Fil d'Ariane
LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS EXAMINE LE RAPPORT DE LA BELGIQUE
Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné aujourd'hui le rapport périodique de la Belgique sur les mesures qu'elle prend pour s'acquitter de ses obligations en vertu du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
Le rapport a été présenté par M. Bertrand de Crombrugghe, Représentant permanent auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, et M. François Vandamme, Conseiller général au Service public fédéral de l'emploi, du travail et de la concertation sociale. M. Vandamme a indiqué que la Belgique applique le Pacte en interaction avec d'autres conventions internationales, ajoutant que la ratification de nouveaux instruments internationaux était un processus constant. Ainsi, le Parlement fédéral sera très bientôt saisi du Protocole facultatif se rapportant au Pacte, tandis que le Sénat est en train d'adopter le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant. Il a d'autre part indiqué que la création d'une institution nationale de droits de l'homme ne rencontre pas de résistance fondamentale, mais qu'il y a lieu de tenir compte des nombreux interlocuteurs actuels et de leurs mandats, dont certains devront être adaptés. M. Vandamme a également indiqué que le respect du principe de non-discrimination est assuré en Belgique par les institutions compétentes sous le contrôle des tribunaux et a ajouté que la liste des motifs de discrimination interdits par la loi s'étend maintenant à l'appartenance syndicale.
La délégation belge était également composée de représentants des Services publics fédéraux des affaires étrangères, de la justice, de l'intérieur, de l'emploi, du travail et de la concertation sociale, de l'intégration sociale, et de la sécurité sociale. Étaient également représentées les autorités de la région de Bruxelles, de la Flandre et de la Wallonie. La délégation a répondu aux nombreuses questions du Comité portant sur la protection des droits des personnes handicapées, sur les modalités de l'aide publique au développement accordée par la Belgique et sur les progrès dans la création de l'institution nationale de droits de l'homme et d'un cadre juridique global de lutte contre les discriminations, de même que sur les mesures prises pour favoriser l'emploi sur un pied d'égalité.
Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport, M. Álvaro Tirado Mejía, s'est félicité de la qualité du rapport et des informations qu'il contient. Entre autres aspects positifs, il s'est réjoui que la Belgique s'apprête à ratifier le Protocole facultatif se rapportant au Pacte et la Convention de l'Organisation internationale du travail sur le travail domestique. M. Tirado Mejía a espéré que l'institution nationale de droits de l'homme aura commencé ses activités lors de l'examen du prochain rapport de la Belgique. Le rapporteur a noté que des écarts salariaux entre les sexes persistent en Belgique. Des questions demeurent aussi quant à l'application du droit de grève. Par ailleurs, la violence domestique n'est pas érigée en infraction pénale alors que le problème semble s'être aggravé.
Le Comité adoptera, avant la fin de la session le vendredi 29 novembre prochain, des observations finales sur le rapport de la Belgique.
Le Comité examinera demain, à partir de 10 heures, le rapport périodique de la Bosnie-Herzégovine (E/C.12/BIH/2).
Présentation du rapport
Le rapport de la Belgique (E/C.12/BEL/4) a été présenté par le chef de la délégation, M. BERTRAND DE CROMBRUGGHE, Représentant permanent auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, qui a présenté les autres membres de la délégation.
M. FRANÇOIS VANDAMME, Conseiller général au Service public fédéral de l'emploi, du travail et de la concertation sociale, a ensuite déclaré que la Belgique appliquait le Pacte nécessairement en interaction avec d'autres conventions internationales et a souligné que la ratification des instruments internationaux était un processus constant. Il a fait valoir que l'examen par le Parlement fédéral du Protocole facultatif au Pacte en vue de sa ratification était imminent, alors que le Sénat est en train d'adopter le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant. M. Vandamme a ajouté que les autorités belges mettent tout en œuvre pour maintenir la protection sociale dans son rôle protecteur de redistribution.
Le projet de création d'une institution nationale de droits de l'homme poursuit son chemin politique; il n'y a pas de résistance fondamentale, mais il y a lieu de tenir compte des nombreux interlocuteurs actuels et de leurs mandats, dont certains devront être adaptés. Le Conseiller général a également indiqué que le respect du principe de non-discrimination est assuré en Belgique par les institutions compétentes sous le contrôle des tribunaux. La liste des motifs de discrimination interdits par la loi s'étend maintenant à l'appartenance syndicale. La loi et les pratiques du pays garantissant les droits et l'accessibilité des personnes avec un handicap aux services et prestations sociaux ont fait l'objet d'un soin tout particulier ces derniers temps, sous l'influence de la Charte sociale européenne. L'écart salarial persistant entre les hommes et les femmes est un souci des autorités. M. Vandamme a souligné à cet égard que la loi oblige les partenaires sociaux à prendre des mesures qui touchent au cœur de la source du problème: notamment les conventions collectives de travail déterminant les barèmes des salaires.
Les droits des travailleurs étrangers sont respectés en cas de séjour légal, a déclaré le Conseiller au ministère de l'emploi. Ils ont accès aux droits économiques et sociaux sans discrimination aucune. Les étrangers admis sont invités à suivre des parcours d'intégration avec le soutien d'associations privées et publiques. Les développements les plus récents du droit à l'éducation sont décrits dans le rapport. Au sein des communautés belges responsables, tout est fait pour faciliter l'intégration des groupes défavorisés et réduire le coût de l'éducation pour les familles. La lutte contre l'abandon scolaire est un thème de la stratégie européenne pour l'emploi, qui encadre les politiques de l'emploi des États membres. Du fait de la persistance du chômage des jeunes, les autorités assurent un important suivi de mesures, en particulier en vue de mettre en place une «garantie jeunes». L'office national de l'emploi, qui règle les allocations chômage, a été primé récemment par l'Association internationale de la sécurité sociale pour l'efficacité de son action.
Examen du rapport
Questions et observations des membres du Comité
M. ÁLVARO TIRADO MEJÍA, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Belgique, s'est félicité de la qualité du document et des informations qu'il contient, ainsi que des déclarations d'ouverture de la délégation. Entre autres aspects positifs, l'expert se réjouit que la Belgique s'apprête à ratifier le Protocole facultatif se rapportant au Pacte et la Convention de l'Organisation internationale du travail sur le travail domestique. Il a rappelé qu'en dernière analyse, l'État central est responsable de l'application des dispositions du Pacte. La délégation a été priée de donner des détails sur la nouvelle loi contre le harcèlement sexuel au travail. M. Tirado Mejía a espéré que l'institution nationale de droits de l'homme sera en activité lors de l'examen du prochain rapport de la Belgique. Certaines recommandations précédentes du Comité n'ont pas été appliquées. Le rapport montre que des écarts salariaux entre les sexes persistent en Belgique. Des questions demeurent aussi quant à l'application du droit de grève. La violence domestique n'est pas érigée en infraction pénale, alors que le problème semble s'être aggravé. L'expert s'est aussi étonné que la pratique de la «gifle pédagogique» soit toujours tolérée en Belgique.
Une experte a voulu savoir si la Belgique avait atteint l'objectif de 0,7% du PIB consacré à l'aide publique pour le développement, et si le pays procédait à un contrôle de l'incidence de son aide sur le respect des droits de l'homme dans les pays bénéficiaires. Le Comité souhaite, d'autre part, que les autorités contrôlent les activités des entreprises belges à l'étranger, afin de s'assurer qu'elles sont conformes aux Principes de Maastricht relatifs aux obligations extraterritoriales des États dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels. Un autre expert a demandé des précisions sur les critères d'octroi de l'aide publique au développement belge.
Une experte a voulu savoir quelles mesures la Belgique prenait pour la désinstitutionalisation des personnes handicapées et leur pleine participation à toutes les démarches de la vie quotidienne.
S'agissant du droit au travail, des experts ont relevé que le système des «titres-services» contre le chômage profite presque exclusivement aux femmes, et que les étrangers extracommunautaires connaissent un taux de chômage très élevé. Le Comité regrette, de plus, que le rapport ne donne pas de statistiques cohérentes sur le taux de chômage des femmes et des personnes handicapées.
Un expert a demandé comment le «revenu mensuel minimum moyen garanti» était indexé au coût de la vie. Il a demandé des précisions sur la mention, au paragraphe 113 du rapport, du remplacement du système de modération salariale par un «régime de prudence». Un expert a voulu savoir comment la Belgique entend, vu le vieillissement de sa population, préserver son système de prise en charge sociale. Des questions ont aussi porté sur l'efficacité du plan fédéral contre la pauvreté auprès des catégories les plus vulnérables; sur les mesures prises pour résoudre les causes de la présence en Belgique de quelque 17 000 personnes sans abri; et sur l'ampleur du problème des enfants vivant dans la rue.
La délégation a été priée de dire si la Belgique était parvenue à réduire le nombre des victimes de la traite des êtres humains et quelles mesures d'assistance ont été prises en leur faveur, le cas échéant. Une autre question a porté sur la lutte contre la pornographie mettant en scène des enfants sur Internet. L'objectif «d'encourager les hommes à s'investir plus nettement dans la sphère privée» (paragraphe 201 du rapport) a-t-il été atteint, a demandé une experte.
Le rapporteur a demandé à la délégation de dire comment la Belgique concilie son soutien aux agrocarburants et son obligation de respecter le droit à l'alimentation dans les pays en voie de développement. Une autre experte s'est interrogée sur la manière dont le Belgique réagit à certaines violations des droits de l'homme importées, comme par exemple les mutilations génitales féminines. L'experte a regretté que la Belgique ne dispose pas de système global d'intégration des personnes handicapées à l'école et au travail, notamment. Un expert a voulu savoir quelles difficultés la Belgique doit relever pour donner effet à l'article 15 du Pacte, relatif à la vie culturelle.
Réponses de la délégation
Rattrapée par la crise, la Belgique n'est pas parvenue à consacrer 0,7% de son PIB à l'aide publique pour le développement. Le pays a atteint un taux de 0,53% en 2011 contre 0,3% en 2002, un niveau respectable par rapport à la moyenne de 0,35% parmi les membres du groupe pour le développement de l'Organisation pour la coopération et le développement économiques. Le Gouvernement n'a pas fixé d'échéance pour la réalisation de l'objectif. La loi sur la coopération vise à renforcer la capacité des pays en voie de développement partenaires, dans le respect des obligations internationales en matière de droits de l'homme. Le contenu de l'aide bilatérale belge est basé sur une négociation avec le pays récipiendaire: la Belgique ne décide pas unilatéralement où ira son aide. Le contrôle des projets est assuré, côté belge, par une institution paraétatique dotée d'une certaine autonomie. La coopération bilatérale concerne quinze partenaires, notamment, mais pas exclusivement, des pays d'Afrique centrale avec lesquels la Belgique entretient des relations de longue date. La coopération se justifie par son utilité et non par des critères politiques.
Répondant à des questions sur l'applicabilité du Pacte, la délégation a indiqué que les droits reconnus par le Pacte sont repris dans la législation interne. Le juge décide si la norme invoquée devant lui est suffisamment explicite. Le Pacte est relativement peu invoqué par les avocats à titre principal: les directives européennes, plus détaillées, sont plus volontiers citées par les avocats. La délégation a admis, avec un expert, que la ratification du Protocole facultatif rendra immédiatement opératoires toutes les dispositions du Pacte. La Belgique est engagée de longue date à créer une institution nationale de droits de l'homme. Le Gouvernement a décidé fin 2011 de créer un «organisme interfédéral des droits de l'homme». Un groupe de travail a été créé pour élaborer un projet associant toutes les autorités concernées. L'organisme reprendra certaines attributions d'institutions existantes. Un nouveau centre sera créé pour gérer les aspects liés à la traite des êtres humains. La structure politique de la Belgique complique la mise en place de l'institution, a constaté la délégation.
Le changement d'approche dans la protection des personnes handicapées en Belgique, sous l'influence notamment de la Charte sociale européenne, doit être intégré par toutes les autorités concernées, a admis la délégation. Cela concerne tout particulièrement l'intégration progressive de ces personnes dans le cours normal de l'existence. Le gouvernement flamand a lancé une politique favorisant l'autonomisation des personnes handicapées et leur accès aux services publics, notamment les logements sociaux. Le budget consacré à ces fins a été augmenté. Dans la communauté francophone, plus de 10 000 jeunes ou adultes sont accueillis par les structures publiques. Une réforme des modalités d'agrément des établissements d'accueil des personnes handicapées est en cours. Les femmes handicapées bénéficient de la protection de la loi contre la violence.
Plusieurs experts ayant observé que si la Belgique se dotait d'un cadre juridique global de lutte contre la discrimination, son action dans ce domaine serait plus efficace, la délégation a noté que les catégories de personnes concernées n'ont pas toutes les mêmes besoins. De plus, la structure fédérale du pays impose sa propre logique dont il n'est pas possible de faire abstraction. En l'état, a fait valoir la délégation, la loi interdit de très nombreuses formes de discrimination et impose aux autorités responsables de prendre des mesures efficaces contre la discrimination, comme il a été expliqué s'agissant des écarts salariaux entre les sexes. D'autres questions ayant porté sur les budgets, il a été confirmé que les autorités fédérales appliquent déjà les principes de la budgétisation tenant compte de la problématique hommes-femmes. La loi belge considère comme circonstance aggravante le fait de commettre un crime motivé par la haine.
S'agissant des questions liées à l'emploi, la délégation a précisé que «revenu mensuel minimum moyen garanti» est lié à l'inflation. Pour éviter un emballement du système au détriment de la compétitivité du pays, le panier de référence de l'indice est réévalué périodiquement. L'autre pilier de l'évolution des salaires est la définition, tous les deux ans, de nouveaux barèmes. Ce système, propre à la Belgique, consiste à demander un rapport aux partenaires sociaux sur l'évolution de la compétitivité du pays par rapport à ses voisins. Sur la base de ce rapport, les partenaires sociaux négocient un «accord interprofessionnel de référence» qui déterminera à son tous l'évolution maximale des salaires, secteur par secteur. Certains partenaires sociaux se sont plaints, à l'Organisation internationale du travail, de décisions unilatérales du Gouvernement en matière salariale après blocage des négociations. Ces deux mécanismes ont fait leurs preuves, a estimé la délégation.
Priée de donner une évaluation générale du problème de la discrimination envers les femmes enceintes au travail en Belgique, la délégation a indiqué que la loi accorde une protection explicite et assez large, dans un contexte où, cependant, l'employeur a le droit de procéder à des licenciements pour des raisons économiques. Les litiges portent sur cette appréciation. La délégation a précisé, en réponse à une autre question, que les «ateliers protégés» accueillent la majorité des personnes handicapées employées, où elles trouvent des structures très bien adaptées à leurs besoins. Il est certes exagéré de dire que les ateliers favorisent l'exploitation. Mais il est vrai que la tendance est actuellement à l'intégration des personnes handicapées dans la société au sens large.
Plusieurs questions ont porté sur les résultats de la stratégie nationale de bien-être au travail et sur son incidence sur les travailleurs étrangers. La délégation a précisé que les employeurs sont tenus d'assurer à tous les travailleurs la même qualité de travail. Les travailleurs en situation irrégulière, qui entretiennent une relation de travail normale avec un employeur de bonne foi ont, par principe, accès aux mêmes prestations.
La délégation a confirmé que la Belgique applique actuellement des mesures d'austérité. Mais la volonté politique est de ne pas nuire aux revenus les plus bas, qui ont d'ailleurs été revalorisés. La viabilité du système de sécurité sociale est assurée par un ensemble de mesures d'adaptation permanentes. L'âge de départ effectif à la retraite étant actuellement très bas, les réformes portent sur un relèvement progressif de la retraite anticipée. L'objectif est de convaincre les personnes de travailler plus longtemps, y compris dans la tranche d'âge 55-65 ans.
L'activation des prestations est liée à la participation du chômeur et à sa disponibilité effective aux exigences du marché de l'emploi. La réforme a consisté à augmenter la somme forfaitaire initiale versée à la personne sans emploi, suivie, à l'expiration de ce droit, du versement d'une allocation plus faible. Le système des «titres-services» est destiné à faciliter et surtout à régulariser l'embauche, par des particuliers, de personnel domestique. Les préjugés relatifs aux occupations des hommes et des femmes jouent à plein s'agissant des travaux domestiques, a admis la délégation, précisant que l'objectif premier du système est la régularisation des travailleurs.
La délégation a indiqué que certains facteurs sociaux et économiques expliquent en partie la structure du chômage en Belgique. C'est une des raisons pour lesquelles le chômage des jeunes et des migrants varie selon les régions et leurs circonstances particulières. Les raisons précises des écarts régionaux font actuellement l'objet de recherches universitaires. Les jeunes sont accompagnés dans leurs démarches de recherche d'emploi, avec un certain succès puisque le taux de chômage des moins de 25 ans a baissé. La formation professionnelle individuelle en entreprise est une autre mesure de soutien de l'insertion des jeunes. Les autorités régionales de Wallonie financent des formations dans le domaine de l'agriculture et ont créé des programmes de formation et d'insertion. Le gouvernement flamand met, pour sa part, l'accent sur l'activation des chômeurs âgés et instauré un mécanisme de formation-embauche à l'intention des jeunes. La Belgique est confrontée à une forte immigration économique, a indiqué la délégation, dont certains représentants sont dotés de qualifications insuffisantes, et dont les enfants souffrent du décrochage scolaire. Les réponses à ces problèmes d'insertion au marché du travail sont probablement à chercher dans l'expérience de pays voisins. La Belgique développe, quoi qu'il en soit, des politiques d'emploi coûteuses et de longue haleine.
La Convention relative aux droits des personnes handicapées impose à la Belgique d'établir des statistiques précises sur le chômage des personnes handicapées, une démarche qui est en cours, a indiqué la délégation. Il s'agit d'un exercice difficile, dont les résultats seront connus à partir de 2014.
Un expert ayant fait part de son sentiment que le droit de grève n'est que toléré en Belgique, faute notamment d'un critère objectif de représentativité des travailleurs, la délégation a assuré que la reconnaissance du droit de grève est pleinement garantie par la Charte sociale européenne, dont le pays est signataire. Les autorités s'en remettent essentiellement aux partenaires sociaux pour régler les conflits du travail. Les procédures de conciliation sont obligatoires. Un corps de médiateurs professionnels est mis à la disposition des entreprises confrontées à un risque de grève. Les piquets de grève sont légaux dans la mesure où ils respectent la loi, notamment s'agissant du droit au travail des employés non grévistes. Les tribunaux ont déjà ordonné des mesures d'interdiction de piquets de grève, des décisions qui ont suscité des plaintes de syndicats auprès de l'Organisation internationale du travail, a confirmé la délégation.
Un expert s'étant étonné de la baisse du nombre des dénonciations pour violences domestiques, la délégation a précisé que cette tendance doit être confirmée. De nombreuses plaintes sont classées sans suite pour des motifs d'opportunité (notamment le fait que la situation familiale est revenue à la normale) ou techniques (charges insuffisantes). La violence domestique n'est pas incriminée en tant que telle par la loi: en effet, elle se manifeste sous des formes très variées et plus ou moins graves, ce qui complique sa définition. Par contre, le fait qu'une violence est commise au sein du couple est considéré comme une circonstance aggravante par la loi. Les victimes de la violence domestique bénéficient de mesures de soutien, notamment l'attribution du domicile familial et l'éloignement du partenaire dangereux.
Les migrants en situation irrégulière ont droit aux soins médicaux d'urgence, lesquels couvrent en réalité une large gamme de prestations, comprenant aussi des interventions de nature préventive. Le caractère urgent des soins est déterminé par le corps médical et non par l'administration. L'État, soucieux de l'accessibilité des soins, octroie, par l'intermédiaire des services sociaux, des cartes médicales autorisant les migrants à s'adresser directement à l'hôpital. Ce système fonctionne depuis le mois d'octobre dernier.
La lutte contre la traite des êtres humains est régie par une nouvelle loi adoptée cette année. La loi élargit la définition de l'infraction et prévoit de nouvelles sanctions. Le plan d'action national en vigueur tire parti des enseignements tirés dans l'application du plan précédent. Il met l'accent sur une politique plus stricte de poursuite des responsables et sur la protection améliorée des victimes. Les statistiques semblent s'être stabilisées à un peu moins de 400 dénonciations par an, les condamnations effectives montant à 48 condamnations à des peines de prison en 2012. Au stade initial de la procédure, les autorités n'exigent pas des victimes potentielles qu'elles coopèrent aux enquêtes. La victime qui coopère bénéficie d'une protection des autorités. Cependant, de par les directives européennes, l'État n'a aucune obligation de délivrer un titre de séjour sans coopération du plaignant.
Le plan bisannuel de lutte contre la pauvreté poursuit deux objectifs: éviter la chute dans la pauvreté et aider les personnes concernées à sortir de cet état. Les autorités disposent de bases de données qui permettent d'automatiser l'octroi des prestations, comme par exemple l'exemption du paiement de certaines charges. L'État collabore avec les Centres publics d'action sociale pour aider les enfants pauvres à accéder aux services qui leur sont destinés (logopédie par exemple) et aux activités qui leur permettent de sortir de leur isolement. Un réseau de fonctionnaires de différents services est chargé d'évaluer l'efficacité de l'action fédérale dans ce domaine.
Le plan fédéral de lutte contre le «sans-abrisme» traite les facteurs multiples qui sont à l'origine de ce problème. Concrètement, les autorités ouvrent des logements d'urgence et réquisitionnent des bâtiments publics (anciennes casernes, par exemple). La notion de «personne sans abri» s'étend à toutes les personnes qui ne disposent pas d'un logement individuel. Les Centres publics d'action sociale sont habilités à avancer des cautions de loyer. La Région wallonne applique une politique d'offre de logements sociaux abordables et de qualité; des «contrôleurs du logement social» y surveillent l'évolution des loyers. Le gouvernement de la région de Bruxelles-capitale accorde des allocations au logement et au déménagement. Pour compenser la pénurie de logements sociaux publics, le gouvernement subventionne la mise à disposition de logements à bas prix par le secteur privé. Afin de combattre la surreprésentation de certaines catégories ethniques dans le logement social, l'État œuvre aussi à la création de zones de mixité sociale.
L'obligation scolaire s'applique également à tous les enfants en Belgique. Les enfants migrants isolés sont soumis à une tutelle juridique et administrative. En dernier recours, le Centre d'action sociale régional fait office de tuteur par défaut.
La Banque de développement de la Belgique s'est associée à un projet d'exploitation de biocarburants en Sierra Leone avec des partenaires européens. La Belgique, consciente des répercussions des biocarburants sur la survie des petits exploitants agricoles, est en train de réviser son plan d'action dans ce domaine, pour tenir compte du critère de responsabilité sociale des entreprises. L'enthousiasme pour cette énergie renouvelable est retombé dès que sont apparus ses effets néfastes en matière sociale et environnementale, a commenté M. Vandamme.
Pour ce qui concerne la lutte contre la pédopornographie sur Internet, le Code pénal réprime la possession et la diffusion de matériel de cette nature par tout moyen technologique. Le blocage des sites Internet incriminés est possible de par la loi: la décision est prise par un magistrat, en collaboration avec les services de police et les fournisseurs d'accès à Internet. Le Parlement examine en ce moment un projet de loi réprimant la prédation sexuelle sur Internet. Suite à des demandes de précision par le rapporteur du Comité, la délégation a indiqué que le Gouvernement a lancé des campagnes de sensibilisation au problème du tourisme sexuel, en coopération avec les gouvernements des pays les plus concernés. La pédophilie est réprimée depuis longtemps par le droit belge. La Belgique a ratifié en mars dernier la Convention du Conseil de l'Europe sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels (Convention de Lanzarote).
Les autorités belges, flamandes en particulier, ont à cœur de sensibiliser les nouveaux migrants au caractère illégal de certaines pratiques traditionnelles, comme les mutilations génitales féminines. Elles organisent des cours d'insertion civique et d'orientation sociale, pour assurer la prise de conscience des valeurs fondamentales que sont l'intégrité personnelle ou l'égalité entre les sexes, par exemple. Dans la communauté francophone, les autorités appliquent, depuis juillet dernier, un programme systématique d'insertion des primo-arrivants d'une durée de 60 heures. Elles organisent aussi des activités récréatives pédagogiques à l'intention des jeunes.
Un expert du Comité ayant demandé des éclaircissements sur le problème des expulsions forcées, la délégation a fait savoir que les autorités sont parfois amenées à imposer des rénovations d'appartements, en cas notamment de violation des normes de salubrité: dans ces cas, le relogement des locataires affectés est supervisé par les Centres d'action sociale. Le juge de paix est, par ailleurs, compétent pour ordonner les expulsions pour loyers impayés. Dans ce cas, le magistrat tient compte des facteurs sociaux et personnels relatifs aux familles concernées. Ces expulsions sont interdites pendant la trêve hivernale.
La Belgique considère, enfin, que toute personne a le droit de profiter de la vie culturelle et du progrès scientifique. L'article 15 du Pacte résume parfaitement l'esprit dans lequel les autorités abordent cette question, a affirmé la délégation.
Conclusions
Le Représentant permanent de la Belgique, M. de Crombrugghe, s'est félicité de l'intérêt porté par les membres du Comité au rapport de son pays et a assuré que la Belgique étudiera attentivement les recommandations du Comité, qu'elle juge particulièrement pertinentes. M. Vandamme a pour sa part assuré que la délégation belge avait pris bonne note des demandes des membres du Comité dans le domaine des statistiques, notamment, ainsi que de ses préoccupations de fond, qui se manifestent d'examen en examen. Il s'agit notamment de la visibilité du Pacte dans le pouvoir judiciaire et de l'effectivité des droits, indépendamment de la conjoncture.
Le rapporteur pour le rapport de la Belgique a jugé que le dialogue avec la délégation avait été riche, informatif et très positif à certains égards. M. Tirado Mejía s'est félicité de l'adoption imminente par la Belgique du Protocole facultatif se rapportant au Pacte. Il s'est dit enfin conscient du fait que les États n'ont pas toute latitude pour adopter les amendements législatifs souhaitables.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
ESC13/018F