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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME ENTAME SON DÉBAT GÉNÉRAL

Compte rendu de séance

Le Conseil des droits de l'homme a ouvert cet après-midi son débat général. Il a entendu dans ce cadre trente-deux déclarations par des représentants d'États, d'organisations internationales et institutions des Nations Unies. Les interventions ont porté avant tout sur des questions liées à l'organisation des travaux et aux dispositions que devra prendre le Conseil pour s'acquitter de son mandat, mais aussi sur certaines questions d'actualité.

Certaines délégations ont estimé que le Conseil, pour améliorer la situation des droits de l'homme, devra adopter des procédures plus ciblées, obtenir davantage d'information sur les dossiers étudiés. La mise en œuvre du mécanisme d'examen périodique universel et le réexamen des mandats spéciaux, qui devrait aboutir à un renforcement des meilleurs dispositifs hérités de la Commission, sont autant de mécanismes à même de renforcer l'action du Conseil, a-t-il été suggéré. Il a été proposé à cet égard que le Conseil invite les Rapporteurs spéciaux et les organisations non gouvernementales à participer à des débats thématiques destinés à éclairer son action. D'une manière générale, le Conseil devrait favoriser la coopération internationale et interrégionale. La crédibilité du Conseil sera en tout état de cause jugée à l'aune de ses actes, ont dit plusieurs intervenants.

Le représentant des États-Unis, précisant que son pays était fermement décidé à contribuer à la mission historique du Conseil, a aussi estimé que le Conseil devra parler au nom des personnes condamnées au silence. Plusieurs pays ont évoqué la situation dans les territoires arabes occupés, estimant que le Conseil devra œuvrer sans tarder au rétablissement des droits du peuple palestinien.

Des représentants d'institutions des Nations Unies ont insisté sur l'occasion qui s'offre à eux de relancer et de renforcer leur coopération avec le Conseil et le Haut Commissariat des droits de l'homme.

Les représentants des États suivants se sont exprimés: Mali, Jordanie, Pérou, Nouvelle-Zélande, Suède, Thaïlande, Liban, États-Unis, Australie, Singapour, Iraq, Bhoutan, Slovaquie, Pakistan (au nom de l'Organisation de la Conférence islamique ), Égypte, Costa Rica, République populaire démocratique de Corée, Syrie et Libye.

La Conseillère spéciale du Secrétaire général pour la parité entre les sexes et la promotion de la femme, l'Expert indépendant chargé de l'étude sur la violence à l'encontre des enfants et la Présidente de l'Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones se sont aussi exprimés, ainsi que les représentants des organisations suivantes: Ordre souverain militaire de Malte, Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), Ligue des États arabes, Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, Banque mondiale, Organisation internationale de la francophonie, Organisation internationale du travail, Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO), Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et l’Union africaine.

Les délégations de l'Inde et du Pakistan ont exercé le droit réponse.

Le Conseil des droits de l'homme reprendra ses travaux demain matin dès 10 heures afin de reprendre son débat de haut niveau et adoption l'ordre du jour et le programme de travail de cette première session.

Débat général

MME FATOUMATA DIALL (Mali) a réitéré l'engagement de son pays en faveur du Conseil des droits de l'homme et assuré qu'il œuvrera pleinement pour accroître son efficacité dans la promotion et la protection des droits de l'homme et cela en étroite collaboration avec les organisations non gouvernementales. Le Mali souhaiterait qu'un accent particulier soit mis sur l'éducation aux droits humains pour un encrage irréversible de la culture de la paix et le respect de la personne humaine. Et pour ce faire, il faut assurer une assistance technique aux États qui en expriment le besoin afin de renforcer leur capacité dans tous les domaines des droits de l'homme.
M. MUSA BURAYZAT (Jordanie) a déclaré que la Communauté internationale ne peut que se montrer satisfaite de l'expérience acquise par l'ancienne Commission des droits de l'homme, qui a permis l'affirmation de nombreux droits humains. Il importe désormais que le nouveau Conseil parvienne à préserver le délicat équilibre entre les exigences parfois contradictoires de la paix, de la sécurité et du droit au développement, afin d'éviter de nouvelles violations, de protéger la dignité humaine et de mettre fin à la pratique de la torture. Le représentant jordanien a par ailleurs fait valoir que les gains de territoires illégitimes et les occupations étrangères sont propices aux violations de la paix et de la sécurité des peuples, le chômage et la pauvreté entraînant de leur côté des conflits qui empêchent aussi la réalisation des droits de l'homme, comme en témoigne la situation dans les territoires arabes occupés. Les efforts du Conseil devront être centrés sur cette région, source de vives tensions et d'extrémisme. Le représentant a rappelé dans ce contexte la légitimité de la résistance du peuple palestinien à l'occupation et a mis en avant les efforts diplomatiques consentis par son pays pour régler cette situation, sur la base du dialogue interculturel, qui ont abouti à la déclaration d'Amman, qui met en avant le principe de l'Islam comme religion de tolérance.

M. CARLOS CHOCANO BURGA (Pérou) a estimé que le Conseil permettra de renforcer le système de protection des droits de l'homme de Nations Unies et qu'il répondra davantage aux besoins des citoyens. Le Pérou souligne que cette nouvelle instance devra à la fois innover et s'appuyer sur les acquis de l'ancienne Commission, à savoir les procédures spéciales. Le Conseil devrait également pouvoir s'appuyer sur les orientations d'experts indépendants. Le Pérou espère que la Déclaration sur les droits des peuples autochtones pourra être adoptée lors de la présente session et espère également qu'il en ira de même du texte de la convention pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Les périodes de réforme comme celles que nous traversons aujourd'hui sont rares et il convient d'en tirer pleinement parti. Dans les circonstances actuelles, tout ce qui ne serait pas une avancée serait aussitôt considéré comme étant un recul, or aucun recul n'est tolérable lorsqu'il s'agit de la protection des droits de l'homme.

M. DON MACKAY (Nouvelle-Zélande) a rappelé que la communauté internationale a placé beaucoup d'espoir dans ce Conseil. «Nous ne pouvons pas nous permettre d'échouer», a déclaré le représentant. Il faut donc instaurer un organe robuste et efficace. Des décisions concrètes doivent être prises et le Conseil doit agir avec efficacité et rapidité, a ajouté M. Mackay. Pour cela, il faut une nouvelle vision et ne pas répéter les erreurs du passé, c'est-à-dire des débats stériles et répétitifs. Le Conseil doit agir différemment. Il faut insister sur un dialogue réel et créer une culture nouvelle, a souligné le représentant. Des nouvelles façons de pensées appellent des outils nouveaux et notamment des processus plus sophistiqués sont nécessaires sur des questions ciblées. La Nouvelle-Zélande s'est engagée à faire avancer différentes questions dans le cadre des travaux du Conseil. Au sujet du projet de déclaration sur les peuples autochtones, le représentant de la Nouvelle-Zélande a annoncé que son pays, qui veut une décision de consensus sur le sujet, ne peut pas s'associer à l'actuel texte du projet de déclaration.

MME ELISABET BORSIIN BONNIER (Suède) a déclaré que la création du Conseil était cruciale pour la protection des droits de l'homme. Les enjeux clés concernent d'abord la mise en œuvre de ces droits. Le Conseil doit à cet égard adopter des positions novatrices et susciter des ouvertures nouvelles, grâce notamment à la coopération technique avec les États membres et à la nouvelle procédure d'examen. De manière plus spécifique, le Conseil doit œuvrer de manière décisive pour l'interdiction effective de la torture, sur la base de normes applicables absolument. Tout échec dans la lutte contre ce fléau aura des résultats dramatiques pour la démocratie et la primauté du droit. Dans le même esprit, il importe de ne ménager aucun effort dans la lutte contre le terrorisme tout en respectant strictement les principes du droit international. Le Conseil devra aussi contribuer à mettre un terme aux violences contre les femmes, la responsabilité des États consistant à réagir contre ces violations et à les prévenir. Enfin, le Conseil devra être plus fort, plus efficace et plus créatif, de manière à avoir un impact maximal. Il pourra inviter les Représentant spéciaux et les organisations non gouvernementales à participer à des débats thématiques destinés à éclairer son action et, d'une manière générale, favoriser la coopération internationale et interrégionale, comme cela s'est fait dans la lutte contre les mines terrestres.

M. CHAIYONG SATJIPANON (Thaïlande) a déclaré qu'il ne fallait pas oublier, alors que le Conseil ouvrait les travaux de sa première session, que son action doit être guidée par les principes du dialogue et de la coopération internationale, ainsi que le prévoit la résolution 60/251 de l'Assemblée générale. Il serait opportun d'utiliser cette première session pour adopter un plan de travail qui permettrait au Conseil de s'acquitter de sa tâche le plus rapidement possible. Un Groupe de travail inter-session devrait être mis sur pied pour préciser les modalités et les procédures du mécanisme d'examen périodique universel dont sera doté le Conseil. Il va de soi que ces modalités devront assurer un examen interactif, impartial, objectif, exempt de sélectivité et universel. La Thaïlande s'engage à faire preuve d'un esprit de collaboration et d'ouverture que le Conseil se penchera sur sa situation en matière de droits de l'homme. La Thaïlande est par ailleurs favorable au maintien des mécanismes spéciaux de l'ancienne Commission des droits de l'homme tout en estimant qu'ils doivent être rationalisés. Toutefois, pour l'heure, il serait opportun de renouveler pour une durée d'un an les mandats de ces différents mécanismes spéciaux.

M. GEBRAN SOUFAN (Liban) a déclaré que les droits de l'homme sont indivisibles et doivent être abordés comme un ensemble complet. S'agissant des questions de procédure, le Liban pense que ce serait une erreur de reprendre en l'état le règlement intérieur de la Commission. Il faut à tout prix éviter une politisation des débats. Le Gouvernement libanais s'est engagé à approuver la procédure d'examen périodique universel. En revanche, le Conseil doit éviter de devenir un tribunal, a précisé M. Soufan. Il doit au contraire aider les États à surmonter leurs difficultés. Concernant la situation des droits de l'homme au Liban, M. Soufan a exprimé l'espoir que sous les nouveaux auspices du Conseil, le Liban pourra assister au retour de tous les détenus libanais et personne disparues qui étaient des combattants pour la liberté du Sud du pays et défenseurs d'un Liban libre et souverain. Le représentant a indiqué que malgré des points faibles, son pays a beaucoup progressé dans le domaine des droits de l'homme. Ainsi, la liberté d'expression, de croyance, d'assemblée et d'association sont mises en œuvre avec toute la synergie voulue, de même que les mesures pour l'emploi et l'amélioration des conditions de vie des Palestiniens, notamment.

M. WARREN W. TICHENOR (États-Unis) a rappelé que son pays, à l'avant-garde de la protection des droits de l'homme dans le monde et sur son propre sol, avait toujours fait preuve d'initiative en matière de protection et de promotion des droits de l'homme. Il a fait référence à cet égard à l'action de Mme Eleanor Roosevelt, première inspiratrice de la Commission. M. Tichenor s'est dit impressionné par l'engagement et le dévouement des membres du Conseil à faire en sorte que cette nouvelle institution remplisse sa promesse. Toutefois promesses et bonnes intentions ne suffiront pas et les opprimés du monde entier comptent sur la communauté internationale pour leur rendre l'espoir et améliorer leur sort quotidien. Toute femme et tout homme ont droit au respect de leur dignité. Ce principe, fondamental pour le peuple des États-Unis, est au cœur de la détermination du Gouvernement de travailler de manière constructive, au-delà des groupes régionaux, avec tous les membres du Conseil, dont les États-Unis s'efforceront de faciliter les travaux. Grâce à la coopération et au dialogue, il est possible de faire avancer les droits de l'homme, comme l'a montré l'action conjointe engagée en Sierra Leone par le Conseil des droits de l'homme, le Haut Commissariat aux droits de l'homme et certains gouvernements. Le Conseil doit aussi parler au nom des personnes condamnées au silence comme Mme Aung San Suu Kyi qui a passé, le jour même de l'inauguration du nouveau Conseil, son soixante et unième anniversaire en résidence surveillée. Le Conseil sera jugé par les victimes de violations de leurs droits en fonction de sa capacité à changer effectivement leur sort. Les États-Unis se déclarent fermement décidés à contribuer à cette mission historique du Conseil.

MME CAROLINE MILLAR (Australie) a déclaré qu'à une époque où les médias, qu'il s'agisse de la télévision ou de la presse écrite, rendent compte chaque jour de la réalité des droits de l'homme et des questions humanitaires, le nouveau Conseil sera assurément jugé sur sa capacité à y répondre avec efficacité. Les projecteurs du monde entier sont tournés vers Genève. Les gens veulent savoir si nous vivons un véritable moment historique ou si le Conseil n'est rien d'autre qu'une appellation différente de l'ancienne Commission. C'est pourquoi il nous appartient d'être du bon côté de l'histoire et de donner au monde le Conseil des droits de l'homme qu'il mérite. Il est désormais plus difficile pour un pays qui viole les droits de l'homme de devenir membre du Conseil. Le Conseil sera en outre davantage axé sur la mise en œuvre des droits de l'homme. Mais, seul l'engagement des États et leur volonté d'abandonner les pratiques du passé permettront la réussite du Conseil. L'Australie est par ailleurs d'avis qu'il faut conserver les meilleurs éléments de l'ancienne Commission, à savoir l'engagement des entités de la société civile et des institutions nationales des droits de l'homme et utiliser de manière innovante les procédures spéciales.

M. BURHAN GAFOOR (Singapour) a noté que la réforme en cours est l'occasion de mettre en place un Conseil des droits de l'homme qui soit véritablement crédible et qui puisse réagir avec plus de souplesse. Le représentant a rappelé que les procédures spéciales constituent un élément fondamental du mécanisme de surveillance des droits de l'homme. Pour que le nouveau Conseil fasse vraiment la différence, M. Gafoor a estimé que les États membres devaient être capables de reconnaître leur diversité car il y aura toujours des différences de points de vue concernant les droits de l'homme. Il faut accepter cela, et être plus tolérant, a-t-il ajouté. Aucun groupe de pays n'a le monopole des droits de l'homme. La tendance de certains États à imposer leur pratique comme norme de valeurs universelles doit être écartée, a déclaré le représentant de Singapour. Il faut accepter nos points de désaccord sur des droits qui doivent être encore discutés avant de dégager un consensus. Enfin, M. Gafoor a déclaré que la capacité à encourager le respect des droits de l'homme en pratique et non seulement en théorie permettra véritablement de tester la véritable contribution du Conseil.

M. OMER BERZINJI (Iraq) a déclaré que son pays participait à cette première session du Conseil dans l'espoir que soient établis des principes de fonctionnement équitables et impartiaux. En Iraq même, des progrès remarquables ont été accomplis en matière de droit de l'homme: le Gouvernement a introduit de règles d'éligibilité aux élections législatives et démocratiques, qui ont connu un énorme succès auprès de la population iraqienne, qui s'est précipitée aux urnes pour élire ses représentants après la longue dictature qu'elle a dû subir jusqu'en 2003. Le Gouvernement a aussi introduit une série de mesures notamment s'agissant de la liberté de la presse, la liberté d'opinion et d'expression et la création d'un Ministère des droits humains et d'un Ministère des affaires féminines. Du temps sera nécessaire pour inculquer les principes démocratiques au cœur d'une société encore en butte au terrorisme aveugle, a toutefois souligné le représentant iraquien.

M. SONAM T. RABGYE (Bouthan) a déclaré que la communauté internationale doit faire la preuve de sa volonté de coopérer et de collaborer dans le cadre d'un véritable dialogue et d'abandonner les anciennes pratiques de la politisation, de la sélectivité et de l'application de deux poids, deux mesures. Quant au Conseil que nous sommes en train de construire, il importe d'en préciser l'architecture même. Dans ce contexte, le représentant a émis l'espoir que les consultations relatives aux modalités futures du mécanisme d'examen périodique universel et des procédures spéciales de l'ancienne Commission continueront de se dérouler dans la transparence et d'associer pleinement les 191 États membres de l'ONU. Venant à la situation dans son propre pays, le représentant a affirmé que le Bouthan, qui fait partie des pays pauvres les moins avancés, avait réalisé d'importants progrès au plan de la gouvernance et du développement, et se trouvait sur la bonne voie malgré l'insuffisance de ses ressources et de ses capacités.

M. ANTON PINTER (Slovaquie) a fait observer que la création du Conseil s'accompagne de grands espoirs, c'est une occasion rare. Le Conseil ne commence pas à partir de zéro car la Commission a permis d'apporter des mécanismes qui doivent être conservés et renforcés, telles que les procédures spéciales, a estimé M. Pinter. La Slovaquie appuie le rôle des défenseurs des droits de l'homme et de la société civile. La nature permanente du Conseil doit permettre de répondre promptement aux violations. Au sujet de l'adoption du projet de convention pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, le représentant a dit souhaiter voir ce texte adopté par consensus. Le représentant slovaque a également estimé que le rôle du Haut-Commissariat aux droits de l'homme méritait d'être renforcé.

M. MASOOD KHAN (Pakistan, au nom de l'Organisation de la Conférence islamique) a déclaré que les pays islamiques entendaient prendre une part active aux travaux du Conseil. La Commission était arrivée au bout de ses possibilités, le nouveau Conseil ne devra pas s'épuiser dans des débats sur les problèmes du passé: sélectivité et partialité dans les débats, programmes de travail stigmatisant certains pays, protection des droits déséquilibrée au détriment des droits économiques, sociaux et culturels. Un nouveau processus institutionnel est désormais engagé. L'interprétation sélective ne servira à rien dans ce contexte. Le Conseil devra adopter une démarche constructive orientée sur les résultats et devra répondre aux préoccupations majeures et anciennes par le dialogue et la coopération, en veillant toujours à lutter contre l'impunité. La situation dans les territoires arabes occupés doit dans ce contexte être au centre des débats, débats qui doivent viser à une solution durable des problèmes que connaissent les Palestiniens. Les pays musulmans sont par ailleurs très inquiets de la montée de l'islamophobie. Il faut promouvoir à cet égard la tolérance et le respect envers toutes les religions, a souligné le représentant.

MME MAHY ABDEL LATIF (Égypte) a déclaré que le Conseil devrait œuvrer dans le respect de toutes les cultures et de toutes civilisations. À défaut, il attiserait le racisme et la discrimination. Il ne faut pas essayer d'imposer des systèmes de valeurs car cela ne peut avoir que des conséquences négatives dans les relations internationales. Le rôle du Conseil doit donc être de promouvoir le dialogue entre les cultures, la tolérance et le respect de toutes les religions. Pour l'Égypte, la réforme du système des droits de l'homme doit s'inscrire dans le cadre de la réforme d'ensemble des Nations Unies et doit également tenir compte des recommandations pertinentes du Conseil de sécurité et de l'Assemblée générale. Il faut lever tous les obstacles qui avaient miné les travaux de la Commission. Ainsi, il faudra éviter d'insister sur les droits civils et politiques au détriment des droits économiques, sociaux et culturels. Le Conseil devra en outre éviter toute politisation de la question des droits de l'homme et aider les États à s'acquitter de leurs obligations en matière de droits de l'homme tout en veillant à ne pas s'immiscer dans les affaires internes d'un pays. Enfin, le Conseil devrait être un forum démocratique tenant compte de l'ensemble des systèmes de valeurs.

M. LUIS VARELA QUIROS (Costa Rica) a déclaré que cette première session du Conseil des droits de l'homme constitue la première étape d'un long processus qui consolidera progressivement le Conseil pour devenir un organe principal des Nations Unies. Le Conseil doit s'acquitter avec efficacité de sa tâche. Pour consolider ce processus il faut poursuivre les négociations de façon transparente avec un engagement total pour s'assurer de la volonté conjointe de toutes les parties prenantes, a relevé le représentant. «Si nous choisissons la coopération plutôt que l'affrontement nous devrions atteindre ces objectifs», a-t-il estimé. Le Costa Rica considère que, durant cette première session, les procédures spéciales, les groupes de travail ainsi que la Sous-Commission des droits de l'homme doivent être reconduits. La déclaration sur les peuples autochtones et celles sur les disparitions forcées revêtent une importance vitale, a ajouté M. Varela Quiros. Ces textes doivent être adoptés durant cette session afin d'envoyer un message clair à la communauté internationale.

M. CHOE MYONG NAM (République populaire démocratique de Corée) a déclaré que la création du nouveau Conseil n'était pas exempte de points faibles et de problèmes qui restent en suspens. Notamment, la résolution qui porte création du nouvel organe ne prévoit pas de recours contre les affrontements politiques qui ont marqué les débats de l'ancienne Commission, débats fortement politisés dont Pyongyang a été victime au premier chef. La question est maintenant de savoir si le Conseil sera juste et équitable pour tous, ou s'il servira les intérêts arbitraires d'une minorité d'États puissants. Il devra en tous cas agir dans le respect de la souveraineté des États, a souligné le représentant, laquelle doit être garantie de tout empiètement à prétexte d'universalité ou d'intervention humanitaire. Le Conseil devra aussi bannir définitivement toute partialité et rejeter toute tentative d'adopter des résolutions politisées sur des pays isolés. La République populaire démocratique de Corée continuera pour sa part d'assumer de bonne foi les obligations relatives aux droits de l'homme qu'elle a souscrites vis-à-vis du droit international, a conclu le représentant.

M. HUSSEIN ALI (Syrie) a déclaré que son pays a la ferme volonté de coopérer pleinement avec le nouveau Conseil. La Syrie souhaite que le Conseil soit à la hauteur des grands espoirs qu'il suscite. A cette fin, il devra agir en toute transparence et en évitant la politisation selon un ordre du jour clair et équilibré, répondant par ailleurs aux besoins des peuples. C'est pourquoi le Conseil devra se saisir de la question des violations des droits de l'homme commises par Israël dans les territoires arabes occupés. Il y a là une urgence dans la mesure ou ces violations s'amplifient chaque jour.

M. RAMADAR IRHIAM (Libye) n'a pas souhaité évoquer les points négatifs qui ont caractérisé le fonctionnement de la Commission. Il a en revanche mentionné les principes sur lesquels le Conseil devrait fonder son activité. Il s'agit de la neutralité, la crédibilité, le dialogue et la non politisation. Mais le Conseil doit tenir compte des spécificités religieuses et culturelles des pays, a précisé le représentant. Il a également demandé à ce qu'une grande attention soit portée par le Conseil à l'éducation aux droits de l'homme.


MME MARIE-THÉRÈSE PICTET-ALTHANN (Ordre souverain militaire de Malte) a dit espérer que les observateurs seront étroitement associés aux activités futures du Conseil, ce qui serait particulièrement profitable aux membres comme aux non-membres. De nombreux intervenants ont déjà réaffirmé l'indivisibilité, l'interdépendance et l'universalité des droits de l'homme. L'Ordre se conforme pleinement à cette vision dans le cadre de son action humanitaire bien établie en faveur des plus pauvres et des malades, qui prend la forme d'une assistance sociale et médicale dans cent vingt pays. L'Ordre espère en particulier que les Rapporteurs spéciaux sur la liberté de croyance et de religion et sur le droit à la santé pourront poursuivre leurs mandats dans le cadre du nouveau Conseil. L'Ordre s'intéresse également au sort des personnes souffrant de handicaps et ne doute pas que le Comité prendra connaissance du rapport ad hoc sur la Convention de protection et de promotion des droits et de la dignité des personnes handicapées. De même, l'Ordre est persuadé que le Conseil accordera toute l'attention nécessaire à la question des droits humains en lien avec l'extrême pauvreté.

MME RIMA SALAH, Directrice générale adjointe du Fonds des Nations Unies pour l'enfance, a déclaré qu'il était essentiel qu'un débat sur les droits de l’enfant demeure un point spécifique dans l'ordre du jour du Conseil des droits de l'homme. L'UNICEF exhorte les États membres à donner aux droits de l'enfant toute l'attention qu'il mérite et à les intégrer à tous les aspects du travail du Conseil. Elle a par ailleurs estimé que l'adoption par le Conseil de sécurité de la résolution 1612 avait marqué une nouvelle étape dans la surveillance des violations des droits des enfants dans le cadre de conflits armés. Elle a estimé qu'il était urgent de renforcer ce processus. Mme Salah a insisté sur la nécessité pour le Conseil de tenir compte, dans le cadre de l'examen périodique universel, de l'étude sur la violence contre les enfants qui sera publiée prochainement. Mon vœu, mon rêve, a-t-elle affirmé, est que pour chaque enfant, où qu'il se trouve, il ne soit jamais trop tard.

M. PAULO SÉRGIO PINHEIRO, (Expert indépendant chargé par le Secrétaire général des Nations Unies de l'étude sur la violence contre les enfants), a dit que cette session était l'occasion de lancer un signal clair pour l'importance considérable de la contribution faite par les procédures spéciales, qui sont les troupes de première ligne pour la protection des droits de l'homme. Il faut accorder une protection beaucoup plus grande aux enfants. Il est urgent d'agir concrètement pour mettre un terme à la violence à leur égard. Des mesures immédiates sont nécessaires, a ajouté M. Pinheiro. Le rapport en préparation de l'expert sera largement basé sur l'intégration d'une dimension participative aux consultations régionales, a-t-il annoncé. Le rapport présentera des stratégies de prévention et de réaction. Les violences ne peuvent en aucun cas être légales. Il faut s'attaquer à ce problème urgent. «Les enfants victimes de violations attendent vraiment beaucoup de nous», a conclu M. Pinheiro.

MME RACHEL MAYANJA (Conseillère spéciale pour la parité entre les sexes et la promotion de la femme) a souligné que la réalisation des objectifs de développement et de paix serait compromise sans une pleine participation des femmes. Leurs droits ont été reconnus comme une partie indivisible des droits universels et les synergies entre droits de femmes et développement ont été maintes fois mises en évidence lors de nombreuses conférences internationales. La promotion de l'égalité entre femmes et hommes doit faire partie intégrante du programme et des méthodes de travail du Conseil, à tous les niveaux de la mise en application des décisions. Le Conseil doit interagir étroitement avec la Commission de la condition de la femme. Il faudra aussi introduire ou conserver des mécanismes efficaces, comme l'a été le renforcement du Haut Commissariat aux droits de l'homme par un département spécialement consacré aux droits des femmes. La violence contre les femmes est une violation persistante de leurs droits. Il faut mettre en œuvre la «plate-forme de Beijing» et éviter que l'on ne fasse marche arrière, comme on le voit malheureusement avec l'adoption, un peu partout dans le monde, d'attitudes hostiles aux femmes ou la perpétuation de stéréotypes les concernant.

M. SAAD ALFARARGI (Ligue des États arabes) a déclaré que les pays arabes ont activement participé à la rédaction de la Charte des Nations Unies. Leur engagement s'est également traduit par une participation à tous les débats de la Commission des droits de l'homme, qui a d'ailleurs été présidée à plusieurs reprises par des personnalités originaires de pays arabes. Il en est résulté des avancées positives dans les pays arabes où de nombreuses institutions de défenses des droits de l'homme ont vu le jour et où de nombreuses organisations non gouvernementales ont droit de cité. Il convient également de rappeler que la ligue des États arabes a adopté en 1992 une Charte des droits de l'homme. Les pays arabes attendent que le Conseil, doté de prérogatives sans précédent lui permettant d'assurer le suivi des normes internationales relatives aux droits de l'homme, soit un véritable instrument de coopération entre les États. Le Conseil devra réussir là où la Commission avait échoué, c'est-à-dire, mettre un terme aux nombreuses violations des droits de l'homme dont est victime le peuple palestinien. Cette intervention s'impose d'autant plus que la situation se détériore.

MME KIRSTEN MLACAK (Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe) a énuméré les domaines dans lesquels ces deux institutions agissent à l'heure actuelle, à savoir: la liberté de réunion, la lutte contre la traite des êtres humains, la tolérance et la non discrimination, la lutte contre le terrorisme dans le respect des droits de l'homme et les défenseurs des droits de l'homme. Concernant ce dernier domaine, la représentante a dit souhaiter qu'il n'y ait plus de harcèlement à leur encontre.

M. JOSEPH K. INGRAM (Banque mondiale) a déclaré que son institution se tenait toujours prête à appuyer les États dans l'application de leurs stratégies nationales de développement. Avec ses partenaires dans la communauté des droits de l'homme, la Banque mondiale peut rendre des services signalés en termes d'aide financière et technique. Un avis juridique a confirmé que la défense des droits de l'homme faisait partie du mandat de la Banque; d'autres travaux empiriques démontrent les liens de cause à effet entre droits de l'homme et développement. La Banque mondiale a donc décidé de développer une stratégie d'action dans le domaine de la promotion de ces droits et a aussi intensifié sa collaboration avec le Haut Commissariat au niveau opérationnel. La Banque travaille avec les Gouvernements scandinaves à l'application de son programme d'action en matière de justice et de droits de l'homme. Par ailleurs, une nouvelle initiative menée conjointement avec le Haut Commissariat vise à aider les gouvernements à intégrer les droits de l'homme dans les mesures de réduction de la pauvreté, en favorisant les services qui contribuent au développement à la fois économique et social et qui constituent des obligations pour les États.

MME CHRISTINE DESOUCHES (Organisation internationale de la francophonie) a estimé que le Conseil devrait reprendre à son compte le projet de convention sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, ainsi que les travaux sur le droit au développement et sur le protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits économique, sociaux et culturels. L'événement qui nous rassemble porte l'espoir d'une nouvelle conscience internationale. Nous ne devons pas mésestimer les questions de procédure et d'organisation du Conseil mais celles-ci ne prennent sens que par rapport à la cause des droits de l'homme. Nous devons donc dès lors nous demander ce que nous voulons et quels sont les enjeux. Pour Mme Desouches, il s'agit notamment de la démocratisation des relations internationales, de l'universalité des droits de l'homme et du traitement égal de leurs violations, l'effectivité des droits de l'homme et enfin, un partenariat rénové avec les institutions nationales et avec les organisations non gouvernementales.

M. LEE SWEPSTON (Bureau international du travail - BIT) a déclaré que la justice sociale est nécessaire à une paix universelle et durable. Les droits de l'homme sont un élément vital dans le mandat du BIT, a rappelé le représentant. Les structures des droits de l'homme du système des Nations Unies subissent un examen à l'heure actuelle et les procédures du BIT ont également beaucoup évolué. L'assistance technique est de plus en plus utilisée pour la mise en œuvre des droits de l'homme.
Le BIT travaille avec les Nations Unies depuis des années pour protéger les droits de l'homme. Dans bien des cas, les normes du BIT inspirent des déclarations plus générales sur les droits de l'homme des Nations Unies. Le représentant a enfin déclaré que le moment était venu de renforcer la coordination des mécanismes des droits de l’homme avec le BIT. «Nous sommes prêts à discuter de nouvelles modalités de coopération», a-t-il ajouté.

MME INGEBORG BREINES (Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture - UNESCO) a déclaré que son Organisation considère que le droit à l'éducation est un droit en soi et aussi la clé des autres droits humains. L'UNESCO a pour mission d'offrir un accès universel à l'éducation primaire, notamment au bénéfice des personnes pauvres et marginalisées. Ceci implique en particulier l'adoption de mesures spéciales pour combler les inégalités dont sont victimes les fillettes dans leur scolarisation. L'UNESCO continue aussi d'accorder une priorité élevée à la formation aux droits de l'homme, et joue à cet égard un rôle important dans la promotion du Plan mondial pour l'éducation aux droits de l'homme. Dans toutes ses activités, l'UNESCO préconise et la concertation et la coopération. Elle soutiendra pleinement l'action du Conseil et du Haut Commissariat aux droits de l'homme.

MME ERIKA FELLER (Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés) a émis l'espoir que le Conseil saura dûment reconnaître que les violations des droits de l'homme sont l'une des principales causes du déplacement forcé de personnes. Le Conseil devrait également reconnaître qu'il lui appartient de traiter des violations des droits de l'homme qui sont à l'origine de la situation de réfugié et qu'il n'est pas suffisant de les condamner. Le Conseil devrait en outre s'efforcer de concilier de manière adéquate les droits et les besoins des particuliers et les préoccupations des États en matière de terrorisme ou d'immigration clandestine. La nouvelle instance devrait par ailleurs accorder une égale attention aux droits des non-ressortissants et aux droits des nationaux. La Commission de consolidation de la paix et son Secrétariat ont une importance déterminante pour le HCR. À cet égard, il convient de souligner que le phénomène des personnes déplacées ne pose pas uniquement des questions d'ordre humanitaire mais également des questions d'ordre politique, de sécurité, de justice, de gouvernance et de développement.

MME KHADIJA RACHIDA MASRI (Union africaine) a déclaré que l'Afrique a des priorités très claires dont certaines visent à s'assurer que le nouvel ordre qui s'est ouvert le 19 juin 2006 puisse établir des mécanismes et des méthodes de travail qui reflètent, entre autres, la nécessité de parvenir à la réalisation du droit au développement ainsi que celle du droit «moral» qu'est l'élimination de la pauvreté et du sous-développement. Certes, il est déplorable de constater que le fléau des conflits en Afrique constitue un obstacle majeur au développement du continent, mais cette situation n'est pas une fatalité, a déclaré la représentante. La Commission de l'Union africaine est fermement engagée à promouvoir la paix, la sécurité et la stabilité comme préalable au développement et à l'intégration socio-économique du continent.

MME VICTORIA TAULI-CORPUZ, Présidente de l'Instance permanente sur les questions autochtones, a déclaré que l'entité qu'elle représente attache une grande importance à la collaboration avec les mécanismes spéciaux de l'ancienne Commission des droits de l'homme et espère qu'il en ira de même avec les structures du nouveau Conseil. Le Forum lance un appel au Conseil des droits de l'homme afin qu'il adopte, sans le modifier, le projet de déclaration sur les droits des peuples autochtones. Elle a en outre appelé de ses vœux le maintien du mandat de Rapporteur spécial sur les droits de l'homme et les libertés fondamentales des peuples autochtones. Le Conseil devrait d'ailleurs attacher la plus grande importance à la mise en œuvre des recommandations de tous les Rapporteurs spéciaux concernant les peuples autochtones. Il conviendrait en outre que les représentants de ces peuples soient pleinement associés aux travaux du Conseil.

Droit de réponse

Le représentant de l'Inde a déclaré que les droits de l'homme de l'ensemble de ses citoyens sont garantis sur l'ensemble de son territoire, y compris au Jammu-et-Cachemire, contrairement aux allégations du représentant du Pakistan.

Le représentant du Pakistan a répondu au droit de réponse de l'Inde en se disant surpris de cette déclaration, car il s'était contenté d'identifier des domaines d'amélioration possible de l'action du Conseil. Le Pakistan continue d'être déçu devant l'absence de progrès réalisé entre les deux pays au sujet de la situation au Jammu-et-Cachemire.

Le représentant de l'Inde a dit que les deux États discutaient de ce problème de manière bilatérale depuis 2004. Cette coopération a commencé de porter ses fruits. L'Inde, tout en souhaitant continuer ce dialogue, estime que ce problème ne devrait pas être abordé dans des conférences multilatérales.

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HRHRC06012F