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LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT TIENT UN DÉBAT SUR UN PROGRAMME GLOBAL DE DÉSARMEMENT

Compte rendu de séance

La Conférence du désarmement a entendu, ce matin, des interventions dans le cadre d'un débat thématique structuré consacré à la question d'un programme global de désarmement, après avoir conclu son débat consacré à la question des arrangements internationaux efficaces pour garantir les États non dotés d'armes nucléaires contre l'emploi ou la menace de ces armes.

Concluant ce débat, l'Argentine et le Venezuela se sont prononcés en faveur de l'élaboration, au sein de la Conférence, d'un instrument international juridiquement contraignant sur les garanties négatives de sécurité.

Diverses questions ont été abordées dans le cadre du débat relatif à un programme global de désarmement, le Sénégal évoquant notamment la complexité de la problématique dans un monde où la sécurité réside moins dans la capacité de protection ou de dissuasion d'un État que dans la capacité collective à prévenir et à maîtriser les menaces de toute nature. La sécurité qui est recherchée à travers un programme global, a-t-il dit, doit être une sécurité collective qui ne saurait être circonscrite à un État ou une région.

La Chine s'est dite disposée à tenir des discussions constructives sur cette question, soulignant qu'elles doivent porter sur l'adoption de principes justes et équitables et des mesures efficaces de désarmement pour renforcer le processus de désarmement multilatéral, préserver la paix et la sécurité internationales et promouvoir le développement de tous et la prospérité.

La Fédération de Russie, après avoir de nouveau insisté pour que la Conférence entame sans tarder un débat sur le positionnement d'armes dans l'espace et l'utilisation ou la menace d'utilisation de la force contre ces armes, a estimé que la question d'un programme complet de désarmement mérite qu'un coordonnateur spécial soit chargé d'explorer les vues des membres de la Conférence. Pour sa part, la Russie est notamment disposée à échanger des vues autour de l'élimination progressive des mines antipersonnel et la question de l'exploitation, par des acteurs étatiques ou non étatiques, des technologies de l'information à des fins incompatibles avec la sécurité internationale.

Le Royaume-Uni et le Canada ont abordé la question d'un nouveau traité sur le commerce des armes, qui est examiné dans le cadre des travaux de l'Assemblée générale, mais auquel pourrait contribuer également la Conférence du désarmement.


La prochaine séance plénière de la Conférence du désarmement, qui sera consacrée à un débat général, se tiendra le mardi 15 août à 10 heures dans la Salle du Conseil.


Déclarations

Garanties négatives de sécurité

M. ALBERTO DUMONT (Argentine) a attiré l'attention de la Conférence du désarmement sur la déclaration commune des États Parties au Traité de Tlatelolco établissant une zone exempte d'armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes. Il a relevé que le principal objectif du Traité avait été atteint sur le continent puisque aucun pays d'Amérique latine ou des Caraïbes ne détenait, ni n'aspirait à détenir d'armes nucléaires. Il a exprimé la volonté des pays d'Amérique latine de voir les principales puissances détentrices de l'arme nucléaire se conformer au protocole additionnel II du Traité de Tlatelolco en s'engageant à ne pas utiliser l'arme nucléaire contre les pays de la zone exempte d'armes nucléaires. Évoquant l'évolution du droit international, il a estimé qu'à l'aube du XXIe siècle, ce principe pourrait être compromis par le recours à la légitime défense telle qu'elle est garantie par l'article 51 de la Charte des Nations Unies, ceci bien qu'une telle réplique contre des pays non détenteurs constituerait une réponse disproportionnée, en violation avec le même article de la Charte.

Le Traité de Tlatelolco, a poursuivi M. Dumont, constitue un exemple à suivre pour permettre à d'autres régions d'avancer vers un monde sans armes nucléaires. Il a conclu en exprimant la conviction des pays signataires du Traité de la nécessité de parvenir à un instrument international garantissant la sécurité aux pays non-détenteurs de l'arme nucléaire.

M. DIEGO IBAZZAZ MARTÍNEZ (Venezuela) a affirmé sa conviction que la seule garantie contre la prolifération de l'arme nucléaire et la menace qu'elle représente, notamment à l'égard des États non dotés de l'arme nucléaire, était l'interdiction totale de ces armes, comme ce fut le cas pour les armes chimiques et les armes biologiques. Le Venezuela considère que les États qui ont renoncé à l'option de posséder l'arme nucléaire ont le droit d'exiger que soit interdit l'emploi la menace de recourir aux armes nucléaires contre eux. Le Venezuela, tout en se félicitant des accords bilatéraux ou autres existants en matière de garanties négatives de sécurité, estime qu'il faut disposer d'un instrument international juridiquement contraignant dans ce domaine. Il a par ailleurs affirmé sa conviction que la Conférence du désarmement était l'institution adéquate pour créer un comité spécial chargé de l'élaboration d'un instrument international sur les garanties négatives de sécurité.

Débat général

MME MARY WHELAN (Irlande), dans une déclaration d'adieux à la Conférence, a relevé l'incapacité de la Conférence du désarmement à atteindre des résultats concrets, alors que la situation mondiale était caractérisée par l'insécurité et la prolifération des conflits. Le multilatéralisme, a-t-elle dit, n'est pas une fin en soi; il devrait être l'expression d'une approche consensuelle des problèmes et ne fonctionne que dans le cadre de processus de négociation transparent, impliquant tous les intéressés et où chacun prend ses responsabilités par rapport à la mise en œuvre des décisions. Tout en exprimant son espoir que l'année 2006 apporterait des changements et permettrait à la Conférence de rompre avec son fonctionnement passé, elle a invité la Conférence a réfléchir à ses échecs et à envisager la possibilité d'une organisation réformée ou d'un type différend qui saurait être plus efficace.

Examen de la question d'un programme global de désarmement

M. LI YANG (Chine) a déclaré que la question d'un programme global de désarmement concerne les principes, les objectifs et orientations des efforts internationaux pour le contrôle du désarmement. La Conférence du désarmement a déjà nommé plusieurs coordonnateurs spéciaux chargés de synthétiser les vues des États concernant cette question. À la lumière de l'évolution de la réflexion et de la situation dans le monde, la question de savoir s'il convient de maintenir ce point à l'ordre du jour est très controversée. La Chine estime que malgré les changements importants intervenus sur la scène internationale, les objectifs et principes définis en 1978, lors de la première session extraordinaire consacrée aux questions de désarmement, restent importants pour guider les travaux sur les questions de sécurité et de désarmement.

La délégation chinoise est donc disposée à tenir des discussions constructives sur ce point de l'ordre du jour, a indiqué M. Li. Il a estimé que le point de départ de la discussion sur un programme global de désarmement devrait être l'adoption de principes justes et équitables et des mesures efficaces de désarmement pour parvenir à l'objectif de renforcer le processus de désarmement multilatéral, de préserver la paix et la sécurité internationales et de promouvoir le développement de tous et la prospérité. Il a précisé que l'élaboration d'un programme global de désarmement doit reposer sur une série de principes-clés. Tout d'abord, les buts et principes de la Charte des Nations Unies et d'autres normes reconnues régissant les relations internationales doivent être respectés; un nouveau concept de sécurité reposant sur la confiance et les avantages mutuels, l'équité et la coordination doit être mis sur pied; les droits des États de participer aux discussions internationales sur le désarmement et le contrôle des armements doivent être garantis; les questions de prolifération doivent être traitées par voie politique et diplomatique, conformément au droit international; le droit légitime de chaque État d'utiliser les technologies à des fins pacifiques doit être préservé; enfin, le rôle des Nations Unies et des autres organes multilatéraux doit être utilisé au mieux. Dans un contexte de mondialisation, aucun État ne peut, seul, résoudre les problèmes de sécurité, a rappelé M. Li.

À l'heure actuelle, il est d'une importance capitale d'accorder la priorité au désarmement nucléaire, à la prévention de la militarisation de l'espace et d'une course aux armements dans l'espace. En matière de désarmement nucléaire, le représentant de la Chine a fait valoir que son pays estime notamment qu'il convient de signer au plus tôt un traité international imposant l'interdiction et la destruction totales des armes nucléaires. De même, chaque pays devait respecter scrupuleusement ses obligations en matière de non-prolifération, dont le régime doit être consolidé. Le désarmement nucléaire doit être un processus juste et raisonnable de réduction graduelle vers un équilibre tendant vers une limite inférieure. Les pays détenteurs d'arsenaux importants portent la principale responsabilité du désarmement nucléaire et devraient strictement respecter les obligations qu'ils ont contractées aux termes des traités, a estimé M. Li. Enfin, a-t-il ajouté, la Chine estime que la militarisation de l'espace peut être empêchée par l'adoption par la communauté internationale de mesures préventives efficaces et par la négociation d'un traité international garantissant que l'espace ne sera utilisé qu'à des fins pacifiques.

MME FIONA PATERSON (Royaume Uni, au nom des sept co-auteurs du projet de résolution de l'Assemblée générale sur un traité sur le commerce des armes - Argentine, Australie, Costa Rica, Finlande, Japon, Kenya et Royaume-Uni) a rappelé que, depuis quelques années, de nombreux hommes politiques et leaders spirituels souhaitent la création d'un nouveau traité visant à mieux réguler le commerce des armes. Elle a fait observer que la communauté internationale a déjà pris diverses mesures touchant certains aspects du commerce et de l'utilisation d'armes conventionnelles, soulignant cependant qu'il n'existe à ce jour aucun instrument international juridiquement contraignant qui puisse fournir un cadre et réguler le commerce des armes. Le traité sur le commerce des armes ne vise pas à abolir le commerce d'armes, mais à veiller à ce qu'elle se fasse de manière responsable, a précisé la représentante. Les co-auteurs de ce projet considèrent que le moment est venu pour un tel traité, a-t-elle poursuivi. Elle a ajouté qu'il s'agissait d'une question sensible et complexe, soulignant l'importance de trouver un équilibre approprié entre les droits et les obligations des États. Enfin, elle a proposé que les Nations Unies entament le plus vite possible un travail sur ce thème, notamment en établissant un groupe d'experts gouvernementaux. Elle a cependant reconnu qu'il serait bénéfique, une fois la résolution adoptée, d'allouer un certain temps à des consultations élargies et ce, afin d'enrichir la discussion que mèneront les experts.

M. PAUL MEYER (Canada) a souligné la nécessité d'un traité sur le commerce des armes conventionnelles ayant force de loi. Il a relevé que si certaines mesures régionales ont été élaborées, un système universel fait encore défaut. Il s'est référé à la pratique en vigueur au Canada, où des restrictions sont imposées à l'exportation de matériel militaire. Dans le cadre d'un traité international régissant le commerce d'armes, il faudrait évidemment s'entendre sur les critères limitant le transfert d'armes, a-t-il relevé. Un tel traité devrait couvrir une large gamme d'armements avec un seul instrument. Des normes communes dans le commerce de différentes sortes d'armes conventionnelles pourraient être imposées pour simplifier le cadre juridique international et éliminer le besoin de définir un instrument distinct pour chaque catégorie, a-t-il suggéré. Les discussion sur un traité sur le commerce des armes pourraient conduire à un traité multilatéral sur le contrôle des armes, a-t-il encore indiqué. Il a conclu en disant que pour le Canada la question n'était pas de savoir si un tel instrument était nécessaire, mais comment il convenait de le faire progresser.

M. OUSMANE CAMARA (Sénégal) a rappelé que l'appel en faveur d'un programme global de désarmement lancé en 1980 à l'occasion de la sixième session spéciale de l'Assemblée générale des Nations Unies garde son intérêt et sa pertinence. Il a souligné que la question de la négociation d'un programme global de désarmement à la Conférence de désarmement continue de revêtir une importance cruciale aux yeux de la délégation sénégalaise. Il a à ce titre précisé que sa délégation considère que le désarmement est un tout et qu'il conviendrait de l'appréhender de manière globale en vue de prendre en compte l'ensemble des besoins sécuritaires. La sécurité qui est recherchée à travers un programme global de désarmement doit être une sécurité collective qui ne saurait être circonscrite à un État ou une région, a souligné le représentant. Dans le monde actuel, la sécurité réside moins dans la capacité de protection et de dissuasion d'un État que dans notre capacité collective à prévenir et maîtriser les menaces de toute nature, a-t-il poursuivi. S'agissant du désarmement nucléaire, il a insisté sur l'importance de fournir de nouveaux efforts pour remettre sur les rails le processus de désarmement nucléaire et de non-prolifération. S'agissant des armes conventionnelles, il a salué les progrès notables qui ont été réalisés. Il importe cependant de prendre des mesures supplémentaires en vue d'arriver à une diminution progressive et un contrôle plus rigoureux de ces armes qui sont utilisées dans la plupart des conflits actuels, a souligné M. Camara. À cet égard, il a souhaité qu'une attention plus soutenue soit accordée à la question des armes légères et de petit calibre dans les débats de la Conférence, soulignant que ces armes constituent les premières armes de destruction massive du fait des multiples ravages qu'elles causent dans plusieurs régions du monde et du sentiment d'insécurité qu'elles y font régner.

M. VALERY LOSHCHININ (Fédération de Russie) a déclaré qu'il faut bien admettre que l'objectif des efforts multilatéraux en vue d'un désarmement complet et vérifiable est loin d'être atteint. Il a évoqué la spirale dans laquelle la course aux armements se trouvait lancée, compte tenu des niveaux techniques atteints actuellement qui laissent planer le risque de l'émergence de tout un arsenal d'armes nouvelles aux effets déstabilisants. Le représentant russe a déclaré que la Russie souhaitait par conséquent que la Conférence sur le désarmement entame sans tarder un débat concernant le positionnement d'armes dans l'espace et l'utilisation ou la menace d'utilisation de la force contre ces armes. C'est ce que la Conférence se doit de faire pour combattre ces tendances inquiétantes. Un traité dans ce domaine pourrait devenir une nouvelle activité de fond de la Conférence, a estimé M. Loshchinin.

S'agissant de la question d'un programme complet de désarmement, le représentant de la Fédération de Russie a estimé qu'il devrait être clarifié dans le cadre d'une approche réaliste et pragmatique. À ce stade, la Russie estime que la désignation d'un coordonnateur spécial chargé d'explorer les vues des membres de la Conférence serait la bonne manière de procéder. Pour sa part, la Russie est prête à échanger des vues autour de l'élimination progressive des mines antipersonnel. Ce problème peut, et doit, être résolu d'une manière globale en prenant en compte les capacités défensives et économiques réelles des États, a dit le représentant russe. Il a également mis en relief une nouvelle menace particulièrement dangereuse, celle posée par l'exploitation, par des acteurs étatiques ou non étatiques, des technologies de l'information à des fins incompatibles avec la sécurité internationale. M. Loshchinin a relevé à cet égard les travaux, en 2004-2005, du Groupe d'experts gouvernementaux des Nations Unies, ainsi que la déclaration publiée en juin dernier par les chefs d'États membres de l'Organisation de coopération de Shanghai, qui insistent tous les deux sur l'importance de la question de la «sécurité informationnelle» au plan international, question à laquelle il est indéniable que la Conférence sur le désarmement peut contribuer.

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