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LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT ENTEND DES DÉCLARATIONS SUR LA SITUATION ACTUELLE DANS LE DOMAINE DU DÉSARMEMENT

Compte rendu de séance

La Conférence du désarmement, qui a entamé cette semaine les travaux de sa session de 2006, a entendu ce matin une déclaration de l'Algérie sur les difficultés auxquelles est confrontée actuellement la communauté internationale dans le domaine de la limitation des armements et du désarmement. Des interventions concernant les travaux de la Conférence ont en outre été faites par les Pays-Bas, le Japon, la Norvège, la France, l'Allemagne et la Chine, ainsi que par M. Sergei Ordzhonikidze, Secrétaire général adjoint des Nations Unies, Secrétaire général de la Conférence du désarmement et Directeur général de l'Office des Nations Unies à Genève.

L'Algérie a déploré que les mécanismes multilatéraux se voient contraints à l'immobilisme alors que le contexte sécuritaire est de plus en plus difficile et incertain, comme en témoigne notamment l'annonce récente par un État nucléaire d'une option de recours à l'utilisation des armes nucléaires, même contre des États non nucléaires, fragilisant davantage la paix et la sécurité internationales, a déclaré l'Algérie. Les États non nucléaires ont renoncé à l'option nucléaire à des fins militaires et il est tout à fait naturel qu'ils réclament, en contrepartie, des garanties de sécurité négatives, les mettant à l'abri de l'utilisation ou de la menace d'utilisation de l'arme nucléaire, dans le cadre d'un instrument international non discriminatoire juridiquement contraignant, a-t-elle souligné.

L'Allemagne a pour sa part souligné que les questions de l'ordre du jour de la Conférence relatives au désarmement nucléaire, aux garanties négatives de sécurité, à un traité d'interdiction de la production de matières fissiles à des fins d'armement (FMCT) et à la prévention d'une course aux armements dans l'espace extra-atmosphérique restent essentielles, compte tenu notamment de l'évolution actuelle de l'environnement international.

Des déclarations sur l'organisation des travaux ont en outre été faites par le Japon et la Chine. Ce pays a notamment souligné que le programme de travail ne devrait pas refléter les désirs d'une minorité d'États, mais bien la volonté commune de tous les États Membres et de l'ensemble de la société internationale.

Suite à une intervention des Pays-Bas sur le rôle de la Conférence et l'appui du Secrétariat, M. Ordzhonikidze a également pris la parole sur la situation difficile dans laquelle se trouve actuellement la Conférence et le soutien apporté à ses travaux par le Secrétariat des Nations Unies. À cet égard, le Secrétaire de la Conférence a notamment indiqué que le budget des Nations Unies récemment adopté allait faire peser un certain nombre de contraintes et de restrictions nouvelles sur
la capacité des services de conférence à assurer ces services comme ils l'ont fait par le passé. Les Pays-Bas, la Norvège et la France sont également intervenus sur ces questions.

Rappelant qu'elle conduit depuis plusieurs années avec la Suisse une réflexion sur la question des infrastructures civiles critiques, la France a annoncé que, souhaitant pouvoir consulter les délégations sur cette thématique de manière totalement informelle, les deux pays organiseront une réunion sur cette question mercredi prochain, dans l'après-midi.

En fin de séance, la Conférence a accepté les demandes de participation à ses travaux présentées par l'Azerbaïdjan, l'ex-République yougoslave de Macédoine et la République de Moldova.


La prochaine séance plénière de la Conférence se tiendra mardi prochain, 31 janvier, à 10 heures. Étant donné qu'il s'agira de la millième séance de cette instance, le Président de la Conférence a annoncé qu'il ferait une déclaration à cette occasion.


Aperçu des déclarations

M. HAMZA KHELIF (Algérie) s'est félicité de l'adoption rapide de l'ordre du jour de la Conférence, mardi dernier, et a souhaité que cette fois-ci, la Conférence parvienne à dégager le consensus requis sur le programme de travail. Cette session de 2006 intervient après une année dont le moins que l'on puisse dire est qu'elle fut stérile dans le domaine du désarmement et de la non-prolifération, en particulier nucléaires, a-t-il rappelé. La septième Conférence d'examen du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP), qui a eu lieu en mai 2005, s'est soldée par un échec, a poursuivi M. Khelif. «Pire, le diagnostic même de cet échec a fait l'objet d'interprétations tendancieuses visant à imputer cet échec non pas à la réalité du refus d'un désarmement nucléaire par certains États nucléaires, mais à la logique même d'une démarche tripartite interactive: le désarmement nucléaire, la non-prolifération et l'utilisation pacifique de l'énergie nucléaire, sous-tendant le Traité lui-même», a déclaré le représentant algérien. Il est fort regrettable que les mécanismes multilatéraux se voient contraints à l'immobilisme alors que le contexte sécuritaire est de plus en plus difficile et incertain, a-t-il ajouté. En témoignent les risques de prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs, les quantités d'armes nucléaires et de matières fissiles très élevées, dépassant tout besoin de dissuasion, le développement de nouveaux types d'armes nucléaires, l'intégration de l'espace extra-atmosphérique dans les politiques et les stratégies de défense, l'allocation de budgets colossaux au secteur de la défense, le phénomène terroriste et le risque d'accès de ces groupes aux armes de destruction massive. «Par ailleurs, l'annonce récente d'un État nucléaire d'une option de recours à l'utilisation des armes nucléaires, même contre des États non nucléaires, fragilise davantage la paix et la sécurité internationales», a déclaré M. Khelif.

Le multilatéralisme, basé sur les principes de la Charte de l'ONU et du droit international – notamment la préséance de la préservation de la paix sur les simples préoccupations sécuritaires, les principes de la souveraineté des États, l'intégrité de leur territoire et la non-ingérence – est plus que jamais nécessaire, dans un contexte international trouble, a poursuivi le représentant algérien. La première menace à laquelle nous devons nous mesurer est bien entendu l'arme nucléaire, a-t-il déclaré. Tant que cette arme existe, le risque d'affrontement nucléaire ou son utilisation accidentelle ne sont pas à écarter. Par ailleurs, l'utilisation ou la menace de l'utilisation de ces armes contre les États ayant renoncé volontairement à l'option létale de l'atome est, de notre point de vue, injustifié, a indiqué M. Khelif. Il a demandé aux États nucléaires d'assumer leur responsabilité et de donner effet aux obligations et aux engagements auxquels ils ont pourtant souscrits, notamment les 13 mesures pratiques adoptées par consensus lors de la sixième Conférence d'examen du TNP en 2000, en vue de créer un climat de détente favorable à la promotion de la paix et de la sécurité internationales. Le statut d'État nucléaire n'a été reconnu aux cinq États nucléaires par le TNP que dans la perspective du désarmement nucléaire, a souligné M. Khelif. Il a précisé que son pays soutenait les mesures susceptibles de renforcer et de consolider le régime de non-prolifération. «Il nous faut d'urgence un traité multilatéral juridiquement contraignant et vérifiable interdisant la production des matières fissiles pour la fabrication d'armes nucléaires et autres explosifs nucléaires», a déclaré le représentant algérien. Les États non nucléaires ont renoncé à l'option nucléaire à des fins militaires et il est tout à fait naturel qu'ils réclament, en contrepartie, des garanties de sécurité négatives, les mettant à l'abri de l'utilisation ou de la menace d'utilisation de l'arme nucléaire, dans le cadre d'un instrument international non discriminatoire juridiquement contraignant, a-t-il fait observer.

Rappelant qu'Israël est le seul pays du Moyen-Orient qui demeure en dehors du TNP et que ce pays refuse de soumettre ses installations nucléaires au régime de vérification de l'AIEA, M. Khelif a exhorté la communauté internationale à déployer les efforts nécessaires en direction de ce pays afin que le Moyen-Orient puisse être une zone exempte d'armes nucléaires. «Nous sommes toujours d'avis que l'initiative des cinq Ambassadeurs continue à constituer une base objective et réaliste pour un programme de travail complet et équilibré», a par ailleurs déclaré M. Khelif. Il a en outre indiqué que l'Algérie avait parachevé, en novembre dernier, et avant même l'arrivée à terme des délais impartis par la Convention sur l'interdiction des mines antipersonnel, la destruction de son stock de mines antipersonnel, conformément aux dispositions de cet instrument.

M. JOHANNES LANDMAN (Pays-Bas) a indiqué avoir lu avec un vif intérêt le message adressé par le Secrétaire général des Nations Unies à la Conférence à l'occasion de la séance d'ouverture de la session de 2006 mardi dernier. Dans ce message, le Secrétaire général des Nations Unies invitait notamment les membres de la Conférence à faire intervenir leur ministre des affaires étrangères à la Conférence, a rappelé M. Landman. Mais quelle est la dernière fois que le Secrétaire général lui-même est-il venu prendre la parole devant la Conférence, a-t-il demandé. Pour sa part, il lui paraît tout à fait exclu de suggérer à son ministre de s'adresser à la Conférence dans les circonstances actuelles. Il a en outre noté que le Secrétaire général de la Conférence était lui aussi absent de cette séance inaugurale, sans qu'une explication soit fournie quant à cette absence. «La Conférence n'est pas un club de bridge», a poursuivi M. Landman. Autrefois, c'était un des organes centraux de la paix dans le monde et nous voulons retrouver cette place, a-t-il affirmé. M. Landman a par ailleurs rappelé que le poste vacant de Secrétaire général adjoint de la Conférence n'a pas encore été pourvu. Il a souhaité savoir quand la Conférence pouvait espérer disposer d'un nouveau Secrétaire général adjoint.

M. YOSHIKI MINE (Japon) a affirmé qu'étant donné que la session de la Conférence s'étend sur une année, il semblerait que l'établissement, bien à l'avance, d'un calendrier de travail pour l'ensemble de l'année soit une exigence minimale. Dans l'objectif de tenir des discussions de fond sur certaines questions, chaque membre a besoin de temps pour se préparer, consulter sa capitale et rédiger des projets de documents de travail, a-t-il souligné. Il faut que nous sachions quand telle ou telle question sera discutée et de quelle manière elle le sera, a-t-il insisté. Un calendrier spécifiant ces points est essentiel, a poursuivi M. Mine. Aussi, s'est-il félicité de l'intention de l'actuel Président de la Conférence d'annoncer le calendrier de la Conférence pour cette année durant sa présidence ; il serait encore plus appréciable que cela soit fait le plus tôt possible, a-t-il ajouté.

M. KJETIL PAULSEN (Norvège) a déclaré, s'agissant du rôle du Secrétaire général des Nations Unies à l'égard de la Conférence, a précisé que sa délégation se plaçait la question sous un angle quelque peu différent de celui adopté par les Pays-Bas. Il a en effet rappelé que la Conférence du désarmement n'est pas un organe subsidiaire de l'Assemblée générale, pas plus que des Nations Unies. Elle ne fait pas partie du système des Nations Unies de quelque façon que ce soit, a-t-il insisté. Elle est toutefois financée par les Nations Unies. Or, ses ressources financières ont été gaspillées pendant un certain nombre d'années; mais c'est là la faute des gouvernements et non pas des Nations Unies ou du Secrétaire général, a souligné le représentant norvégien. Plutôt que de déplorer l'absence du Secrétaire général mardi dernier, il lui a souhaité la bienvenue à ses travaux dès qu'elle aura proposé des négociations de fond sur la limitation des armements, justifiant ainsi la part du budget ordinaire ponctionnée sur les Nations Unies qui lui est allouée, a conclu M. Paulsen.

M. FRANÇOIS RIVASSEAU (France) a jugé particulièrement lourd le fardeau qui repose sur les épaules du Président de la Conférence. Depuis quelques mois, des attentes se sont exprimées concernant l'activité accrue qui est nécessaire ici, en 2006. Aussi, a-t-il félicité le Président d'assumer cette tâche difficile. L'approche coordonnée des six présidents de la Conférence pour assurer un calendrier d'activités de la Conférence pour l'année à venir est un élément positif et nouveau, a poursuivi M. Rivasseau. La France croit que si l'action des six présidents est coordonnée, cela peut constituer une chance de progrès pour cette instance. Depuis plusieurs années, la France conduit avec la Suisse une réflexion sur la question des infrastructures civiles critiques, a par ailleurs rappelé M. Rivasseau. Souhaitant pouvoir consulter les délégations sur cette thématique de manière totalement informelle, les deux pays organiseront une réunion mercredi prochain, à 15h30, au Palais des Nations, a indiqué le représentant français.

M. BERNHARD BARSACK (Allemagne) a estimé que l'ordre du jour adopté mardi dernier par la Conférence reste adapté pour traiter des questions de désarmement et de sécurité. Les questions relatives au désarmement nucléaire, aux garanties négatives de sécurité, à un traité d'interdiction de la production de matières fissiles à des fins d'armement et à la prévention d'une course aux armements dans l'espace extra-atmosphérique restent essentielles, compte tenu notamment de l'évolution actuelle de l'environnement international. L'Allemagne appuie l'intention du Président actuel et des prochains présidents de la Conférence de coordonner leurs travaux afin de permettre une cohérence et une continuité de l'action de la Conférence, a précisé le représentant allemand.

M. HAMZA KHELIF (Algérie) s'est enquis de la nature exacte de la réunion que la France se propose d'organiser mercredi prochain avec le concours de la Suisse. Il a en outre rappelé que les pays du Groupe des 21 se réunissent tous les mercredis matin à 10 heures.

MME DENG HONGMEI (Chine) a rappelé que le programme de travail de la Conférence est à l'examen depuis plusieurs années. Ce début de session de 2006 doit nous amener à redoubler d'efforts pour parvenir à un consensus sur ce programme de travail. De l'avis de la Chine, le programme de travail ne devrait pas refléter les désirs d'une minorité d'États, mais bien la volonté commune de tous les États Membres et de l'ensemble de la société internationale. La seule manière de sortir la Conférence de la situation difficile dans laquelle elle se trouve actuellement consiste à tenir compte des préoccupations de toutes les parties en arrêtant un programme de travail équilibré et complet. La Chine continue de soutenir l'idée de parvenir à un programme de travail en se fondant sur la proposition dite des cinq Ambassadeurs. La Chine, en outre, est favorable à la négociation d'un instrument juridique visant à prévenir la militarisation et la course aux armements dans l'espace extra-atmosphérique. La représentante de la Chine a indiqué que son pays n'était pas en mesure d'accepter la proposition de programme de travail présentée par l'ancien Président l'Ambassadeur du Pérou, dans laquelle le mandat du comité spécial au titre de la prévention d'une course aux armements dans l'espace extra-atmosphérique sortait affaiblie.



M. FRANÇOIS RIVASSEAU (France) a indiqué que la France, ayant été informée de consultations présidentielles mercredi à 15h30, était disposée, après avoir consulté la délégation suisse, à reconsidérer quelque peu l'horaire de la réunion précédemment annoncée pour ce jour-là et à la retarder dans le courant de l'après-midi. Pour ce qui est de la nature de cette rencontre, il a précisé qu'il s'agirait d'une réunion d'information et de consultation informelle. En aucun cas il ne s'agira d'une activité officielle de la Conférence, a-t-il insisté.

M. SERGEI ORDZHONIKIDZE, Secrétaire général adjoint des Nations Unies, Secrétaire général de la Conférence du désarmement et Directeur général de l'Office des Nations Unies à Genève, a répondu aux questions soulevées ce matin par le représentant néerlandais en assurant que le Secrétaire général des Nations Unies est, comme lui, convaincu que la Conférence aurait pu être un outil efficace pour la limitation stratégique des armements et le désarmement, permettant au monde d'économiser des milliards de dollars dont l'éducation, la santé et l'environnement, par exemple, ont grandement besoin. Mais en raison des positions des États Membres, cette Conférence n'enregistre pas de résultats, a-t-il souligné. On ne peut guère demander au Secrétaire général des Nations Unies de venir prendre la parole devant une instance qui ne produit rien d'autre que des débats de procédure, a fait remarquer M. Ordzhonikidze. «Vous n'êtes plus un organe hautement politique; il faut que vous le sachiez, que vous en preniez conscience, parce que vous n'adoptez pas de décision politique», a-t-il insisté.

Précisant qu'il n'avait pu être présent à l'ouverture de la session pour des raisons de santé, le Secrétaire général de la Conférence du désarmement a souligné que, même s'il avait lu le message du Secrétaire général mardi dernier, que serait-il arrivé ? S'agissant de la question du poste de Secrétaire général adjoint de la Conférence, le Département des affaires du désarmement n'a pas pris une décision, mais cette décision devrait bientôt intervenir, a indiqué M. Ordzhonikidze.

M. LANDMAN (Pays-Bas) a souhaité à M. Ordzhonikidze la meilleure santé possible. Il a par ailleurs souligné que la performance de la Conférence est aussi liée à la performance d'un secrétariat efficace et compétent, ce qui relève de la responsabilité de son Secrétaire général . Aussi, M. Landman s'est-il dit certain que le Secrétaire de la Conférence transmettrait à qui de droit la demande urgente de disposer d'un très bon Secrétaire général adjoint de la Conférence et Directeur des affaires de désarmement à Genève.

M. RIVASSEAU (France) a affirmé ne pas être certain que la discussion que vient d'avoir la Conférence ait été très conclusive. Il a souligné que la France a un profond respect pour la devise des Pays-Bas qui affirme que «point n'est besoin d'espérer pour entreprendre ni de réussir pour persévérer». C'est dans cet esprit que la délégation française n'exclut pas de demander une intervention ministérielle cette année, en fonction des développements qui prendront place, a-t-il indiqué. M. Rivasseau a par ailleurs rappelé qu'il est de coutume que le nom du Secrétaire général adjoint soit soumis à l'approbation des groupes au sein de la Conférence. Il s'est dit certain qu'ici encore, les procédures seront respectées.

M. ORDZHONIKIDZE, Secrétaire général adjoint des Nations Unies, Secrétaire général de la Conférence du désarmement et Directeur général de l'Office des Nations Unies à Genève, a souligné que le Secrétariat actuel de la Conférence faisaient du bon travail. Mais le problème vient d'ailleurs; le problème, c'est que la Conférence n'a pas de bonnes performances, a insisté M. Ordzhonikidze.


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