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LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT ENTEND LE MINISTRE IRANIEN DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Compte rendu de séance
Elle entend aussi le Pakistan, l'Autriche, l'Italie et le Japon sur la question d'un traité sur les matières fissiles qui fera l'objet des débats lors de la reprise de session à la mi-mai

La Conférence du désarmement a achevé, ce matin, la première partie de sa session de 2006 en entendant le Ministre des affaires étrangères de l'Iran, M. Manouchehr Mottaki. Le Pakistan, l'Autriche, au nom de l'Union européenne, et le Japon ont également pris la parole.

M. Manouchehr Mottaki a notamment dénoncé la propagande partiale, exagérée et injustifiée qui a été faite au sujet du programme nucléaire de son pays. Après des années d'inspection particulièrement stricte de la part de l'Agence internationale de l'énergie atomique, rien n'a été découvert qui contredirait l'affirmation de l'Iran que ses activités nucléaires sont pacifiques et n'ont jamais été détournées vers des activités interdites, a-t-il souligné. Parallèlement, l'Iran a négocié avec les pays européens pour supprimer toute ambiguïté en ce qui concerne le programme pacifique du pays. L'Iran constate une politique qui repose sur la prolongation de la négociation sans perspective de parvenir à un accord final. Présenter le dossier de l'Iran au Conseil de sécurité constitue un abus des mécanismes internationaux et une tentative concertée de favoriser une escalade de la situation au service de l'ordre du jour politique à court terme de certains États puissants. L'accès aux techniques nucléaires pacifiques est un droit incontestable de l'Iran. Il ne saurait être question d'attendre des pays qui ont développé l'énergie nucléaire à des fins pacifiques qu'ils renoncent à leur option légitime de disposer de politiques en matière de cycle du combustible. M. Mottaki a proposé la mise en place d'un consortium régional sur le cycle du combustible soumis aux garanties de l'AIEA et qui serait géré conjointement par les États de la région.

Les autres interventions de ce matin on principalement porté sur la question de la négociation d'un traité sur les matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires. Relevant que certains États souhaitent que l'interdiction des matières fissiles se limite à la production future, le Pakistan a souligné qu'afin d'assurer le maintien de la dissuasion stratégique en Asie du Sud, il faudra tenir compte des stocks existants, car ils pourraient éventuellement être transformés en armes nucléaires. Un traité sur les matières fissiles qui figerait ou accentuerait les dissymétries aurait pour conséquence d'accélérer la non-prolifération, et non d'y mettre fin.

L'Autriche a rappelé que l'Union européenne accordait la priorité à la négociation d'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles à des fins d'armement nucléaire en tant que moyen de renforcer la non-prolifération et le désarmement nucléaires. À l'instar de l'Autriche, l'Italie a appelé tous les pays, en attendant l'entrée en vigueur d'un tel traité, à déclarer et maintenir des moratoires sur la production de matières fissiles. Le Japon a pour sa part indiqué qu'il entendait organiser, en prévision du débat sur ce traité qui doit se tenir au sein de la Conférence à la mi-mai, une réunion ouverte sur cette question avant Pâques.

Le Président de la Conférence, l'Ambassadeur Doru-Romulus Costea de Roumanie, a relevé que la première partie de la session de 2006 de la Conférence a apporté une fenêtre d'ouverture et un peu de confiance mutuelle à l'engagement commun des membres de la Conférence à trouver une solution consensuelle. Il a exprimé l'espoir que cette tendance positive se poursuivra pendant le reste de la session de cette année.


La prochaine séance plénière de la Conférence, lors de la reprise de session qui marquera le début de la deuxième partie de la session de 2006, se tiendra le mardi 16 mai, à 10 heures.


Aperçu des déclarations

M. MANOUCHEHR MOTTAKI, Ministre des affaires étrangères de l'Iran, a indiqué venir devant la Conférence en tant que messager de la paix. Il a rappelé que l'objectif ultime des efforts de la Conférence du désarmement était de parvenir à un programme de travail complet et équilibré.

M. Mottaki a par ailleurs rappelé les importantes réalisations enregistrées dans les années 1990, dans le contexte de la fin de la guerre froide, au nombre desquelles figure en particulier la Convention sur les armes chimiques. Il a aussi rappelé que les États parties à la Convention sur les armes toxiques et bactériologiques avaient décidé en 1994 d'engager des négociations qui renforceraient la mise en œuvre de cet instrument par le biais d'un protocole qui lui serait annexé. Les négociations en la matière se sont déroulées ici même, à Genève. Dans le cadre du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP), d'autres mesures importantes ont été prises, parmi lesquelles la déclaration unilatérale des États dotés d'armes nucléaires. La Conférence a également adopté toute une série de décisions et de résolutions sur le Moyen-Orient, qui ont rendu possible la prorogation indéfinie du TNP en 1995, a-t-il ajouté. La Cour internationale de justice a ensuite émis en 1996 un avis sur la légalité des menaces ou du recours aux armes nucléaires, qui avait donné un nouvel élan aux questions de désarmement nucléaire. Puis ce fut la fin de ce que l'on peut qualifier de décennie glorieuse pour le désarmement. Une décennie de négociation sur un protocole se rapportant à la Convention sur les armes toxiques et bactériologiques s'est soldée par un échec en raison de l'attitude d'un seul État partie qui n'a pas été en mesure d'accepter le dernier texte évolutif ni de proposer quoi que ce soit qui eut pu le rendre acceptable. Le Traité ABM, qui pendant des décennies fut la pierre angulaire de l'équilibre stratégique, a été abrogé. Contrairement à toutes les obligations politiques, juridiques et morales, de nouvelles armes nucléaires ont été fabriquées et de nouvelles doctrines ont été promulguées pour abaisser le seuil du recours à ces armes inhumaines, a poursuivi M. Mottaki. Les choses sont allées si loin qu'en 2005, nous nous sommes trouvés face à une défaite malvenue mais non moins peu surprenante de la Conférence d'examen du TNP et du rapport issu du Sommet de l'ONU de septembre 2005, lequel ne mentionne nulle part les questions de désarmement.

Rappelant que cela fait maintenant une décennie que la Conférence ne s'est pas attaquée à ce à quoi elle aurait dû s'atteler, à savoir la discussion d'instruments de désarmement, M. Mottaki a déploré la tendance délibérée dans certaines capitales à ne pas laisser la Conférence travailler. Cette impasse ne saurait être surmontée par l'élaboration de propositions nouvelles, a déclaré le Ministre iranien. Il ne s'agit pas d'une question de procédure mais bien d'une question de volonté politique, a-t-il affirmé. Il s'est dit convaincu que les braises qui couvent sous les cendres vont reprendre et que nous allons pouvoir assister à une négociation énergique qui marquera un retour au multilatéralisme. M. Mottaki a jugé suffisamment inclusif et souple l'ordre du jour actuel de la Conférence pour qu'elle puisse aborder, devant la communauté internationale, toute une série de questions.

Pour l'Iran, le désarmement nucléaire constitue la priorité absolue, a poursuivi le Ministre iranien des affaires étrangères. Il a rappelé qu'une très grande puissance de destruction subsiste qui permettrait aisément d'éradiquer de la Terre toute présence humaine. Les initiatives bilatérales sont certes bienvenues, mais elles sont bien loin de répondre aux attentes de la communauté internationale, a souligné le Ministre. Il a apporté le soutien de son pays à la proposition du Groupe des 21 visant la création d'un comité spécial sur le désarmement nucléaire, qui commencerait la négociation sur un programme d'élimination graduelle de toutes les armes nucléaires et déboucherait sur une convention sur le désarmement nucléaire. Les États qui ont renoncé à l'option nucléaire sont légitimement en droit d'attendre des garanties de sécurité et de demander que soit négocié un instrument juridiquement contraignant concernant de telles garanties, a également souligné M. Mottaki. L'élimination totale des armes nucléaires reste la seule garantie absolue que de telles armes ne seront pas utilisées, a-t-il rappelé. En attendant, les États non dotés d'armes nucléaires doivent être rassurés et assurés qu'il n'y aura pas d'utilisation ni de menaces d'utilisation des armes nucléaires à leur encontre.

L'Iran comprend l'importance que d'autres membres de la Conférence accordent à d'autres questions qui leur paraissent prioritaires. Il reconnaît que l'espace extra-atmosphérique doit être exploré et utilisé seulement à des fins pacifiques et au profit de l'ensemble de l'humanité. Il est en outre préoccupé par les incidences négatives de la mise au point de systèmes antimissiles, a ajouté le Ministre iranien. L'Iran considère que la prévention de la course aux armements dans l'espace extra-atmosphérique revêt un caractère de grande urgence, compte tenu des préoccupations légitimes du fait de l'insuffisance des instruments juridiques existants dans ce domaine.

La question d'un traité sur les matières fissiles est aussi importante pour l'Iran. À l'instar de bien d'autres États, l'Iran considère qu'un tel traité serait une mesure viable sur la voie du désarmement nucléaire. Le Ministre iranien des affaires étrangères a toutefois exprimé des doutes sérieux quant à la possibilité qu'un tel traité serve la cause du désarmement nucléaire s'il ne porte pas sur tous les stocks susceptibles d'être utilisés facilement pour mettre au point de nouvelles armes nucléaires ou de nouveaux types d'armes nucléaires. En outre, un traité sur les matières fissiles doit être vérifiable si l'on veut qu'il suscite et entretienne la confiance. La meilleure façon de procéder à cet égard consiste à rester fidèles aux textes qui ont déjà été adoptés par consensus et notamment au mandat Shannon, a déclaré M. Mottaki. Les «quatre questions principales» reflétées dans les diverses initiatives des membres de différents groupes régionaux représentent la seule démarche réaliste qui permettra à la Conférence de sortir de l'impasse dans laquelle elle se trouve actuellement.

Le multilatéralisme est la seule option viable si la communauté internationale veut relever le défi le plus menaçant qui pèse sur notre sécurité commune, a poursuivi le Ministre des affaires étrangères. Malheureusement, on constate certaines tendances dans certains cercles à avoir recours à des actes unilatéraux; cette tendance mène malheureusement au recours à des forces armées, à la violence et à la terreur pour répondre à l'insécurité. Si ces politiques ne sont pas contenues, le monde risque d'être confronté à une situation terrible susceptible de représenter un danger pour la paix et la sécurité internationales. L'unilatéralisme menace le fondement même du régime de non-prolifération et du TNP lui-même, a insisté M. Mottaki. L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) dispose d'instruments suffisants pour contrôler les activités nucléaires des États Membres, a-t-il rappelé. Cependant, ces États unilatéralistes, tout en possédant et en mettant au point les armes les plus destructrices et les plus inhumaines qui soient, se montrent si intolérants qu'ils empêchent l'Agence de fonctionner comme il conviendrait. Ils s'efforcent de justifier leur démarche illégale et discriminatoire en invoquant des préoccupations de non-prolifération – préoccupations que nous partageons tous. Le TNP reconnaît le droit des pays en développement à utiliser l'énergie nucléaire à des fins pacifiques, a rappelé le Ministre iranien.

M. Mottaki a dénoncé la propagande partiale, exagérée et injustifiée lancée au sujet du programme nucléaire de l'Iran, qui a induit la communauté internationale en erreur. On a négligé les antécédents de l'Iran. L'Iran s'efforce de mener des recherches sur l'utilisation pacifique de l'énergie nucléaire mais ceci lui est maintenant contesté alors qu'en vertu du TNP, l'Iran, comme tout État partie, a des droits qui ne peuvent pas être contestés par d'autres, a déclaré M. Mottaki. Après toutes ces années d'inspection particulièrement stricte de la part de l'AIEA, rien n'a été découvert qui irait à l'encontre de ce que dit l'Iran, à savoir que ses activités nucléaires sont pacifiques et n'ont jamais été détournées vers des activités interdites. Le fait que, pendant toutes ces années de recherche, il n'y ait pas eu de détournement de matières nucléaires vers des activités interdites constitue en soi la meilleure preuve des intentions pacifiques de l'Iran, a fait observer le Ministre des affaires étrangères. Il a rappelé que ces trois dernières années, l'Iran, par le biais d'une application volontaire du protocole additionnel et de la suspension de toute activité d'enrichissement, a pris des mesures qui vont bien au-delà de ses obligations contractuelles. En tant que membre du TNP, l'Iran reste liée par ses accords de garantie avec l'AIEA et continue de mener ses activités nucléaires pacifiques sous la surveillance étroite de l'Agence. Il faut souligner que l'application de trois années d'inspection stricte par l'AIEA et la coopération extraordinaire dont a fait preuve l'Iran sont des paramètres de la plus haute importance et auxquels l'Agence n'a jamais bénéficié dans toute son histoire. Parallèlement, nous avons négocié avec les pays européens pour supprimer toute ambiguïté en ce qui concerne le programme pacifique de l'Iran. Cependant, trois années de négociations n'ont fait qu'ajouter à notre méfiance; nous constatons qu'il y a une politique qui repose sur la prolongation de la négociation sans perspective de parvenir à un accord final. De la même façon, nous constatons que certains pays ne semblent pas soucieux de respecter les objectifs du TNP, pas plus que ceux des accords de garantie de l'Agence, et tentent d'utiliser ces instruments juridiques et institutionnels comme des instruments au service de leur politique étrangère.

Étant donné qu'il ne saurait être question d'attendre des pays qui ont développé l'énergie nucléaire à des fins pacifiques qu'ils renoncent à leur option légitime de disposer de politiques en matière de cycle du combustible, M. Mottaki a proposé la mise en place d'un consortium régional sur le cycle du combustible, auquel participeraient les pays de la région ayant déjà développé au niveau national des programmes liés au cycle du combustible et désireux de les développer plus avant à des fins civiles. Ce consortium serait géré conjointement par les États de la région et d'autres pays pourraient aussi participer à ces accords régionaux selon des modalités à convenir entre les parties. Ce consortium bénéficierait des garanties de l'AIEA, a précisé le Ministre iranien des affaires étrangères. Présenter le dossier de l'Iran au Conseil de sécurité constitue un abus des mécanismes internationaux qui est non seulement malvenu, mais aussi juridiquement injustifié et clairement inacceptable pour l'Iran, a-t-il affirmé. Cela ne peut que porter préjudice à la promotion, dans le cadre des relations internationales, d'un comportement fondé sur le droit. Il s'agit d'une tentative concertée de favoriser une escalade de la situation au service de l'ordre du jour politique à court terme de certains États puissants. L'accès aux techniques nucléaires pacifiques est un droit incontestable de l'Iran et des autres États Membres du TNP. Il ne faut avoir aucun doute quant au fait que l'adoption de mesures politiques visant à priver des États de leurs droits inaliénables s'avèrera un exercice futile préjudiciable aux instruments internationaux et générateur de crises, a conclu le Ministre.

M. MASOOD KHAN (Pakistan) a jugé particulièrement utile le dialogue interactif instauré cette année par les six Présidents de la session 2006 (le «P6»), qui l'aiderait à restaurer la confiance et favoriser la compréhension des questions examinées. Cette organisation des travaux est également nécessaire pour préparer le terrain des négociations. Tout en menant ce dialogue, la Conférence doit aussi essayer d'adopter son programme de travail, car le réel travail que doit accomplir la Conférence est de mener des négociations. À cet égard, il devient de plus en plus difficile de s'expliquer pourquoi on ne peut s'entendre sur un programme de travail raisonnable, tel que celui proposé par les «cinq ambassadeurs» et qui recueille l'appui de la majorité des États, pour permettre à la conférence d'entamer des négociations.

S'agissant d'un traité sur les matières fissiles, M. Khan a estimé que les questions concernant la définition, la portée, la vérification et les stocks existants devaient être discutées et examinées ouvertement. L'approche de la Conférence en ce qui concerne ce traité doit se fonder, au minimum, sur trois éléments: le traité devrait viser à la fois les objectifs de non-prolifération et de désarmement; il devrait prévoir un mécanisme efficace de vérification; et il devrait être non-discriminatoire. Certains États souhaitent limiter l'interdiction des matières fissiles à la production future. La grande majorité des membres voudrait que le traité aborde la question des stocks et favorise l'objectif du désarmement nucléaire grâce à une réduction progressive et équilibrée des matières fissiles.

Afin d'assurer le maintien de la dissuasion stratégique en Asie du Sud, il faudra tenir compte des stocks existants de matières fissiles, a souligné le représentant pakistanais. On peut supposer que les stocks de matières fissiles seront éventuellement transformés en armes nucléaires. Un traité sur les matières fissiles qui figerait ou accentuerait les asymétries aurait pour conséquence d'accélérer la non-prolifération, et non d'y mettre fin. Il est clair qu'il existe des différences de points de vue, d'approches et de méthodes entre les États membres. Afin de combler ces différences, le Pakistan a souligné la nécessité de parvenir à un nouveau consensus en matière de sécurité pour réaliser le désarmement et la non-prolifération et faire face aux défis mondiaux existants et nouveaux. À cette fin, il faut procéder à des consultations et parvenir à un accord parmi tous les États membres de l'ONU. Le multilatéralisme exige des États d'adopter une vision à long terme et de dépasser leurs positions nationales; le multilatéralisme est la somme d'intérêts éclairés.

M. WOLFGANG PETRITSCH (Autriche, au nom de l'Union européenne, de la Bulgarie et de la Roumanie) a souligné que l'impasse dans laquelle se trouve actuellement la Conférence reste un sujet de grave préoccupation. Les menaces actuelles et nouvelles qui pèsent sur la paix et la sécurité exigent que cette impasse soit surmontée, a-t-il déclaré. Il a affirmé que l'Union européenne est fermement engagée à parvenir à un consensus sur un programme de travail de la Conférence; elle se réjouit que de nouvelles idées et de nouvelles propositions aient été avancées ces dernières années. L'Union européenne souhaite en outre réitérer son attachement au suivi du processus d'élargissement de la Conférence.

M. Petritsch a rappelé que l'Union européenne accorde une haute priorité à la négociation, au sein de la Conférence, d'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles à des fins d'armement nucléaire en tant que moyen de renforcer la non-prolifération et le désarmement nucléaires. L'Union européenne en appelle au lancement immédiat des négociations ainsi qu'à la conclusion rapide d'un traité non discriminatoire et universellement applicable d'interdiction de la production de matières fissiles à des fins d'armement nucléaire, sans condition préalable. En attendant l'entrée en vigueur d'un tel traité, l'Union européenne demande aux États de déclarer et de maintenir un moratoire sur la production de matières fissiles à des fins d'armement nucléaire. Elle se félicite à ce sujet des mesures prises par les quatre États qui ont d'ores et déjà déclaré de tels moratoires.

M. CARLO TREZZA (Italie) a souligné qu'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles à des fins d'armement nucléaire fait partie intégrante des processus de désarmement nucléaire et de contrôle des armements ainsi que du processus de non-prolifération. Pour certains une négociation sur un tel traité vient trop tard; nous ne sommes pas de cette opinion, a déclaré M. Trezza. Un tel traité fait en effet partie des acquis sur le désarmement nucléaire auxquels au moins toutes les parties contractantes au TNP ont souscrit. Un tel traité est faisable et ce, sur une base consensuelle, si l'on en juge par le consensus qui semble exister sur le principe même de sa négociation, a déclaré M. Trezza. Nous sommes conscients que certaines délégations ont d'autres priorités, a-t-il poursuivi; nous sommes disposés à traiter avec elles. Le désarmement nucléaire, la prévention d'une course aux armements dans l'espace, les garanties négatives de sécurité et ce que l'on appelle les «nouvelles questions» sont autant de sujets légitimes pour un programme de travail; pour autant, ces questions ne recueillent pas, à ce stade, un consensus total. Aussi, convient-il de veiller à ce que le bien ne devienne pas victime du mieux.

Comment sérieusement prétendre œuvrer au désarmement nucléaire sans commencer par interrompre le flux qui fournit le matériel nécessaire pour produire de telles armes, a poursuivi M. Trezza? Il faut se féliciter que la plupart des États dotés d'armes nucléaires aient déjà instauré des moratoires sur la production des matières fissiles à des fins d'armement, certains d'entre eux ayant pris des mesures complémentaires en démantelant leurs sites de production. En attendant l'entrée en vigueur d'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles à des fins d'armement, l'Italie appelle tous les pays, y compris ceux qui ne sont pas parties au TNP, à déclarer et maintenir des moratoires. Pour autant, des moratoires et déclarations unilatérales, pas plus que de simples «abstentions de facto» à produire de telles matières, ne sauraient constituer un substitut à un instrument juridiquement contraignant.

M. YOSHIKI MINE (Japon) a indiqué que son pays, en prévision du débat sur un traité d'interdiction des matières fissiles qui doit se tenir au sein de la Conférence à la mi-mai, a indiqué que son pays entend organiser une réunion ouverte sur cette question avant le week-end Pâques.

Le Président de la Conférence, l'Ambassadeur Doru-Romulus Costea de Roumanie, qui continuera d'assumer la présidence pendant l'intersession et à la reprise de la session au mois de mai, a souligné qu'il n'est pas inhabituel pour les organes multilatéraux de traverser une crise d'identité telle que celle que traverse actuellement la Conférence. Il a rappelé que, dans les années 1920, Lord Robert Cecil, parlant de la nécessité pour la Société des Nations de parvenir à des résultats, avait déclaré que si la SDN n'entreprenait rien de valable pour le désarmement, l'ensemble de sa réputation s'en trouverait menacée, de sorte qu'elle pourrait perdre la confiance des nations. Près de 80 ans plus tard, on entend des messages similaires adressés à la Conférence non seulement par les délégations mais aussi par des responsables de haut rang venus des capitales. Dans ce contexte, la première partie de la session de 2006 de la Conférence a apporté une fenêtre d'ouverture et un peu de confiance mutuelle à l'engagement commun des membres de cette instance à trouver une solution consensuelle, a souligné M. Costea. Il a exprimé l'espoir que cette tendance positive se poursuivrait pendant le reste de la session de cette année.

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