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LE CONSEIL DISCUTE DE L’ASSISTANCE TECHNIQUE ET DU RENFORCEMENT DES CAPACITÉS DANS LE DOMAINE DES DROITS DE L'HOMME EN HAÏTI

Compte rendu de séance
Il achève son débat général sur le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui est associée

Le Conseil des droits de l'homme a achevé, ce matin, son débat général sur le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, avant de tenir un dialogue interactif avec le Haut-Commissaire aux droits de l'homme, M. Zeid Ra’ad Al Hussein, concernant la situation des droits de l'homme en Haïti. Ce dialogue, tenu dans le cadre du point de l’ordre du jour du Conseil consacré à l’assistance technique et au renforcement des capacités en matière des droits de l'homme, a fait suite à la présentation du rapport du Haut-Commissariat sur l’«élaboration d’un plan d’action national pour la mise en œuvre des recommandations des mécanismes des droits de l'homme en Haïti».

Présentant ce rapport, le Haut-Commissaire a affirmé que peu de progrès ont été faits dans l’élaboration d’un tel plan d’action comme le Conseil avait demandé à Haïti de le faire après l’expiration du mandat de l’Expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Haïti en mars 2017. En dépit de l’assistance apportée par la section des droits de l'homme de la Mission des Nations Unies pour l'appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH), l’absence prolongé d’un point focal de haut niveau en matière de droits de l'homme au sein du Gouvernement et le manque global de stratégie et d’engagement politique du Gouvernement haïtien pour améliorer la situation des droits de l'homme ont limité les progrès, a précisé le Haut-Commissaire, soulignant qu’Haïti a encore des défis majeurs à relever, notamment en matière de droits économiques et sociaux, de lutte contre l’illettrisme et la pauvreté, de justice transitionnelle ou encore en ce qui concerne la surpopulation carcérale et l’impunité.

Intervenant en tant que pays concerné, Haïti a souligné que la question des droits de l’homme constitue l’un des piliers fondamentaux sur lequel repose l’État haïtien depuis la Constitution de 1987. Le pays a cependant souligné que le contexte difficile prévalant sur le terrain contribue trop souvent à annihiler les efforts déployés pour la satisfaction des droits de l’homme des Haïtiens. Haïti a en outre indiqué qu’un processus de recrutement d’un expert national (aux fins de l’élaboration du plan d’action) est en cours. En outre, le Premier Ministre vient de désigner, le 20 juin dernier, le Ministre de la justice et de la sécurité publique comme « point focal ministériel chargé du dossier des droits de l’homme en Haïti »; en cette qualité, ce Ministre devient donc le Coordonnateur du Comité interministériel des droits de la personne (CIDP) et l’intermédiaire auprès des institutions internationales des droits de l’homme sur le terrain. Le combat contre la corruption reste au cœur des préoccupations, a ajouté Haïti, avant de faire part des mesures prises en vue de lutter contre la détention préventive prolongée. Le pays a assuré qu’il continuerait de faire appel à l’assistance technique du Haut-Commissariat.

En tant qu’institution nationale des droits de l'homme, l’Office de la protection du citoyen d’Haïti est également intervenu pour souligner que des mesures urgentes doivent être adoptées pour garantir un minimum de bien-être social pour les personnes les plus défavorisées.

De nombreuses délégations* sont intervenues au cours du dialogue qui a suivi. Si bon nombre d’entre elles ont salué les efforts consentis par Haïti, relevant en outre que le pays avait choisi pour la présente session du Conseil de soumettre lui-même le projet de résolution relatif à l’assistance technique et au renforcement des capacités en sa faveur, il a néanmoins été souligné que des défis persistent, que ce soit dans le domaine judiciaire ou en matière de reddition de comptes, d’extrême pauvreté ou de surpopulation carcérale.

Achevant son débat général au titre du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui est associée, le Conseil a entendu plusieurs organisations non gouvernementales** l’alerter sur des situations spécifiques de discriminations subies par des minorités à travers le monde, notamment dans le sous-continent indien.


Le Conseil poursuivait ses travaux en fin de matinée en engageant son dialogue interactif renforcé sur la situation des droits de l'homme en République démocratique du Congo, avec le Haut-Commissaire et l’équipe d’experts internationaux sur la situation au Kasaï.


Racisme, discrimination raciale, xénophobie et intolérance associée à ces phénomènes: suivi et application de la Déclaration et du Programme d’action de Durban

Fin du débat général

Iraqi Development Organization a dénoncé l’arrestation et la condamnation à la prison à vie de chiites ayant critiqué ouvertement le Gouvernement de Bahreïn. Les autorités de ce pays cherchent à effacer tous les symboles religieux, sociaux et culturels de la majorité chiite. En 2017, elles ont systématiquement harcelé, arrêté, détenu et condamné pas moins de soixante-dix responsables religieux tels Cheikh Mohammed al-Miqdad, Abduljali Al-Miqdad et Saeed al-Nori. L’ONG a appelé Bahreïn à respecter la Déclaration de Durban et la liberté de culte. Americans for Democracy & Human Rights in Bahrain Inc a, elle aussi, dénoncé les harcèlements incessants dont la minorité chiite est la cible à Bahreïn, ainsi que la condamnation à mort d’un membre du clergé chiite.

Khiam Rehabilitation Center for Victims of Torture a attiré l’attention du Conseil sur plusieurs cas de harcèlement d’organisations de la société civile au Koweït, persécutées par les autorités de ce pays. La Fondation Alsalam a dénoncé l’exécution, en Arabie saoudite, d’un responsable chiite qui s’exprimait contre les violences sectaires et en faveur de la non-violence. Il n’y aurait actuellement pas moins de 45 membres du clergé chiite dans les couloirs de la mort saoudiens, tandis que 46 autres auraient été exécutés.

Organization for Defending Victims of Violence a déclaré que des études menées au Royaume-Uni montraient que les crimes de haine contre les musulmans leur causent des problèmes psychologiques, alors même qu’ils rencontrent des difficultés pour accéder à l'emploi et au logement. L'organisation a demandé aux organisations non gouvernementales du Royaume-Uni de trouver des moyens d'assurer l'inclusion sociale des minorités, notamment des musulmans.

La Fédération Humaniste Européenne a dit sa préoccupation en ce qui concerne les migrants athées qui se trouvent actuellement dans des camps dans plusieurs pays européens, et qui risquent de subir des représailles en cas de renvoi dans leur pays d’origine.

United Nations Watch a demandé aux pays arabes de dire « ce qu’ils avaient fait de leurs Juifs ». L’organisation a dénoncé les pogroms dont ont été victimes les Juifs en Algérie, en Iraq, en Syrie, au Yémen, en Libye et dans d’autres pays encore. L’ONG a dénoncé l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), estimant qu’il ne faisait que maintenir les Palestiniens dans leur statut de réfugiés, de génération en génération. Association of World Citizen a affirmé que le livre Mein Kampf d’Adolf Hitler bénéficiait de tous les privilèges en Iran, en dépit de la censure qui règne dans ce pays. Son auteur est présenté comme un esprit libre, à tel point que nombre d’Iraniens se considèrent comme « aryens », a affirmé la représentante.

Institute for NGO Research a regretté que les institutions des Nations Unies continuent de perpétuer la discrimination envers les Juifs. Dans les territoires palestiniens, la haine est telle que les enfants sont entraînés à haïr et à tuer les Juifs, a dit l’ONG.

Le Congrès du monde islamique a déclaré que la discrimination à l’encontre des basses castes et des Cachemiriens était une réalité quotidienne en Inde. Les musulmans du Cachemire sont victimes de nombreux abus sous couvert de la lutte contre le terrorisme, a dit l’ONG, appelant le Conseil à se saisir de cette question. Shivi Development Society s’est inquiétée des nouvelles formes de racisme, de discrimination raciale, de calomnies en ligne et d’autres manifestations d’intolérance en Inde. L’ONG a dénoncé la marginalisation des non-musulmans et des musulmans modérés au Cachemire, ainsi que l’assassinat de femmes et de filles.

L’Association pour l’intégration et le développement durable au Burundi a affirmé pour sa part que le Gouvernement indien cherchait à transformer les communautés vivant dans l’Assam en une « minorité assimilée ». Cela est contraire à la Déclaration de Durban, a affirmé la délégation, estimant cependant que l’Inde pouvait encore corriger cette injustice en assurant l’enregistrement de ces citoyens à l’état-civil.

L’Association des étudiants tamouls de France a indiqué qu’en août 2016, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale avait noté que Sri Lanka se servait de la loi sur la prévention du terrorisme pour discriminer les Tamouls, et que le Comité avait recommandé au Gouvernement d’abolir cette loi. L’ONG attiré l’attention du Conseil sur le sort des Tamouls, qui sont soumis au joug sri-lankais dans leur propre pays.

La représentante d’Action of Human Movement (AHM) s’est présentée comme l’une des mères qui manifestent depuis de 500 jours devant le Palais des Nations de Genève pour obtenir des informations sur leurs proches disparus à Sri Lanka. En dépit de ses promesses, le Gouvernement sri-lankais ne donne aucune nouvelle aux familles. En tant que mère, la représentante a exhorté le Conseil à faire respecter le droit du peuple tamoul à l’autodétermination et à saisir la Cour pénale internationale. La représentante de l’Association Bharati Centre Culturel Franco-Tamoul a exigé que la vérité soit faite et la justice rendue s’agissant de la disparition de membres de sa famille. Elle a prié le Conseil d’aider les victimes et de saisir la Cour pénale internationale.

L’Observatoire mauritanien des droits de l'homme et de la démocratie a déploré que le Gouvernement sri-lankais n’ait pas abrogé la loi contre le terrorisme, une loi contraire aux normes internationales et qui est utilisée pour discriminer et marginaliser les Tamouls. Un projet de loi à l’examen risque de mettre fin à toute opposition en l’assimilant au terrorisme, a mis en garde l’ONG. Society for Development and Community Empowerment a elle aussi dénoncé les violations des droits des Tamouls à Sri Lanka, ajoutant que, récemment, le ministre de la justice avait annoncé vouloir faire disparaître les avocats et les défenseurs des droits de l'homme.

L’Association Solidarité Internationale pour l'Afrique (SIA) a affirmé que le Gouvernement de Sri Lanka continuait ses politiques répressives et discriminatoire contre les Tamouls, notamment des arrestations arbitraires et des disparitions forcées, et même des mesures sans précédent pour criminaliser la commémoration de la résistance nationale tamoule. ABC Tamil Oli a affirmé que le même gouvernement profanait la culture et l’identité des Tamouls, tout en glorifiant les actes génocidaires dont ils ont été victimes. Association Tamil Uzhagam a affirmé que le gouvernement sri-lankais s’était rendu coupable, le 14 août 2006, d’un massacre à l'orphelinat de Chencholai: 61 filles ont été brutalement tuées et 170 grièvement blessées, a déclaré la délégation.

Association Thendral a dénoncé les problèmes posés par l’occupation militaire post-conflit dans le nord de Sri Lanka. La militarisation entraîne des difficultés économiques pour les communautés car les forces armées accaparent également les moyens de subsistance.

International Educational Development a fait remarquer qu’il n’existait pas d’indicateurs ou de définition agréés de l’expression « régime raciste » dans le droit international. C’est une des raisons pour lesquelles le Conseil n’a pas su réagir à la guerre qui a été menée contre le peuple tamoul à Sri Lanka. L’ONG a aussi déploré la discrimination dont est victime le peuple hmong en République démocratique populaire lao contre.

Servas International a observé que lorsque les intérêts politiques deviendront plus importants que les préoccupations au sujet des droits de l'homme, le Conseil aura perdu sa raison d’être. Les membres du Conseil doivent agir ensemble pour appliquer la Déclaration et le Programme de Durban, en priorité et sans concession aucune. Health and Environment Program (HEP) a souligné l’importance des procédures destinées à protéger les victimes du racisme et de l’intolérance. Le Conseil indien d'Amérique du Sud s’est dit déçu que le Rapporteur spécial sur le racisme et le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale aient refusé de se pencher sur le problème de l’apartheid en Alaska.

Assistance technique et renforcement des capacités dans le domaine des droits de l'homme

Dialogue interactif avec le Haut-Commissaire aux droits de l'homme concernant Haïti

Présentation du rapport

Tous les rapports présentés durant la présente session peuvent être consultés sur la page Internet consacrée à la documentation de cette trente-huitième session.

Le Conseil est saisi du rapport du Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme intitulé : « Élaboration d’un plan d’action national pour la mise en œuvre des recommandations des mécanismes des droits de l'homme en Haïti » (A/HRC/38/30)

M. ZEID RA’AD AL HUSSEIN, Haut-Commissaire aux droits de l'homme, a rappelé qu’à la fin du mandat de l’Expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Haïti, en mars 2017, le Conseil avait prié le Gouvernement haïtien de préparer un plan d’action sur la mise en œuvre des recommandations des mécanismes des droits de l'homme, avec l’assistance du Haut-Commissariat. Mais, à ce jour, peu de progrès ont été accomplis dans ce domaine, a regretté le Haut-Commissaire.

La section des droits de l'homme de la Mission des Nations Unies pour l'appui à la justice en Haïti (MINUJUSTH) a bien fourni des financements et été active dans le domaine du renforcement des capacités, mais l’absence prolongée d’un point focal de haut niveau en matière de droits de l'homme au sein du Gouvernement, en plus du manque global de stratégie et d’engagement politique pour améliorer la situation des droits de l'homme, a limité les progrès. Même si le bureau de l’Ombudsman et l’institution nationale des droits de l'homme ont montré un dynamisme et un ferme engagement, le comité interministériel des droits de la personne n’a pas avancé en ce qui concerne l’élaboration d’un plan d’action. Le Haut-Commissariat reste pour sa part engagé à aider, mais souligne qu’un ferme et fort engagement des autorités haïtiennes est essentiel pour pouvoir avancer, a déclaré M. Zeid.

Du point de vue du rapport, le plan d’action devrait se pencher sur les défis majeurs, y compris les droits économiques et sociaux, le droit au développement, la lutte contre l’illettrisme et la pauvreté. Le rapport pointe également les défis en matière de justice transitionnelle et de lutte contre l’impunité. Par ailleurs, des réformes législatives sont urgentes, notamment des mesures concrètes pour aborder la question de la surpopulation carcérale, avec des personnes en détention préventive prolongée en raison de lacunes dans les procédures judiciaires. Le Haut-Commissariat reste en outre préoccupé par les allégations de violences commises par les forces de police, comme celles survenues en 2017 lors des opérations dans les quartiers de Lilavois et Grand Ravine, à Port-au-Prince, et qui à ce jour n’ont toujours pas fait l’objet d’enquête. Pour ces raisons, le Haut-Commissaire a demandé au Conseil de continuer de se saisir de la question et a souligné que le Haut-Commissariat continuerait pour sa part de fournir une assistance technique à Haïti.

Pays concerné

M. PIERRE ANDRE DUNBAR, Représentant permanent d’Haïti auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, a rappelé d’emblée que la question des droits de l’homme constitue l’un des piliers fondamentaux sur lequel repose l’État haïtien depuis la Constitution de 1987. Il a cependant souligné que le contexte difficile prévalant sur le terrain contribue trop souvent à annihiler les efforts déployés pour la satisfaction des droits de l’homme des Haïtiens. Il a en outre partagé les observations figurant dès les premiers paragraphes du rapport concernant l’impact négatif des catastrophes naturelles et les préoccupations suscitées par les retours massifs d’Haïtiens en provenance de l’étranger, s’agissant de la pleine jouissance des droits de l’homme, notamment des droits à un logement convenable, à l’accès à la santé et à l’éducation.

S’agissant du plan d’action, M. Dunbar a indiqué qu’un processus de recrutement d’un expert national (aux fins de l’élaboration de ce plan) est en cours. En outre, le Premier Ministre vient de désigner, le 20 juin dernier, le Ministre de la justice et de la sécurité publique comme « point focal ministériel chargé du dossier des droits de l’homme en Haïti » ; en cette qualité, ce Ministre devient donc le Coordonnateur du Comité interministériel des droits de la personne (CIDP) et l’intermédiaire auprès des institutions internationales des droits de l’homme sur le terrain.

Au sujet du respect de ses engagements envers les organes de traités, Haïti a présenté,en février 2018 son rapport initial au Comité des droits des personnes handicapées concernant les mesures législatives et les politiques publiques mises en place en application de la Convention relative aux droits des personnes handicapées. D’autre part, les préparatifs avancent en vue de la transmission imminente du rapport au Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, dans le cadre du suivi des recommandations formulées par cet organe en 2016. Le rapport périodique au Comité des droits de l’homme devra quant à lui être présenté en octobre 2018, a ajouté le Représentant permanent.

M. Dunbar a ensuite résumé les changements que connaît le pays depuis l’arrivée au pouvoir du Président Moïse, faisant état d’une situation politique relativement stable. Dans ce contexte, il a indiqué que le combat contre la corruption reste au cœur des préoccupations et qu’un train de mesures mis en place à travers un mécanisme d’assainissement de la fonction publique avait permis de récupérer, au cours des derniers mois, des millions de gourdes au bénéfice de l’État haïtien.

Dans le cadre de la lutte contre la détention préventive prolongée, a poursuivi M. Dunbar, la permanence a été instituée, depuis mai dernier, au Cabinet d’instruction dans la juridiction de Port-au-Prince, avec la présence de trois juges d’instruction. La Commission présidentielle d’enquête sur la situation des détenus a identifié de nombreux cas de détenus sans dossiers sur lesquels les autorités judiciaires vont statuer rapidement, a précisé le Représentant permanent. D’autre part, les tribunaux de première instance organisent des assises criminelles, avec ou sans jury, pour juger ceux qui ont des dossiers en souffrance. En outre, le chef de l’État a nommé 41 juges sur recommandation du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire ; il restera à combler la vacance de plus de soixante sièges. Les forces de l’ordre, de leur côté, ont été conviées à mener des actions intensives, dans le respect des droits de l’homme, contre tous les actes de banditisme pour résorber l’insécurité galopante dans les quartiers populeux de la région de Port-au-Prince, a ajouté M. Dunbar.

M. Dunbar a insisté sur les efforts déployés par son pays dans le cadre du programme « La Caravane du Changement » mis en place depuis février 2017 et axé sur la mise en commun des ressources pour la promotion des secteurs porteurs de l’économie nationale et pour le relèvement régional. Il a assuré que son Gouvernement continuerait de faire appel à l’assistance technique du Haut-Commissariat et aux mécanismes des droits de l’homme, avant de conclure en soulignant la nécessité de prendre en compte la nouvelle stratégie des Nations Unies en matière de lutte contre le choléra en Haïti, telle qu’adoptée par l’Assemblée générale par sa résolution 71/161B.

En tant qu’institution nationale des droits de l'homme, l’Office de la protection du citoyen (OPC) d’Haïti a rappelé que le pays avait consenti d’énormes sacrifices afin de satisfaire aux exigences des droits de l'homme. L’OPC a accueilli avec satisfaction la nomination d’un fonctionnaire de haut niveau afin de faciliter l’élaboration du plan d’action national. S’il est vrai que des progrès significatifs ont été enregistrés dans le domaine des droits civils et politiques, il faudra toutefois admettre que l’application des dispositions relatives aux droits économiques, sociaux et culturels demeure une grande préoccupation, a poursuivi l’Office. Il a estimé que des mesures urgentes doivent être adoptées pour garantir un minimum de bien-être social pour les personnes les plus défavorisées, le non-accès aux services sociaux de base étant l’un des facteurs de délinquance. L’OPC s’est par ailleurs réjoui de la conduite de diverses actions pour la prise en compte de diverses catégories de droits, dont ceux de la communauté LGBTI et ceux des personnes âgées.

Débat interactif

L’Union européenne a exhorté le Gouvernement haïtien à faire de l’amélioration des droits de l'homme une priorité, en mettant en œuvre rapidement les recommandations figurant dans le rapport du Haut-Commissaire. La nomination d’un point focal, la situation des détenus en détention préventive, la reddition de compte pour les crimes commis sous la dictature sont des actions nécessaires et bénéfiques à l’amélioration de l’état de droit en Haïti, a insisté l’Union européenne, regrettant que les actions dans ces domaines n’aient pas pu être engagées dans l’année écoulée. Elle a demandé au Haut-Commissaire quels seraient les domaines où l’assistance technique du Haut-Commissariat pourrait se montrer la plus efficace. Au nom du groupe des amis d’Haïti, la France a salué l’initiative prise par Haïti de déposer cette année une résolution sous le point 10 de l’ordre du jour afin de renforcer l’assistance technique que lui apporte le Haut-Commissariat, y voyant un signe encourageant de la volonté politique des autorités haïtiennes de remédier à certains enjeux des droits de l'homme. Le Groupe des amis d’Haïti s’est dit prêt à apporter son appui aux efforts du Gouvernement haïtien dans le domaine des droits de l'homme et a appelé la communauté internationale à apporter son soutien dans ce domaine. Il a demandé au Haut-Commissaire s’il pouvait apporter des éclaircissements sur le calendrier et la nature possible de cette assistance technique.

Le Canada a jugé essentiel que le Conseil utilise tous les outils disponibles dans le cadre de son mandat pour promouvoir et protéger les droits de l'homme en Haïti. Le Canada a appuyé la récente résolution du Gouvernement haïtien de solliciter de l’assistance technique et du renforcement de capacités de la part du Haut-Commissariat pour être mieux à même de s’acquitter de ses obligations. Il a encouragé le Gouvernement haïtien à prendre toutes les mesures nécessaires pour atteindre les objectifs fixés, notamment à travers un calendrier précis. La France a en outre encouragé les autorités haïtiennes à renforcer l’état de droit et à poursuivre la coopération avec le Haut-Commissariat et a appelé le Conseil à adopter par consensus le projet de résolution (sur Haïti) soumis à cette session au Conseil au titre du point 10 de l’ordre du jour. La délégation française a notamment encouragé Haïti à réduire le nombre de détenus en détention provisoire depuis plus de deux ans et à mettre en place des mécanismes de justice transitionnelle pour faire la lumière sur les violations massives des droits de l'homme commises dans le passé ; la France a salué à ce sujet l’engagement pris par les autorités haïtiennes de mettre en place une commission de vérité, justice et réparation. La France a demandé au Haut-Commissaire quelles actions clés il jugeait prioritaires pour que la situation des droits de l'homme puisse être sensiblement améliorée en Haïti.

L’Australie a pris note des progrès réalisés en Haïti pour faire face aux défis en matière des droits de l’homme et a encouragé fortement le Gouvernement haïtien à finaliser le plan d’action. Elle a appuyé la Mission des Nations Unies pour l’appui à la justice en Haïti, mandatée pour assister le Gouvernement dans le renforcement des capacités des institutions de l’état de droit, en particulier dans le domaine judiciaire et dans celui des prisons. L’Australie reste préoccupée par l’augmentation de la détention provisoire, le surpeuplement des prisons et l’augmentation récente du nombre de décès dans le contexte de la privation de liberté. L’Australie a en outre exprimé sa préoccupation face à l’absence de transparence dans la nomination de l’Office de la protection du citoyen. Elle a appelé à veiller à enquêter sur les violences fondées sur le sexe, l’inégalité, la traite et les cas d’esclavage de femmes et d’enfants.

L’Espagne a salué les efforts consentis par Haïti, les jugeant particulièrement tangibles au regard des grandes difficultés rencontrées sur le terrain. Il reste beaucoup à faire pour parvenir à une vitesse de croisière en matière de respect des droits de l’homme, a cependant ajouté l’Espagne, insistant sur la question de l’indépendance des juges.

Le Venezuela a rappelé s’être acquitté de son devoir d’assistance solidaire dans la lutte contre la pauvreté, en effaçant plus de 375 millions de dollars de dette extérieure. Une assistance a aussi été fournie dans le contexte des catastrophes naturelles, notamment lors du séisme qui a frappé Haïti. Il faut néanmoins apporter des réparations aux victimes du choléra et mettre définitivement fin à ce fléau, a insisté le Venezuela. Il a invité les pays à fournir une assistance technique à Haïti, dans le respect des décisions souveraines de ce pays.

Le Mexique a pris note des mesures concernant la détention préventive prolongée et le système judiciaire et s’est dit convaincu que la coopération du Haut-Commissariat et d’autres mécanismes internationaux permettra d’améliorer la situation en Haïti.

Cuba a indiqué que toute discussion sur Haïti doit prendre en considération les besoins et les décisions du peuple haïtien qui, après des siècles de colonialisme, a constitué le premier État souverain de la région. Cuba a demandé à la communauté internationale des pays développés de poursuivre son appui pour le développement du peuple haïtien.

Le Royaume-Uni a déploré le manque de progrès dans l’élaboration d’un plan d’action et encouragé le Gouvernement haïtien à élaborer une stratégie des droits de l’homme. Le Royaume-Uni a en outre plaidé pour que soit assuré un processus transparent pour toutes les nominations en Haïti et a déploré que les détenus en Haïti vivent dans des conditions en-deçà des normes mondiales, subissant des traitements cruels, inhumains et dégradants alors que, souvent, ils n’ont commis aucun délit.

En tant que commandant de la force de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH), le Brésil a réaffirmé son soutien aux Haïtiens et a insisté sur la nécessité d’approfondir l’assistance technique et le renforcement des capacités pour aider la population haïtienne à se développer et à vivre dans la paix et la stabilité. Le Brésil a appelé tous les États à maintenir leur engagement constructif avec Haïti.

Plusieurs organisations non gouvernementales (ONG) ont ensuite pris part au débat. Franciscain International a déploré le manque de volonté des autorités haïtiennes pour mettre en œuvre les recommandations des mécanismes des droits de l'homme, y compris celles de l’Expert indépendant sur la situation des droits de l'homme en Haïti. L’ONG a demandé aux autorités haïtiennes d’inclure la société civile dans la mise en œuvre de ces recommandations. L’Association international des juristes démocrates a pour sa part déploré que les Nations Unies ne tiennent pas leurs promesses et n’assument pas leurs responsabilités en ce qui concerne l’épidémie de choléra qui a frappé le pays et qui a été apportée par les soldats onusiens. Les victimes n’ont pas reçu des réparations, a rappelé l’ONG.

La Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH) a affirmé que plus de la moitié de la population haïtienne vit avec moins d’un dollar par jour et que des dizaines de milliers de personnes vivent dans les 30 camps d’hébergement encore existants mis en place après le séisme de 2010, tandis que les ressources de l’État sont engagées dans des projets de grande envergure, sans consultation des communautés ou de la société civile. Par ailleurs, les trois quarts de la population carcérale vivent dans des conditions que le Comité des droits de l'homme a qualifiées de traitement cruel, inhumain et dégradant. Pour la Rencontre Africaine pour la défense des droits de l'homme la lutte contre la corruption est vitale aux fins de la lutte contre la pauvreté en Haïti et le Haut-Commissariat doit continuer d’assister le pays. Association World Citizen a également déploré l’extrême pauvreté qui frappe la majorité de la population haïtienne. L’ONG a en outre estimé que l’épidémie de choléra qui a fait 10 000 victimes aurait pu être prévenue par les Nations Unies ; aujourd'hui, cette maladie reste endémique en Haïti, a-t-elle souligné.

Réponses et conclusions du Haut-Commissaire

M. ZEID a souligné que le Haut-Commissariat continuerait à soutenir l’élaboration et la mise en œuvre rapide d’un plan d’action national des droits de l'homme et a précisé que le Haut-Commissaire avait conseillé d’y intégrer la question des détentions provisoires et de l’analphabétisme. Il s’est en outre félicité de l’annonce de la désignation du point de coordination pour ce plan d’action au niveau du Ministère de la justice, ce qui montre l’engagement du Gouvernement haïtien.

Quant aux questions prioritaires, le Haut-Commissaire a évoqué le recrutement d’un expert, dont il s’est félicité, et les détentions provisoires prolongées. Il a en outre rappelé la nécessité de vérifier que l’obligation redditionnelle est bien respectée. Nous ne réussirons que s’il y a une volonté politique permanente de la part des autorités haïtiennes, a conclu le Haut-Commissaire.

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*Délégations ayant participé au débat interactif concernant Haiti: Union européenne; France (au nom d'un groupe de pays); Canada, France, Australie; Espagne; Venezuela; Mexique; Cuba; Royaume-Uni; Brésil; Franciscain international; Association internationale des juristes démocrates; Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH); Rencontre Africaine pour la defense des droits de l'homme; Association of World Citizens.

**Organisations non gouvernementales ayant participé au débat général: Iraqi Development Organization; Americans for Democracy & Human Rights in Bahrain Inc; Fondation Alsalam; Organization for Defending Victims of Violence; Khiam Rehabilitation Center for Victims of Torture; United Nations Watch; Congrès du monde islamique; Association of World Citizens; Association pour l'Intégration et le Développement Durable au Burundi; Association des étudiants tamouls de France; Action of Human Movement (AHM); Fédération Humaniste Européenne; Association Bharathi Centre Culturel Franco-Tamoul; L'Observatoire Mauritanien des Droits de l'Homme et de la Démocratie; Society for Development and Community Empowerment; Association Solidarité Internationale pour l'Afrique (SIA); ABC Tamil Oli; Tamil Uzhagam; Association Thendral; International Educational Development; Institute for NGO Research; Servas International; Health and Environment Program (HEP); Conseil indien d'Amérique du Sud; Shivi Development Society.

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

HRC18/108F