colonialistes, et à aboutir ainsi à une épuration ethnique, a-t-il dénoncé. Israël continue à adopter contre le peuple palestinien des politiques racistes dont le rythme s’accélère, a-t-il ajouté.
L’État de Palestine veille à honorer ses engagements pour ce qui est de protéger son peuple contre les violations d’Israël, la puissance occupante, a déclaré M. Hijazi. Il a rappelé que l’État de Palestine avait attiré l’attention du Comité, le 23 avril 2018, sur le fait qu’Israël refusait de mettre en œuvre les dispositions de la Convention en Palestine occupée. Le Comité devrait évaluer la situation concernant les violations d’Israël, a estimé le Ministre adjoint. L’État de Palestine tient à mettre au courant toutes les institutions concernées quant aux violations des droits de l’homme commises et attend qu’elles se saisissent de cette question, a-t-il expliqué.
L’État palestinien tente de pallier les effets négatifs de l’occupation israélienne afin d’assurer une vie digne à tous ses citoyens – et plus particulièrement aux victimes des agissements israéliens en leur permettant d’accéder aux voies de recours telles que le mécanisme de plaintes individuelles du présent Comité.
Afin de prévenir la discrimination raciale, a ensuite indiqué le chef de la délégation palestinienne, les manuels scolaires palestiniens insistent sur les valeurs de tolérance et d’acceptation d’autrui ; ils mettent en outre en exergue les principes énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme.
D’autre part, des décisions ont été prises par le Conseil des ministres qui donnent notamment le droit à la femme d’ouvrir des comptes bancaires et d’établir des visas pour ses enfants. En outre, la nouvelle loi sur la famille qui prévoit notamment d’interdire les mariages pour les personnes de moins de 18 ans va être adoptée prochainement, a annoncé M. Hijazi.
La politique prévue pour la période 2017-2022 concrétise les pratiques démocratiques dans l’État de Palestine, a enfin souligné le chef de la délégation, évoquant notamment l’organisation d’élections libres.
L’institution nationale des droits de l’homme de la Palestine a fait observer que le présent dialogue avec les membres du Comité se déroulait alors que les Palestiniens tentaient de défendre leur place sur la scène internationale. L’institution a rappelé avoir obtenu le statut A de pleine conformité aux Principes de Paris et a précisé que son champ d’action couvrait toutes les formes de violations des droits de l'homme. En outre, l’institution élabore des rapports parallèles à l’occasion des dialogues avec les organes des Nations Unies.
On ne saurait se pencher sur la question de la discrimination raciale s’agissant de Palestine en faisant fi de la situation découlant de l’occupation, qui mène à un régime d’apartheid et engendre de nombreuses discriminations, a poursuivi l’institution nationale. Israël a fait main basse sur ce qui restait de la Palestine historique à la fin de la guerre de 1967, a-t-elle rappelé. La puissance occupante a violé le droit international, notamment par la création de colonies de peuplement, par sa politique de destruction des maisons palestiniennes et par la construction du mur de séparation, a-t-elle insisté. Ces politiques ont un effet négatif sur les capacités des autorités palestiniennes à mettre en œuvre les traités internationaux, a-t-elle souligné. Malgré cela, l’État de Palestine tente de respecter ses engagements en vertu de la Convention – laquelle prime sur le droit national palestinien de manière à ce que les citoyens puissent avoir recours à la justice et faire part de leurs doléances.
L’institution nationale des droits de l'homme a toutefois reconnu que l’État de Palestine devait encore agir pour harmoniser sa législation avec sa Convention. En effet, il n’y a pas de définition globale de la discrimination raciale conforme à la Convention dans la législation interne palestinienne, a-t-elle rappelé. En outre, certains groupes vulnérables ont besoin de davantage de protection, a-t-elle ajouté.
Examen du rapport
Questions et observations des membres du Comité
MME CHUNG CHINSUNG, rapporteuse du Comité pour l’examen du rapport de l’Etat de Palestine, a relevé que l’occupation rendait difficile la mise en œuvre de la Convention. De nombreuses résolutions ont été adoptées par l’Assemblée générale ou le Conseil de sécurité, entre autres, concernant cette question, a-t-elle rappelé. Le Comité va maintenant examiner, pour la première fois, ce rapport initial de l’État de Palestine, mais il a déjà traité la question de la Palestine à plusieurs reprises en examinant les rapports présentés par Israël, a-t-elle souligné.
Mme Chung a relevé que tous les rapports internationaux (concernant la Palestine) reconnaissent deux problèmes : d’une part, que les colonies de peuplement sont illégales en droit international et qu’elles représentent un obstacle à la jouissance des droits de l’homme de toute la population et, d’autre part, qu’il y a différents problèmes de droits de l’homme au niveau des Palestiniens eux-mêmes.
L’experte a ensuite recommandé à la délégation palestinienne de présenter un document de base commun à l’ensemble des organes de traités, afin de présenter la situation actuelle de l’État de Palestine. Elle a demandé des données ventilées mises à jour concernant la composition de la population de l’État de Palestine et le nombre de non-citoyens. Existe-t-il un mécanisme permettant le recueil de telles données, a-t-elle demandé ?
Mme Chung a par ailleurs relevé l’absence d’une définition complète de la discrimination raciale dans la législation palestinienne. Elle s’est enquise des efforts entrepris pour réviser le Code pénal afin d’interdire la discrimination raciale conformément à la Convention. Mme Chung s’est en outre enquise des mesures prises en vue d’amender les lois discriminatoires afin de garantir la conformité des textes concernés avec la Convention.
La rapporteuse a d’autre part souhaité savoir si l’Etat de Palestine avait pris des mesures pour remettre en place l’institution nationale d’assistance juridique. Elle s’est également enquise des ressources allouées à l’institution nationale des droits de l’homme afin de veiller à la mise en œuvre de la Convention.
Mme Chung a souhaité en savoir davantage sur la situation des minorités et sur leur droit de jouir de toutes les dispositions de la Convention.
S’agissant des réfugiés et des personnes déplacées, la rapporteuse a relevé que six millions de Palestiniens étaient enregistrés comme réfugiés. Elle s’est enquise des mesures prises pour harmoniser les lois liées à la nationalité.
Une autre experte a demandé des statistiques sur le taux de scolarité et le taux d’abandon scolaire et s’est enquise des défis à relever pour que les enfants puissent profiter de l’accès à l’éducation gratuite. Elle a relevé que chaque groupe de la population avait son propre système d’éducation et a souhaité savoir comment étaient harmonisés le programme sur la citoyenneté et la lutte contre les discriminations. La même experte a ensuite demandé des informations sur la situation des Roms dans l’Etat de Palestine.
Un expert a souhaité en savoir davantage sur les mesures prises par l’État de Palestine dans le contexte de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine.
Un expert a fait observer que la situation en Palestine, qui se trouve au centre du conflit probablement le plus difficile et le plus complexe au monde, place le Comité face à un défi exceptionnel. Toutefois, a-t-il souligné, il ne serait pas juste d’imputer la responsabilité de la persistance d’un tel conflit à un seul de ses protagonistes alors qu’aussi bien l’un que l’autre (des protagonistes) sont pris dans un engrenage infernal. Pour avoir une chance d’en sortir, il faudra beaucoup de lucidité, de courage et d’abnégation de part et d’autre, a insisté l’expert. L’attitude des organes politiques des Nations Unies à l’égard de ce conflit n’est pas toujours caractérisée par une neutralité au-dessus de tout soupçon, a-t-il estimé, avant d’insister sur la nécessité pour le Comité de résister à des tentatives d’instrumentalisation et d’ajouter que les organes de traités ne peuvent s’acquitter de leur rôle qu’en restant éloignés de tout opportunisme politique.
Ce même expert a ensuite relevé que l’inventaire du dispositif législatif palestinien n’est que rarement suivi d’informations concernant la pratique palestinienne en matière de mise en œuvre de la Convention, mais est en revanche très souvent suivi d’un exposé détaillé des pratiques d’Israël – en tant que puissance occupante – en la matière. Il est étonnant de constater qu’il y a foison d’informations concernant les territoires sur lesquels les autorités palestiniennes n’exercent pas une juridiction effective et très peu d’informations, en revanche, sur leurs propres pratiques dans les autres territoires. L’expert a demandé à la délégation de préciser les superficies respectives des territoires palestiniens occupés par Israël et des territoires palestiniens qui ne sont pas occupés. Ce même expert a par ailleurs relevé que le présent rapport était très long et dépassait de loin les restrictions imposées concernant la longueur des rapports des Etats parties ; aussi, a-t-il souhaité savoir ce qui avait permis à l’Etat de Palestine de bénéficier d’un tel traitement exceptionnel.
Une experte a souhaité connaître le processus d’adoption d’une norme législative dans l’État de Palestine et savoir à qui s’appliquent ces nouvelles lois.
Un membre du Comité a rappelé que la Convention obligeait les États parties à adopter des mesures immédiates pour lutter contre les discriminations dans le domaine de l’éducation. Aussi, a-t-il souhaité obtenir des exemples concrets de révision récentes des manuels scolaires visant à éliminer des références antisémites directes ou indirectes.
Une experte a souhaité en savoir davantage sur les plaintes déposées pour discrimination dans l’État de Palestine.
Une autre experte a demandé si des sanctions étaient prévues et appliquées contre les individus ayant recours au mariage de mineurs.
Réponses de la délégation
La délégation palestinienne a réaffirmé que l’État de Palestine était désireux de collaborer avec tous les membres du Comité dans l’objectif de se conformer pleinement à la Convention.
La délégation a ensuite rappelé que la Palestine était occupée par une puissance étrangère ; les autorités ne gèrent pas les frontières de l’ensemble de l’État, qui est de fait occupé. Le contrôle exercé par les autorités palestiniennes est dans certaines régions limité, a insisté la délégation.
L’État de Palestine a néanmoins le souhait d’aller de l’avant, notamment en signant des traités et en promulguant des lois pour protéger l’ensemble des citoyens, a poursuivi la délégation.
On ne peut nier le fait qu’il y a un occupant et un occupé : ce fait a été reconnu par divers organes des Nations Unies tels que le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale, a ensuite souligné la délégation, avant d’ajouter qu’avancer un quelconque prétexte d'équivalence morale entre l'occupant et l'occupé ne favoriserait pas le dialogue. D’une part, une puissance occupante exerce un contrôle absolu sur une nation toute entière ; de l’autre, une nation se voit privée de l’ensemble de ses droits fondamentaux, notamment de son droit à l’autodétermination. La puissance occupante mène des politiques punitives et discriminatoires contre les Palestiniens en raison de leur nationalité, a insisté la délégation palestinienne.
La délégation a déclaré qu’accepter l’oppression était contre la nature humaine. Il est impossible de rejeter sa propre histoire et d’accepter la violence du discours israélien, a-t-elle ajouté, avant d’assurer que l’État de Palestine a pris toutes les mesures possibles pour faire en sorte que l’âme et le caractère de la population palestinienne soient préservés.
L'État de Palestine a rejeté les tentatives visant à priver les réfugiés de leurs droits, notamment du droit au retour, et a soulevé la question des réfugiés dans toutes les enceintes internationales ; il a en outre coopéré avec les organismes internationaux impliqués dans l'amélioration de la situation et des conditions de vie de ces réfugiés, a ajouté la délégation.
La délégation a par la suite indiqué que des enfants se voyaient octroyer des papiers afin qu’ils ne se retrouvent pas en situation d’apatridie. Les Palestiniens réfugiés à l’étranger n’ont en revanche aucune nationalité, a-t-elle souligné, précisant que le Gouvernement a créé pour eux le passeport à usage extérieur – notamment pour ceux réfugiés au Liban ou en Syrie.
S’agissant des discours de haine, la délégation a expliqué que, dans le contexte qui vient d’être décrit, la dissidence et la protestation constituaient la réponse normale. Les conditions insupportables dans lesquelles vivent les Palestiniens sont la principale source de violence et créent un environnement propice à un conflit sans fin. Parler de l'histoire palestinienne ne constitue pas une incitation à la haine, a souligné la délégation palestinienne. L'État de Palestine a pris toutes les mesures possibles pour que l'âme et le caractère de la société palestinienne soient préservés et non ternis par la violence quotidienne et systématique ; mais la Palestine ne veut pas que sa politique soit dictée par la haine.
Les autorités palestiniennes luttent contre toutes les formes d’antisémitisme, a ensuite assuré la délégation. Elle a en outre déploré que certains individus tentent d’amalgamer les critiques légitimes d'Israël et de son occupation avec l'antisémitisme. La Palestine n’accepte pas la prétention d’Israël de représenter tous les juifs à travers le monde, a ajouté la délégation, avant de rappeler que tous les juifs ne sont pas responsables des exactions commises contre les Palestiniens. Certaines organisations juives ont même expliqué que l’occupation israélienne était un cauchemar et ont plaidé pour les droits humains des Palestiniens, a souligné la délégation palestinienne.
Israël recourt à une politique de destruction et ces destructions illégales constituent une punition collective, quel que soit le prétexte invoqué pour les justifier. Dans ce contexte, l’État de Palestine prend des mesures pour prendre soin des familles obligées de se déplacer.
S’agissant de l’éducation, la délégation a expliqué qu'il y avait deux programmes scolaires : l'un en Cisjordanie et l'autre dans la bande de Gaza. Ces programmes intègrent un enseignement relatif aux droits de l'homme : ils comportent des enseignements relatifs à l’histoire, à la langue arabe, à l’éducation civique et s’articulent autour des droits de l’homme et du droit international humanitaire.
Les programmes scolaires prennent en compte les caractéristiques des élèves et l’environnement particulier dans lequel ils évoluent, a poursuivi la délégation. L’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) utilise le programme scolaire palestinien qui, selon l’Office, est à 96% conforme aux normes des Nations Unies. Les programmes scolaires font référence, entre autres, au respect et à la tolérance, ainsi qu’à la présence des juifs en Palestine avant 1947.
L’État de Palestine a pris un certain nombre de mesures pour assurer la mise en œuvre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme dans le cadre d’une approche globale, a ensuite indiqué la délégation. L’Inspection judiciaire et le Conseil supérieur de la magistrature ont publié un guide décrivant tous les traités internationaux auxquels la Palestine a adhéré. Afin de soutenir la Commission indépendante des droits de l'homme, l'État de Palestine lui a apporté une contribution financière conformément aux Principes de Paris. L’institution nationale des droits de l’homme n’a pas reçu de plaintes concernant une discrimination raciale spécifique ; elle a par contre reçu quelque 2500 plaintes sur des violations des droits de l’homme en général, a indiqué la délégation palestinienne.
Pour ce qui est du statut des traités internationaux, la délégation a précisé qu’il était possible de les invoquer devant les tribunaux.
La loi fondamentale stipule que la discrimination raciale est interdite, a ensuite fait valoir la délégation. Des peines sont prévues par la loi nationale pour ce type d’infraction et le Code pénal prévoit que toute action qui vise à inciter à la division ou à la haine entre les communautés nationales peut entraîner une sentence pouvant mener à l’emprisonnement. La délégation a fait état de l’existence d’affaires devant les tribunaux relatives à l’incitation à la haine en ligne.
Il y a eu des cas d’arrestation arbitraire à motif politique, a reconnu la délégation ; mais lorsque les tribunaux ont montré que les accusations y afférentes étaient inappropriées, les personnes concernées ont alors été acquittées.
Aucune affaire relative à des crimes d’honneur n’a été portée devant les tribunaux palestiniens, a en outre indiqué la délégation.
La délégation a déclaré que la loi palestinienne prévoyait le droit absolu d’avoir accès à la justice sans discrimination aucune : aussi, l’aide juridictionnelle est-elle un des droits du peuple palestinien, notamment pour les plus pauvres.
Le Code de procédure pénale et le Code de procédure civile ne permettent pas d’imposer des interdictions de voyager, sauf si elles prononcées par un tribunal, auquel cas le juge doit convoquer la personne concernée et peut demander une garantie financière afin de lever l’interdiction de voyager pesant sur elle.
S'agissant des données sur les groupes protégés par la Convention, la délégation a déclaré que de nouveaux indicateurs (statistiques), comme ceux liés à la couleur de peau, avaient été introduits récemment. Elle a néanmoins souligné qu’il est difficile de collecter des statistiques sur ces groupes, car beaucoup de personnes concernées vivent à Jérusalem et voient leur liberté de circulation entravée par la puissance occupante.
Le Ministère de la Santé fournit en outre un soutien et créé des cliniques mobiles dans les villes et les zones où vivent les Roms, les Bédouins et les personnes d’ascendance africaine.
La délégation a par ailleurs informé le Comité qu’une ordonnance sur le travail domestique avait été promulguée en 2014 afin de mieux définir la relation entre le salarié et l'employeur. La pratique du travail domestique n’est pas répandue en Palestine, a précisé la délégation.
Remarques de conclusion
Ce doit être la première fois que le Comité entend une délégation d’un pays sous occupation, a fait observer M. IBRAHIM KHRAISHI, Observateur permanent de l’État de Palestine auprès des Nations Unies à Genève. La Palestine est une victime et cette occupation de la Palestine est illégale, a-t-il insisté.
Les institutions de l’État palestinien sont néanmoins en train d’être construites, a poursuivi l’Observateur permanent. L’État de Palestine est confronté au mouvement sioniste et le sionisme est considéré par des instances internationales comme une forme de racisme, a-t-il déclaré. L’État de Palestine a le droit d’utiliser tous les outils possibles pour lutter contre l’occupation, a ajouté M. Khraishi.
L’antisémitisme est répandu en Europe ; mais la Palestine est musulmane, chrétienne et juive, a ensuite souligné l’Observateur permanent, avant de faire valoir que dans l’État de Palestine, la citoyenneté est accordée de manière égale à tous.
L’occupation elle-même est la forme la plus hideuse de discrimination, a ensuite rappelé M. Khraishi. Israël empêche les rapporteurs spéciaux des Nations Unies de se rendre en Palestine, a-t-il également rappelé. Alors que le 17 septembre prochain, auront lieu des élections en Israël, l’une des candidates a dit que les Palestiniens n’avaient pas le droit d’avoir des droits, a ajouté l’Observateur permanent. Le peuple palestinien veut néanmoins être un modèle pour la région, notamment en ratifiant sans réserve l’ensemble des instruments internationaux de droits de l’homme, a-t-il conclu.
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