Fil d'Ariane
LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME TIENT UNE RÉUNION-DÉBAT SUR LES ENFANTS ET LES ADOLESCENTS MIGRANTS NON ACCOMPAGNÉS
Le Conseil des droits de l'homme a tenu, cet après-midi, une réunion-débat sur les enfants et les adolescents migrants non accompagnés et les droits de l'homme, dont le nombre a atteint un niveau record à l'échelle mondiale. Organisée sous forme de table ronde, la réunion-débat a pour objectif d'identifier les défis et les pratiques optimales des pays d'origine, de transit et de destination, ainsi que les efforts conjoints à envisager, à tous les niveaux, aux fins de la protection des droits fondamentaux de ces enfants et adolescents, a indiqué à l'ouverture de la réunion le Président du Conseil, le Salvadorien Joaquín Alexander Maza Martelli.
Dans ses remarques liminaires, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, M. Zeid Ra'ad Al Hussein s'est déclaré satisfait que le Conseil se penche sur cette question des droits de l'homme et des enfants et les adolescents migrants non accompagnés, dans un contexte où le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) a recensé plus de 300 000 enfants non accompagnés dans 80 pays en 2015, contre 76 000 en 2011. Ces enfants fuient les conflits, les changements climatiques ou migrent de façon volontaire, a-t-il dit. Il a mis en exergue le fait que, faute de mécanismes régissant les migrations, certains se jettent dans les bras des passeurs et de réseaux mafieux qui souvent abusent d'eux ou les soumettent en esclavage.
Dans les pays de transit ou d'accueil, a poursuivi le Haut-Commissaire, les enfants migrants se retrouvent parfois dans les centres de détention de migrants, où ils sont également soumis à des conditions portant atteinte à leur santé mentale et physique. Les politiques de refoulement de migrants leur sont également défavorables, a-t-il encore expliqué, ajoutant que «les refouler, c'est les jeter à nouveau dans l'inconnu ou dans les mains des réseaux mafieux». Face à cette situation, M. Zeid a espéré que les discussions autour du pacte mondial pour la migration sûre, ordonnée et régulière (qui doit être adopté en 2018) tiendront compte de cette problématique.
Parmi les cinq panélistes à la table ronde, animée par Mme Peggy Hicks, Directrice de la Division de l'engagement thématique, des procédures spéciales et du droit au développement au Haut-Commissariat aux droits de l'homme, M. Benyam Dawit Mezmur, membre du Comité des droits de l'enfant, a précisé que le Comité prépare, avec le Comité pour la protection des droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille, une observation générale sur les droits des enfants et mineurs non accompagnés dont le nombre a effectivement bondi ces dernières années. En effet, en 2016, 92% des enfants échoués sur les côtes en Italie étaient non accompagnés, contre 75% en 2015. Soulignant l'urgence pour les États de prendre des mesures significatives, notamment afin de déterminer l'âge de ces mineurs non accompagnés, M. Mezmur a toutefois fait remarquer que certains États avaient recours à des méthodes d'évaluation de l'âge souvent évasives ou expéditives.
La question de l'évaluation de l'âge a également été abordée par une autre panéliste, Mme Cristiana Carletti, Professeure associée de droit international à l'Université de Rome 3, Italie, qui a en outre rappelé que l'article 3 de la Convention relative aux droits de l'enfant, qui traite de l'intérêt supérieur de l'enfant, s'applique de manière égale aux enfants accompagnés, non accompagnés ou séparés.
Autre panéliste, M. Lucio Melandri, conseiller principal pour les situations d'urgence au Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), a indiqué que pas moins de cent mille enfants non accompagnés et séparés ont été arrêtés à la frontière entre le Mexique et les États-Unis en 2015 et 2016; alors que 200 autres enfants ont péri en Méditerranée cette année et que 90 000 enfants non accompagnés et séparés étaient des déplacés internes dans la Corne de l'Afrique. Fort de son expérience sur le terrain, M. Melandri a rappelé que les facteurs qui poussent les enfants à se réfugier - notamment la faim, les conflits, la violence, la pauvreté et les chocs climatiques - ne sont pas prêts de disparaître et iront même en s'intensifiant.
M. Obiora Chinedu Okafor, membre du Comité consultatif du Conseil des droits de l'homme, a souligné que les enfants et adolescents représentent la moitié des réfugiés dans le monde et que les non-accompagnés de moins de 20 ans représentent 15% de tous les migrants. À l'instar de Mme Carletti, il a appelé à passer d'un système de contrôle aux frontières, qui met trop l'accent sur la détention, la rétention et l'expulsion, à une approche fondée sur l'intérêt supérieur de l'enfant.
Précisément, l'intérêt supérieur de l'enfant est encore loin d'être respecté a signalé M. Gholamreza Hassanpour, jeune afghan migrant non accompagné, qui a alerté les membres du Conseil sur les dangers encourus par les enfants réfugiés et migrants non accompagnés. En guise de recommandations, il a sollicité la présence de représentants des services de protection de l'enfance à toute les étapes du voyage, l'accès à des services essentiels comme des interprètes, l'éducation, la santé, le logement et la procédure d'asile, le soutien psychologique et la protection.
De très nombreuses délégations* ont pris part à la réunion-débat. Un groupe de pays ayant connu un afflux massif de migrants à leurs frontières ces dernières années a souligné que l'intérêt supérieur de l'enfant devait être au cœur de toute action et a proposé de débattre de cette question lors des négociations autour du pacte mondial pour des migrations sures, ordonnées et régulières qui doit être adopté l'an prochain. Il a en outre été rappelé que le mois dernier, à Nicosie, 47 pays du Conseil de l'Europe ont adopté un plan d'action sur la protection des réfugié et enfants migrants, qui s'attaque aux principaux défis identifiés et propose des solutions concrètes pour les résoudre. Le Comité international de la Croix Rouge, a conseillé pour sa part de tout faire pour ne pas séparer les enfants de leurs familles et, en cas de séparation, de tout faire pour réunifier les familles.
Le Conseil reprendra ses travaux lundi prochain, 12 juin, à 9 heures pour poursuivre son dialogue interactif, entamé cet après-midi, avec la Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants. Il entendra ensuite les présentations des rapports des titulaires de mandats sur l'indépendance des juges et des avocats et sur la violence à l'égard des femmes, ses causes et ses conséquences.
Réunion-débat sur les enfants et les adolescents migrants non accompagnés et les droits de l'homme
Remarques liminaires
M. ZEID RA'AD AL HUSSEIN, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, s'est déclaré satisfait que le Conseil se penche sur la situation des enfants et adolescents migrants non accompagnés, dans un contexte où l'UNICEF recensait plus de 300 000 enfants non accompagnés dans 80 pays en 2015, contre seulement 76 000 en 2011. Ces enfants fuient les conflits, les changements climatiques ou migrent de façon volontaire, a-t-il dit. Faute de mécanismes de gestion des migrations, certains enfant sont la proie de passeurs et de réseaux mafieux qui souvent abusent d'eux ou les réduisent à l'esclavage, a déploré le Haut-Commissaire. Dans les pays de transit et d'accueil, les jeunes migrants se retrouvent parfois dans des centres de détention où ils sont soumis à des conditions dangereuses pour leur santé mentale et physique. Les politiques de refoulement des migrants leur sont également défavorables: refouler les jeunes migrants, c'est les rejeter à nouveau dans l'inconnu ou dans les filets des réseaux mafieux.
Dans ce contexte, le Haut-Commissaire s'est dit d'avis que les discussions autour d'un «pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières» devraient tenir compte des problèmes rencontrés par les enfants et les adolescents migrants.
Exposés des panélistes
M. BENYAM DAWIT MEZMUR a indiqué que le Comité des droits de l'enfant, dont il est membre, et le Comité des travailleurs migrants étaient en train d'élaborer une observation générale au sujet des droits des migrants mineurs non accompagnés. Il a observé que ce phénomène était en pleine croissance depuis quelques années: en 2016, 92% des enfants échoués sur les côtes italiennes voyageaient seuls, contre 75% en 2015. Cette situation exige que les États prennent des mesures pour déterminer l'âge des mineurs, afin d'être en mesure de leur octroyer le statut et la protection adéquats. Or, certains États ont recours à des méthodes d'évaluation de l'âge imprécises ou expéditives; et, dans certains cas, des migrants mineurs sont emprisonnés en dépit de l'interdiction juridique de détenir des enfants.
M. Mezmur a rappelé aux États leur devoir de protection des enfants. En lieu et place de mesures punitives, les États devraient explorer d'autres pistes conformes à leurs obligations internationales, comme par exemple les mesures d'accompagnement individuel (tutorat) des enfants non accompagnés, a recommandé l'expert.
MME CRISTIANA CARLETTI, Professeure associée de droit international à l'Université de Rome 3, a rappelé que l'article 3 de la Convention relative aux droits de l'enfant posait le principe de l'intérêt supérieur de l'enfant, qui s'applique également aux enfants migrants accompagnés, non accompagnés et séparés. Compte tenu de sa nature juridique transversale, ce principe est nécessairement lié à d'autres dispositions de la Convention dont la mise en œuvre suppose un traitement adéquat des enfants migrants dans les pays de transit et de destination.
S'appuyant sur plusieurs recommandations d'organes conventionnels des droits de l'homme, Mme Carletti a indiqué qu'il existait une littérature et une interprétation claires au sujet du traitement à réserver aux enfants migrants non accompagnés. Il convient en particulier d'établir systématiquement le statut juridique de ces jeunes pour en identifier les besoins élémentaires. Pour ce faire, il faut appliquer des procédures d'identification et d'évaluation de l'âge dans les centres de réception. Il faut en outre employer des personnels dûment formés, notamment des médiateurs culturels, et nommer des tuteurs capables de prendre soin des enfants. Il va de soi qu'il faut aussi tenter de retrouver les membres de la famille des jeunes isolés, a ajouté Mme Carletti.
M. LUCIO MELANDRI, conseiller principal pour les situations d'urgence au Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), a confirmé que le nombre d'enfants qui traversent les frontières internationales avait atteint des niveaux inédits. Pas moins de cent mille enfants non accompagnés et séparés ont été arrêtés à la frontière entre le Mexique et les États-Unis en 2015 et 2016; au moins 200 enfants ont péri en Méditerranée cette année. Les facteurs qui poussent les enfants à se chercher refuge à l'étranger – la faim, les conflits, la violence, la pauvreté et les chocs climatiques – ne sont pas prêts de disparaître, a relevé M. Melandri. Au contraire, certains de ces facteurs s'intensifient comme au Soudan du Sud, en Somalie, au nord du Nigeria et au Yémen, qui connaissent la famine et où 1,5 million d'enfants vivent sous la menace de la malnutrition. C'est pourquoi l'UNICEF vient de publier un rapport intitulé Un enfant est un enfant et de lancer une nouvelle campagne de sensibilisation (#déracinés sur Twitter).
M. OBIORA CHINEDU OKAFOR, membre du Comité consultatif du Conseil des droits de l'homme, a précisé que les mineurs migrants non accompagnés, selon les chiffres de 2015, représentent la moitié des réfugiés dans le monde et 15% de tous les migrants. Les problèmes auxquels ces jeunes font face sont la traite des êtres humains, la brutalité des autorités ou d'acteurs non étatiques, la privation de leurs droits à l'éducation de base et aux soins de santé, et la discrimination raciale. Pour le Comité consultatif, la solidarité et la coopération internationales doivent jouer un rôle fondamental pour améliorer les conditions de vie de ces enfants et adolescents.
Le Comité consultatif recommande d'appliquer le cadre juridique national et international existant de façon plus efficace. Beaucoup d'États doivent encore aligner leur législation sur le droit international. Il faut aussi passer d'un système de contrôle aux frontières, qui met trop l'accent sur la détention, la rétention et l'expulsion, à une approche fondée sur l'intérêt supérieur de l'enfant, au besoin en assurant une formation aux personnels aux frontières. Les États doivent récolter des données ventilées sur la situation de ces mineurs, car elles manquent souvent.
M. GHOLAMREZA HASSANPOUR, ancien jeune migrant non accompagné, a raconté son expérience par le truchement de son interprète, Mme Katerina Giannikopoulou, du Conseil grec pour les réfugiés. Né en Afghanistan en 1990, M. Hassanpour a fui en Iran avec sa famille quand il était enfant. Puis il a dû partir seul pour l'Europe, à l'âge de 16 ans, avec cinq amis. Ils sont passés par la Turquie, se cachant pendant la journée et marchant la nuit. Ils ont été transportés dans un petit camion, arrêtés par l'armée turque et retenus dans un camp où ils avaient froid et peu à manger. Ils ont été reconduits à la frontière avec l'Iran: des contrebandiers les ont retenus dans un camion, les menaçant de torture s'ils ne les payaient pas. Les jeunes ont réussi à gagner Istanbul puis ont été embarqués sur un petit bateau jusqu'à l'île grecque de Lesbos.
Pensant être en sécurité en Europe, ils se sont rendus aux autorités mais ont été frappés puis emmenés dans un centre de détention dans des conditions épouvantables. M. Hassanpour est resté dans ce camp deux semaines avant d'être autorisé à partir pour Athènes, où il a travaillé douze heures par jour comme tailleur. Il souhaitait étudier, et a finalement pu le faire grâce à l'aide d'une ONG. Après beaucoup d'efforts, il a été reconnu comme réfugié puis a obtenu la citoyenneté grecque, le mois dernier.
En racontant son histoire, M. Hassanpour a voulu souligner que la vie des enfants migrants est perpétuellement en danger. Il a adressé ses recommandations au Conseil: que les responsables de la protection des enfants soient présents à toutes les étapes des voyages; que les enfants aient accès à des services essentiels comme des interprètes, un soutien psychologique, l'éducation, la santé et la procédure d'asile; et que les enfants soient protégés et logés.
Débat
L'Union européenne a rappelé l'importance de veiller, avant la prise de toute mesure, au seul intérêt supérieur de l'enfant. Il ne faut pas se contenter de se pencher sur la seule question de la détention, mais aussi lutter contre la violence que les enfants concernés subissent; il faut aussi leur fournir toute l'aide et l'assistance, ainsi que les services scolaires et de santé voulus. Que peut faire la communauté internationale pour réduire les souffrances qu'endurent et les risques qu'encourent ces enfants, a demandé l'Union européenne? La Slovénie, au nom d'un groupe de pays qui ont connu un afflux de migrants à leurs frontières ces dernières années, a elle aussi souligné combien l'intérêt supérieur de l'enfant devait être placé au cœur de toute action. C'est pour cela que le groupe de pays propose, à l'instar du Mexique, que cette question soit discutée au plan international, y compris dans le contexte du pacte mondial pacte mondial pour une migration sûre, ordonnée et régulière, qui doit être adopté en 2018. El Salvador, à titre national, a lui aussi souhaité savoir comment les panélistes envisagent la manière dont cette question pourrait être abordée dans le cadre de ce pacte mondial. Il faut veiller à ce que ce pacte ne conduise pas à imposer des charges sur les pays en développement, a pour sa part prévenu l'Afrique du sud.
Tenant compte de ce principe d'intérêt supérieur de l'enfant, El Salvador au nom de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), a par ailleurs demandé que les pays de transit et d'accueil prennent des mesures en faveur des enfants et ne fassent rien qui exacerberait leur vulnérabilité, notamment en les détenant ou en les refoulant. Il ne faut pas non plus les séparer de leurs parents lorsqu'ils sont accompagnés, ni les exposer à des risques liés à l'exploitation sexuelle, a ajouté le Brésil.
Le Comité international de la Croix Rouge, qui intervient dans le domaine de l'assistance aux enfants mineurs non accompagnés, a souligné que tout doit être fait pour que les enfants ne soient pas séparés de leurs familles, et en cas de séparation, pour réunir les familles. Rappelant avoir démantelé le site de Calais en 2016, la France, suivant les recommandations du Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR), a indiqué avoir mis en place un dispositif spécifique pour les quelque 2000 mineurs isolés identifiés sur ce site: ils ont bénéficié d'un dispositif d'accompagnement social, psychologique et sanitaire, a précisé la délégation française.
Il n'en reste pas moins que 200 000 enfants ont demandé l'asile dans les pays de l'Union européenne sans jamais l'obtenir, a observé la Sierra Leone, rappelant aux États leur obligation au titre de la Convention relative aux droit de l'enfant, de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.
L'Argentine a signalé que dans le cadre du Mercosur, un protocole pour les enfants migrants a été élaboré. Le Conseil de l'Europe a pour sa part souligné que le mois dernier, à Nicosie, 47 pays de cette organisation régionale avaient adopté un plan d'action sur la protection des enfants réfugiés et migrants, qui s'attaque aux principaux défis identifiés et propose des solutions concrètes pour les résoudre.
La Bulgarie a fait savoir que ses institutions, en coopération avec la Croix-Rouge, le Haut-Commissariat aux réfugiés, l'UNICEF et les ONG, travaillaient à trouver des solutions pour intégrer ces enfants mineurs non accompagnés dans les programmes sociaux, éducatifs et sanitaires, les protéger de la violence et de la discrimination, leur fournir un soutien psychologique et favoriser leur développement et leur intégration. La Bulgarie a précisé que le centre d'accueil de Sofia disposait d'une zone protégée et séparée pour ces mineurs non accompagnés et qu'ils étaient ultérieurement placés dans des familles ou des institutions spécialisées pour enfants. La délégation bulgare a demandé aux panélistes de partager les meilleures pratiques pour l'intégration des enfants mineurs non accompagnés.
De son côté, l'Équateur a indiqué avoir adopté une loi organique sur la mobilité humaine, en vigueur depuis février, qui intègre l'intérêt supérieur de l'enfant dans tous les domaines, y compris celui d'une migration non autorisée.
Le Saint-Siège a qualifié d'insulte à la dignité humaine les risques et les mauvais traitements auxquels les enfants migrants non accompagnés font face. Respecter les enfants, c'est respecter l'humanité toute entière, dont ils sont l'avenir, a souligné le Saint-Siège, ajoutant que leur détention ne devrait pas être possible, même pour une courte période. Très préoccupée par la violence dont ces enfants sont victimes, la Bolivie a dit espérer que les résultats de cette table ronde pourraient contribuer à renforcer le pacte mondial pour une migration sûre, ordonnée et régulière.
Particulièrement inquiète de la situation des migrants mineurs en Europe, la Fédération de Russie a appelé ses partenaires européens à faire preuve de responsabilité et a rappelé qu'il fallait dans ce contexte garantir la sécurité, lier aide humanitaire et aide au développement et améliorer les mécanismes de gestion des flux migratoires et la coopération internationale. Pays d'accueil de nombreux réfugiés, la Grèce a indiqué que 2150 mineurs non accompagnés résident actuellement sur son sol et sous protection internationale. Avec le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR), les autorités grecques ont créé d'innombrables centres d'accueil à leur intention, séparés de ceux prévus pour les adultes, et pris toutes les mesures nécessaires pour que ces enfants ne restent pas en détention et qu'ils puissent être scolarisés. Le Honduras a souligné qu'il est lui aussi concerné par ces questions et a rappelé qu'en 2014, le flux d'enfants et adolescents migrants non accompagnés en provenance du Honduras, du Guatemala et d'El Salvador qui cherchent à se rendre vers le Nord a été sans précédent et a même été qualifié de situation d'urgence humanitaire par les États-Unis. La délégation hondurienne a demandé dans quelle mesure la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants était suffisante pour mettre un terme à la détention de ces jeunes.
La Colombie a fait part des mesures qu'elle a prises et des institutions qu'elle a créées pour assurer la protection et le respect des droits des enfants migrants non accompagnés.
L'Iraq a pour sa part déploré cette tragédie humaine que l'on constate dans de nombreux pays et a réitéré son engagement à respecter les traités et conventions relatifs aux droits de l'enfant.
Rappelant être le pays qui accueille le plus grand nombre de réfugiés au monde, la Turquie a plaidé pour une approche globale bien plus complète, estimant que la garantie de la dignité et du bien-être des migrants dépend de la responsabilité de chacun et de la coopération internationale. En 2013, la Turquie a promulgué une loi définissant notamment le permis de résidence humanitaire et la protection temporaire et entend maintenant renforcer la gestion de la migration. Le Portugal a également demandé une coopération de toutes les parties prenantes et conseillé de s'attaquer de façon globale et holistique aux facteurs expliquant les mouvements migratoires, tels que la pauvreté et les catastrophes climatiques. La délégation a demandé aux panélistes comment le jeune migrant peut passer du système éducatif au travail. Les Fidji ont elles aussi soulevé la question du changement climatique, qui explique de nombreuses migrations, soulignant que cette question est de la plus haute importance pour la communauté mondiale.
L'Organisation pour la coopération islamique (OCI), qui s'exprimait par la voix du Pakistan, a indiqué avoir élaboré des lignes directrices à l'intention de ses membres, parmi lesquels figurent des pays d'origine, de transit et de destination des migrants. La Déclaration universelle islamique des droits de l'homme de 1981, la Déclaration du Caire sur les droits de l'homme en Islam de 1990 et la Charte arabe des droits de l'homme de 1994 contiennent toutes des clauses sur les droits de l'homme des migrants, a précisé l'OCI.
La Libye, pays appartenant au groupe susmentionné et pays d'origine et de transit de migrants, a invité la communauté internationale à mettre fin aux guerres qui poussent enfants et adolescents à fuir leurs pays d'origine. La Libye recommande aussi de combattre les passeurs et les groupes terroristes qui exploitent les migrants. Les États-Unis ont appelé pour leur part au partage des bonnes pratiques et d'informations sur les trafics de personnes et sur l'enrôlement de mineurs par les groupes armés et terroristes.
La Jordanie a plaidé pour que l'on s'attaque aux causes de ces migrations d'enfants. Elle a aussi relevé que l'on ne peut se contenter d'appliquer la Convention relative aux droits de l'enfant au détriment d'autres régimes juridiques internationaux. Le principe de non-refoulement ne doit pas non plus être appliqué de manière systématique, sans tenir compte des lois et circonstances nationales, a insisté la Jordanie.
Le Venezuela a estimé pour sa part que tout doit être fait dans l'intérêt de l'enfant. La Chine a appelé les pays hôtes à honorer leurs obligations internationales en la matière.
Equality and Human Rights Commission, la Commission des droits humains de l'Écosse et la Commission des droits de l'homme de l'Irlande du Nord ont rappelé que le Royaume-Uni est en train de négocier sa sortie de l'Union européenne et que pays doit s'assurer qu'il fournit un soutien à l'enfant non accompagné dès son arrivée sur le territoire britannique. Chaque enfant se voyant désigner un tuteur, les autorités britanniques ont le devoir d'enregistrer toute disparition d'enfant. Lorsque l'âge d'un jeune migrant est incertain, il faut qu'il reste présumé enfant tant que des experts n'ont pas prouvé qu'il s'agit d'un adulte.
Parmi les organisations non gouvernementales (ONG) qui se sont exprimées, International Coalition Detention, au nom également de Terre Des Hommes Fédération Internationale, et Défense des enfants – international, a à son tour plaidé pour la primauté de l'intérêt supérieur de l'enfant sur toute autre considération. L'Alliance internationale d'aide à l'enfance s'est pour sa part réjouie de la nouvelle législation italienne sur ces questions qui, selon l'ONG, prend en compte nombre de problématiques relatives aux enfants migrants non accompagnés et défend l'intérêt supérieur de l'enfant. C'est un exemple de bonne pratique qui devrait être repris, a ajouté l'ONG. American Civil Liberties Union s'est pour sa part alerté de la situation des migrants depuis l'élection du Président Trump aux États-Unis, s'inquiétant notamment des poursuites ainsi que des examens lapidaires de leurs dossiers dont ils feraient l'objet.
La Confédération internationale d'organismes catholiques d'action charitable et sociale (Caritas), au nom également de Associazione Comunita Papa Giovanni XXIII, et Dominicains pour justice et paix - Ordre des frères prêcheurs) a demandé au Conseil d'intensifier ses efforts pour protéger ces enfants migrants non accompagnés dans toutes les circonstances et a plaidé pour l'interdiction de la détention des mineurs, accompagnés ou non, et l'interdiction de leur renvoi dans leur pays d'origine. Défense des enfants - international, au nom également du Bureau international catholique de l'enfance, a rappelé que des alternatives à la détention de ces enfants existent toujours et qu'il faut faire respecter l'interdiction d'une telle détention.
L'Istituto Internazionale Maria Ausiliatrice delle Salesiane Don Bosco, au nom également de International Volunteer Organization for Women Education Development, a demandé que les services de base, à savoir la santé et l'éducation, soit garantis et fournis aux mineurs migrants.
Réponse des panélistes
M. MEZMUR a insisté sur l'importance de l'intérêt supérieur de l'enfant, une notion qui doit être au cœur de la prise en charge des enfants migrants non accompagnés. L'expert a relevé que les systèmes de protection des enfants ne sont pas toujours assez solides ni à la hauteur de la gravité des problèmes que pose l'afflux des migrants. M. Mezmur a souligné également que l'exploitation des enfants est d'autant plus forte que les enfants n'ont pas d'issue alternative.
Les enfants doivent absolument bénéficier d'une protection et d'un appui psychologique, a insisté l'expert. M. Mezmur a appelé les États à procéder à des inspections régulières de tous les lieux où des abus risquent d'être commis sur des mineurs migrants et à prendre les mesures nécessaires pour en sanctionner les responsables. Soulignant le rôle potentiel des organisations régionales dans l'application de la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants, il a donné l'exemple de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest, la CEDEAO.
MME CARLETTI a observé que l'Italie faisait face à un défi de taille s'agissant de la gestion de l'afflux massif de migrants. L'Italie applique néanmoins une politique de persévérance et d'ouverture dans ce domaine. Mme Carletti a encouragé les États à appliquer des lois adaptées pour prévenir toute violation des droits des enfants migrants et leur garantir un certain niveau de protection. L'Italie a beaucoup fait dans ce domaine grâce, notamment, à une circulaire du Ministère de l'intérieur prévoyant l'ouverture d'abris temporaires pour les enfants mineurs non accompagnés, en collaboration avec les autorités locales.
M. MELANDRI a observé que les dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant – l'instrument international qui a recueilli le plus grand nombre de signatures et de ratifications – s'appliquent à tous les enfants du monde et ne souffrent aucune exception. Il a observé que l'éducation était sans conteste l'une des meilleures formes d'intégration et d'inclusion. L'expert a attiré l'attention sur la prochaine réunion de Bonn qui sera consacrée aux enfants migrants non accompagnés et permettra des échanges de pratiques optimales dans la prise en charge de ces jeunes.
Il manque actuellement de mesures concrètes et de voies juridiques originales, crédibles et réalistes en matière de migration, a regretté pour sa part M. OKAFOR. L'expert a jugé impossible de dissocier la problématique de la migration des questions sociales et économiques. Il a indiqué que certains pays appliquent d'excellentes politiques favorables aux enfants au niveau national mais pas au niveau provincial et local, comme au Canada. L'apprentissage de la langue est crucial pour toute intégration, a aussi relevé M. Okafor.
M. HASSANPOUR a dit que son voyage avait été l'étape la plus dangereuse de son parcours. M. Hassanpour a constaté que, par rapport à 2005, date de son arrivée en Europe, il existe aujourd'hui davantage de services pour les jeunes migrants. Mais ces services sont loin d'être suffisants car le nombre d'enfants non accompagnés a explosé. Il a aussi remarqué l'absence totale de programmes d'intégration et de services d'encadrement ou de soutien spécialisé, y compris linguistiques, compte tenu de la demande et de l'afflux des migrants. M. Hassanpour a demandé aux États de prendre en charge les besoins essentiels des enfants migrants non accompagnés, pour qu'ils puissent surmonter leur traumatisme.
Modératrice du débat, MME PEGGY HICKS, Directrice de la Division des activités thématiques, des procédures spéciales et du droit au développement au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, a relevé que le jeune Gholamreza Hassanpour s'était exprimé dans la langue de son pays d'accueil, la Grèce, ce qui est déjà un exemple d'intégration. La Déclaration de New York souligne l'importance des besoins des enfants migrants, qu'ils soient séparés ou avec leurs parents. Les principes généraux relatifs aux droits de l'enfant sont cruciaux, en particulier l'intérêt supérieur. Mme Hicks a souligné que la détention d'un enfant migrant est toujours traumatisante, car il ne peut pas comprendre la raison de son enfermement. L'intérêt supérieur de l'enfant doit prévaloir en toutes circonstances. Mme Hicks a lancé un appel de fonds pour permettre la réalisation de l'étude mondiale sur les enfants privés de liberté.
___________
**Les institutions et organisations non gouvernementales suivantes ont pris la parole dans le cadre de la réunion-débat: Equality and Human Rights Commission, la Commission des droits humains de l'Écosse et la Commission des droits de l'homme de l'Irlande du Nord, International Detention Coalition Inc.(au nom également de Terre Des Hommes Fédération Internationale, et Défense des enfants – international); Alliance internationale d'aide à l'enfance; American Civil Liberties Union; Confédération internationale d'organismes catholiques d'action charitable et sociale – Caritas (au nom également de Associazione Comunita Papa Giovanni XXIII, et Dominicains pour justice et paix - Ordre des frères prêcheurs); Défense des enfants – international (au nom également du Bureau international catholique de l'enfance); et Istituto Internazionale Maria Ausiliatrice delle Salesiane di Don Bosco (au nom également de International Volunteer Organization for Women Education Development).
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
HRC17.083F