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LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT MARQUE LE SEPTIÈME ANNIVERSAIRE DE LA CONVENTION SUR L'INTERDICTION DES MINES ANTIPERSONNEL

Compte rendu de séance
Elle entend une déclaration des organisations non gouvernementales à l'occasion de la Journée internationale de la femme et reprend son débat sur le désarmement nucléaire

La Conférence du désarmement a marqué ce matin le septième anniversaire de l'entrée en vigueur, le 1er mars 1999, de la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction, également appelée Convention d'Ottawa. La Conférence a également entendu un message d'organisations non gouvernementales à l'occasion de la journée internationale de la femme et a repris son débat sur le désarmement nucléaire.

La Croatie, qui a accueilli, à la fin de l'an dernier, la sixième Réunion des États parties à la Convention sur les mines antipersonnel, a souligné que cette Convention constitue «une étincelle de multilatéralisme en ces temps difficiles pour le multilatéralisme». Elle se félicite que l'emploi des mines antipersonnel a-t-il été considérablement réduit, leur production ralentie et le commerce de ces armes presque complètement interrompu. En outre, les États parties à la Convention ont enregistré de grands succès en matière de destruction des stocks de mines, respectant les délais fixés par la Convention. La Croatie rappelle par ailleurs que les États qui sont en mesure de le faire doivent, en vertu de la Convention, apporter l'assistance nécessaire aux pays affectés par les mines qui en ont besoin.

Des déclarations sur cette question ont été faites par l'Algérie, l'Australie, l'Autriche, la Malaisie, l'Afrique du Sud, l'Argentine, le Canada, la Suisse, les États-Unis, la Norvège, le Bélarus, l'Égypte et la Colombie.

Reprenant par ailleurs son débat sur le désarmement nucléaire entamé la semaine dernière, la Conférence du désarmement a entendu le Japon, l'Afrique du Sud, la Syrie, Israël, la Nouvelle-Zélande, l'Égypte, la France et l'Algérie. La Syrie et l'Iran ont fait des déclarations en réponse à l'intervention d'Israël.

Une délégation ayant estimé qu'il fallait dissocier la question du désarmement nucléaire de celle de la non-prolifération, cette dernière étant la plus urgente à régler, d'autres ont au contraire souligné que, tant que des États possèderont des armes nucléaires, il y en aura d'autres qui aspireront à en posséder. Certaines délégations se sont inscrites en faux contre l'affirmation que la négociation d'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles devait être traitée de manière prioritaire. Une autre a souligné que tout progrès vers l'élimination des armes nucléaires sera inévitablement entravé par les doctrines nationales qui continuent d'accorder une quelconque valeur militaire aux armes nucléaires.

En début de séance, la Conférence a entendu un message adressé par les organisations non gouvernementales qui ont participé au séminaire annuel organisé à l'occasion de la Journée internationale des femmes, et qui a été lu par le Président de la Conférence du désarmement. Dans leur message, les organisations non gouvernementales regrettent qu'il n'ait pas encore été possible pour une représentante féminine de la société civile de s'adresser directement à la Conférence pour y délivrer ce message à l'occasion de la Journée internationale des femmes. Elles soulignent que la Conférence bénéficierait grandement d'une transparence et d'un engagement accrus vis-à-vis du monde extérieur.

L'Algérie, la Syrie, l'Irlande, la Colombie, la Norvège, l'Égypte, le Kenya et la Suède ont également regretté qu'une représentante des organisations non gouvernementales n'ait pas été autorisée à présenter elle même cette déclaration adressée à la Conférence

La prochaine séance publique de la Conférence du désarmement se tiendra le mardi 14 mars à 10 heures.

Déclaration d'ONG à l'occasion de la Journée internationale de la femme

Le Président de la Conférence , M. PARK IN-KOOK, a donné lecture d'une déclaration d'organisations non gouvernementales qui ont participé au séminaire annuel organisé à l'occasion de la Journée internationale des femmes. Dans cette déclaration, les ONG concernées soulignent qu'elles avaient espéré pouvoir être en mesure, cette année, de lire elles-mêmes cette déclaration à la Conférence. Malheureusement, en dépit de tout le soutien que les ONG ont reçu en ce sens ces dernières semaines, il n'est apparemment pas encore possible qu'une représentante féminine de la société civile s'adresse directement à cette instance en intervenant une fois par an pour y délivrer un message à l'occasion de la Journée internationale des femmes.

Au sein de la Conférence, 13% seulement des délégations sont dirigées par des femmes, poursuit la déclaration des ONG. Elles soulignent en outre que la Conférence bénéficierait grandement d'une transparence et d'un engagement accrus vis-à-vis du monde extérieur. Relevant que l'on n'a jamais entendu personne s'opposer en séance plénière de la Conférence à la proposition de programme de travail des cinq Ambassadeurs, les ONG estiment que le monde voudrait bien savoir qui s'oppose à cette proposition et pourquoi. En outre, on n'a jamais non plus entendu le moindre État s'opposer publiquement à l'idée d'un traité sur les matières fissiles. Les ONG sont disposées à soutenir et à encourager toutes les négociations préliminaires et toutes les négociations sur un tel traité. Les ONG pensent que le désarmement nucléaire est possible et qu'il sera réalisé; elles ont confiance en la Conférence pour surmonter les obstacles sur la voie de la réalisation d'une paix et d'une sécurité internationales véritables.


Déclarations sur la Convention sur l'interdiction des mines antipersonnel

M. GORDAN MARKOTIĆ (Croatie) a rappelé que mercredi dernier marquait le septième anniversaire de l'entrée en vigueur de la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction. Comme la plupart le savent, cette Convention est le fruit d'un partenariat unique entre les gouvernements et la société civile. Il ne fait aucun doute que la Convention sur l'interdiction des mines constitue une étincelle de multilatéralisme en ces temps difficiles pour le multilatéralisme. Les trois quarts des pays du monde, 149, sont parties à la Convention et des signes semblent indiquer que d'ici la prochaine Réunion des États parties, un petit nombre d'autres pays auront rejoint cet instrument, a souligné M. Markotić. Bien que 45 pays n'aient pas encore signé la Convention, il est important de souligner que la Convention a établi une nouvelle norme internationale qui est tout aussi respectée par la majorité des États qui, pour des raisons diverses, n'ont pas encore rejoint cet instrument mais qui considèrent néanmoins son application comme valable. Ainsi, du fait de cette évolution, l'emploi des mines antipersonnel a-t-il été considérablement réduit, leur production ralentie et le commerce de ces armes presque complètement interrompu. En outre, les États parties à la Convention ont enregistré de grands succès en matière de destruction des stocks de mines, respectant strictement en la matière les délais fixés par la Convention.

M. Markotić a rappelé que la sixième Réunion des États parties à la Convention s'est tenue à Zagreb, du 28 novembre au 2 décembre 2005. Il a fait observer que les pays affectés par les mines manquent des ressources nécessaires pour mener à bien toutes les activités nécessaires dans ce domaine, en particulier pour ce qui est du déminage, ce qui reste le principal objectif à court terme de la Convention. Il ne faut pas oublier que, si les pays tels que la Croatie, qui compte des zones minées et où il existe un nombre significatif de victimes des mines, sont en fin de compte responsables d'assurer la réhabilitation et la réintégration des survivants des mines ainsi que le nettoyage des mines présentes sur leur territoire, il n'en demeure pas moins que l'article 6 de la Convention stipule que les États qui sont en mesure de le faire devraient apporter l'assistance nécessaire aux pays affectés par les mines qui en ont besoin.

M. HAMZA KHELIF (Algérie), rappelant par ailleurs que le 1er mars dernier a marqué le septième anniversaire de l'entrée en vigueur de la Convention sur l'interdiction des mines antipersonnel, M. Khelif a souligné que les mines antipersonnel sont une arme qui frappe de manière aveugle et constitue de ce fait une menace permanente pour les civils. Ces armes ne sont plus justifiées si l'on considère le caractère limité de leur effet d'un point de vue stratégique et militaire, a-t-il fait observer. Or, la Convention d'interdiction des mines antipersonnel – fruit d'une coopération internationale et d'un partenariat exemplaire entre les gouvernements et la société civile – constitue précisément l'instrument adéquat pour débarrasser définitivement le monde de ces armes.

En novembre 2005, l'Algérie a achevé le processus de destruction de ses arsenaux de mines antipersonnel conformément à l'article 4 de la Convention, et ce, avant même la date butoir fixée par cet instrument. Le Président algérien a lui-même supervisé ce travail de destruction desdits arsenaux, a précisé M. Khelif. Trente six millions de mines ont jusqu'à présent été détruites à travers le monde, a souligné le représentant. D'après le rapport pour 2005 de la Campagne mondiale contre les mines, 15 000 à 20 000 personnes seraient victimes des mines antipersonnel chaque année, notamment dans des États non parties à la Convention; 69% de ces victimes sont des civils. Il est donc important de parvenir à l'universalité de la Convention, a souligné M. Khelif.

M. CRAIG MACLACHLAN (Australie) a déclaré que son pays est très encouragé que l'adoption d'une norme internationale contre les mines antipersonnel apparaisse de plus en plus comme une évidence avec la réduction de l'utilisation des mines antipersonnel par les États et les acteurs non étatiques. Toutefois, trop d'États ne sont pas parties à la Convention et beaucoup de régions du monde sont encore touchées par les mines antipersonnel. Il a souligné en particulier, à l'occasion de la Journée internationale de la femme, les souffrances des femmes touchées directement ou indirectement par les mines terrestres. En même temps, les femmes ont un rôle indispensable à jouer dans la lutte contre la menace que représentent les mines aux niveaux local, national et international. Pour sa part, l'Australie a renouvelé son engagement dans la campagne contre les mines antipersonnel par une contribution de 75 millions de dollars au cours des cinq prochaines années.

M. MARKUS REITERER (Autriche) a souligné que la Convention sur l'interdiction des mines antipersonnel est un témoignage éloquent de la manière dont la société civile et les États peuvent travailler ensemble dans un esprit de partenariat, de transparence et de coopération. Le remarquable succès enregistré par cette Convention montre que la coopération multilatérale peut apporter des résultats si elle se concentre sur un objectif clair et manifeste un véritable esprit de coopération. Insistant sur les importants progrès enregistrés depuis l'entrée en vigueur de la Convention, M. Reiterer a souligné que non seulement l'emploi des mines antipersonnel a été considérablement réduit, mais en outre leur production s'est réduite et le commerce de ces armes dangereuses a presque complètement cessé. Par ailleurs, le nombre de nouvelles victimes a été une fois de plus réduit de manière significative et les survivants des mines antipersonnel reçoivent désormais des soins et une assistance meilleurs. M. Reiterer a appelé les États qui ne sont pas encore parties à la Convention à rejoindre cet instrument le plus tôt possible.

M. WAN A. YUSRIWAN ABDUL RASHID (Malaisie) a salué les progrès réalisés depuis l'entrée en vigueur de la Convention d'Ottawa et a espéré que cette évolution se poursuivra. Pour sa part, la Malaisie reste attachée à l'objectif d'une interdiction réellement universelle des mines antipersonnel et à l'universalisation de la Convention d'Ottawa. À l'occasion de ce septième anniversaire de la Convention, la Malaisie réitère son appel aux États qui ne sont pas encore parties à la Convention et qui continuent à mettre au point et fabriquer des mines antipersonnel, en particulier dans la région de l'Asie et du Pacifique, de cesser immédiatement de le faire et de devenir parties à la Convention d'Ottawa. Cela contribuerait de manière importante à la paix et la sécurité internationales.

MME GLAUDINE MTSHALI (Afrique du Sud) a rappelé que l'Afrique est l'un des continents qui a le plus souffert des mines antipersonnel. En dépit des nombreux défis associés au problème des mines antipersonnel, l'expérience a prouvé que les nombreuses difficultés ne sont pas insurmontables et que des succès concrets peuvent être enregistrés pour peu que l'on fasse preuve de la volonté politique nécessaire et qu'une planification attentive soit mise en œuvre. L'universalisation de la Convention sur l'interdiction des mines antipersonnel reste une priorité pour l'Afrique du Sud, qui lance un appel aux États qui n'ont pas encore interdit les mines antipersonnel pour qu'ils le fassent. Insistant sur l'importance de maintenir l'élan dont a bénéficié cette Convention, Mme Mtshali a souligné qu'il ne faut pas permettre que les mines antipersonnel deviennent victimes de l'ère de l'information, où une question n'est importante que jusqu'à ce qu'une autre ait pris le relais. L'Afrique du Sud considère la Réunion des États parties de 2006 comme l'occasion de souligner encore davantage l'importance de ce traité et en accélérer la mise en œuvre et l'universalisation.

M. MARCELO VALLE FONROUGE (Argentine) a rappelé que l'Amérique latine est la région du monde qui compte le plus grand nombre d'adhésion à la Convention. L'Argentine appuie les efforts menés par les Nations Unies et les partenaires tels que la Croix-Rouge et les organisations non gouvernementales que sont l'Appel de Genève et la Campagne internationale pour l'interdiction des mines terrestres (ICBL) en vue de faire participer les acteurs non étatiques afin de promouvoir les principes de la Convention. M. Valle Fonrouge a aussi attiré l'attention sur les efforts déployés au niveau régional, en particulier en matière de transparence. Il a souligné que la Convention offre une instrument international permettant de canaliser les différences, que ce soit sur le plan civil ou militaire, et de renforcer la confiance grâce à la coopération en matière de déminage humanitaire.

M. PAUL MEYER (Canada) s'est félicité que la mise en œuvre de la Convention d'Ottawa est en bonne voie. La communauté internationale a consacré plus de 2 milliards de dollars à l'action contre les mines au cours des dix dernières années. Près de 40 millions de mines stockées ont été détruites, de vastes superficies ont été déminées et sont redevenues exploitables et une aide a été apportée à des milliers de survivants et leurs familles. La production des mines antipersonnel a fortement chuté et le commerce officiel de ce type d'armes a pratiquement disparu. Quatre gouvernements seulement ont posé de nouvelles mines ces dernières années. Le plus important à retenir est que le nombre de victimes se situe maintenant entre 15 000 et 20 000 par an, alors qu'il était presque le double lorsque la Convention a vu le jour. Mais nous sommes loin d'avoir terminé notre travail et le Canada réaffirme son engagement à collaborer avec les autres pays, avec ses partenaires multilatéraux et avec ses partenaires de la société civile à la réalisation de cet objectif.

M. JÜRG STREULI (Suisse) a déclaré que le Gouvernement suisse s'engage à maintenir son effort actuel dans les années qui viennent afin d'aider les pays affectés par les mines antipersonnel à prévenir les accidents, à soulager les souffrances et à nettoyer les territoires minés. M. Streuli a déclaré que la septième Conférence des États parties à la Convention d'Ottawa, qui se tiendra à Genève en septembre prochain, sera l'occasion de mesurer les progrès effectués en particulier en ce qui concerne l'universalisation de la Convention, la sensibilisation aux risques causés par les mines, la destruction des stocks, le déminage et l'assistance aux victimes. Ce dernier aspect revêt une importance fondamentale pour l'avenir et reste une priorité pour la Suisse, a souligné M. Streuli, qui a rappelé que la Suisse assume cette année, avec l'Afghanistan, la co-présidence du Comité permanent pour l'assistance aux victimes et la réintégration socioéconomique. Il a aussi rappelé le travail que fournit le Centre international de déminage humanitaire de Genève, qui, avec son Unité d'appui à l'application de la Convention (Implementation Support Unit), fournit une contribution essentielle au développement et à la mise en œuvre de la Convention.

Le représentant suisse a enfin souligné que l'utilisation des mines antipersonnel par les groupes armés non étatiques continue de représenter un énorme défi qu'il est nécessaire d'affronter. La Suisse poursuit la réflexion sur cette problématique et M. Streuli a souligné le rôle important que jouent les organisations non gouvernementales comme l'Appel de Genève et la Campagne internationale pour l'interdiction des mines terrestres (ICBL) pour les convaincre d'y renoncer.

THOMAS CYNKIN (États-Unis), soulignant que son pays a joué un rôle de premier plan dans les efforts de déminage, a rappelé que les États-Unis avaient proposé à la Conférence d'examiner la question de l'interdiction de la vente et de l'exportation des mines persistantes. Cette proposition était perçue par les États-Unis comme étant complémentaire avec la Convention d'Ottawa et non en conflit avec elle. Alors que la Conférence recherche les moyens de mettre au point un programme de travail, les États-Unis demandent aux délégations d'envisager sérieusement d'examiner cette proposition.

M. KJETIL PAULSEN (Norvège) a affirmé le plein engagement de son pays en faveur de la Convention sur les mines et a rappelé les efforts incessants qui ont été faits pour entamer les négociations sur cette Convention au sein de la Conférence du désarmement avaient échoué et la Convention a été négociée avec succès à l'extérieur de cette instance. Ce qui prouve que «lorsqu'on veut, on peut», que ce soit dans le cadre de la Conférence ou ailleurs.

M. IVAN GRINEVICH (Bélarus) a assuré la Conférence de l'engagement de son pays en faveur de l'universalisation de tous les instruments internationaux sur la question des mines, notamment le Protocole II amendé de la Convention sur certaines armes classiques et la Convention d'Ottawa. Cette universalisation et le respect scrupuleux des obligations prévues par ces instruments permettraient d'atteindre l'objectif de mettre fin aux mines antipersonnel. Pour sa part, le Bélarus a prévu de détruire tous ses stocks existants avant le 1er mars 2008. Dans ce cadre, le Bélarus procède depuis le 1er mars dernier au recyclage des mines antipersonnel avec l'aide du Canada et de la Lituanie. En collaboration avec l'OTAN; le Bélarus est en train de recycler un grand nombre de mines. Les mines antipersonnel du modèle PFM-1, le modèle le plus dangereux, seront détruites dans le cadre d'un projet de la Commission européenne.

M. SAMEH ABOUL-ENEIN (Égypte) a déclaré qu'en dépit des progrès réalisés sur le plan humanitaire, l'Égypte souligne que la Convention d'Ottawa doit tenir compte de la particularité de nombreux pays en développement, dont l'Égypte. Le pays compte en effet quelque 22 millions de mines antipersonnel et de débris datant de la deuxième guerre mondiale sur son territoire. À cet égard, l'Égypte demande aux pays qui ont laissé ces armes sur son territoire d'assumer leurs responsabilité et de procéder au déminage du pays. Outre les problèmes qu'elles posent sur le plan humanitaire, la seule présence des mines représente un réel frein au développement. Il a demandé que la Convention tienne dûment compte de tous les aspects de la question dans les divers pays touchés par le problème des mines antipersonnel. Dans ce contexte, il faut veiller à ce que les efforts menés actuellement en vue de l'universalisation de la Convention soient sincères et crédibles.

M. RAFAEL QUINTERO CUBIDES (Colombie) a rappelé que la Colombie détenait le triste privilège d'être le pays le plus touché par les mines antipersonnel de l'hémisphère occidentale, occupant en outre la quatrième place au niveau mondial. La Colombie ne peut qu'envier les pays qui n'ont pas eu à connaître les souffrances causées par les mines antipersonnel, et continuera à les envier tant que l'on ne sera pas parvenu à l'universalisation de la Convention d'Ottawa, que les mines antipersonnel continueront d'être fabriquées et que les acteurs non étatiques continueront à les acquérir avec autant de facilité.


Débat sur le désarmement nucléaire

M. YOSHIKI MINE (Japon) a souligné que depuis la fin de la guerre froide, le stock mondial de matières fissiles à des fins d'armement est resté le même. Bien entendu, on attend des États dotés d'armes nucléaires qui possèdent des matières fissiles à des fins d'armement qu'ils appliquent des contrôles stricts et appropriés; mais ces contrôles se font au niveau national et ne s'accompagnent d'aucune garantie ou obligation internationale. Aussi, un traité d'interdiction des matières fissiles, en fixant le contenu des obligations et en prévoyant des mesures de vérification et de garantie, serait-il de nature à combler, dans une certaine mesure, les lacunes existantes dans les traités actuels.

Afin de faire en sorte que le débat sur les matières fissiles soit aussi fructueux que possible, a précisé M. Mine, le Japon a l'intention de présenter un document de travail sur le sujet, qui s'efforcera de passer en revue les traités et cadres internationaux existants tout en soulignant la signification que revêt aujourd'hui un traité d'interdiction des matières fissiles. Ce document de travail, encore en cours d'élaboration, envisage que le concept de vérification en vertu du futur traité sur l'interdiction des matières fissiles reposerait sur quatre éléments : il conviendrait ainsi de confirmer que le stock de matières fissiles à des fins d'armement nucléaire n'a pas augmenté; de confirmer que les matières nucléaires censées être utilisées à des fins pacifiques ou à des fins militaires conventionnelles n'ont pas été détournées à des fins d'armement nucléaire; de confirmer que les installations de production de matières fissiles à des fins d'armement nucléaire qui sont fermées ou en cessation d'activités avant ou après l'entrée en vigueur du traité le restent par la suite; et de confirmer que les matières fissiles qu'un État a volontairement déclarées en excédent en vertu du désarmement nucléaire ou en vertu d'une révision de sa politique sécuritaire ne reviennent pas être utilisées à des fins d'armement nucléaire.

MME GLAUDINE MTSHALI (Afrique du Sud) a rappelé l'évidence selon laquelle la seule garantie absolue contre l'emploi des armes nucléaires reste leur élimination totale et l'assurance qu'elles ne seront plus jamais fabriquées. L'Afrique du Sud estime que c'est la possession d'armes nucléaires et le maintien de l'option des armes nucléaires par certains États, qui, par définition, créent le véritable danger que de telles armes soient utilisées et qu'elles puissent tomber entre les mains d'acteurs non étatiques. Toute prétention des États dotés d'armes nucléaires à posséder indéfiniment ces armes est incompatible avec les dispositions du Traité de non-prolifération nucléaire, a rappelé Mme Mtshali. Une telle prétention est également incompatible avec l'objectif global du maintien de la paix et de la sécurité internationales.

Mme Mtshali a rappelé que son pays avait abandonné l'option des armes nucléaires et détruit sa capacité de dissuasion nucléaire. La charge de mener à bien le désarmement nucléaire incombe en premier lieu aux États qui possèdent des armes nucléaires, a-t-elle insisté. Tant que des États possèderont des armes nucléaires, il y en aura d'autres qui aspireront à en posséder, a-t-elle souligné. Il est dangereux d'ignorer le lien qui existe entre désarmement nucléaire et non-prolifération nucléaire, a poursuivi Mme Mtshali. Pour l'Afrique du Sud, le Traité de non-prolifération nucléaire reste la pierre angulaire du désarmement nucléaire et de la non-prolifération nucléaire.

M. HUSSEIN ALI (Syrie) a estimé que l'on assistait à une crise de confiance alors que certains États dotés de l'arme nucléaire, non contents de prendre leurs distances avec les engagements qu'ils ont pris, continuent de fabriquer des armes nucléaires et d'en mettre au point de nouvelles. Il faut surmonter cette crise de confiance pour permettre à la Conférence du désarmement de reprendre son travail. S'agissant des discussions autour d'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires ou autres dispositifs explosifs nucléaires, le représentant syrien a souligné que la question qui se pose est de savoir si la détention ou de la production de matières fissiles devrait être interdite pour tous les États. Dans le cas contraire, tous les États devraient avoir le droit de s'en procurer s'ils le souhaitent. Le représentant syrien a précisé que sa question était toute théorique puisque son pays ne dispose pas de matières fissiles et n'a pas de programme d'armes nucléaires. La Syrie estime toutefois que la question de la possession de matières fissiles devrait s'appliquer à tous sur un pied d'égalité. Contrairement à l'ambassadeur des Pays-Bas qui s'est exprimé mardi, la Syrie ne pense pas qu'il y a un rapprochement sur la question d'un traité sur les matières fissiles. Il a demandé sur quels critères se fondaient les délégations qui estiment que la question d'un tel traité est venue à maturation pour commencer des négociations. Il a souligné que la Conférence ne saurait se montrer sélective et adopter une approche «à la carte» dans ce domaine. Il a suggéré que la Conférence crée un comité spécial qui serait chargé d'examiner à la fois la question d'un traité sur les matières fissiles et du désarmement nucléaire.

M. ITZHAK LEVANON (Israël) a souligné qu'en raison des contraintes politiques au Moyen Orient, Israël se voit dans l'obligation d'adapter son approche globale à la situation régionale.
Selon la vision israélienne sur les objectifs à long terme pour la sécurité régionale au Moyen-Orient, adoptée par le Gouvernement en 1992, Israël souhaite œuvrer à ce que les États de la région établissent conjointement une zone mutuellement vérifiable exempte de missiles sol-sol, d'armes chimiques et biologiques et d'armes nucléaires. Sur le plan pratique, Israël estime que les circonstances politiques au Moyen Orient exigent une approche par étapes. La première de ces étapes doit consister en des mesures modestes de renforcement de la confiance. Viennent ensuite l'établissement de relations pacifiques durables fondées sur la réconciliation, le bon voisinage, l'ouverture des frontières et la confiance entre les nations. Lorsque les conditions seront réunies, ces mesures pourraient être suivies de négociations sur des arrangements régionaux en matière de sécurité, accompagnées éventuellement de mesures de limitation des armements classiques et non classiques.

Malheureusement, les appels répétés du Président iranien à rayer Israël de la carte ne contribuent pas à atteindre cet objectif, a souligné M. Levanon. Le représentant a de nouveau rappelé qu'Israël s'associe chaque année au consensus sur les résolutions pour la création d'une zone exempte d'armes nucléaires au Moyen Orient. Mais tant que certains États et les organisations terroristes de la région appellent à la destruction d'Israël, et que la prolifération et la mise au point d'armes de destruction massive se poursuivent en l'absence de tout dialogue sur la sécurité régionale, les appels en faveur d'un débat de fond sur le désarmement ne resteront mal venus. Israël estime que la création d'une zone exempte d'armes nucléaires au Moyen-Orient ne peut se faire que par le biais de négociations directes entre les États de la région. Israël souligne par ailleurs que davantage d'efforts devraient être consacrés à la non-prolifération à l'échelle mondiale et estime qu'il faut repenser le lien entre non-prolifération et désarmement nucléaire. Ces deux questions, de nature différente, devraient être dissociées. L'évolution de la situation ces dernières années s'agissant particulièrement de l'Iran au Moyen Orient, ainsi qu'en Extrême Orient, a bien démontré que la prolifération des techniques de traitement des combustibles pourrait représenter un péril mondial car ces techniques peuvent aisément être détournées vers des objectifs illégaux et militaires. Les États agissant de mauvaise foi devraient être empêchés d'exploiter les failles du régime actuel. M. Levanon a tenu à souligner que le droit de tout pays aux utilisations pacifiques de l'énergie atomique n'est pas remis en question.

M. TIM CAUGHLEY (Nouvelle-Zélande), a déclaré que le désarmement nucléaire avançait beaucoup trop lentement pour sa délégation. Il a souligné que tout progrès vers l'élimination des armes nucléaires sera inévitablement entravé par les doctrines nationales en matière de sécurité qui continuent d'accorder quelconque une valeur militaire aux armes nucléaires. La Nouvelle-Zélande remercie la France pour les éclaircissements qu'elle a fournis à la Conférence sur sa politique en matière de dissuasion et se félicite que d'autres États dotés de l'arme nucléaire contribuent déjà activement à ce débat sur le désarmement nucléaire. Tout en notant que les nombres sont en baisse, M. Caughley s'est demandé combien il fallait de ces armes immensément destructrices et toxiques pour dissuader un ennemi potentiel, sans compter l'importance et le perfectionnement des arsenaux d'armes classiques de ceux qui possèdent des armes nucléaires. La Nouvelle-Zélande souhaiterait en particulier en savoir davantage sur la manière dont les justifications de la dissuasion nucléaire sont intégrées au sein de l'OTAN, au regard de l'immense puissance collective des membres de l'alliance dans le domaine des armes classiques. Il a salué à cet égard les efforts de certains pays qui s'efforcent de remettre en question et réduire le rôle des armes nucléaires dans les doctrines militaires collectives.

Par ailleurs, le représentant néo-zélandais a souligné que le maintien d'arsenaux nucléaires par certains pays et la lenteur des réductions des armements nucléaires ne doivent pas être considérés comme pouvant justifier la prolifération par d'autres pays. La Nouvelle-Zélande ne souhaite pas davantage que les arsenaux nucléaires existants ne soient maintenus qu'elle ne tolérera la mise au point de tels arsenaux par davantage de pays. Il a plaidé en faveur de la transparence dans le domaine du désarmement nucléaire, la déclaration de moratoires sur les essais nucléaires en attendant l'entrée en vigueur du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires, et la création de zones exemptes d'armes nucléaires.

M. JEAN MICHEL DESPAX (France) s'est félicité de l'intérêt porté par les délégations, notamment celle de la Syrie, aux déclarations faites par l'Ambassadeur de la France au sein de la Conférence. Relevant avec satisfaction que plusieurs délégations émanant de tous les groupes régionaux présents à la Conférence ont abordé de manière préliminaire «la question du cut-off» et qu'il s'agit là d'un bon signal, il a rappelé que pour la France «le cut-off est bien la prochaine étape en termes de désarmement nucléaire multilatéral assignée à la Conférence». On peut avoir des visions différentes sur la maturité de tel ou tel sujet pour lancer une négociation; on peut avoir des visions différentes des priorités des uns et des autres. Pour autant, un mandat, un objectif nous a été assigné par la communauté internationale, dès 1995 dans la déclaration sur les principes et objectifs de la Conférence sur la prorogation indéfinie du Traité de non-prolifération nucléaire, repris dans le document final de la Conférence de 2000 et au cœur des débats de substance de la Conférence d'examen du TNP en 2005. En outre, des résolutions sont régulièrement portées au vote de la Première Commission de l'Assemblée générale, a rappelé le représentant de la France.

M. Despax a souligné que les 25 pays de l'Union européenne sont liés par une position commune qu'ils ont adoptée à la veille de la Conférence d'examen du TNP de 2005 et selon laquelle ils se disent favorables au lancement sans conditions préalables de cette négociation dans le cadre de la Conférence du désarmement; cela a une valeur légale pour les membres de l'Union européenne. Pour autant, chaque délégation – européenne ou non européenne – développera au cours de la négociation des positions nationales. À cet égard, trois éléments sont, de l'avis de la France, importants lorsque la négociation viendra à démarrer : la notion de «cut-off» à proprement parler, c'est-à-dire l'interdiction de la production future de matières fissiles à usage militaire explosif; la position traditionnelle de la France sur les stocks existants; la notion de vérifiabilité, que la France interprète comme s'appliquant à une chose «susceptible d'être vérifiée», et au sujet de laquelle la France reste ouverte pour en parler. Il semble à la France qu'il y a un accord au sein de la communauté internationale pour engager une négociation sur le sujet de la production de matières fissiles qui soit une négociation non-discriminatoire et à portée universelle, a affirmé le représentant français.

M. HUSSEIN ALI (Syrie) répondant également à l'intervention du représentant d'Israël, a déclaré que ce pays était responsable des tensions dans la région du Moyen Orient en raison de son occupation de territoires arabes au Liban, en Palestine et en Syrie. L'occupation constitue un état d'agression permanent, un crime en vertu du droit international et est incompatible avec la paix. Dès qu'Israël aura mis fin à son occupation et respectera le droit international, il n'y aura plus de problème pour établir des relations pacifiques. Si Israël était sincère lorsqu'il prétend souhaiter l'établissement d'une zone exempte d'armes nucléaires au Moyen Orient, pourquoi ne devient-il pas partie au Traité de non-prolifération nucléaire, a demandé le représentant syrien? Les installations nucléaires en Israël ne constituent pas seulement une menace militaire, mais représente aussi un grave danger pour la santé des populations de la région.

M. HAMZA KHELIF (Algérie) a souligné que les États dotés de l'arme nucléaire et ceux qui n'en sont pas dotés peuvent s'entendre sur l'importance du désarmement nucléaire. C'est ce dont témoignent les déclarations faites dans le cadre de ce débat par les représentants des États-Unis et de la Fédération de Russie au sujet des réductions auxquelles ils ont procédé dans leurs arsenaux nucléaires, bien que ces efforts restent insuffisants de l'avis de l'Algérie. M. Khelif a déclaré ne pas être sûr qu'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles soit prioritaire par rapport au désarmement nucléaire, mais l'Algérie n'écarte pas totalement la question d'un tel traité. D'autres questions revêtent cependant plus d'importance pour nombre de pays, notamment la question des garanties négatives de sécurité. Il ne revient pas à l'Algérie d'établir les priorités, a souligné M. Khélif, qui a rappelé que quatre questions centrales avaient été arrêtées: un traité d'interdiction de la production de matières fissiles; la prévention de la course aux armements dans espace extra-atmosphérique; le désarmement nucléaire; et les garanties négatives de sécurité. Toutes ces questions sont aussi importantes les unes que les autres.

M. HAMID ESLAMIZAD (Iran), réagissant à la déclaration faite par le représentant d'Israël, a souligné que la politique d'agression et d'occupation d'Israël et les menaces constantes que constituent au Moyen Orient son arsenal nucléaire et ses armes de destruction massive est la raison principale d'insécurité et d'instabilité dans la région. Israël n'étant toujours pas partie au Traité de non-prolifération nucléaire et à d'autres instruments en fait l'État le moins autorisé à parler des droits et obligations ou du respect des obligations d'États qui sont déjà parties à ces instruments, dont l'Iran.

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