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L'AIEA S'ADRESSE À LA CONFERENCE DU DÉSARMEMENT AU SUJET DE LA VÉRIFICATION D'UN TRAITÉ D'INTERDICTION DES MATIÈRES FISSILES

Compte rendu de séance
La Conférence poursuit en outre son débat thématique structuré sur la transparence dans le domaine des armements

La Conférence du désarmement a entendu, ce matin, une déclaration du Chef de la coordination des politiques de vérification et de sécurité à l'Agence internationale de l'énergie atomique, M. Tariq Rauf, portant sur un traité d'interdiction de la production de matières fissiles à des fins d'armement nucléaire et sur les capacités de l'AIEA dans ce domaine. La Conférence a ensuite poursuivi son débat thématique structuré sur la transparence dans le domaine des armements en entendant les déclarations de l'Australie et du Royaume-Uni qui ont tous deux abordé la question des systèmes portables de défense antiaérienne.

M. Rauf a rappelé qu'en 1993, l'Assemblée générale avait adopté une résolution demandant à l'AIEA d'apporter une assistance pour l'examen des arrangements de vérification en vue d'un traité non discriminatoire, multilatéral et internationalement et effectivement vérifiable interdisant la production de matières fissiles à des fins d'armements nucléaires ou d'autres engins nucléaires explosifs (TIPMF, ou FMCT selon le sigle anglais). Du point de vue du Secrétariat de l'AIEA, l'objectif technique de la vérification du respect d'un tel traité serait de fournir des garanties contre toute nouvelle production de matières fissiles utilisables à des fins d'armements et contre tout détournement de matières fissiles issue du cycle du combustible nucléaire civil à des fins d'armement nucléaire. Pour qu'un tel traité offre un niveau de garantie analogue à celui qu'offrent les accords de garanties de l'AIEA, il faut que le système de vérification s'applique à l'ensemble du cycle combustible déclaré des États parties et soit orienté vers la détection des installations de production non déclarées et des matières fissiles. Si le régime de vérification ne devait s'appliquer qu'au seul engagement de ne pas produire de matières fissiles à des fins interdites par le TIPMF, il ne garantirait pas que les stocks existants de matières fissiles susceptibles d'être utilisés à de telles fins ne seraient pas augmentés par des moyens autres que la production, a fait observer M. Rauf.

En conclusion, M. Rauf a souligné que, selon le Secrétariat de l'AIEA, la vérification d'un traité interdisant la production de matières fissiles serait possible par le biais d'un système de vérification assez similaire à celui qui est appliqué pour le système de garanties de l'AIEA.

L'intervention de M. Rauf a été suivie d'une séance plénière informelle au cours de laquelle les membres de la Conférence ont pu faire part de leurs commentaires, observations et questions au représentant de l'AIEA.

Reprenant ensuite ses travaux en séance plénière officielle, la Conférence a entendu l'Australie demander que soit distribué en tant que document officiel de la Conférence le résumé du séminaire récemment organisé par l'Australie sur les mesures visant à lutter contre la prolifération des systèmes portables de défense antiaérienne. L'Australie a indiqué qu'elle organiserait en novembre prochain, à New York, un autre séminaire sur ce même thème.

Le Royaume-Uni a pour sa part fait valoir les progrès que la communauté internationale a commencé à faire vers un contrôle plus efficace des systèmes portables de défense antiaérienne et dont témoigne en particulier l'Arrangement de Wassenaar sur le contrôle des exportations de ces systèmes et qui insiste notamment sur la nécessité urgente d'assurer leur stockage adéquat.


La Conférence poursuivra cet après-midi, à 15 heures, son débat thématique structuré sur la transparence dans le domaine des armements.


Déclaration du Chef de la coordination des politiques de vérification et de sécurité à l'Agence internationale de l'énergie atomique

M. TARIQ RAUF, Chef de la coordination des politiques de vérification et de sécurité à l'Agence internationale de l'énergie atomique, a rappelé qu'en 1993, l'Assemblée générale a adopté la résolution 48/75/L demandant notamment à l'AIEA d'apporter une assistance pour l'examen des arrangements de vérification en vue d'un traité non discriminatoire, multilatéral et internationalement et effectivement vérifiable interdisant la production de matières fissiles à des fins d'armements nucléaires ou d'autres engins nucléaires explosifs (TIPMF). Du point de vue du Secrétariat de l'AIEA, l'objectif technique de la vérification du respect d'un tel traité serait de fournir des garanties contre toute nouvelle production de matières fissiles utilisable à des fins d'armements et contre tout détournement de matière fissile issue du cycle du combustible nucléaire civil à des fins d'armement nucléaire. Il serait donc nécessaire d'assurer que les stocks de plutonium et d'uranium hautement enrichi devant être utilisés à des fins d'armement nucléaire et qui existent au moment de l'entrée en vigueur d'un tel traité, ne seront pas augmentés par la suite. Une autre question connexe consisterait à voir comment traiter des stocks existants de matière utilisable à des fins d'armement.

S'agissant de la question de la définition, M. Rauf a rappelé que la notion de «matières fissiles» n'est pas utilisée dans le cadre de la mise en œuvre des accords de garanties de l'AIEA, lesquels s'appliquent plutôt aux «matières nucléaires», divisées en matières nucléaires à usage direct (plutonium contenant moins de 80% d'isotope de plutonium 238; uranium contenant plus de 20% d'isotope d'uranium 235; uranium 233) et matières nucléaires à usage indirect (ce sont les matières nucléaires à usage direct qui ont été séparées des produits de la fission et dont le processus nécessaire pour leur utilisation à des fins d'armements nucléaires est beaucoup plus court et requiert beaucoup moins de temps que si elles étaient combinées à des produits fissiles hautement radioactifs). La définition de la notion de matières fissiles devant être incluse dans un TIPMF pourrait se rapprocher de cette définition, a souligné M. Rauf. Toute différence dans ces définitions de base pourrait compliquer les obligations et les actions requises des États ainsi que la mise en œuvre des garanties de l'AIEA et de la vérification associée à un TIPMF.

M. Rauf a ensuite présenté les différents types d'accords de garanties de l'AIEA, en précisant que pour le plutonium et l'uranium 233, une quantité de 8kg est considérée comme nécessaire pour qu'un État produise sa première arme nucléaire. Pour l'uranium fortement enrichi, une quantité de 25kg de l'isotope d'uranium 235 est considérée nécessaire.

La découverte, il y a plusieurs années, d'un important programme clandestin d'armement nucléaire en Iraq a montré qu'un système de garanties qui se concentrait sur la vérification des activités déclarées s'avérait inadéquat, a poursuivi M. Rauf. Le Conseil des gouverneurs de l'AIEA a donc reconnu que pour faire face à de potentielles opérations clandestines, il fallait des dispositions permettant d'accéder à tout lieu du territoire d'un État soumis aux accords de garanties. Ainsi, les protocoles additionnels aux accords de garanties ont été adoptés pour étendre l'autorité de l'AIEA, a indiqué M. Rauf. À ce jour, des protocoles additionnels ont été signés par 109 États et sont en vigueur dans 77 États, a-t-il précisé. Pour ce qui est des cinq États dotés de l'arme nucléaire qui sont parties au Traité de non-prolifération nucléaire (TNP), M. Rauf a souligné qu'ils avaient conclu des accords de garanties volontaires modelés sur les accords de garanties de l'AIEA mais qui ne placent sur ces États aucune obligation quant aux matières nucléaires devant être soumises aux garanties. Ces cinq États ont en outre signé des protocoles additionnels.

M. Rauf a par ailleurs rappelé que l'AIEA a entrepris des mesures de vérification élargies en Iraq, conformément aux dispositions de la résolution 687 du Conseil de sécurité. L'AIEA a par ailleurs contrôlé le gel des opérations des installations nucléaires de la République populaire démocratique de Corée, en relation avec le cadre concerté conclu entre ce pays et les États-Unis. M. Rauf a ensuite fait part de l'Initiative trilatérale lancée en septembre 1996 par la Fédération de Russie, l'AIEA et les États-Unis.

Respecter les exigences de vérification associées aux garanties est plus difficile dans les grandes installations en fonctionnement du fait que les objectifs de garanties de l'AIEA sont énoncés en termes de quantités nécessaires pour la fabrication d'une arme nucléaire et que, dans de telles installations, ces quantités deviennent faibles au regard des quantités totales de matières nucléaires qui sont traitées, a fait observer M. Rauf.

Dans un État soumis aux garanties de l'AIEA, tout retraitement non déclaré constituerait une violation claire des dispositions de l'Accord et du Protocole additionnel, a-t-il poursuivi. Généralement, les opérations de retraitement entraînent la libération dans l'atmosphère de produits gazeux issus de la fission ainsi que la libération de particules dont certaines se déposent à des distances conséquentes. M. Rauf a indiqué qu'au nombre des mesures permettant de détecter des installations clandestines, figurent l'analyse des informations fournies; l'accès complémentaire, afin de compléter ces informations; et le prélèvement d'échantillons dans l'environnement à des fins d'analyse. Les méthodes utilisées pour détecter des installations d'enrichissement non déclarées sont sensiblement les mêmes que celles utilisées pour détecter le retraitement non déclaré. Les opérations d'enrichissement se traduisent normalement par la libération d'aérosols dans l'atmosphère - mais généralement à peu de distance de l'installation d'enrichissement, a-t-il précisé.

M. Rauf a indiqué que l'AIEA a étudié les différents scénarios possibles, leurs coûts relatifs et le niveau de garanties qu'ils offrent s'agissant des alternatives pour un TIPMF. Pour qu'un tel traité offre un niveau de garantie analogue à celui qu'offrent les accords de garanties de l'AIEA, il faut que le système de vérification y afférent s'applique à l'ensemble du cycle combustible déclaré des États parties et soit orienté vers la détection des installations de production non déclarées et des matières fissiles. Reste aux États à discuter dans quelle mesure ils seraient autorisés à exempter de vérification des matières fissiles existantes dans leurs stocks au moment de l'entrée en vigueur d'un tel traité. Si le régime de vérification ne devait s'appliquer qu'au seul engagement de ne pas produire de matières fissiles à des fins interdites par le TIPMF, il ne garantirait pas que les stocks existants de matières fissiles susceptibles d'être utilisés à de telles fins ne seraient pas augmentés par des moyens autres que la production.

En conclusion, M. Rauf a souligné que, selon le Secrétariat de l'AIEA, la vérification d'un traité interdisant la production de matières fissiles serait possible par le biais d'un système de vérification assez similaire à celui qui est appliqué pour le système de garanties de l'AIEA. Le choix du système à mettre en place pour vérifier le respect d'un tel traité incombe aux États, qui auront à cet égard à se pencher sur les questions relatives aux différents niveaux de garanties et aux coûts associés. L'AIEA, pour sa part, est disposée à contribuer au processus de discussion et de négociation sous toute forme que les États pourraient juger appropriée, a conclu M. Rauf.

L'intervention de M. Rauf a été suivie d'une séance plénière informelle au cours de laquelle les membres de la Conférence ont pu faire part de leurs commentaires, observations et questions au représentant de l'AIEA.



Aperçu des déclarations sur la transparence dans le domaine des armements

MME CAROLINE MILLAR (Australie) a déclaré que les systèmes portables de défense antiaérienne sont des armes défensives légitimes lorsqu'elles sont développées, produites et utilisées par des États. Or, leur prolifération illicite entre les mains de terroristes et d'acteurs non étatiques constitue une menace significative pour l'aviation civile mondiale et pour les efforts internationaux de maintien de la paix. Mme Millar a fait part de l'organisation récente, par la Mission permanente de l'Australie, d'un séminaire qui attiré l'attention sur toute une série de mesures nationales, bilatérales et internationales visant à lutter contre la prolifération des systèmes portables de défense antiaérienne. Elle a souhaité que le résumé de ce séminaire préparé par la délégation australienne soit distribué en tant que document officiel de la Conférence. L'un des messages clefs de ce séminaire a été de mettre l'accent sur la nécessité de contrôles nationaux effectifs quant à la production, au stockage et au transfert de tels systèmes portables, a précisé Mme Millar. Elle a rappelé que l'Australie avait lancé une initiative diplomatique majeure en décembre dernier afin de promouvoir l'application effective de tels contrôles. L'Australie organisera en novembre prochain, à New York, un autre séminaire sur ce même thème, a indiqué Mme Millar.

MME FIONA PATERSON (Royaume-Uni) a attiré l'attention sur l'importance du contrôle effectif sur la disponibilité des systèmes portables de défense antiaérienne. Ces systèmes constituent une menace si on les laisse tomber entre les mains de personnes cherchant à les utiliser à des fins non désirables, a-t-elle souligné. Des groupes terroristes possèdent déjà de tels systèmes et les ont utilisés contre des cibles tant civiles que militaires, a-t-elle rappelé. Elle a fait valoir les progrès que la communauté internationale a commencé à faire vers un contrôle plus efficace des systèmes portables de défense antiaérienne et dont témoigne en particulier l'Arrangement de Wassenaar sur le contrôle des exportations de ces systèmes, qui aborde des questions essentielles comme la nécessité de ne permettre le transfert de systèmes portables de défense antiaérienne qu'à destination de gouvernements étrangers ou d'agents spécifiquement autorisés à agir au nom d'un gouvernement. L'Arrangement de Wassenaar insiste en outre sur la nécessité urgente d'assurer un stockage adéquat des systèmes portables de défense antiaérienne. Désireux de soutenir de manière concrète les éléments de cet arrangement, le Royaume-Uni a œuvré cette année au développement de meilleures pratiques en matière de stockage. Suite à ce travail, l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe a décidé, au mois de mars dernier, de publier (en tant qu'annexe au Manuel de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe sur les meilleures pratiques en matière d'armes légères et de petit calibre) un guide détaillé sur les procédures nationales concernant la gestion des stocks et la sécurité appliquées aux systèmes portables de défense antiaérienne.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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