Fil d'Ariane
Le Conseil des droits de l’homme se penche sur les situations au Venezuela et au Myanmar
Ce matin, le Conseil des droits de l’homme a tenu un dialogue avec les membres de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits sur la République bolivarienne du Venezuela, avant d’entendre un compte rendu de l’ancienne Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Mme Michelle Bachelet, sur la situation des droits de l’homme au Myanmar. Le Conseil a ensuite entamé son débat général au titre des situations relatives aux droits de l’homme qui requièrent son attention, en entendant les déclarations de plusieurs délégations**.
Mme Marta Valiñas, Présidente de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits sur la République bolivarienne du Venezuela, a notamment indiqué que la Mission avait analysé les activités de deux structures étatiques – à savoir l’agence militaire DGCIM et le service de renseignement civil SEBIN – comme étant les principales responsables de crimes et violations des droits humains au Venezuela. « Les violations des droits de l'homme par ces deux agences continuent jusqu’à présent », a indiqué Mme Valiñas, avant d’ajouter que les violations documentées par la Mission ont eu lieu dans un climat d'impunité presque totale. La DGCIM et le SEBIN font partie d'une machinerie conçue et déployée pour l'exécution d'un plan du Gouvernement visant à réprimer celles et ceux qu'il perçoit comme ses opposants et à consolider ainsi son contrôle du pouvoir, a déclaré la Présidente de la Mission.
La Mission s’est aussi penchée sur la situation dans « l'Arc minier de l'Orénoque », dont les habitants sont pris dans le feu croisé d’une lutte violente pour le contrôle de l'or dans les zones minières. La Mission a reçu des allégations de collusion entre l'armée et des « syndicats » criminels impliqués dans le secteur minier, allégations qui exigent des enquêtes supplémentaires, a dit Mme Valiñas.
Le Venezuela a fait une déclaration à titre de pays concerné, rejetant catégoriquement le rapport présenté par la Mission d’établissement des faits. De nombreuses délégations* ont ensuite pris part au dialogue avec les membres de la Mission.
Présentant le compte rendu sur la situation des droits de l’homme au Myanmar, la Haute-Commissaire aux droits de l’homme par intérim, Mme Nada Al-Nashif, a indiqué que, depuis la dernière mise à jour faite au mois de juin dernier devant le Conseil, le peuple du Myanmar a été pris dans « une rapide spirale descendante faite de souffrances, de peur et d’insécurité croissantes ». « Une action de toute urgence est nécessaire pour inverser cette situation catastrophique et rétablir la paix, la démocratie et le développement durable », a-t-elle déclaré.
Mme Al-Nashif a ajouté que les offensives de l’armée du Myanmar dans tout le pays sont conçues non seulement pour cibler ses opposants, mais aussi pour punir les communautés considérées comme soutenant ces derniers. Depuis février 2021, a-t-elle indiqué, au moins 2316 personnes – dont 188 enfants - ont été tuées. Mme Al-Nashif a ajouté que « la crise humanitaire fait maintenant craindre la famine ».
Mme Al-Nashif a réitéré les appels aux militaires pour qu'ils cessent les violences, notamment en imposant un moratoire sur les exécutions, libèrent tous les prisonniers politiques, garantissent l'accès à l'aide humanitaire et ramènent le Myanmar à une démocratie fondée sur le respect des droits de l'homme et de l'État de droit. Elle a en outre exhorté le Conseil à renforcer le mandat de documentation du Haut-Commissariat afin d'améliorer le suivi de la situation et de soutenir les efforts de responsabilisation, y compris le travail du Mécanisme d'enquête indépendant pour le Myanmar.
Cet après-midi à partir de 15 heures, le Conseil poursuivra son débat général au titre des situations relatives aux droits de l’homme qui requièrent son attention. À 16 heures, il tiendra son débat annuel consacré à la prise en compte des questions de genre dans tous les travaux du Conseil et de ses mécanismes.
Dialogue avec la Mission internationale indépendante d’établissement des faits sur la République bolivarienne du Venezuela
Le Conseil est saisi du rapport de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits sur la République bolivarienne du Venezuela (A/HRC/51/43 , version préliminaire en anglais).
Présentation
Le rapport a été présenté par MME MARTA VALIÑAS, Présidente de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits sur la République bolivarienne du Venezuela.
Dans son rapport de 2020, a rappelé Mme Valiñas, la Mission avait identifié six structures étatiques comme étant les principales responsables de crimes et violations des droits humains. Deux agences de renseignement d'État, à savoir l'agence militaire DGCIM et l'agence civile SEBIN, figurent parmi les six identifiées, notamment pour leur rôle dans la répression sélective des personnes perçues comme opposées au Gouvernement, a-t-elle souligné, précisant que la Mission a documenté la manière dont ces deux agences ont commis des violations des droits de l'homme qui constituent des crimes contre l'humanité – parmi lesquels la torture et autres mauvais traitements, la violence sexuelle et sexiste, la détention arbitraire et les disparitions forcées de courte durée.
S’agissant de la DGCIM, la Mission a documenté 122 victimes détenues, dont 77 ont été soumises à des actes de torture, des violences sexuelles ou d'autres traitements cruels, inhumains ou dégradants perpétrés par des agents de cette agence. La grande majorité des victimes sont des officiers et anciens officiers des forces armées et des personnes qui leur sont associées. La DGCIM a pratiqué la torture dans son centre de détention de Boleita, à Caracas, et dans des centres de détention clandestins dans tous les États du pays.
Quant au SEBIN, le service de renseignement civil du Venezuela, il a joué un rôle clef dans la surveillance, l'arrestation et la détention de personnes opposées au Gouvernement, ou perçues comme telles, notamment des membres de l'opposition politique, des journalistes, des défenseurs des droits humains et des manifestants. La grande majorité des détenus ont été incarcérés dans le centre de détention El Helicoide à Caracas, où la torture était systématiquement pratiquée.
L'enquête de la Mission a montré que ces crimes n'ont pas été commis par des individus agissant de manière isolée au sein de ces agences ou hors du contrôle de leurs supérieurs. Au contraire, la DGCIM et le SEBIN font partie d'une machinerie conçue et déployée pour l'exécution d'un plan du Gouvernement visant à réprimer celles et ceux qu'il perçoit comme ses opposants et à consolider ainsi son contrôle du pouvoir. Ce plan a été orchestré depuis le plus haut niveau politique, a affirmé la Présidente de la Mission d’établissement des faits.
Les violations des droits de l'homme de la part de ces deux agences continuent jusqu’à présent, tout comme leurs pratiques d’intimidation, a indiqué Mme Valiñas, avant d’ajouter que les violations documentées par la Mission ont eu lieu dans un climat d'impunité presque totale. Seuls quelques responsables des services de renseignement, tous de rang inférieur, ont été tenus responsables de ces actes, a-t-elle précisé. Les autorités vénézuéliennes n'ont fait aucun effort sérieux pour lutter contre le caractère systématique et généralisé des violations, ni pour rendre justice aux victimes et leur offrir des réparations. Les réformes judiciaires annoncées à partir de 2021 sont clairement insuffisantes pour remédier au manque d'impartialité et d’indépendance qui frappe le système judiciaire, a regretté Mme Valiñas. Elle a ajouté que suite à son enquête, la Mission qu’elle préside a réuni de solides informations concernant la participation de fonctionnaires de la DGCIM et du SEBIN ainsi que d’autorités au plus haut niveau politique aux violations et crimes documentés : « nous avons des motifs raisonnables de croire que ces personnes sont responsables de ces actes et doivent faire l’objet d’une enquête.
Mme Valiñas a ensuite expliqué qu’en 2016, en réponse à une crise du secteur pétrolier national, le Gouvernement vénézuélien avait créé « l'Arc minier de l'Orénoque » (Arco Minero del Orinoco), pour formaliser et étendre son contrôle sur l'industrie aurifère. Baptisée « zone de développement stratégique national », cette région s’étend principalement sur l'État de Bolivar, mais aussi vers des États [vénézuéliens] voisins. Depuis 2016, la militarisation de cette région a été progressive, a souligné la Présidente de la Mission d’établissement des faits. Les forces armées et les dirigeants du Gouvernement civil participent à la gestion des entreprises qui y sont impliquées dans l'exploitation de l'or, a-t-elle ajouté.
Or, des groupes criminels armés, notamment ceux qui sont désignés sous le nom de « syndicats », opèrent ouvertement en contrôlant les zones minières et même les populations, a indiqué Mme Valiñas, avant de faire savoir que la Mission a reçu des allégations de collusion entre des militaires et des « syndicats » impliqués dans le secteur minier – allégations qui exigent des enquêtes supplémentaires. Les habitants de la région sont pris dans le feu croisé de cette violente lutte pour le contrôle de l'or dans les zones minières. Des acteurs étatiques et non étatiques ont commis des crimes et des violations des droits humains, y compris des assassinats et des disparitions forcées. Les autorités n'ont pas pris de mesures suffisantes pour prévenir et enquêter sur ces abus, a déploré la Présidente de la Mission d’établissement des faits.
L'État de Bolivar comprend des territoires de peuples autochtones, notamment dans la municipalité méridionale de Gran Sabana, a en outre souligné Mme Valiñas, avant d’ajouter que la Mission a documenté plusieurs attaques des forces de l’État contre des personnes autochtones. La Mission a documenté comment des agents de l’État se sont rendu coupables de privations arbitraires de la vie et ont perpétré des actes de torture et d'autres mauvais traitements à l’encontre de membres des communautés autochtones.
Selon notre enquête, la violence sexuelle et sexiste est répandue dans l’État de Bolivar, a également souligné Mme Valiñas : les acteurs étatiques et les groupes criminels armés commettent des violations et des actes d'exploitation sexuelle qui touchent particulièrement les femmes et les filles. La sous-déclaration de ce type de violence, la stigmatisation sociale et la peur généralisée des représailles présentent des défis importants pour la recherche et l'analyse, ce qui nécessite qu’une attention continue d’être portée à cette situation, a demandé Mme Valiñas.
Pays concerné
Le Venezuela a déploré de devoir venir, une fois encore, devant ce Conseil pour y « confirmer sa terrible politisation, dont témoignent une fois de plus l’intervention qui vient d’être faite [par la Présidente de la Mission d’établissement des faits] et le prétendu rapport qui l’accompagne et que nous rejetons catégoriquement, sur la forme comme sur le fond ». « La soi-disant Mission d’établissement des faits s’est une fois de plus surpassée dans la fiction qu’elle construit sur la réalité du Venezuela »., a jugé la délégation vénézuélienne, avant d’ajouter que le fait que la Mission ait présenté son prétendu rapport la semaine dernière lors d’une conférence de presse internationale avant de le présenter à ce Conseil – « avec l'objectif clair de plaire à la canaille des médias transnationaux dont les vautours ne peuvent que se contenter de gros titres retentissants dans lesquels rien de bon ne se passe au Venezuela » - ne laisse plus planer aucun doute quant au « comportement agressif et calomnieux » de cette Mission.
Le rapport, a poursuivi la délégation, « invente de tout » : « des millions de prétendus migrants fantômes fuyant dans la terreur », l’existence de « supposés camps terroristes et jusqu’à la présence d’un président fantôme dont l’inscription dans les annales de l’histoire est peu probable. Comme la « stratégie criminelle de changement de régime impulsée par le Gouvernement des États-Unis et ses gouvernements satellites » a échoué, ils ont pillé les ressources du pays par « l’imposition criminelle de mesures coercitives unilatérales illégales » et ont créé d’énormes difficultés qui entravent les échanges commerciaux du Venezuela et ne permettent pas au pays de bénéficier des mêmes règles multilatérales que le reste du monde, a déclaré la délégation. « Mais la dignité de notre nation reste intacte et cela désespère toujours plus nos détracteurs », a-t-elle affirmé.
La délégation a invité le Conseil à saluer et renforcer la bonne coopération qui existe entre le Haut-Commissariat et le Gouvernement vénézuélien, qui apporte des résultats positifs et concrets, plutôt que de privilégier l'option de l'attaque continue – « à laquelle nous continuerons de résister », a souligné la délégation.
Le Venezuela est un État démocratique et social, un État de droit et de justice, a conclu la délégation, réitérant sa volonté de continuer à coopérer avec le Conseil et le Haut-Commissariat, sur la base des principes d'objectivité, de non-sélectivité, d'impartialité, de respect de la souveraineté et de non-ingérence dans les affaires intérieures.
Aperçu du débat
Plusieurs intervenants ont fait part de leur préoccupation devant « la crise prolongée des droits de l'homme au Venezuela » et les « violations choquantes des droits de l'homme » qui seraient commises par des mécanismes et des agents de l'État dans le cadre de la « répression politique ». Le rapport présenté par Mme Valiñas, a fait observer un intervenant, met opportunément l'accent sur les chaînes de commandement au sein des services de renseignement militaire et civil de l'État vénézuélien, ce qui est essentiel pour comprendre et combattre « l'impunité qui prévaut pour les violations et les atteintes aux droits de l'homme passées et présentes ».
Sans obligation de rendre des comptes au moyen d'enquêtes impartiales et exhaustives, a-t-on souligné à plusieurs reprises, il ne peut y avoir de justice pour les victimes. Une délégation a rappelé les recommandations faites par l’ancienne Haute-Commissaire, Mme Michelle Bachelet, quant à l’importance de traduire les coupables en justice et d’offrir une réparation adéquate aux victimes et à leurs familles. Le Conseil a été prié de rester vigilant face à d'éventuelles représailles contre les victimes, leurs familles et les défenseurs qui ont collaboré au rapport de la Mission d’établissement des faits.
Des inquiétudes ont aussi été exprimées devant les conclusions du rapport de la Mission concernant les violations des droits de l'homme dans l'Arc minier de l'Orénoque et dans d'autres zones d'exploitation d’or de l’État de Bolivar, en particulier la répression violente, le recours à une force excessive, la torture et les violences sexuelles et sexistes à l'encontre des autochtones.
Plusieurs pays ont estimé que le Venezuela, en tant que pays membre du Conseil des droits de l’homme, devait donner l’exemple de la coopération avec les mécanismes des droits de l’homme des Nations Unies, y compris avec la Mission d’établissement des faits. Les autorités vénézuéliennes ont été appelées à appliquer les recommandations du rapport et à mener des enquêtes approfondies sur les auteurs présumés des crimes.
Des organisations non gouvernementales (ONG) ont demandé la libération de Javier Tarazona et d'autres personnes « détenues arbitrairement et injustement dans le pays ». Les autorités ont été appelées à maintes plusieurs reprises, à « libérer les prisonniers politiques » et à reprendre les négociations inter-vénézuéliennes au Mexique. Plusieurs orateurs ont plaidé pour la tenue d’élections libres et transparentes au Venezuela.
D’autres délégations ont dit prendre note avec satisfaction de la coopération et de l'engagement actifs du Venezuela avec les mécanismes des droits de l'homme des Nations Unies, ainsi que de ses progrès pour renforcer la promotion et la protection des droits de l'homme, malgré les problèmes auxquels le pays est confronté.
Une ONG a demandé que les quatre autres structures étatiques [c’est-à-dire celles qui, sur les six identifiées par la Mission, ne sont pas les deux agences de renseignement d’État] mentionnées par Mme Valiñas fassent également l’objet d’enquêtes.
Une délégation a regretté que le rapport de la Mission « renforce la manipulation des questions relatives aux droits de l'homme ». « L'utilisation politisée du Conseil, visant à frapper politiquement le Gouvernement vénézuélien » a également été dénoncée. Des délégations ont réaffirmé leur rejet des mandats du Conseil adoptés sans le consentement des pays concernés et ont plaidé pour qu’il soit mis fin « à la politisation, à la sélectivité et aux doubles standards dans le traitement des droits de l'homme au sein du Conseil ».
Enfin, d’aucuns ont affirmé que le principal obstacle à la réalisation des droits de l'homme au Venezuela est constitué par les mesures coercitives et les sanctions imposées par les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Union européenne et leurs satellites « pour s'ingérer dans les affaires intérieures et déstabiliser la situation du pays sous des prétextes liés aux droits de l'homme ».
*Liste des intervenants : Union européenne, Canada (au nom d'un groupe de pays), Liechtenstein, Suisse, Équateur, France, Allemagne, Irlande, République populaire démocratique de Corée, Australie, Luxembourg, Cuba, Autriche, Fédération de Russie, Chine, Pays-Bas, États-Unis, Nicaragua, Sri Lanka, Royaume-Uni, Argentine , Bélarus, Yémen, République démocratique populaire lao, Espagne, Belgique, Bolivie, Uruguay, Nouvelle-Zélande, Portugal, Suède, Géorgie, Malawi, Iran, Cambodge, Paraguay, Éthiopie, Arabie saoudite, Soudan du Sud, Algérie et Syrie.
Plusieurs organisations non gouvernementales ont aussi pris part au débat : Freedom House, Aula Abierta, Commission internationale des juristes, Amnesty International, Human Rights Watch, Service international pour les droits de l'homme, International Bar Association, CIVICUS: Alliance mondiale pour la participation des citoyens, Fédération internationale des ligues de droits de l’homme et Organisation mondiale contre la torture.
Réponses et remarques de conclusion
MME PATRICIA TAPPATÁ VALDEZ, membre de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits sur la République bolivarienne du Venezuela, a déclaré que la torture restait une pratique courante au Venezuela, de même que les menaces et intimidations utilisées pour contrer les dissidents et opposants politiques.
La toute première mesure à prendre consiste à assurer l’indépendance de la justice ; il faut également permettre aux organisations de la société civile d’agir ; et la communauté internationale doit continuer d’examiner de près la situation, a indiqué l’experte. La Mission d’établissement des faits se félicite que la communauté internationale continue de demander au Gouvernement de rompre le cycle d’impunité et de rendre justice aux victimes, a-t-elle ajouté. Le Gouvernement vénézuélien doit aussi créer un climat propice à la concurrence politique, a-t-elle recommandé.
M. FRANCISCO COX VIAL, également membre de la Mission internationale indépendante d’établissement des faits sur la République bolivarienne du Venezuela, a précisé que le travail de la Mission était basé sur des faits ainsi que sur des sources accessibles qui seront mises à la disposition de toute instance internationale qui serait chargée de faire des enquêtes. M. Cox Vial a regretté que la réforme du système judiciaire vénézuélien ne soit pas allée assez loin. Pour que les auteurs de violations des droits de l’homme rendent des comptes, il a recommandé que le Conseil renouvelle le mandat de la Mission et que les États se dotent d’une capacité à juger des crimes commis au Venezuela en vertu de la compétence universelle.
L’expert a d’autre part estimé que la communauté internationale pouvait très bien exiger la traçabilité de l’or exporté depuis l’Arc minier de l’Orénoque. La Mission d’établissement des faits et le Haut-Commissariat mènent des activités complémentaires, a en outre souligné M. Cox Vial.
Compte rendu de la Haute-Commissaire (sortante) sur la situation des droits de l’homme au Myanmar
Conformément à sa résolution 49/23, Le Conseil des droits de l’homme est saisi d’un compte rendu de la Haute-Commissaire aux droits de l’homme (sortante) sur la situation des droits de l'homme au Myanmar.
Compte rendu
Présentant ce compte rendu, MME NADA AL-NASHIF, Haute-Commissaire aux droits de l’homme par intérim, a indiqué que depuis la dernière mise à jour faite au mois de juin devant le Conseil, le peuple du Myanmar a été pris dans « une rapide spirale descendante faite de souffrances, de peur et d’insécurité croissantes ». « Une action de toute urgence est nécessaire pour inverser cette situation catastrophique et rétablir la paix, la démocratie et le développement durable », a-t-elle déclaré.
Mme Al-Nashif a ajouté que les offensives de l’armée du Myanmar dans tout le pays sont conçues non seulement pour cibler ses opposants, mais aussi pour punir les communautés considérées comme soutenant ces derniers. Les tactiques militaires impliquent de plus en plus des attaques et des armes utilisées aveuglément. L’utilisation croissante de la puissance aérienne et de l’artillerie pendant la saison de la mousson a un impact considérable sur les civils et les zones résidentielles.
La Haute-Commissaire par intérim a notamment détaillé l’incident emblématique du 11 août, documenté par le Haut-Commissariat, qui a vu les forces militaires attaquer, avec notamment des hélicoptères, la présence d’un groupe armé dans le village de Yin Paung Taing, dans la région de Sagaing, ainsi que la frappe aérienne du 16 septembre qui a ciblé une école et un monastère dans le village de Let Yet Kone, dans la même région.
Depuis février 2021, a indiqué Mme Al-Nashif, au moins 2316 personnes – dont 188 enfants - ont été tuées. La peur et l’insécurité généralisées de la population civile ont poussé plus d’un million de personnes - dont 45.000 ont fui vers les pays voisins - à quitter leur foyer et à vivre désormais dans des conditions précaires, sans accès à la nourriture, à l’assistance médicale et à d’autres services de base. Mme Al-Nashif a fait savoir que « la crise humanitaire fait maintenant craindre la famine », avec l’armée qui refuse largement l’accès humanitaire, notamment par les ordres récents de cesser les opérations humanitaires dans le nord et le centre de l'État rakhine.
La Haute-Commissaire par intérim a par ailleurs indiqué que plus de 15 607 personnes ont été arrêtées et environ 12 464 sont toujours en détention. Le nombre de décès des personnes détenues est en constante augmentation, a-t-elle ajouté. Au moins 273 personnes sont mortes dans des lieux de détention officiels et au moins 266 personnes seraient mortes à la suite de raids et d’arrestations dans des villages - dont au moins 40 qui auraient été tuées d’une balle dans la tête. Il y a également 111 cas rapportés de personnes brûlées vives ou après avoir été exécutées, dans ce qui semble être une tactique d’exécutions sommaires et de tentatives de destruction de preuves des crimes commis.
Le système judiciaire du Myanmar contrôlé par l’armée a également été utilisé pour exécuter des opposants, a ajouté Mme Al-Nashif. Ces exécutions, les premières depuis une trentaine d’années, constituent un indicateur important de la régression des droits de l’homme au Myanmar et du mépris complet de l’armée pour le droit international, a-t-elle déclaré.
La relative stabilité de l’État rakhine depuis le coup d’État s’est avérée être de courte durée, a poursuivi Mme Al-Nashif. Le Haut-Commissariat a reçu des informations faisant état de meurtres, de blessures, de détentions arbitraires et de déplacements massifs de civils résultant des affrontements entre l'armée du Myanmar et l'armée d'Arakan, dans plusieurs cantons de l'État rakhine et de l'État chin, ainsi que le long de la frontière, avec des cas signalés de bombardements jusqu’au Bangladesh.
Mme Al-Nashif a rappelé que les communautés minoritaires, notamment les musulmans rohingya et kaman, sont particulièrement vulnérables, l’armée imposant de nouvelles restrictions à la fourniture de l’assistance humanitaire et des biens essentiels dans de nombreux endroits de l’État rakhine.
Mme Al-Nashif a ajouté que lors de la visite de l'ancienne Haute-Commissaire dans les camps de réfugiés de Cox's Bazar le mois dernier, les réfugiés rohingya ont fait part de leur espoir de pouvoir rentrer chez eux lorsque les conditions le permettront. Mais, les conditions pour un retour sûr, durable et dans la dignité ne sont pas réunies, a souligné Mme Al-Nashif, avant de lancer un appel pour que la communauté internationale aide le Bangladesh à assurer la protection, l'éducation et les moyens de subsistance des réfugiés, tout en poursuivant les efforts internationaux en faveur de la reddition de comptes.
Soulignant qu’il reste encore au Myanmar à traiter les causes profondes de la persécution des Rohingya, la Haute-Commissaire par intérim a déploré que ceux-ci soient toujours privés de leurs droits de citoyenneté et de leurs documents d'état civil, ce qui limite leur liberté de mouvement et leur accès à l'éducation et aux services de santé. La plupart des Rohingya de l’État rakhine vivent dans une pauvreté désespérée, ce qui les pousse, à grand risque, à fuir le Myanmar, en payant souvent de grosses sommes d'argent à des trafiquants d'êtres humains. Les chiffres de l'ONU indiquent que les tentatives informelles de départ et les arrestations pour avoir voyagé sans autorisation ont doublé entre 2021 et 2022.
Le cycle des violations doit prendre fin, a déclaré Mme Al-Nashif. Malheureusement, les efforts diplomatiques ont jusqu’à présent donné des résultats limités, a-t-elle estimé, disant espérer que la récente visite au Myanmar et au Bangladesh de l'Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Myanmar permettrait de créer une dynamique. L’Association des nations de l’Asie du Sud-Est doit également redoubler d’efforts pour apporter une aide humanitaire et promouvoir une résolution de la crise, en consultation avec les représentants du peuple et avec le soutien des puissances régionales.
Mme Al-Nashif a réitéré les appels aux militaires pour qu'ils cessent les violences, notamment en imposant un moratoire sur les exécutions, libèrent tous les prisonniers politiques, garantissent l'accès à l'aide humanitaire et ramènent le Myanmar à une démocratie fondée sur le respect des droits de l'homme et de l'État de droit. Elle a en outre exhorté le Conseil à renforcer le mandat de documentation du Haut-Commissariat afin d'améliorer le suivi de la situation et de soutenir les efforts de responsabilisation, y compris le travail du Mécanisme d'enquête indépendant pour le Myanmar.
Débat général au titre des situations des droits de l’homme qui requièrent l’attention du Conseil
Aperçu du débat
Plusieurs délégations se sont dites extrêmement préoccupées par « l'agression militaire à grande échelle non provoquée de la Fédération de Russie contre l'Ukraine ». Des allégations font état d’exécutions sommaires, de disparitions forcées et de tortures commis par les troupes de la Fédération de Russie sur le territoire Ukrainien, a précisé un intervenant. Certains orateurs ont également mis l’accent sur la situation préoccupante des droits de l’homme dans la Fédération de Russie, où les libertés d’expression, de réunion pacifique et d'association sont restreintes et où des personnes sont arbitrairement détenues pour avoir exprimé des opinions ou partagé leurs informations.
Plusieurs délégations ont dénoncé les « prétendus référendums » [dans les régions sous occupation de Donetsk, Lougansk, Kherson et Zaporijjia] et assuré qu’elles n’en reconnaîtraient jamais les résultats. L'attaque de la Fédération de Russie est une attaque contre l'ordre international fondé sur des règles, a-t-il été affirmé. Une délégation a dénoncé l’adoption d’une loi par la Fédération de Russie visant « à priver davantage le peuple russe d'informations indépendantes sur les actions illégales et les atrocités commises par les forces armées russes en Ukraine ».
Les forces armées du Myanmar ont quant à elles été appelées à « prendre des mesures concrètes pour mettre immédiatement fin à la violence, libérer les détenus et rétablir rapidement le système politique démocratique ».
La publication du rapport de la Haute-Commissaire sur la région autonome du Xinjiang, en Chine, a été saluée par plusieurs orateurs, qui ont jugé extrêmement préoccupant le bilan qui s’en dégage s’agissant de la «sévère répression » à l’encontre des défenseurs des droits humains, des intellectuels, des avocats, des journalistes et de bien d'autres.
D’autres délégations ont dénoncé le fait que « certaines puissances » persistent, selon elles, à faire de ce Conseil une arène de confrontation, en menant des campagnes médiatiques négatives afin de brouiller les grands efforts des pays en développement pour faire respecter les droits de l'homme, comme en témoignent les « accusations infondées portées contre la Chine au sujet du Xinjiang » ou encore « la manipulation du discours sur les droits de l'homme pour condamner des pays tels que le Bélarus, la Fédération de Russie, la Chine, le Burundi, l'Éthiopie, l’Érythrée, l'Iran, le Myanmar, le Nicaragua, la République populaire démocratique de Corée, la Syrie ou le Soudan du Sud, que les pays hégémoniques attaquent pour des raisons purement politiques ».
D’aucuns ont dénoncé une politisation et une sélectivité dans le traitement des droits de l’homme, auxquelles il a été demandé qu’il soit mis terme.
Renforcer la capacité des États par l’assistance technique, avec leur consentement, est la meilleure façon d’améliorer la situation des droits de l’homme dans le monde, a-t-il été affirmé.
L’attention a par ailleurs été attirée sur les effets dévastateurs, pour les pays en voie de développement, du changement climatique et de la crise de la COVID-19.
**Liste des intervenants : Pakistan (au nom de l'Organisation de la coopération islamique), République tchèque (au nom de l'Union européenne), Pakistan (au nom d'un groupe de pays), Venezuela (au nom d'un groupe de pays), Azerbaïdjan (au nom d'un groupe de pays), Allemagne, Finlande, France, Chine, Lituanie, Venezuela, République de Corée, Inde, Japon, Luxembourg, Cuba, Pays-Bas, Arménie, Tchéquie, Indonésie, Royaume-Uni, Pakistan, Malaisie, Malawi, Ukraine, États-Unis.
Ce document produit par le Service de l’information des Nations Unies à Genève est destiné à l'information ; il ne constitue pas un document officiel.
Les versions anglaise et française de nos communiqués sont différentes car elles sont le produit de deux équipes de couverture distinctes qui travaillent indépendamment.
HRC22.099F