Aller au contenu principal

LE PAKISTAN, L'ALGÉRIE, LA HONGRIE ET L'INDE S'ADRESSENT À LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT

Compte rendu de séance
Le Pakistan souligne qu'il est un État nucléaire déclaré et que cette réalité doit être respectée

La Conférence du désarmement a entendu ce matin le Pakistan, l'Algérie, la Hongrie et l'Inde, ainsi que M. Joseph Ayalogu, du Nigéria, qui assume cette semaine la présidence de la Conférence.

Rappelant que lors d'une visite effectuée au Pakistan l'an dernier, le Ministre britannique des affaires étrangères, M. Jack Straw, plaidait pour que les trois États dotés de l'arme nucléaire qui ne sont pas parties au Traité de non-prolifération des armes nucléaires soient arrachés à «l'enfer nucléaire», le Pakistan a déclaré ce matin qu'«il n'est pas aux enfers et qu'il est un État nucléaire déclaré». La réalité sur le terrain doit être respectée, a insisté le Pakistan.

Le Pakistan estime par ailleurs que les négociations sur un traité d'interdiction des matières fissiles doivent porter également sur les stocks existants et un mécanisme effectif de vérification. Il convient en outre d'œuvrer à la prévention d'une militarisation de l'espace extra-atmosphérique. En outre, conformément aux engagements pris par les États dotés d'armes nucléaires en vertu de l'article VI du Traité de non-prolifération nucléaire lors de la dernière Conférence d'examen du TNP, un programme réaliste de désarmement nucléaire doit commencer.

Le Pakistan a par ailleurs indiqué que les principes de base du programme nucléaire de son pays étaient la retenue et la responsabilité. Il a fait savoir que le réseau associé au marché noir du nucléaire mis à jour en 2003, qui avait des ramifications dans plus d'une dizaine de pays, a été définitivement neutralisé pour ce qui est de ses liens au Pakistan. L'équilibre conventionnel entre l'Inde et le Pakistan est essentiel pour la stabilité en Asie du Sud, a ajouté le Pakistan, ce à quoi l'Inde a rétorqué ce matin qu'elle n'acceptait pas le lien entre la retenue nucléaire et l'équilibre conventionnel, pas plus d'ailleurs qu'elle n'entretient l'idée d'un équilibre militaire conventionnel entre elle et le Pakistan.

L'Algérie s'est pour sa part dite plus que jamais convaincue que la proposition des cinq ambassadeurs reste une base équilibrée qui permettrait de dégager un programme de travail qui prenne en considération les besoins de sécurité et les priorités de tous les pays.

Le Président de la Conférence, M. Ayalogu, a pour sa part mis l'accent sur la nécessité pour les membres de la Conférence d'adopter un esprit «donnant-donnant». C'est la seule manière d'assurer la convergence nécessaire pour reprendre les travaux, a-t-il estimé.


La prochaine séance plénière de la Conférence, qui sera la dernière de la première partie de la session de 2005 se tiendra jeudi prochain, 31 mars, à 10 heures.


Aperçu des déclarations

M. JOSEPH AYALOGU (Nigéria), Président de la Conférence du désarmement, a affirmé que les défis actuels qui se posent à la Conférence exigent, si l'on veut avancer de quelque manière que ce soit, de repenser les positions. Il faut adopter un esprit «donnant-donnant»; c'est la seule manière d'assurer la convergence nécessaire pour reprendre les travaux et assurer de nouveau la crédibilité de la Conférence auprès de la communauté internationale, a souligné M. Ayalogu. Il s'est dit convaincu qu'il existe des opportunités pour progresser, si tous le désirent. Le document qui a été présenté et qui constitue une évolution de la proposition des cinq ambassadeurs est une bonne initiative mais n'a pas, pour l'heure, reçu le soutien nécessaire de tous pour permettre de faire avancer les discussions, a poursuivi le Président de la Conférence. Aussi, a-t-il indiqué que si après deux semaines, aucune indication positive ne devait attester d'un large soutien en faveur de ce document, il braquerait les projecteurs sur la proposition des cinq ambassadeurs et ceci pour la simple raison que depuis qu'elle a été présentée, la majorité des délégations ont indiqué qu'elles étaient disposées à accepter le programme de travail fondé sur cette proposition. M. Ayalogu a indiqué qu'il allait explorer les possibilités de parvenir à accord sur un programme de travail basé sur la proposition des cinq ambassadeurs sans pour autant se déconnecter de la voie du document de réflexion qui en constitue une évolution. Il a précisé que, du fait des similitudes existantes entre la proposition des cinq ambassadeurs et ce document, il envisageait la possibilité, à la fin de l'exercice, d'identifier et de réduire les points de divergence entre les deux documents afin de concentrer les efforts sur la recherche d'un terrain d'entente pour parvenir à un programme de travail. M. Ayalogu a dit avoir conscience que le problème est politique; il a néanmoins formulé l'espoir que l'élan généré par le segment de haut niveau de cette année aidera la Conférence à avancer sur la voie de la paix et de la sécurité collective.

M. MASOOD KHAN (Pakistan), dont c'était la première intervention devant la Conférence en tant qu'Ambassadeur du Pakistan, a souligné que si les initiatives bilatérales et plurilatérales se multiplient, il n'en demeure pas moins qu'elles ne sauraient porter atteinte au mandat de la Conférence en tant qu'unique instance de négociations sur le désarmement. Mais force est de constater qu'en dépit de l'importance que revêt la Conférence, toutes les tentatives menées ces dernières années afin de la dynamiser ont échoué. Comme l'a fait observer la Ministre suédoise des affaires étrangères, cet échec est politique et non pas diplomatique.

M. Khan a précisé que, pour le Pakistan, les négociations sur un traité d'interdiction des matières fissiles doivent couvrir les stocks existants et un mécanisme effectif de vérification. Il convient en outre d'œuvrer à la prévention d'une militarisation de l'espace extra-atmosphérique. En outre, conformément aux engagements pris par les États dotés de l'arme nucléaire en vertu de l'article VI du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) lors de la dernière Conférence d'examen du Traité, un programme réaliste de désarmement nucléaire doit commencer. Jusqu'à ce que les objectifs de désarmement nucléaire soient atteints, des garanties de sécurité apportées aux États non dotés de l'arme nucléaire seraient de nature à réduire l'incitation à la prolifération des armes nucléaires, a par ailleurs fait valoir l'Ambassadeur du Pakistan. La Conférence devrait être autorisée à prendre à bras le corps la question des missiles sous tous leurs aspects, a-t-il poursuivi. Elle devrait en outre inclure dans son programme de travail le contrôle des armes conventionnelles aux niveaux régional et sous-régional.

M. Khan a d'autre part indiqué que les principes de base du programme nucléaire de son pays étaient la retenue et la responsabilité. La recherche de notre capacité nucléaire a été dictée par des questions de sécurité et non par des questions de statut, a-t-il assuré. Nous n'étions pas les premiers à faire des essais et nous n'avons pas des ambitions de grande puissance, a-t-il déclaré. L'objectif premier que le Pakistan recherchait en acquérant la capacité nucléaire était de dissuader toute forme d'agression extérieure susceptible de mettre en péril sa sécurité nationale, a-t-il indiqué. Simultanément, le Pakistan maintiendra une force militaire conventionnelle adéquate, a-t-il ajouté. Il a affirmé que selon son pays, une course aux armements sans fin en Asie du Sud est contre-productive et pleine de dangers.

Le Pakistan ne transfèrera aucune arme nucléaire ni aucun matériel ou aucune technologie en rapport avec une telle arme à une quelconque entité étrangère ni à un quelconque État tiers, a assuré M. Khan. À cet égard, il a rappelé qu'en septembre 2004, le Pakistan avait adopté une loi globale sur le contrôle des exportations des biens, technologies et équipements sensibles. Le réseau associé au marché noir du nucléaire mis à jour en 2003, qui avait des ramifications dans plus d'une dizaine de pays, a été définitivement neutralisé pour ce qui est de ses liens au Pakistan, a souligné M. Khan.

La diplomatie mondiale se doit de se concentrer sur la résolution des différends qui durent depuis longtemps, a poursuivi l'Ambassadeur du Pakistan. Comme l'a relevé le Groupe de personnalités de haut niveau sur les menaces, les défis et le changement, les questions de la Palestine, du Cachemire et de la péninsule coréenne figurent au premier rang de ces différends. Notre concept d'un régime de retenue stratégique se fonde sur trois éléments, a précisé M. Khan: un dialogue soutenu et orienté vers les résultats visant la résolution de la question du Jammu-et-Cachemire et d'autres questions pendantes avec l'Inde; la retenue nucléaire; et l'équilibre conventionnel. Rappelant le processus de dialogue maintenu avec l'Inde depuis janvier 2004, M. Khan a indiqué que l'objectif est de parvenir à une solution gagnant-gagnant, durable et juste du Cachemire. Il a souligné que les deux pays se sont engagés à œuvrer à la stabilité stratégique. Précisant que les deux pays ont décidé d'œuvrer à un accord de pré-notification des essais de missiles dans l'air, il a formulé l'espoir que cet accord puisse éclore au deuxième trimestre de cette année. L'équilibre conventionnel entre l'Inde et le Pakistan est essentiel pour la stabilité en Asie du sud, a insisté M. Khan.

Rappelant que lors d'une visite effectuée au Pakistan l'an dernier, le Ministre britannique des affaires étrangères, M. Jack Straw, plaidait pour que les trois États dotés de l'arme nucléaire qui ne sont pas parties au TNP soient arrachés à ce qu'il a appelé «l'enfer nucléaire», M. Khan a affirmé que «le Pakistan n'est pas aux enfers»; le Pakistan est un État nucléaire déclaré. La réalité sur le terrain doit être respectée, a insisté M. Khan.

M. IDRISS JAZAÏRY (Algérie) a félicité M. Ayalogu pour son accession à la présidence de la Conférence et l'a assuré de la collaboration de sa délégation pour qu'il puisse s'acquitter avec succès de sa tâche. M. Jazaïry a relevé que malheureusement, le tiers du temps imparti à la Conférence cette année n'a toujours pas permis d'avancer en vue de l'adoption d'un programme de travail. Pour sortir de l'impasse actuelle, il faudrait revenir aux mesures permettant de dégager un certain consensus. À cet égard, l'Algérie est plus que jamais convaincue que la proposition des cinq ambassadeurs reste une base équilibrée qui permettrait de dégager un programme de travail qui prenne en considération les besoins de sécurité et les priorités de tous les pays. Cette proposition a recueilli l'appui de la grande majorité des délégations au sein de la Conférence, a rappelé M. Jazaïry. Certes, cette proposition peut être améliorée, y compris en tenant compte des suggestions avancées à cet égard par les deux précédents présidents de la Conférence, a-t-il ajouté. Il a appelé le Président actuel de la Conférence à poursuivre les consultations sur un programme de travail sur la base de cette proposition des cinq ambassadeurs.

M. TIBOR TÓTH (Hongrie) a rappelé que dans deux jours, sera célébrée le trentième anniversaire de l'entrée en vigueur de la Convention sur les armes biologiques. À cet égard, il a fait part de la mise à disposition d'un DVD sur les diverses réunions - d'experts et d'États parties - qui se sont tenues en 2004 sur ces questions.

M. JAYANT PRASAD (Inde) a souhaité la bienvenue au nouvel ambassadeur du Pakistan. Il a par ailleurs rappelé que l'Inde et le Pakistan entretiennent toute une série de dialogues sur diverses questions, y compris sur le Jammu-et-Cachemire et sur des mesures de confiance. En réaction à l'intervention faite ce matin par l'ambassadeur du Pakistan, M. Prasad a indiqué que l'Inde n'accepte pas le lien entre la retenue nucléaire et l'équilibre conventionnel. Les exigences de défense et les perceptions des menaces de l'Inde et du Pakistan sont différentes, a poursuivi M. Prasad. L'Inde n'entretient pas l'idée d'un équilibre militaire conventionnel entre elle et le Pakistan, a-t-il précisé.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel


DC05016E