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LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE EXAMINE LE RAPPORT INITIAL DU HONDURAS

Compte rendu de séance

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné, hier après-midi et ce matin, le premier rapport présenté par le Honduras sur les mesures prises par ce pays en application des dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Présentant le rapport de son pays, M. Giampaolo Rizzo Alvarado, Représentant permanent du Honduras auprès des Nations Unies à Genève, a indiqué que le Honduras avait reconnu la discrimination, l’inégalité et l’exclusion sociale dont souffrent les peuples autochtones et d’origine africaine, ainsi que les obstacles structurels, socioéconomiques et culturels qui les empêchent de profiter de leurs terres et de réaliser leur potentiel. C’est pourquoi le pays a pris, tout au long de la présidence de M. Porfirio Lobo Sosa - qui vient de s’achever –, des mesures concrètes pour donner effet aux dispositions de la Convention, a-t-il déclaré. Au plan institutionnel, a-t-il souligné, la Constitution hondurienne interdit la discrimination quel qu’en soit le motif et reconnaît, entre autres, le droit à la protection du patrimoine culturel et des cultures autochtones. Le Code pénal fait de la discrimination fondée sur le sexe, la religion ou l’origine nationale, entre autres, une circonstance aggravante, a insisté le Représentant permanent. Il a indiqué que le Congrès est actuellement saisi d’un projet de loi reconnaissant et défendant les principes de multi-culturalité et de plurilinguisme.

Après avoir attiré l'attention sur la création, en 2010, du Secrétariat aux peuples autochtones et afro-descendants, M. Alvarado a souligné que les peuples autochtones et afro-honduriens bénéficient notamment de plans stratégiques axés sur le développement économique durable, sur la santé et la sécurité alimentaire et sur le soutien direct aux familles les plus démunies. Il a en outre attiré l'attention sur la mise en place du Procureur spécial des ethnies et du patrimoine culturel. Les droits des populations autochtones et afro-honduriennes sur les terres ancestrales sont reconnus par la loi, a poursuivi M. Alvarado, précisant que plus de 76 000 titres de propriété leur ont été remis dans ce cadre entre 2010 et 2013, couvrant plusieurs centaines de milliers d’hectares. Il n'en demeure pas moins que les statistiques montrent que le problème de la pauvreté et de l’extrême pauvreté frappe durement les peuples autochtones et afro-honduriens, a reconnu le Représentant permanent.

Composée de plusieurs autres représentants de la Mission permanente du Honduras à Genève, la délégation a répondu aux questions des experts s'agissant de la situation des peuples autochtones et des Afro-honduriens, y compris pour ce qui est des questions de propriété foncière; des mesures spéciales prises en faveur des groupes défavorisés; de l'incrimination de la discrimination raciale; de la notion de «race» telle que figurant dans la législation hondurienne; de la lutte contre la pauvreté; ou encore de l'ordre juridique interne.

M. Pastor Elias Murillo Martinez, rapporteur du Comité pour l’examen du Honduras, a fait observer que la présidence de M. Porfirio Lobo, entre 2010 et aujourd’hui, avait marqué un tournant dans la reconnaissance et la visibilité des groupes ethniques qui composent le Honduras. Les Garifunas ont joué un rôle important à cet égard en se positionnant comme un canal stratégique pour le rétablissement de la légitimité perdue après le coup d’État de 2009. Aujourd’hui, la volonté du Honduras de surmonter les difficultés auxquelles il est confronté se reflète, en particulier, dans la création, en 2011, du Ministère des peuples autochtones et afro-descendants, ainsi que dans la redistribution de terres à plusieurs groupes ethniques et dans le lancement de programmes spéciaux. Le rapporteur a toutefois relevé la difficulté de disposer de statistiques démographiques précises concernant les peuples autochtones et afro-descendants. En outre, comme dans d’autres pays d’Amérique latine, les Afro-descendants sont toujours confrontés, au Honduras, à d’importants obstacles en matière de développement et de représentation équitable dans les instances de décision, a poursuivi M. Murillo Martinez. Ces obstacles sont notamment le racisme et la discrimination raciale, le manque d’éducation, les difficultés d’accès au marché du travail, l’insécurité juridique relative à la propriété foncière collective, le manque d’information, la dévalorisation du patrimoine culturel autochtone et la faiblesse des institutions, a-t-il précisé.

Le Comité adoptera ultérieurement à huis-clos ses observations finales concernant le rapport du Honduras et les rendra publiques à l'issue de la session, qui doit clore ses travaux le vendredi 21 février prochain.


Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport du Monténégro (CERD/C/MNE/2-3).



Présentation du rapport

Présentant le rapport initial du Honduras (CERD/C/HND/1-5), M. GIAMPAOLO RIZZO ALVARADO, Représentant permanent du Honduras auprès des Nations Unies à Genève, a indiqué que son pays avait reconnu la discrimination, l’inégalité et l’exclusion sociale dont souffrent les peuples autochtones et d’origine africaine, ainsi que les obstacles structurels, socioéconomiques et culturels qui les empêchent de profiter de leurs terres et de réaliser leur potentiel. C’est pourquoi le Honduras, qui a signé la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, a pris, tout au long de la présidence de M. Porfirio Lobo Sosa - qui vient de s’achever –, des mesures concrètes pour donner effet aux dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes formes de discrimination raciale.

Au plan institutionnel, la Constitution hondurienne interdit la discrimination quel qu’en soit le motif et pose l’égalité entre tous les citoyens. La Constitution reconnaît, de plus, le droit à l’égalité et à la non-discrimination dans la jouissance des droits à l’éducation, à la santé et à la sécurité sociale, ainsi que le droit à la protection du patrimoine culturel et des cultures autochtones. Le Code pénal fait de la discrimination fondée sur le sexe, la religion ou l’origine nationale, entre autres, une circonstance aggravante. Le Code pénal sanctionne en outre tout acte de violence visant à détruire totalement ou partiellement un groupe national ou ethnique. Par ailleurs, la discrimination dans le contexte professionnel est interdite par le Code du travail. D'autre part, a précisé le Représentant permanent du Honduras, les législations sur la famille et sur l’enfance sont en cours de réforme, en vue d’une mise en conformité avec les normes internationales. Le Congrès est saisi d’un projet de loi reconnaissant et défendant les principes de multi-culturalité et de plurilinguisme, a-t-il ajouté.

M. Alvarado a également informé le Comité des politiques publiques adoptées par son Gouvernement en vue d’assurer le respect des droits constitutionnels de certains groupes ethniques ou catégories de personnes, par l’intermédiaire notamment du Secrétariat aux peuples autochtones et afro-descendants (SEDINAFROH), créé en 2010. Le Secrétariat a ainsi élaboré, avec les peuples autochtones et afro-honduriens, un plan stratégique de développement intégral (2011-2012) ; un plan national de lutte contre le racisme et la discrimination; ainsi qu’un programme de renforcement des compétences des peuples autochtones et afro-honduriens visant à les intégrer davantage aux institutions publiques et étatiques. D’autres mesures de soutien sont prises en leur faveur dans les domaines de la formation professionnelle, du développement économique et de la participation au marché du travail, a ajouté le Représentant permanent. Les peuples autochtones et afro-honduriens bénéficient ainsi de plans stratégiques axés sur le développement économique durable, sur la santé et la sécurité alimentaire et sur le soutien direct aux familles les plus démunies.

La Commission nationale des droits de l’homme (CONADEH) a pour mandat de donner suite à toute plainte pour violation des droits de l’homme et de surveiller l’action de l’État dans le domaine des droits de l’homme, a poursuivi M. Alvarado. Le budget de cette Commission est en progression constante depuis 2010 et a atteint 3,2 millions de dollars en 2013, a-t-il précisé. Il a en outre fait valoir que le Honduras a désigné un procureur chargé de veiller aux intérêts collectifs des tribus autochtones et afro-honduriennes: le «Procureur spécial des ethnies et du patrimoine culturel», auprès duquel toute personne victime de discrimination raciale au Honduras peut faire valoir ses droits. Quant au Secrétariat d’État à la justice et aux droits de l’homme, il est chargé de la conception et de l’application d’une politique publique et d’un plan national sur les droits de l’homme, inspirés des résultats de la Conférence de Vienne en 1993, a indiqué le Représentant permanent.

L’Institut national des statistiques a organisé un recensement précis des populations autochtones et afro-honduriennes, a poursuivi M. Alvarado. Leurs droits sur les terres ancestrales sont reconnus par la loi, a-t-il assuré, précisant que plus de 76 000 titres de propriété leur ont été remis dans ce cadre entre 2010 et 2013, couvrant plusieurs centaines de milliers d’hectares. Une Commission intersectorielle a pour mission de préserver les terres ancestrales des communautés garifuna et misquita, a insisté le Représentant permanent. Les statistiques montrent que le problème de la pauvreté et de l’extrême pauvreté frappe durement les peuples autochtones et afro-honduriens, a-t-il poursuivi. Pour y remédier, l’État met en œuvre d’importantes politiques publiques en matière de protection de la petite enfance, d’équité entre les sexes, de stratégie et de sécurité alimentaires, entre autres.

M. Alvarado a en outre attiré l'attention sur l'existence d'un programme national destiné à améliorer la qualité de l’éducation des peuples autochtones et afro-honduriens, dans un contexte où le taux d’illettrisme atteint 30 % dans certaines ethnies. L’éducation bilingue et interculturelle est favorisée en tant que moyen de préserver les patrimoines autochtones et traditionnels, a précisé le Représentant permanent. La situation sociale et économique des différentes ethnies est très contrastée, s’agissant notamment de l’accès à l’éducation, au marché du travail et à la santé (y compris l’eau et l’assainissement), a-t-il souligné. La grande majorité des familles autochtones vit encore dans des logements individuels (maisons en bois et terre cuite) à l’hygiène généralement insuffisante, a-t-il reconnu.


Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

M. PASTOR ELIAS MURILLO MARTINEZ, rapporteur du Comité pour l’examen du rapport du Honduras, a fait observer que la présidence de M. Porfirio Lobo, entre 2010 et aujourd’hui, avait marqué un tournant dans la reconnaissance et la visibilité des groupes ethniques qui composent le Honduras. Les Garifunas ont joué un rôle important à cet égard en se positionnant comme un canal stratégique pour le rétablissement de la légitimité perdue après le coup d’État de 2009. Aujourd’hui, la volonté du Honduras de surmonter les difficultés auxquelles il est confronté se reflète, en particulier, dans la création, en 2011, du Ministère des peuples autochtones et afro-descendants, ainsi que dans la redistribution de terres à plusieurs groupes ethniques et dans le lancement de programmes spéciaux. Le rapporteur a toutefois relevé la difficulté de disposer de statistiques démographiques précises concernant les peuples autochtones et afro-descendants. Il a par ailleurs noté avec satisfaction que le Honduras collabore pleinement avec les institutions de droits de l’homme des Nations Unies.

Il n'en demeure pas moins que, comme dans d’autres pays d’Amérique latine, les Afro-descendants sont toujours confrontés, au Honduras, à d’importants obstacles en matière de développement et de représentation équitable dans les instances de décision, a poursuivi M. Murillo Martinez. Ces obstacles sont notamment le racisme et la discrimination raciale, le manque d’éducation, les difficultés d’accès au marché du travail, l’insécurité juridique relative à la propriété foncière collective, le manque d’information, la dévalorisation du patrimoine culturel autochtone et la faiblesse des institutions, a-t-il précisé. Dans ce contexte, a-t-il relevé, le nouveau Gouvernement a annoncé un programme ambitieux incluant notamment la création de 25 000 nouveaux emplois par an : aussi, M. Murillo Martinez a-t-il prié la délégation de dire dans quelle mesure ce programme profiterait aux catégories les plus défavorisées – et donc aux peuples autochtones et afro-descendants. Le rapporteur s'est également enquis des mesures affirmatives que le Gouvernement entend prendre pour garantir l’égalité des chances pour tous les citoyens.

Le Honduras pénalise le racisme, a en outre relevé le rapporteur, soulignant qu'un étranger responsable de ce crime peut être expulsé du pays – sanction que l'on ne retrouve, sans doute, dans aucun autre pays. Mais les informations dont dispose le Comité indiquent que le racisme continue de sévir au Honduras, sans que la loi ne soit invoquée, a regretté M. Murillo Martinez. Il a souligné que la vie et le développement des peuples autochtones dépendent étroitement de l’accès aux terres ancestrales. Dans ce contexte, la délégation a été priée de fournir des renseignements – par exemple des statistiques ventilées par ethnie – attestant d'une reconnaissance effective du droit à la terre. M. Murillo Martinez a aussi prié la délégation de donner des renseignements sur les assassinats de dirigeants autochtones engagés dans la défense des droits fonciers des peuples autochtones et afro-descendants.

La situation de plusieurs milliers de Misquitos vivant du produit de la plongée sous-marine est particulièrement difficile, a aussi mis en garde le rapporteur, précisant que bon nombre de ces personnes sont handicapées par les maladies liées à la décompression (lors de la plongée). D’autre part, des organisations non gouvernementales ont signalé au Comité que les peuples autochtones réclament toujours l’application effective de la Convention n°169 de l’Organisation internationale du travail relative aux peuples indigènes et tribaux. Le rapporteur a enfin relevé que le nouveau Président de la République, dans son discours d’investiture, n’avait fait aucune allusion à la notion de diversité.

Un expert du Comité a noté que la notion de « race », telle qu’utilisée dans le rapport et dans la Constitution honduriens, est insuffisamment définie et ne correspond pas complètement aux exigences de la Convention. La notion d’incitation à la haine, couverte par l’article 4 de la Convention, est, quant à elle, absente des textes fondamentaux honduriens. Cet expert a souligné que l’interdiction de la discrimination raciale doit bénéficier non seulement aux « Afro-honduriens » mais, d’une manière, à tous les « Afro-descendants »; il existe une distinction sémantique entre ces deux catégories de personnes, a-t-il insisté. Il s'est enfin enquis du sort réservé aux 44 plaintes pour discrimination raciale reçues par le Procureur spécial chargé des ethnies et du patrimoine culturel et a souhaité savoir comment les conflits fonciers entre autochtones et autres communautés sont traités.

Un autre membre du Comité s’est félicité des conditions dans lesquelles a été préparé le rapport du Honduras, ainsi que du rôle joué par le Ministère des peuples autochtones et afro-honduriens. Il a néanmoins regretté que les lois honduriennes ne reprennent pas systématiquement les douze motifs de discrimination cités dans la Convention. L’expert s’est aussi interrogé sur le caractère discriminatoire de certaines dispositions relatives à la participation des ressortissants étrangers à l’activité syndicale au Honduras.

Un expert a rappelé que le Comité avait à cœur de défendre la diversité afin que les groupes minoritaires puissent s’affirmer en tant que tels. Il faudrait savoir dans quelle mesure les groupes ethniques du Honduras se considèrent comme autant de minorités, a-t-il fait observer.

Un autre membre du Comité s'est inquiété de l’impunité persistante d’auteurs de violences policières. Le pouvoir judiciaire doit être parfaitement indépendant des deux autres pouvoirs (exécutif et législatif), a-t-il rappelé.

Une experte a demandé des précisions sur l’organisation et les compétences du Bureau du Procureur spécial chargé des ethnies et du patrimoine culturel.

Un expert s’est enquis de l’incidence de la criminalité organisée sur le développement économique du Honduras et, surtout, sur les conditions de vie de la population autochtone et afro-descendante, alors que selon des informations, entre 20 % et 30 % des revenus de ces personnes leur seraient extorqués par des bandes criminelles.

D’autres experts ont demandé des précisions sur les suites données au conflit concernant la construction d’un barrage sur la rivière Patuca ; sur l’adoption et la mise en œuvre du plan d’action pour les droits de l’homme, dont il est question depuis 1993 ; sur les mesures prises pour lutter contre la discrimination à l’encontre des ressortissants de pays asiatiques ; sur des violences commises par les forces de l’ordre contre des membres de la communauté misquito ; ainsi que sur les raisons de la longue hésitation (32 ans) qui a été celle du Honduras avant que ce pays ne procède à la ratification de la Convention.

Un membre du Comité a relevé que le rapport traite, pour l’essentiel, de neuf peuples autochtones et des afro-descendants. Aussi, la question se pose-t-elle de savoir comment sont désignées les autres catégories de populations minoritaires vivant au Honduras, a souligné cet expert. Il semble, au vu de la liste des personnes vulnérables au Honduras, que pratiquement toute la population, hormis les hommes blancs, peut être incluse dans cette catégorie, a ajouté cet expert.

La loi ne définit pas la notion de «race», ce qui complique la compréhension de la position du Honduras à ce sujet, a noté un autre expert, rappelant que la Norvège a supprimé ce mot de sa législation au motif que ce concept n’est pas scientifique et ne renvoie à rien. Qu’entend au juste le Honduras par «origine nationale»? S’agit-il de l’origine ethnique ou de la citoyenneté, a en outre demandé l'expert? Il a rappelé que la Convention prévoit l’adoption de mesures spéciales destinées à corriger les effets discriminatoires de situations structurellement et historiquement défavorables à certaines catégories de population. Les personnes qui proviennent de pays voisins du Honduras font-elles partie des groupes vulnérables, a-t-il demandé?


Réponses de la délégation

Le plan national de lutte contre le racisme et la discrimination raciale est appliqué avec l’aide du Programme des Nations Unies pour le développement, du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et de la Coopération suisse pour le développement, a indiqué la délégation. Une politique publique des droits de l’homme a également été approuvée.

Le programme présidentiel de création d’emplois, réalisé en partenariat avec des experts, est une réponse nationale au niveau élevé du chômage dans le pays et bénéficiera à tous les jeunes, indépendamment de leur origine ethnique, a par ailleurs fait valoir la délégation. En vertu de ce programme, qui bénéficie déjà à 1800 jeunes, le Gouvernement du Honduras s’engage à subventionner les trois premiers mois d’emploi, a-t-elle précisé.

Par ailleurs, 11 000 personnes bénéficient directement du Programme de développement intégral des peuples autochtones du Honduras, a poursuivi la délégation. Trois projets d’investissements ont été mis sur pied à l'intention des neuf peuples autochtones, a-t-elle précisé. Le renforcement institutionnel, quant à lui, se concrétise par la formation de cadres autochtones et afro-honduriens, a-t-elle ajouté.

L’État hondurien continuera de renforcer son cadre juridique jusqu’à l’inclusion de tous les peuples autochtones et afro-descendants, a assuré la délégation. L’existence du Bureau du Procureur spécial chargé des ethnies et du patrimoine culturel doit être vue comme une modalité d’action affirmative et non comme une forme de discrimination, a-t-elle poursuivi. L’État du Honduras estime que la discrimination raciale est de nature à perturber la paix entre les peuples, a souligné la délégation. L’institution du Procureur spécial a donc pour mission de protéger les intérêts collectifs des peuples autochtones et d’autres groupes ethniques.

La loi sur la propriété prévoit un processus de régularisation des titres de propriété foncière détenue traditionnellement par les peuples autochtones, a indiqué la délégation. L’Institut de la propriété sera chargé de donner effet à une nouvelle loi affirmant le droit des peuples autochtones à la jouissance collective et 8communale de leurs ressources naturelles, a-t-elle ajouté. Aux termes de cette même loi, a-t-elle précisé, lorsque l’État voudra exploiter les ressources naturelles d’autochtones, il sera obligé de consulter auparavant les peuples concernés et d’obtenir leur consentement. A titre d'exemple, la délégation a évoqué le refus d'un projet minier exprimé par la communauté de Danlí. Le «régime communal» de propriété suppose l’imprescriptibilité et l’intangibilité des titres de propriété, a-t-elle rappelé. Les autorités honduriennes ont accordé récemment à des peuples autochtones des titres de propriété couvrant quelque 759 000 hectares, a fait valoir la délégation.

Les peuples autochtones les plus défavorisés sont ceux qui vivent dans des régions isolées et qui ne bénéficient pas des services publics, a fait observer la délégation. Elle a en outre fait savoir que les autorités ne disposent pas de statistiques pour quantifier les effets économiques de la criminalité organisée sur les peuples autochtones. Le problème de l’extorsion, particulièrement préoccupant au Honduras, ne touche pas seulement les peuples autochtones, a-t-elle toutefois souligné.

Les peuples autochtones et afro-descendants peuvent développer leur identité et leur culture par le biais d’émissions de radio, des fréquences leur étant réservées, a poursuivi la délégation. En outre, l'éducation primaire est dispensée dans sept langues et des enseignants bilingues sont formés, certains d'entre eux ayant été recrutés pour enseigner à l’école les langues maya chorti et misquito. Les autorités du Honduras ont fait traduire des manuels pédagogiques dans les langues des neuf peuples autochtones et des afro-descendants. Il sera difficile de faire renaître la langue maya, aujourd’hui disparue, a indiqué la délégation en réponse aux questions d’un expert.

Le Honduras reconnaît que les Nations Unies utilisent le terme «Afro-descendants», mais le fait est que les Afro-descendants honduriens se désignent eux-mêmes comme «Afro-honduriens», a souligné la délégation. Quoi qu'il en soit, les autorités accordent la même protection à toutes les personnes soumises à leur juridiction, a assuré la délégation. Toutes les lois du Honduras s’appliquent à toutes les personnes vivant dans le pays, sans distinction aucune et dans le respect du principe d’égalité devant la loi. Toutefois, des mesures spéciales ont été prises en faveur de catégories défavorisées de la population, a précisé la délégation.

La délégation a précisé que les peuples autochtones ne sont pas les seuls à bénéficier de mesures spéciales destinées à faciliter leur développement ou améliorer leurs conditions de vie: on trouve aussi parmi les bénéficiaires de telles mesures les personnes handicapées, les personnes privées de liberté, les enfants, les jeunes et les femmes. Les plans pour l’égalité et l’équité entre les sexes ont intégré un volet d’analyse de la situation des femmes autochtones et une série de mesures visant, notamment, l’exercice de leurs droits de citoyennes et leur protection contre la violence. Le Honduras applique bel et bien des mesures spéciales destinées à certaines catégories de population, a ensuite insisté la délégation. Les ressortissants de pays voisins résidant au Honduras sont dûment recensés et classés en tant que «migrants», a-t-elle indiqué.

La définition des «groupes vulnérables» est celle retenue dans le plan d’action pour les droits de l’homme, qui a été élaboré après de vastes consultations, a souligné la délégation.

Les résultats de l’inclusion de la variable ethnique au recensement national seront consignés dans le prochain rapport du Honduras, a ensuite indiqué la délégation.

S’agissant de plusieurs cas précis de discrimination raciale au sein de l’université ou contre des députés autochtones, la délégation a indiqué que les procédures pénales sont en cours pour certains de ces cas, alors que d'autres ont été résolus par la conciliation ou, dans un cas, par le licenciement de la personne responsable. La délégation a précisé que les plaintes pour discrimination doivent être déposées auprès du Procureur spécial ou du Ministère public.

En ce qui concerne l'incrimination de la discrimination raciale, le terme de «race», utilisé dans l’article 321 du Code pénal, est repris de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et d’autres instruments internationaux, a souligné la délégation, précisant que ce mot peut renvoyer à la «race humaine». La délégation a ensuite indiqué que son pays est en train d’harmoniser sa pratique juridique avec les normes internationales et qu'il tiendrait compte des remarques des experts s’agissant de l’utilisation du mot «race» dans la loi. En vertu des principes de non-discrimination et d’égalité devant la loi, a-t-elle poursuivi, le Honduras est en train d’harmoniser sa loi avec le droit international. Le pays a donc ouvert son Code pénal à des crimes reconnus au plan international. Une réforme récente permet aux juges de prendre en compte de nouvelles circonstances aggravantes liées à la discrimination ou à la négation des droits de plusieurs catégories de personnes (article 27 du Code pénal), a précisé la délégation. Les conditions de santé et la maladie peuvent être une cause de discrimination, tout comme l’apparence physique ou la manière de s’habiller, a-t-elle indiqué. L'article 321 du Code pénal réprime l’incitation publique à la discrimination, à la haine ou à la persécution contre une personne ou un groupe de personnes.

Quant à l’expulsion d’un étranger qui commettrait un acte de discrimination, elle relève d'une décision du juge; mais aucun cas concret n’a été recensé à ce jour, a indiqué la délégation.

Le Gouvernement du Honduras collabore en ce moment, avec les experts internationaux des droits de l’homme et les autorités de la Colombie, à l’élaboration d’un projet de loi sur la protection des défenseurs des droits de l’homme, a indiqué la délégation.

La pauvreté touche plus de 64 % de la population hondurienne, a poursuivi la délégation. C’est pourquoi les autorités entendent poursuivre leur programme social prioritaire «Prime 10 000» d'allocations directes aux familles nécessiteuses, pour un montant total équivalent à 1% du PIB. L’impact de ce programme sur la situation des familles est tangible, a affirmé la délégation: il se manifeste par l’amélioration des résultats scolaires et de la santé des enfants, ainsi que par une augmentation de la consommation et un recul du taux de pauvreté, entre autres.

Un expert ayant insisté sur l’importance de l’investissement dans l’accès à l’éducation, la délégation a indiqué que le programme national d’aide financière directe aux familles («Prime 10 000» - 10 000 lempiras représentant environ 500 dollars) lie l'octroi de cette aide à la participation scolaire des enfants, entre autres critères.

L’une des sources du droit hondurien est le droit coutumier, a rappelé la délégation, soulignant que les coutumes ancestrales doivent être préservées. La Constitution de la République stipule que le Honduras souscrit aux pratiques et principes du droit international et impose que les traités internationaux soient ratifiés par le Congrès national. Une fois ratifiés, les traités font partie intégrante du droit interne et nul n’est besoin de les transposer en droit interne par des règlements d’application (tradition moniste). Lorsqu’un traité va à l’encontre d’une disposition de la Constitution, le Congrès examine le cas comme s’il s’agissait d’une modification constitutionnelle.

Le Code du travail hondurien devra être révisé pour admettre la participation sur un pied d'égalité des ressortissants étrangers à l’activité syndicale, a reconnu la délégation.

Le retard avec lequel le Honduras a procédé à la ratification de la Convention s’explique par l’absence de structure publique capable de définir les obligations internationales du Honduras en matière de droits de l’homme, a en outre expliqué la délégation.

La «Direction d’enquête et d’évaluation de la police» a pour mission de veiller à la bonne conduite des services de police, a indiqué la délégation, précisant que dans les cas graves, elle peut recommander le licenciement du ou des fonctionnaires ayant eu une conduite non conforme. Les policiers reçoivent une formation aux droits de l’homme, a rappelé la délégation. La torture est définie en détail à l’article 209 du Code pénal, qui punit d'une peine de cinq à quinze ans de réclusion tout agent public ayant commis ce délit. L’action pénale contre des auteurs de torture n’exclut pas une action civile en dédommagement, a précisé la délégation.

Le Honduras étant un État de droit, son Gouvernement représentatif exerce le pouvoir de manière complémentaire et indépendamment des deux autres pouvoirs, a souligné la délégation.


Observations préliminaires

Le rapporteur du Comité pour l’examen du rapport du Honduras, M. MURILLO MARTINEZ, s’est dit satisfait des réponses données par la délégation du Honduras ainsi que des efforts qu'elle a fournis pour répondre aux inquiétudes qui existent encore s'agissant de ce pays. Le prochain rapport devrait fournir des informations statistiques sur les peuples autochtones et afro-descendants, a-t-il souligné. Il s'est réjoui que le Honduras envisage d’inclure dans sa législation des dispositions reconnaissant la diversité ethnique et culturelle du pays, a-t-il poursuivi. Il s'est dit intéressé de voir la place que les peuples autochtones et les afro-descendants occuperont dans le nouveau Conseil des Ministres.

Le rapporteur a par ailleurs souligné que si la notion de race est difficile à admettre pour certains, la Convention porte bel et bien sur l’élimination du fléau qu’est le racisme. M. Murillo Martinez s'est ensuite inquiété du danger que la fusion du Secrétariat des peuples autochtones avec le Secrétariat des droits de l’homme n'entraîne une dilution des compétences et de l’influence qu'ont à l'heure actuelle ces deux institutions. Le Comité attend des informations à ce sujet ainsi qu'en ce qui concerne les dédommagements qui seront accordés aux Misquitos victimes d’accidents et de maladies de plongée, a conclu le rapporteur.


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CERD14/004F