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LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT ENTEND PLUSIEURS DÉLÉGATIONS
S’EXPRIMER AU SUJET D’ÉVENTUELLES QUESTIONS ADDITIONNELLES

Compte rendu de séance
Elle observe une minute de silence à la mémoire des victimes du naufrage du ferry égyptien dans la mer rouge

La Conférence du désarmement a entendu ce matin des déclarations de la France, du Nigéria, de l’Allemagne, de l’Irlande, de la Nouvelle-Zélande, de la Norvège et de la Syrie.

En début de séance, elle a observé une minute de silence à la mémoire des victimes de la tragédie du ferry égyptien qui, vendredi dernier, a sombré dans la mer Rouge alors qu’il transportait près de 1400 personnes - dont un millier auraient perdu la vie. Au nom de la Conférence, le Président de cette instance, le Polonais Zdzislaw Rapacki, a présenté ses condoléances et sa sympathie aux proches des victimes et au Gouvernement de l’Égypte. Plusieurs délégations ont également transmis leurs condoléances au peuple et au Gouvernement égyptiens. L’Égypte a remercié tous ceux qui lui ont adressé un message de sympathie suite à cet accident.

Plusieurs délégations ont fait part de leurs points de vue s’agissant de la possibilité de voir la Conférence explorer des questions additionnelles non inscrites à son ordre du jour. L’Allemagne a estimé que cette démarche doit être appréhendée comme un ajout et non comme un substitut au traitement des questions figurant actuellement à l’ordre du jour de la Conférence. Prenant note des propositions avancées par certaines délégations depuis le début de la session de 2006 afin que la Conférence examine de nouveaux sujets additionnels, la Syrie a estimé qu’il aurait fallu faire ces propositions avant l'adoption de l'ordre du jour ; il n'existe pas au sein de la Conférence de consensus pour examiner ces nouvelles questions et nous avons besoin de consulter nos capitales à ce sujet, a indiqué la Syrie. Tout en précisant qu’elle ne chercherait pas à s’opposer à l’examen de toute question susceptible de rassembler le consensus, l’Irlande a pour sa part estimé que l’introduction de nouveaux sujets de discussion au sein de la Conférence - alors que cette instance n’est pas parvenue depuis neuf ans à traiter d’une quelconque question inscrite à son ordre du jour - semble comparable à une démarche qui consisterait à agrandir un édifice dont les fondations menacent de céder.

En réponse à la proposition faite la semaine dernière par l’Australie de voir la Conférence se saisir de la question des systèmes portables de défense antiaérienne, la Nouvelle-Zélande a insisté sur la nécessité de faire en sorte que cette question soit traitée de telle manière qu’elle ne détourne pas la Conférence de ses efforts visant à parvenir à un accord sur un programme de travail. Faisant pour sa part valoir qu’il existe déjà à l'Assemblée générale des Nations Unies un consensus sur cette question, la Norvège a apporté son soutien à la proposition australienne de voir la Conférence se pencher sur le thème du transfert illicite et de l’utilisation non autorisée des systèmes portables de défense antiaérienne.

L’Allemagne a rappelé qu’elle continue d’être favorable à la création d'organes subsidiaires pour les quatre questions essentielles que sont le traité « cut-off » sur les matières fissiles, le désarmement nucléaire, les garanties négatives de sécurité et la prévention d'une course aux armements dans l'espace extra-atmosphérique. L'Allemagne estime que la question du « cut-off » est mûre pour le lancement immédiat des négociations et la conclusion rapide d'un traité d’interdiction de la production de matières fissiles à des fins d'armement. Pour la Nouvelle-Zélande aussi, les sujets qui requièrent l’attention la plus urgente sont ceux qui sont couverts par les quatre questions essentielles, au premier rang desquelles figure celle d’un traité d’interdiction de la production de matières fissiles à des fins d’armement. L’Irlande a, elle aussi, indiqué qu’en 2006, elle accorde une priorité particulière au lancement de négociations sur un traité relatif aux matières fissiles.

La France a indiqué qu’elle déposait aujourd'hui comme document officiel de la Conférence le texte du discours prononcé le 19 janvier dernier à l'Île Longue par le Président de la République française, M. Jacques Chirac. Les principes fondamentaux de la dissuasion nucléaire n'ont pas changé, a assuré la France ; les armes nucléaires françaises ne sont pas des armes de bataille et il ne saurait en aucun cas être question d'utiliser les moyens nucléaires à des fins militaires lors d'un conflit.

Soulignant qu’il appuyait sans réserve l’initiative des six présidents de la session de 2006 de la Conférence de désigner des Amis des Présidents, le Nigéria a estimé que lesdits Amis des Présidents devraient concentrer leurs efforts sur la recherche d’un programme de travail basé sur la proposition des cinq Ambassadeurs.

En fin de séance, le Secrétaire général de la Conférence, M. Sergei Ordzhonikidze, a annoncé que le Secrétaire général de l’ONU avait approuvé la nomination de M. Timothy Caughley au poste de Secrétaire général adjoint de la Conférence ; M. Caughley entrera en fonction dès qu'auront été menées à bien les différentes procédures administratives.

La prochaine séance plénière de la Conférence se tiendra jeudi prochain, 9 février, à 10 heures.


Aperçu des déclarations

M. FRANÇOIS RIVASSEAU (France) a indiqué que sa délégation déposait aujourd'hui comme document officiel de la Conférence le texte du discours prononcé le 19 janvier dernier à l'Île Longue par le Président de la République française, M. Jacques Chirac. Depuis la fin de la guerre froide, la doctrine de dissuasion française a connu plusieurs étapes dans sa formulation sans que ses fondements en soient modifiés, a souligné M. Rivasseau. Le Président de la République française a rappelé que les principes fondamentaux de la dissuasion nucléaire n'ont pas changé, a-t-il insisté. La vocation de la dissuasion française est de garantir les intérêts vitaux de la France face à toute menace, d'où qu'elle vienne et quelle qu'en soit la forme, a rappelé M. Rivasseau. Dans le cadre de ce concept dissuasif, les armes nucléaires françaises ne sont pas des armes de bataille, a-t-il ajouté. "Il ne saurait en aucun cas être question d'utiliser les moyens nucléaires à des fins militaires lors d'un conflit", a expliqué M. Rivasseau. La reconfiguration, c'est-à-dire la modernisation et l'adaptation des moyens de la force de dissuasion aux évolutions du contexte stratégiques sont pleinement compatibles avec les engagements souscrits par la France au titre de l'article VI du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP), a-t-il assuré. Il a notamment rappelé que, depuis 1985, la France a réduit des deux tiers le nombre global de ses vecteurs nucléaires et que, globalement, le coût de la dissuasion a été réduit pour représenter aujourd'hui moins de 10% du budget de la défense, hors pension.

Le Président de la République a rappelé que la France continue à soutenir les efforts internationaux en faveur du désarmement général et complet et, en particulier, en faveur de la négociation d'un traité d'interdiction de la production de matière fissile pour les armes nucléaires, a poursuivi M. Rivasseau. M. Rivasseau a par ailleurs fait valoir les garanties négatives de sécurité juridiquement contraignantes que la France a données aux États non nucléaires qui sont parties au TNP. Cela n'affecte naturellement en rien notre droit, naturel, de légitime défense, tel que rappelé par l'article 51 de la Charte des Nations Unies, a souligné M. Rivasseau. Il a par ailleurs rappelé que la France avait donné des garanties négatives de sécurité juridiquement contraignantes à plus d'une centaine de pays, en ratifiant les protocoles aux traités portant création de zones exemptes d'armes nucléaires (Tlatelolco pour l'Amérique du sud; Pelindaba pour l'Afrique; et Rarotonga pour le Pacifique). Toutes ces garanties restent évidemment intégralement valides, a insisté M. Rivasseau. Rappelant les propos du Président français selon lequel la voie du désarmement est une voie exigeante, il a souligné que la France continue à soutenir les efforts internationaux dans ce domaine ; mais nous ne pourrons évidemment continuer à avancer que si les conditions de notre sécurité globale sont maintenues et si la volonté de progresser est unanimement partagée, a-t-il conclu.

M. JOSEPH AYALOGU (Nigéria) a salué la décision prise conjointement par les six présidents de la session de 2006 de la Conférence de travailler ensemble à la recherche du consensus. Il a rappelé que l’actuel Président de la Conférence avait précisé que les travaux des six présidents devraient se concentrer sur la recherche d’un consensus sur un programme de travail. Il a souligné que son pays appuyait sans réserve l’initiative des six présidents de désigner des Amis des Présidents pour 2006 afin de les aider dans leur entreprise. À cet égard, il a estimé que les Amis des Présidents devraient eux aussi concentrer leurs efforts sur la recherche d’un programme de travail, toutes les délégations ayant indiqué qu’il s’agissait là pour elle d’une priorité. Rappelant que la proposition des cinq Ambassadeurs jouissait du soutien d’une majorité écrasante de délégations mais pas du consensus, M. Ayalogu a suggéré que les Amis des Présidents concentrent leurs efforts sur la recherche d’un programme de travail basé sur la proposition des cinq Ambassadeurs ; ils pourraient essayer d’identifier les difficultés que les délégations qui ne parviennent pas à se joindre au consensus éprouvent à l’égard de la proposition des cinq Ambassadeurs et tenter de reformuler la proposition en tenant compte de ces préoccupations sans créer de nouveaux problèmes. Comme cela a été souligné à maintes reprises, la proposition des cinq Ambassadeurs est évolutive, a insisté M. Ayalogu.

M. BERNHARD BRASACK (Allemagne) a souligné que son pays considère l'ordre du jour de la Conférence, basé sur le décalogue, comme étant approprié pour traiter des questions actuelles en matière de désarmement et de sécurité. Les quatre questions essentielles que sont le traité cut-off d'interdiction de la production de matières fissiles à des fins d'armement, le désarmement nucléaire, les garanties négatives de sécurité et la prévention d'une course aux armements dans l'espace extra-atmosphérique restent pertinentes et essentielles dans l'ordre du jour international, même à la lumière de l'environnement international actuel, qui a changé, a-t-il ajouté, précisant que son pays continue d’être favorable à la création d'organes subsidiaires pour ces quatre questions. L'Allemagne ne pense pas que l'une des quatre questions essentielles serait, par nature, plus importante que les autres; néanmoins, elle estime que la question du "cut-off" est mûre pour le lancement immédiat des négociations et la conclusion rapide d'un traité non discriminatoire, universellement applicable et vérifiable d'interdiction de la production de matières fissiles à des fins d'armement.

Une approche globale prenant en compte les différentes priorités et préoccupations en matière de sécurité constitue la manière la plus réaliste de sortir la Conférence de l'impasse dans laquelle elle se trouve, a affirmé M. Brasack. Nous avons toujours pensé que la proposition des cinq Ambassadeurs répond totalement à ces exigences, a-t-il indiqué. Il a toutefois relevé que si cette proposition est celle qui a le plus rapproché la Conférence du consensus, être près du consensus ne signifie pas avoir atteint le consensus. M. Brasack a par ailleurs rappelé qu’il incombe à la présidence de la Conférence d’explorer la faisabilité d’alternatives éventuelles qui permettraient à cette instance de reprendre ses travaux de fond, ce qui inclut la possibilité d’explorer des questions additionnelles. Pour autant, a souligné M. Brasack, cette démarche doit être appréhendée comme un ajout et non comme un substitut au traitement des questions figurant actuellement à l’ordre du jour de la Conférence ; en outre, cette démarche ne saurait être entreprise que si elle est susceptible d’accroître la base nécessaire au consensus. L’approche multilatérale offre des solutions qui sont généralement perçues comme légitimes, transparentes, impartiales et durables, a rappelé M. Brasack.

MME MARY WHELAN (Irlande) a fait part des priorités de son pays au sein de la Conférence en indiquant que selon l’Irlande, la Conférence devrait commencer les négociations sur un traité relatif aux matières fissiles. Elle a précisé que l’Irlande est en outre favorable à la création d’un organe subsidiaire pour traiter du désarmement nucléaire. D’autre part, il pourrait être judicieux d’engager un processus susceptible, éventuellement, d’aboutir à un accord sur la non-militarisation de l’espace extra-atmosphérique. Étant réaliste, l’Irlande comprend que la Conférence ne puisse pas entamer simultanément des négociations sérieuses sur toute une série de thèmes ; dans ce contexte, en 2006, l’Irlande accorde une priorité particulière au lancement de négociations sur un traité relatif aux matières fissiles, pendant que seraient établis des organes subsidiaires afin d’examiner les autres questions auxquelles le pays accorde la priorité.

Nous serions disposés à examiner la manière d’avancer sur d’autres questions de notre ordre du jour auxquelles nos partenaires accordent de l’importance, a poursuivi Mme Whelan. Comme d’autres, nous continuons de penser que la proposition des cinq Ambassadeurs recèle le potentiel nécessaire pour traiter de l’ensemble des préoccupations présentes dans cette salle, a-t-elle déclaré. L’Irlande ne chercherait pas à s’opposer à l’examen de toute question susceptible de rassembler le consensus, a par ailleurs indiqué Mme Whelan en référence aux propositions faites par certaines délégations qui ont identifié des questions non inscrites à l’ordre du jour de la Conférence et pour lesquelles elles souhaiteraient voir mis en place des mandats de négociation ; néanmoins, l’introduction de nouveaux sujets de discussion au sein de la Conférence - alors que cette instance n’est pas parvenue depuis neuf ans à traiter d’une quelconque question inscrite à son ordre du jour - semble comparable à une démarche qui consisterait à agrandir un édifice dont les fondations menacent de céder. Mme Whelan a par ailleurs réitéré le fort engagement de sa délégation en faveur du renforcement du rôle de la société civile dans les délibérations de la Conférence.

M. TIM CAUGHLEY (Nouvelle-Zélande) a rappelé que le mandat de la Conférence inclut clairement les armes classiques au nombre de ses attributions. Il a également indiqué que son pays est heureux de se pencher, au sein de cette instance ou d’une autre, sur toute question de désarmement considérée par la communauté internationale comme requérant une attention urgente. M. Caughley a par ailleurs rappelé que pour la Nouvelle-Zélande, les sujets qui requièrent l’attention la plus urgente sont ceux qui sont couverts par les quatre questions essentielles, au premier rang desquelles figure celle d’un traité d’interdiction de la production de matières fissiles à des fins d’armement ; si tous les membres de la Conférence ne sont pas d’accord sur l’importance relative qu’il conviendrait d’accorder aux autres questions essentielles, il semble qu’aucune délégation ne remette en question la prééminence de chacune d’entre elles.

La Nouvelle-Zélande est disposée à faire preuve de souplesse quant à la marche à suivre au sein de la Conférence, tant que l’objectif de cette instance restera en prise avec les véritables questions du jour – c’est-à-dire celles qui contribuent à la sécurité de tous. S’il faut se réjouir des initiatives prises en ce début de session pour coordonner l’action des différents présidents de la Conférence pour 2006 et pour établir un calendrier du travail à venir, il faut se garder de croire que ces mesures, à elles seules, restaureront la crédibilité de la Conférence, a souligné M. Caughley. Il a indiqué que son pays n’était pas opposé à ce que soit évaluée l’existence d’éventuelles revendications visant à ce que la Conférence se penche sur tout sujet qui relève incontestablement du désarmement, comme par exemple l’importante question des systèmes portables de défense antiaérienne ; mais, comme l’a souligné lui-même l’Ambassadeur de l’Australie en avançant ce sujet précis, il faudrait que la question soit traitée de telle manière qu’elle ne détourne pas la Conférence de ses efforts visant à parvenir à un accord sur un programme de travail.

M. KJETIL PAULSEN (Norvège) a apporté son soutien à la proposition faite la semaine dernière par l’Australie afin que la Conférence se penche sur la question du transfert illicite et de l’utilisation non autorisée des systèmes portables de défense antiaérienne, afin de développer des mesures pour combattre ces pratiques. Ces systèmes d’armement sont hautement attractifs pour les terroristes, a-t-il souligné. Ils pourraient faire l’objet de restrictions internationales concertées. Il existe déjà à l'Assemblée générale des Nations Unies un consensus sur cette question, ce qui fournit à la Conférence l’occasion de se pencher sur le sujet et de développer des mesures de non-prolifération. Ce consensus devrait nous encourager à ne pas tenir les systèmes portables de défense antiaérienne otages des autres questions de l’ordre du jour de la Conférence, a insisté M. Paulsen.

M. HUSSEIN ALI (Syrie) s'est réjoui que la Conférence soit parvenue cette année à adopter dès l'ouverture de sa session son ordre du jour. Depuis, des délégations ont proposé que soient examinés de nouveaux sujets additionnels, a-t-il rappelé; mais il aurait fallu faire ces propositions avant l'adoption de l'ordre du jour, a-t-il affirmé. Il n'existe pas au sein de la Conférence de consensus pour examiner ces nouveaux sujets, d'une façon ou d'une autre; nous avons en effet besoin, avant tout, de consulter nos capitales à ce sujet, a indiqué M. Ali.

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