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Le Conseil achève son dialogue sur les droits humains des personnes déplacées dans leur propre pays et se penche sur les discriminations à l’encontre des personnes atteintes de la lèpre, ainsi que sur la violence contre les femmes et les filles

Compte rendu de séance

 

Cet après-midi, le Conseil des droits de l’homme a achevé son dialogue, entamé ce matin, avec la Rapporteuse spéciale sur les droits humains des personnes déplacées dans leur propre pays, Mme Paula Gaviria Betancur en entendant de nombreuses délégations*. Il a ensuite tenu un dialogue avec la Rapporteuse spéciale sur l’élimination de la discrimination à l’égard des personnes touchées par la lèpre (maladie de Hansen) et des membres de leur famille, Mme Beatriz Miranda-Galarza, avant d’engager son dialogue avec Mme Reem Alsalem, Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes et les filles, ses causes et ses conséquences.

Présentant son rapport, Mme Miranda-Galarza, a fait observer que diverses approches de la lèpre qui se chevauchent continuent de créer des obstacles à la capacité des personnes touchées par la lèpre de mener une vie légitime. Les réponses ont souvent été paternalistes et caritatives, d'un point de vue religieux et moral, a-t-elle observé. Sur le plan culturel, les efforts de sensibilisation ont souvent renforcé les stéréotypes négatifs, dépeignant les personnes touchées comme dangereuses et perpétuant le mythe de la lèpre comme hautement contagieuse, a-t-elle ajouté, déplorant que de nombreux gouvernements aient été conduits à traiter les personnes touchées principalement comme des porteurs de maladies plutôt que comme des individus ayant des droits.

Les personnes interrogées dans le cadre de la rédaction de ce rapport ont identifié des problèmes dans cinq grands domaines qui seront au cœur du mandat, a indiqué la Rapporteuse spéciale : les systèmes de soins et de soutien fondés sur les droits de l'homme ; les questions intersectionnelles et les groupes marginalisés ; les aspects sociaux, politiques et culturels de la lèpre ; les dimensions juridiques et économiques liées à la lèpre ; et les conflits et les considérations environnementales. L'identification de ces questions clés implique que la lèpre est à la fois un problème de droits de l'homme et un problème sociopolitique, a souligné Mme Miranda-Galarza.

Suite à cette présentation, plusieurs délégations** ont participé au dialogue interactif avec la Rapporteuse spéciale. Les intervenants ont notamment convenu, à l’instar de la Rapporteuse spéciale, qu’il fallait mettre en place, en faveur des personnes touchées par la lèpre et des membres de leur famille, des dispositifs de soutien et de prise en charge fondés sur les droits humains et accélérer les politiques permettant l’autonomisation de ces personnes, ainsi que leur inclusion et leur participation effective à la vie de la société. Les États ont en outre été exhortés à créer un environnement propice pour que les personnes touchées par la lèpre soient consultées dans l’élaboration des politiques et des réglementations qui ont des effets sur leur vie.

Présentant ensuite son rapport, Mme Alsalem s’est d’abord dite très inquiète de constater que les progrès en matière de participation politique et économique des femmes sont entravés par des reculs alarmants, et que des droits durement acquis « que nous considérions comme allant de soi ont régressé de manière significative ». Le mépris flagrant de la sécurité, de la dignité et de l'humanité des femmes et des filles dans les conflits récents est l'illustration la plus claire de ces reculs, comme on a pu le constater à Gaza, en Haïti, au Soudan et en Ukraine, entre autres, a ajouté Mme Alsalem. Elle a jugé très inquiétant que certains pays fassent pression pour que les femmes soient effacées en tant que groupe social, en particulier en Afghanistan, où les femmes continuent d'être écartées de la vie publique, mais aussi dans d’autres pays où on recense des tentatives inquiétantes visent à effacer les femmes du langage et à leur refuser la liberté de se réunir.

S’agissant de son rapport à proprement parler, qui traite de la prostitution et de la violence faite aux femmes et aux filles, Mme Alsalem a affirmé qu’il était grand temps « de reconnaître la prostitution pour ce qu'elle est vraiment : un système de violence, d'exploitation et d'abus ». Elle a indiqué être parvenue à la conclusion que la prostitution ne peut être qualifiée de travail. Elle a ajouté que la perception du droit qu’auraient les hommes à acheter des actes sexuels normalisait la violence systématique à l'encontre des femmes et des filles, et brouillait la ligne de démarcation entre les relations sexuelles consensuelles et la violence sexuelle. Mme Alsalem a dit plaider en faveur d'un cadre juridique abolitionniste, dans lequel les États ont la responsabilité de protéger et d'aider les victimes.

Après que Mme Alsalem eut rendu compte de la visite qu’elle a effectuée en Pologne en 2023, la Pologne a fait une déclaration en tant que pays concerné. Un grand nombre de délégations*** ont ensuite engagé le dialogue avec la Rapporteuse spéciale.

En fin de séance, les pays suivants ont exercé leur droit de réponse : Azerbaïdjan, Rwanda, Arménie, Indonésie, Israël, et République démocratique du Congo.

 

Lundi prochain, à 10 heures, le Conseil achèvera le dialogue avec Mme Alsalem avant d’entamer son dialogue avec la Rapporteuse spéciale sur le droit qu’a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible.

 

Suite et fin du dialogue avec la Rapporteuse spéciale sur les droits humains des personnes déplacées dans leur propre pays 

Aperçu du dialogue

Poursuivant le dialogue entamé ce matin, des délégations ont appelé la communauté internationale à venir davantage en aide aux personnes déplacées à l’intérieur de leur pays. Il a été demandé, en particulier, aux gouvernements des pays historiquement les plus responsables des changements climatiques de dégager des fonds pour couvrir entièrement tous les besoins de relocalisation [des personnes déplacées internes] par le biais de subventions.

Les gouvernements ont aussi été appelés à s'assurer que les processus de relocalisation préservent les identités culturelles et les pratiques locales grâce à la pleine participation des communautés. Il a été recommandé que les États et les acteurs humanitaires donnent aux femmes et aux filles les moyens de participer à la recherche de solutions au problème du déplacement.

Eu égard au nombre extrêmement important de personnes déplacées, il est impératif d’élaborer une politique multidimensionnelle pour trouver une solution durable aux problèmes liés à la pauvreté, à la violence, à la vulnérabilité, à la discrimination et aux violations des droits de l’homme droits humains, a plaidé une organisation non gouvernementale (ONG).

Il a été rappelé que de nombreuses personnes sont déplacées dans leur pays pour des raisons liées non seulement aux changements climatiques et à des facteurs environnementaux, mais aussi à la colonisation, à la criminalité organisée, à un accident nucléaire ou encore au terrorisme.

Le rôle joué par les institutions nationales de droits de l’homme dans la défense des droits des personnes déplacées à l’intérieur de leur pays a été mis en évidence.

La situation à Gaza a aussi été évoquée cet après-midi. Outre le génocide et le transfert interne de 1,7 million de Palestiniens, les infrastructures d’assainissement et d'approvisionnement en eau ont été complètement détruites, le sol, l'eau et l'air ont été gravement pollués et les écosystèmes ont subi des dommages irréversibles, a souligné une ONG. En rendant Gaza invivable, Israël a délibérément visé les droits à réparation et au retour des Palestiniens, a-t-elle condamné.

Une autre ONG a demandé que la Rapporteuse spéciale s’intéresse aussi au sort des Israéliens qui sont déplacés dans leur pays pour échapper aux bombardements du Hamas.

Le Conseil des droits de l’homme et la communauté internationale ont été appelés à travailler étroitement avec le Mozambique, afin qu'il puisse faire face à tous les défis qui se présentent causés par les catastrophes naturelles et les conflits.

* Liste des intervenants : Soudan du Sud, Ghana, Maroc, Cabo Verde, État de Palestine, National Human Rights Commission of India, Réseau de formation et de recherche sur les migrations africaines, BADIL Resource Center for Palestinian Residency and Refugee Rights, International Service for Human Rights, World Evangelical Alliance, Franciscans International, Plan International, Inc., United Nations Watch, Company of the Daughters of Charity of St. Vincent de Paul, Human Rights Now et Elizka Relief Foundation .

Réponses et remarques de conclusion de la Rapporteuse spéciale

MME PAULA GAVIRIA BETANCUR, Rapporteuse spéciale sur les droits humains des personnes déplacées dans leur propre pays, a remercié les nombreuses délégations qui ont participé au débat.

L’experte a mis en avant l’importance de comprendre les difficultés liées à la collaboration avec les acteurs locaux, en particulier en ce qui concerne les aspects sécuritaires. La Rapporteuse spéciale a aussi souligné le rôle très important des organisations de la société civile dans la défense des droits des populations déplacées.

Mme Gaviria Betancur a plaidé en faveur de la création d’un « fonds pour pertes et dommages » destiné à financer les réinstallations de personnes déplacées.

La Rapporteuse spéciale a par ailleurs indiqué qu’elle se rendrait aux Îles Marshall cette année encore et a dit espérer pouvoir se rendre également au Soudan du Sud.

Dialogue avec la Rapporteuse spéciale sur l’élimination de la discrimination à l’égard des personnes touchées par la lèpre (maladie de Hansen) et des membres de leur famille 

Le Conseil est saisi du rapport de la Rapporteuse spéciale sur l’élimination de la discrimination à l’égard des personnes touchées par la lèpre (maladie de Hansen) et des membres de leur famille (A/HRC/56/59).

Présentation 

Présentant son rapport, MME BEATRIZ MIRANDA-GALARZA, Rapporteuse spéciale sur l’élimination de la discrimination à l’égard des personnes touchées par la lèpre (maladie de Hansen) et des membres de leur famille, a déclaré que la création du mandat et l'approbation des Principes et directives sur l'élimination de la discrimination à l'égard des personnes touchées par la lèpre et des membres de leur famille dans la résolution 65/215, adoptés par l'Assemblée générale en 2010, reposent sur une longue histoire d'isolement, d'exclusion et de lutte continuelle des personnes touchées par la lèpre pour être reconnues comme des individus ayant des droits.

Diverses approches de la lèpre qui se chevauchent continuent de créer des obstacles à la capacité des personnes touchées par la lèpre de mener une vie légitime, a déploré Mme Miranda-Galarza. Les réponses ont souvent été paternalistes et caritatives, d'un point de vue religieux et moral, a-t-elle observé. Sur le plan culturel, les efforts de sensibilisation ont souvent renforcé les stéréotypes négatifs, dépeignant les personnes touchées comme dangereuses et perpétuant le mythe de la lèpre comme hautement contagieuse. D'un point de vue scientifique et administratif, la lèpre a été considérée comme une simple maladie qui nécessite des recherches cliniques et l'isolement des personnes touchées, souvent par le biais de lois et de normes visant à guérir ces personnes et à éliminer la maladie, a-t-elle poursuivi. Ces notions ont conduit de nombreux gouvernements à traiter les personnes touchées principalement comme des porteurs de maladies plutôt que comme des individus ayant des droits, a souligné la Rapporteuse spéciale.

Au XXIème siècle, les défenseurs ont mis en évidence les violations systématiques des droits des personnes concernées, ce qui a conduit à une attention accrue portée à leur situation, a rappelé la Rapporteuse spéciale. Leurs travaux ont permis de comprendre que la lèpre est un problème complexe qui porte l'ombre dangereuse de son passé. C'est pourquoi le travail de ce mandat est impératif pour continuer à soutenir le mouvement pour les droits des personnes touchées par la lèpre à l'échelle mondiale et pour faciliter les changements sociétaux, a-t-elle insisté.

Les personnes interrogées dans le cadre de la rédaction de ce rapport estiment qu'il reste beaucoup à faire et qu'il est nécessaire de mettre en œuvre des politiques et des directives sur le terrain, qui relèvent principalement de la responsabilité des États Membres, a indiqué Mme Miranda-Galarza. Elles ont identifié des problèmes dans cinq grands domaines qui seront au cœur du mandat : les systèmes de soins et de soutien fondés sur les droits de l'homme ; les questions intersectionnelles et les groupes marginalisés ; les aspects sociaux, politiques et culturels de la lèpre ; les dimensions juridiques et économiques liées à la lèpre ; et les conflits et les considérations environnementales. L'identification de ces questions clés implique que la lèpre est à la fois un problème de droits de l'homme et un problème sociopolitique, a souligné la Rapporteuse spéciale.

Enfin, Mme Miranda-Galarza a invité le Conseil à continuer d'appuyer ce mandat. La réalisation de l'objectif consistant à éliminer toutes les formes de discrimination à l'égard des personnes touchées par la lèpre et des membres de leur famille nécessite un appui politique et matériel, a-t-elle insisté.

Aperçu du dialogue 

De nombreuses délégations ont apporté leur soutien au mandat de la Rapporteuse spéciale et ont reconnu les avancées importantes dans la reconnaissance et la réalisation des droits des personnes touchées par la lèpre au cours des sept années du mandat. Ce mandat a permis de réels changements dans la vie des personnes touchées par la lèpre et de donner plus de visibilité aux difficultés auxquelles est confrontée cette catégorie de population vulnérable, ont-elles souligné.

Les intervenants ont aussi convenu, à l’instar de la Rapporteuse spéciale, qu’il fallait mettre en place des dispositifs de soutien et de prise en charge fondés sur les droits humains et accélérer les politiques permettant l’autonomisation des personnes touchées par la lèpre, ainsi que leur inclusion et leur participation effective à la vie de la société.

Un groupe de pays a soutenu l’approche de la Rapporteuse spéciale visant à favoriser la compréhension de la lèpre en tant que question des droits de l'homme au XXIème siècle, guidée par une éthique du soin.

Bien que la lèpre soit une maladie curable, elle peut entraîner des déficiences à vie et des complications post-traitement, a-t-il été rappelé. Il est donc essentiel de passer d'une approche purement médicalisée à une approche fondée sur les droits de l'homme, où le soutien, les soins et l'assistance sont positionnés comme des droits inhérents, a-t-il été affirmé.

Plusieurs intervenants ont aussi déploré la perception de la lèpre comme étant très contagieuse, ce qui est scientifiquement inexact et contribue à la ségrégation. Les mythes et les fausses représentations associés à la lèpre perpétuent la stigmatisation et la discrimination, lesquelles entravent le diagnostic, le traitement et la réalisation des droits civils, culturels, économiques, politiques et sociaux, a-t-il été déploré.

Une délégation a souligné que l'absence de données statistiques sur les personnes touchées par la lèpre complique l'élaboration de politiques efficaces et l'évaluation des discriminations et obstacles que subissent notamment les femmes et les filles dans ce contexte. Cette lacune entrave également le suivi des progrès réalisés en matière de respect des droits humains des personnes touchées, a-t-elle constaté.

Dans ce contexte, les États ont été exhortés à créer un environnement propice pour que les personnes touchées par la lèpre soient consultées dans l’élaboration des politiques et des réglementations qui ont des effets sur leur vie.

** Liste des intervenants : Union européenne, Iran, Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Koweït, Égypte, Japon, Portugal, Algérie, Nigéria, Bangladesh, Djibouti, Chine, États-Unis, Ordre souverain de Malte, Côte d’Ivoire, Panama, Brésil, Togo, Cameroun, Venezuela, Angola, Afrique du Sud, Organisation mondiale de la santé (OMS), Inde, Maroc, Rencontre africaine pour la défense des droits de l'homme, Associazione Comunita Papa Giovanni XXIII , et Interfaith International.

Réponses et remarques de conclusion de la Rapporteuse spéciale

MME MIRANDA-GALARZA a affirmé qu’il était très important que les délégations soutiennent le rapport. Elle a félicité les États et les gouvernements qui ont pu promouvoir la participation des personnes atteintes par la lèpre dans leur politique, notamment en adoptant des programmes de lutte contre les discriminations. Elle a également félicité toutes les organisations qui continuent de soutenir son mandat.

Mme Miranda-Galarza a rappelé que la lèpre restait un défi du XXIème siècle du même ordre que d’autres problèmes sociaux dans le monde. Elle a souligné le caractère intersectionnel de la lèpre par rapport à la pauvreté, la migration, ou encore les changements climatiques, entre autres. Elle a insisté sur le rôle des femmes et des filles touchées par la lèpre, qui sont amenées à gérer les familles, et a appelé à les soutenir.

Il faut entendre la voix des personnes atteintes par la lèpre et tenir compte de leur avis, a plaidé la Rapporteuse spéciale. Il faut que tous les États réfléchissent à la manière dont ils prennent des mesures et adoptent des politiques. Il n’y a pas d’autres choix que de consulter les personnes atteintes par la lèpre et leur famille, a insisté Mme Miranda-Galarza.

La Rapporteuse spéciale a appelé tous les acteurs qui œuvrent dans le domaine de la lèpre à collaborer avec le mandat dans l’élaboration de futurs rapports, notamment sur la question de l’impact des religions dans la perception de la lèpre. Elle a fait observer que dans certaines régions les personnes atteintes par la lèpre sont tout particulièrement discriminées. Il faut réfléchir à un soutien spécifique en faveur de ces communautés, a-t-elle plaidé.

Dialogue avec la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes et les filles, ses causes et ses conséquences 

Le Conseil est saisi du rapport de la Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes et les filles, ses causes et ses conséquences (A/HRC/56/48), et du rapport sur sa visite de travail en Pologne (Add.1).

Présentation

Dans des remarques générales, MME REEM ALSALEM, Rapporteuse spéciale sur la violence contre les femmes et les filles, ses causes et ses conséquences, s’est dite très inquiète de constater que les progrès en matière de participation politique et économique des femmes sont entravés par des reculs alarmants, et que des droits durement acquis « que nous considérions comme allant de soi ont régressé de manière significative ».

Le mépris flagrant de la sécurité, de la dignité et de l'humanité des femmes et des filles dans les conflits récents est l'illustration la plus claire de ces reculs, comme on a pu le constater à Gaza, en Haïti, au Soudan et en Ukraine, entre autres, a souligné Mme Alsalem. Il est inacceptable que des ressources soient utilisées pour alimenter des guerres sans merci mais pas pour sauver des vies de femmes et de jeunes filles, a insisté la Rapporteuse spéciale.

Mme Alsalem a aussi jugé très inquiétant que certains pays fassent pression pour que les femmes soient effacées en tant que groupe social, en particulier en Afghanistan où les femmes continuent d'être écartées de la vie publique, mais aussi dans d’autres pays où on recense des tentatives inquiétantes visant à effacer les femmes du langage et à leur refuser la liberté de se réunir.

Face à ces revers, Mme Alsalem a notamment salué la proposition d'adopter un protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, qui serait consacré à la lutte contre la violence à l'égard des femmes et des filles.

Présentant ensuite son rapport, qui traite de la prostitution et de la violence faite aux femmes et aux filles, Mme Alsalem a d’emblée affirmé qu’il était grand temps « de reconnaître la prostitution pour ce qu'elle est vraiment : un système de violence, d'exploitation et d'abus ». L’experte a indiqué être parvenue à la conclusion que la prostitution ne peut être qualifiée de travail. Elle a ajouté que la perception du droit qu’auraient les hommes à acheter des actes sexuels normalisait la violence systématique à l'encontre des femmes et des filles et brouillait la ligne de démarcation entre les relations sexuelles consensuelles et la violence sexuelle.

Mme Alsalem a dit plaider en faveur d'un cadre juridique abolitionniste, dans lequel les États ont la responsabilité de protéger et d'aider les victimes. Les États devraient décriminaliser la prostitution pour les femmes et les jeunes filles, traiter ces femmes et ces filles comme des victimes d'un système cruel d'exploitation et d'abus, et leur fournir un soutien complet et des voies de sortie. Parallèlement, les États doivent criminaliser l'achat d'actes sexuels et prendre des mesures strictes contre le proxénétisme.

Rendant par ailleurs compte de la visite qu’elle a effectuée en Pologne en 2023, Mme Alsalem a relevé les progrès notables du pays en matière d'égalité entre les femmes et les hommes, avec en particulier des réformes juridiques qui ont élargi la définition de la violence domestique pour englober la violence sexuelle, psychologique, économique et cybernétique. Cependant, l’experte a dit avoir constaté que les femmes et les filles en Pologne rencontrent des obstacles considérables pour accéder aux droits en matière de santé sexuelle et génésique. En outre, et bien qu’il faille reconnaître l'immense hospitalité dont la Pologne fait preuve à l'égard des femmes et des filles réfugiées d'Ukraine, les femmes et les filles non ukrainiennes qui ont besoin d'une protection internationale doivent pouvoir bénéficier d'une assistance et d'un soutien adéquats en Pologne, a recommandé Mme Alsalem.

Pays concerné

La Pologne a mentionné plusieurs initiatives législatives récemment prises par le pays en faveur de la lutte contre la violence envers les femmes et les filles, citant en particulier l'introduction des crimes de mutilation génitale féminine et de mariage forcé dans le Code pénal, ou encore l’élargissement de la définition de la violence domestique pour couvrir les partenaires officieux et anciens partenaires, ainsi que la violence économique, psychologique et cybernétique.

La délégation a souligné que le rapport présenté aujourd'hui reflétait des observations faites au moment de la visite, soit au début de 2023. Après les élections parlementaires d'octobre 2023, la Pologne a un nouveau Gouvernement, lequel, pour la première fois, comprend un bureau de Ministre de l'égalité, a précisé la délégation. Ce bureau a un mandat universel couvrant la prévention et la lutte contre toutes les formes de discrimination, de préjugés et de haine, ainsi que la violence à l'encontre des femmes et des filles.

Aperçu du dialogue

Des délégations se sont dites alarmées par l’ampleur du problème de la violence envers les femmes dans le monde. Il a été relevé que contrairement à d'autres violations des droits de l'homme, telles que la torture, il n'existe pas d'instrument international contraignant pour lutter contre cette violation généralisée des droits humains, ce qui contribue à des niveaux élevés d'impunité et à la persistance des causes profondes. À l’instar de la Rapporteuse spéciale, d’aucuns ont plaidé en faveur de l’adoption d’un protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, qui traiterait explicitement de la lutte contre la violence envers les femmes.

L’utilisation de la violence sexuelle comme arme de guerre a été condamnée. L’importance d’écouter les témoignages des femmes et des filles victimes de violence, que la stigmatisation décourage souvent de saisir la justice, a par ailleurs été soulignée.

Des intervenants ont dit appuyer les recommandations du rapport de la Rapporteuse spéciale concernant la nécessité d'aborder le phénomène de la prostitution dans le cadre d'une approche fondée sur les droits, en utilisant tous les outils juridiques disponibles, et en utilisant tous les moyens disponibles pour promouvoir et protéger les droits des femmes et des filles. Certaines délégations ont insisté sur la préférence de leurs pays de parler de « travail du sexe » plutôt que de « prostitution ».

Il faut faire davantage pour contrer les risques et les préjudices auxquels sont confrontées toutes les personnes qui travaillent dans le commerce du sexe, a recommandé un intervenant. Il est également important de travailler avec les utilisateurs potentiels de la prostitution dans le but de réduire la demande, afin de faire comprendre aux usagers potentiels que le recours à la prostitution est une forme de violence et l'expression d'un besoin de pouvoir et non la satisfaction d'un désir sexuel, a-t-il été affirmé.

Des préoccupations ont été exprimées s’agissant de l’utilisation des technologies numériques pour exploiter sexuellement les femmes et les filles. Une plus grande coopération avec les entreprises technologiques est nécessaire pour lutter contre toutes les formes de violence sexiste facilitées par la technologie, a-t-il été recommandé.

La Rapporteuse spéciale a été priée de suggérer comment améliorer les voies de sortie des femmes et des filles exploitées dans la prostitution.

Plusieurs délégations ont mentionné des mesures législatives prises par leurs pays pour éliminer la violence à l'égard des femmes et des filles dans la société, en particulier des révisions de la législation relative à la violence domestique, ainsi que pour venir en aide aux victimes.

Ont par ailleurs été condamnés « le meurtre, la famine et la violence contre les civils palestiniens non armés, en particulier les femmes et les filles », dans la bande de Gaza. Une délégation a pour sa part regretté que la Rapporteuse spéciale n’ait pas mentionné les femmes israéliennes enlevées le 7 octobre et victimes de violences sexuelles et d’actes de torture.

*** Liste des intervenants : Costa Rica (au nom d’un groupe de pays), Union européenne, États-Unis (au nom d’un groupe de pays), Qatar (au nom du Conseil de coopération du Golfe), Jordanie (au nom de la Ligue des États arabes), Gambie (au nom du Groupe des États africains), Islande (au nom des pays baltes et nordiques), Chili, Israël, Sierra Leone, Koweït, Arménie, Iran, Mexique, Canada, Égypte, Tchéquie, États-Unis, Japon, Maldives, Grèce, Slovénie, Algérie, Géorgie, République de Corée, Pays-Bas, Belgique, Lesotho, Nigéria, Arabie saoudite, et Iraq.

 

 

 

 

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