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LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS TIENT UNE SÉANCE D'AUDITION DES ONG

Compte rendu de séance

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a tenu, cet après-midi, une séance publique au cours de laquelle il a procédé à l'audition de plus d'une quinzaine de représentants d'organisations non gouvernementales. Ces derniers se sont exprimés au sujet des situations qui prévalent, du point de vue des droits économiques, sociaux et culturels, dans les quatre pays dont les rapports seront examinés au cours de la session, à savoir la Zambie, la Chine, la Serbie-et-Monténégro et la Norvège.

En ce qui concerne la Zambie, plusieurs intervenants ont déploré que les droits économiques, sociaux et culturels ne soient pas intégrés dans la Constitution du pays et ont attiré l'attention sur la situation particulière des femmes du fait des dispositions du droit coutumier en matière de mariage et d'héritage. À cet égard, l'attention a été attirée sur la situation particulière des ménages touchés par le VIH/sida.

S'agissant de la Chine, l'attention a notamment été attirée sur les questions intéressant, entre autres, le droit au logement; la situation des minorités et des personnes qui viennent de Chine continentale pour vivre à Hong-Kong; le droit syndical; ou encore la situation des Tibétains.

En ce qui concerne la Serbie-et-Monténégro, un intervenant a notamment déploré que le principe de non-discrimination ne soit pas appliqué dans la pratique, s'agissant des femmes, des personnes handicapées et des réfugiés.

S'agissant enfin de la Norvège, l'accent a été mis sur la nécessité pour ce pays, dans l'aide qu'il apporte au développement à travers le monde, de ne pas approuver des documents de réduction de la pauvreté qui n'offriraient pas suffisamment de garanties s'agissant du respect du droit à l'alimentation.

Les représentants des organisations non gouvernementales suivantes sont intervenus: Jesuit Centre for Theological Reflection; Women in law international South Africa; Justice for Widows and Orphans Project; COHRE; FIAN International; Habitat International Coalition-Housing and Land Rights Network; Society for Community Organization; Hong-Kong Human Rights Commission; Hong-Kong Human Rights Monitor; Tibet Support Group Netherlands; Commission pour l'égalité des chances de Hong-Kong; Confération internationale des syndicats libres; Human Rights in China; Dui Hua Foundation; Organisation mondiale contre la torture; FIAN-Norvège.

Afin d'approfondir un certain nombre de questions évoquées dans les interventions des ONG susmentionnées, des dialogues interactifs se sont noués entre les experts du Comité et les représentants desdites ONG.

Le Comité entamera demain matin, à 10H30, l'examen du rapport initial de la Zambie (E/1990/5/Add.60). Il doit en outre procéder à l'élection de son bureau.


Aperçu des déclarations des ONG

Concernant la Zambie

Le représentant du Jesuit Centre for Theological Reflection a indiqué que le rapport présenté par son pays concernant la situation en Zambie traite plus particulièrement des questions relatives à la santé, à l'éducation, au logement, à l'alimentation, à la terre et aux femmes. La Zambie est un pays riche en ressources naturelles et qui vit en paix, a-t-il souligné. Néanmoins, la plupart des citoyens du pays sont pauvres. Le représentant a par ailleurs souligné que le Gouvernement zambien doit prélever sur son budget plus de 100 millions de dollars pour le remboursement de la dette extérieure, de sorte que le pays n'est pas en mesure de s'acquitter pleinement de ses obligations en matière de droits économiques, sociaux et culturels. En outre, ces droits n'ont pas été intégrés dans la Constitution zambienne. Il faudrait donc que la dette ainsi que les restrictions inéquitables imposées par les institutions financières internationales soient annulées, a affirmé le représentant.

La représentante de Women in law international South Africa a déploré le manque d'engagement et de volonté manifesté par les autorités zambiennes s'agissant des droits de l'homme. Elle a plus particulièrement fait part de sa préoccupation face aux problèmes d'accès aux droits économiques et sociaux que rencontrent les personnes touchées par le VIH/sida.

La représentante de Justice for Widows and Orphans Project a rappelé que près de 20% de la population zambienne sont infectés par le VIH/sida. Elle a fait part de sa préoccupation face au fait que la Constitution autorise une discrimination, dans le cadre du droit coutumier, en matière de mariage et de succession, ce qui ne manque pas d'affecter les veuves et les orphelins. Les droits économiques, sociaux et culturels ne sont pas garantis par la Constitution, a-t-elle déploré. La représentante a cité le chiffre de 80% de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté en Zambie. Elle a en outre attiré l'attention sur les cérémonies traditionnelles et autres rites de passage qui affectent la santé des enfants. Les principaux bénéficiaires des programmes publics d'assistance sont les hommes et non les femmes, a-t-elle en outre fait observer.

La représentante de COHRE a fait part d'un rapport parallèle publié par son organisation concernant le droit à l'héritage pour les femmes en Zambie. Le droit à l'héritage est étroitement lié au droit au logement, a-t-elle souligné. En Zambie, les femmes sont souvent privées du droit au logement, la question étant devenue particulièrement aiguë du fait de la prévalence du VIH/sida dans le pays. Les tribunaux locaux n'assurent pas l'application du droit statutaire, a par ailleurs déploré la représentante. En outre, du fait de certaines pratiques traditionnelles, les femmes pensent souvent que si elles réclament leur part d'héritage, elles auront des problèmes. Il faut que le principe de non-discrimination s'applique à toutes les questions, y compris à celles relatives au statut personnel.

La représentante de FIAN International a attiré l'attention du Comité sur un projet pilote mis en place en Zambie dans le cadre d'un programme de coopération entre l'Allemagne et ce pays. Ce projet pilote touche au logement et cible les groupes les plus vulnérables, en particulier les ménages touchés par le VIH/sida. Chaque ménage bénéficiant de ce projet reçoit chaque mois 6 dollars en liquide, ce qui lui permet de passer du stade de pauvreté critique à celui de pauvreté modérée. La représentante a par ailleurs déploré le manque de progrès enregistrés jusqu'à présent en matière de réalisation des Objectifs du Millénaire.

Au cours du bref échange de vues qui a suivi ces déclarations, certains membres du Comité ont souhaité en savoir davantage sur le statut du droit coutumier en Zambie. Il faudrait peut-être faire en sorte que les tribunaux de droit coutumier soient régis par des personnes qui sont sensibilisées aux droits humains, leur a-t-il été répondu; en effet, le droit coutumier est fréquemment discriminatoire. La Zambie compte plus de 600 000 enfants orphelins du sida, a-t-il par ailleurs été souligné.

Concernant la Chine

La représentante de Habitat International Coalition-Housing and Land Rights Network a évoqué le droit à un logement adéquat en précisant que son organisation a préparé à ce sujet un rapport consacré à la Chine. Ce rapport souligne notamment que l'ampleur de la violation du droit au logement au Tibet est particulièrement éloquente. Le Comité devrait envisager de recommander à la Chine d'élargir le droit au logement afin de promouvoir une meilleure protection de ce droit en cherchant à remédier au clivage qui existe de ce point de vue entre zones urbaines et zones rurales. Depuis 1997, la Chine a pris des mesures importantes pour développer un régime de pension; néanmoins, ces mesures sont vraiment insuffisantes, notamment si l'on tient compte de la situation particulière des Tibétains, des Ouïgours et des Mongols, a ajouté la représentante.

La représentante de Society for Community Organization a déclaré que la situation des personnes originaires du continent qui arrivent à Hong-Kong se dégrade, les familles concernées devant attendre parfois de longues années avant de pouvoir être réunies. Les critères appliqués s'agissant du droit au logement de ces personnes sont souvent arbitraires, a-t-elle ajouté. Elle a dénoncé les discriminations dont font l'objet ces personnes, qui vivent parfois dans des cages à poule, dans des conditions très précaires.

La représentante de la Hong-Kong Human Rights Commission a attiré l'attention du Comité sur la situation des minorités à Hong-Kong, affirmant que le principal problème pour le Gouvernement est qu'il ne s'est pas véritablement engagé à assurer la non-discrimination à l'égard de ces personnes. Il n'existe toujours pas de législation sur les réfugiés à Hong-Kong; il n'existe pas non plus d'aide sociale ni de dispositions d'urgence en faveur des requérants d'asile qui arrivent à Hong-Kong, ces personnes se retrouvant donc dans la rue. Il faudrait élaborer une politique générale d'intégration des réfugiés et des minorités à Hong-Kong.

Le représentant de Hong-Kong Human Rights Monitor a déclaré que peu de progrès ont été accomplis s'agissant des préoccupations antérieurement exprimées par le Comité s'agissant de la situation à Hong-Kong. L'an dernier, les autorités chinoises ont empêché Hong-Kong d'élire un représentant au Conseil exécutif local en interprétant dans un certain sens la loi fondamentale, a-t-il notamment souligné.

La représentante de Tibet Support Group Netherlands a déclaré que le rapport à l'examen du Comité ne traite pas de manière adéquate de la situation qui prévaut actuellement du Tibet. En 2003, a-t-elle poursuivi, la Rapporteuse spéciale sur le droit à l'éducation, Mme Katarina Tomasevski, s'est dite horrifiée par le fort taux d'analphabétisme (39,5%) qui prévaut au Tibet. Pendant les 40 ans de domination chinoise, les enfants tibétains ont été privés de leur droit à l'éducation. En outre, les femmes tibétaines continuent de subir des violations de leurs droits, notamment des actes de stérilisation forcée.

Le représentant de la Commission pour l'égalité des chances de Hong-Kong a estimé qu'une institution chargée de la protection des droits humains serait la bienvenue pour la population de Hong-Kong. En effet, les citoyens de Hong-Kong disposent de certaines institutions, assurant par exemple la protection des données personnelles, mais la coordination centrale fait défaut. Il serait donc judicieux de créer une institution de droits de l'homme qui serait notamment chargée d'une telle coordination. Le représentant a par ailleurs plaidé en faveur de la création d'un conseil de santé mentale.

La représentante de la Confération internationale des syndicats libres (CISL) a rappelé que la Chine a prononcé une réserve à l'égard de l'article 8.1.a) du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, s'agissant de la liberté de former un syndicat et d'y adhérer. Or, cet article est un élément fondamental du Pacte. La représentante a dénoncé la situation de monopole qu'occupe le seul syndicat existant en Chine. La Chine a supprimé le droit de grève de sa Constitution en 1982, a par ailleurs rappelé la représentante de la CISL. Compte tenu des nombreux cas de violations des droits des travailleurs, la CISL peut conclure que la Chine ne respecte pas nombre de droits contenus dans le Pacte et dans diverses conventions de l'OIT.

La représentante de Human Rights in China a souligné que, pour importantes qu'elles soient, les mesures législatives ne suffisent pas à assurer qu'un État s'acquitte de ses obligations. Le rapport initial présenté par la Chine ne reconnaît pas que les populations les plus vulnérables sont de plus en plus défavorisées en dépit de la croissance économique que connaît le pays. Il faudrait garantir en Chine le droit de critiquer le Gouvernement et le droit de présenter des pétitions, a ajouté la représentante. Elle a souhaité qu'il soit demandé à la Chine de fournir des renseignements complémentaires s'agissant de la définition juridique de la discrimination dans ce pays.

Le représentant de la Dui Hua Foundation a indiqué que son organisation avait établi un dialogue officieux avec la Chine s'agissant d'un certain nombre de questions. Il a ajouté que son organisation n'hésite pas à mettre le doigt sur les déficiences de la législation chinoise dans certains domaines. Il est regrettable que le rapport initial présenté par la Chine au Comité ne dise rien des sérieux problèmes découlant de la croissance rapide de l'économie chinoise et qui affectent en particulier les minorités.

Un membre du Comité a souhaité savoir si la circulation est libre entre la Chine continentale, Hong-Kong et Macao. Un expert ayant souhaité savoir si les problèmes en matière de droit au logement concernaient tout le pays, la représentante d'une ONG a indiqué que des allégations de violation du droit au logement dans toutes les régions sont parvenues à son organisation. Pour se rendre de Chine continentale à Hong-Kong, il faut avoir un membre de sa famille à Hong-Kong, a-t-il en outre été précisé. Hong-Kong faisant partie de la Chine, on ne peut parler de réfugiés dans le contexte des personnes qui se rendent de Chine continentale à Hong-Kong. La Convention sur le statut des réfugiés, qui s'applique en Chine et à Macao, ne s'applique en revanche pas à Hong-Kong, a-t-il également été souligné.

Concernant la Serbie-et-Monténégro

La représentante de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) a affirmé qu'en Serbie-et-Monténégro, le principe de non-discrimination n'est pas appliqué dans la pratique, s'agissant notamment des femmes, des personnes handicapées et des réfugiés. En outre, les lacunes de la législation ne permettent pas de garantir la sécurité au travail et le système de sécurité sociale est inadéquat. Le système de santé ne semble plus être une priorité pour le Gouvernement, a déploré la représentante. En matière d'éducation, a-t-elle poursuivi, les principaux problèmes ont trait à la nécessité de promouvoir plus avant l'inclusion dans le système éducatif des Rom, des réfugiés et des personnes déplacées. Il est regrettable qu'il n'existe toujours pas en Serbie-et-Monténégro de programmes nationaux de lutte contre la traite des êtres humains.

Concernant la Norvège

La représentante de FIAN-Norvège a notamment mis l'accent sur la nécessité pour la Norvège de s'assurer, dans l'aide qu'elle apporte au développement à travers le monde, qu'elle n'approuve pas des documents de réduction de la pauvreté qui n'offriraient pas suffisamment de garanties s'agissant du respect du droit à l'alimentation. Le droit à l'alimentation devrait être au cœur de toute négociation concernant les produits agricoles, a-t-elle insisté.

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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