Fil d'Ariane
LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE SE PENCHE SUR LA QUESTION DE LA RÉFORME DES ORGANES CONVENTIONNELS
Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a procédé, cet après-midi, à un échange de vues sur la question de la réforme s'agissant des organes conventionnels créés en vertu d'instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme.
M. Linos Alexander Sicilianos a ouvert le débat par une présentation des objectifs et des enjeux de la réforme, rappelant en particulier que l'une des propositions faites par Mme Louise Arbour, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, pour donner suite à la volonté du Secrétaire général de renforcer le système conventionnel de protection des droits de l'homme, consiste à substituer un organe unique aux différents comités chargés de surveiller l'application des instruments internationaux des Nations Unies dans le domaine des droits de l'homme.
L'expert a précisé que quatre objectifs principaux sous-tendent cette proposition de réforme: accroître la visibilité du système actuel; le renforcer; l'unifier; et lui donner une plus grande cohérence. On ne peut qu'appuyer de tels arguments, a estimé M. Sicilianos. Toutefois, il convient de se pencher sur les difficultés d'une telle entreprise et même, sur certains arguments qui militent en sens contraire.
S'agissant des difficultés liées à la réforme, M. Sicilianos a souligné que la création d'un organe unique entraînerait la présentation d'un rapport unique, ce qui fait naître le risque de la marginalisation de certains instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, y compris de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. D'un point de vue technique, il semblerait que la création de cet organe unique nécessite l'adoption d'une décision par l'ensemble des États parties à chaque instrument, à la majorité des deux tiers, d'un protocole d'amendement. Ce protocole devrait laisser intactes les dispositions quand au fond des différents instruments et ne viserait que les aspects institutionnels du nouvel édifice. Or ce processus pourrait durer plusieurs années et fournir l'occasion à certains États de différer la présentation de leurs rapports.
M. Sicilianos a ensuite évoqué différentes alternatives à la mise en place d'un organe unique en tant que moyen de renforcer le système international de protection des droits de l'homme. Il a ainsi déclaré que l'on pourrait, par exemple, envisager la création de «chambres» au sein des différents comités, qui permettraient de palier le retard accumulé dans la présentation des rapports. Le Comité des droits de l'enfant a déjà adopté cette solution, a-t-il fait remarquer. On pourrait également renforcer l'équipe des communications individuelles au niveau du Secrétariat. M. Sicilianos a par ailleurs déclaré qu'une autre piste consisterait à créer un organe unique chargé de traiter des communications individuelles reçues par les quatre comités qui examinent des communications. Il a par ailleurs déclaré qu'il conviendra de clarifier la relation entre les organes conventionnels et le futur Conseil des Nations Unies pour les droits de l'homme afin d'éviter le double emploi. À cette fin, le futur Conseil devrait fonder l'évaluation de la situation des droits de l'homme dans les pays sur les observations finales des organes conventionnels. Ces observations finales devraient constituer le point de départ du travail du Conseil, a estimé l'expert. Ainsi, l'on pourrait garantir la complémentarité entre le nouveau Conseil pour les droits de l'homme et les organes conventionnels.
Un membre du Comité a déclaré que la réforme proposée par la Haut-Commissaire soulevait des interrogations multiples. En particulier, de par leur nature même, la question de la surveillance des droits de l'homme représente une brèche dans le principe de la souveraineté de l'État. On est en droit de se demander de quel côté de la balance la réforme penchera: du côté de la souveraineté des États ou du côté des droits de l'homme. Il importe de garder à l'esprit la nécessité de préserver tous les acquis en matière de droits de l'homme avant de se lancer dans la réforme. Cela devrait être le principal souci des membres du Comité, a-t-il été souligné.
Un expert a affirmé que, contrairement à ce que l'on pourrait penser, les organes conventionnels ont une véritable incidence sur les États, particulièrement sur le long terme. Toutefois, il est clair que les observations finales et les recommandations souffrent d'un manque de visibilité.
Un expert a déclaré que le système de surveillance par les organes conventionnels avait atteint un degré élevé de complexité et que des améliorations étaient sans doute nécessaires. Il a toutefois rappelé que des efforts importants avaient d'ores et déjà permis d'améliorer considérablement les méthodes de travail. Faut-il aller plus loin et fusionner les différents organes en un organe unique ? Si oui, la réforme aura-t-elle pour objet les seuls organes ou les traités eux-mêmes ? Cette question est importante car elle pose la question de la ratification par les États membres pour le cas où l'on toucherait aux instruments, un processus lent et compliqué.
La création d'un organe unique permettra-t-elle de résoudre la question du retard accumulé par certains États dans la présentation de rapports, a demandé un expert ? Il a appelé de ses vœux une meilleure coordination du système de protection des droits de l'homme, exprimant des doutes sur l'aptitude d'un organe unifié à remédier aux problèmes qui se posent.
À sa prochaine séance publique, demain à 10 heures, le Comité tiendra un débat sur la question du multiculturalisme. Il poursuivra ensuite l'adoption de son projet de recommandation générale sur l'administration de la justice.
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