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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME TIENT UN DÉBAT SUR L'INVESTISSEMENT DANS LES ENFANTS EN RESPECTANT LEURS DROITS AUX NIVEAUX LOCAL, NATIONAL, RÉGIONAL ET INTERNATIONAL

Compte rendu de séance

Le Conseil des droits de l'homme, poursuivant son débat annuel d'une journée sur les droits de l'enfant, a porté son attention cet après-midi sur les modalités d'investissement dans les enfants respectueuses des principes de droits de l'homme aux niveaux local, national, régional et international.

Après la lecture d'un message du Président du Conseil, M. Joachim Rücker, soulignant notamment que le Conseil devait apporter sa contribution dans l'élaboration du programme de développement pour l'après-2015, Mme Amina Mohammed, Conseillère spéciale du Secrétaire général pour l'après-2015, a ouvert le débat en soulignant qu'une occasion unique est offerte de définir le programme de développement pour l'après-2015 en conformité avec les conventions et traités internationaux et que les investissements dans les droits de l'enfant ne doivent pas appréhendés isolément. On ne peut se permettre de laisser qui que ce soit au bord de la route et certainement pas les enfants, a-t-elle ajouté.

Les panélistes suivants ont fait des exposés et répondu aux questions des participants: Mme Stefanie Conrad, spécialiste des questions de citoyenneté et de gouvernance à Plan International; M. Enrique Vásquez, Professeur d'économie à l'Université du Pacifique à Lima (Pérou); M. Marc Dullaert, Président du Réseau européen des défenseurs des droits de l'enfant (ENOC) et Défenseur des droits de l'enfant des Pays-Bas; et M. Yehualashet Mekonen, Chef de l'Observatoire de l'enfant africain à l'African Child Policy Forum. La réunion était animée par M. Peter Sørensen, chef de la Délégation permanente de l'Union européenne à Genève.

Mme Conrad a souligné que certains décideurs attachaient un grande valeur à l'avis des enfants lorsqu'il s'agissait de décider d'investissements, la représentante de Plan International a insisté sur le fait que s'il y a encore une résistance à cet égard de la part de décideurs, certains attachent une grande valeur à l'avis des enfants lorsqu'il s'agit de décider d'investissements, comme le montre un exemple au Brésil, où les élèves de 200 écoles de Recife sont consultés au sujet des investissements de la municipalité.

M. Vásquez a souligné que la réalisation des droits de l'enfant dépendait d'une utilisation optimale des budgets publics. Il a énuméré six bonnes pratiques, dont la première consiste à rendre visibles les enfants dans les statistiques officielles. M. Dullaert, du Réseau européen des Défenseurs des droits de l'enfant, s'est dit inquiet de la situation actuelle des droits de l'enfant en Europe du fait de la crise économique et estimé que les États devraient suivre les recommandations de la Commission européenne pour «investir dans les enfants». M. Mekonen, a pour sa part fait état d'un engagement croissant des États et d'une meilleure réalisation des droits de l'enfant sur ce continent. Cette évolution positive a notamment permis une remarquable réduction de la mortalité infantile en Afrique et à une nette amélioration de leur accès à des services aussi essentiels que la santé, l'éducation et l'eau potable.

Les délégations 1 qui ont participé au débat ont presque toutes mis en avant les mesures prises par leurs gouvernements sur le plan national afin de concrétiser les droits de l'enfant. Elles ont souligné l'importance des investissements en matière d'éducation et de santé en premier lieu, certains États mettant aussi l'accent sur la réforme de la justice pour mineurs afin d'éviter dans la mesure du possible l'incarcération, voire la tenue de procès lorsque cela est possible. Une délégation a souligné que les investissements dans les droits de l'enfant allaient bien au-delà de l'aspect matériel de la dépense publique et du budget, mettant en garde contre l'impact des conflits armés, du changement climatique, des inégalités, des épidémies, de la détérioration de la sécurité alimentaire, de l'argent sale et de l'éclatement de la cellule familiale, entre autres fléaux. Des organisations non gouvernementales se sont alarmées de la situation de l'enfance dans plusieurs pays. L'importance des investissements dans l'éducation a aussi été soulignée.


Demain matin, le Conseil sera saisi des rapports thématiques du Secrétaire général de l'ONU et du Haut-Commissaire aux droits de l'homme et procédera à un débat général sur la promotion et la protection de tous les droits de l'homme.


Réunion-débat sur le thème d'un investissement dans les enfants qui soit fondé sur les droits de l'homme

Déclaration liminaire

Dans une déclaration liminaire lue au nom de M. JOACHIM RÜCKER, du Président du Conseil des droits de l'homme, Mme Filloreta Kodra, Vice-Présidente, a indiqué que la discussion de cet après-midi viserait à illustrer comment le processus d'investissement dans les enfants pouvait être conduit en respectant les principes des droits fondamentaux aux niveau tant local, que national, régional ou international. Il s'agira de mettre en lumière les initiatives et bonnes pratiques liées à l'investissement dans les enfants qui sont basées sur des systèmes transparents, participatifs et responsables et sur des structures de gouvernance permettant une implication active des mineurs, a précisé la Vice-Présidente. Elle a rappelé que la communauté internationale avait reconnu, lors du Sommet mondial de 2005, que la paix et la sécurité, le développement et les droits de l'homme étaient les trois piliers de l'ONU. Ceux-ci sont interdépendants et se renforcent mutuellement: il ne saurait y avoir de développement durable sans droits humains et pas de réalisation des droits de l'homme sans développement durable, a insisté Mme Kodra. Il n'est donc pas étonnant que le rapport de synthèse du Secrétaire général de décembre 2014 intitulé «La Route vers la dignité» reflète ces interdépendances, a-t-elle fait observer. Nombre des objectifs envisagés sont étroitement liés au travail du Conseil des droits de l'homme à Genève, a-t-elle souligné. Avec en ligne de mire la finalisation et la mise en œuvre du programme de développement pour l'après-2015, le Président du Conseil est convaincu que le Conseil peut apporter sa pierre à l'édifice, a-t-elle conclu.

Exposés des panélistes

MME AMINA MOHAMMED, Conseillère spéciale du Secrétaire général sur le programme de développement pour l'après-2015, a raconté avoir grandi dans le nord du Nigéria où elle avait bénéficié d'une excellente instruction, ce qui lui permet aujourd'hui de pouvoir s'exprimer devant le Conseil. Que s'est-il produit pour que les jeunes d'aujourd'hui n'aient apparemment plus cette chance ; comment comprendre que certains d'entre eux se laissent entraîner dans des combats dévoyés, a-t-elle alors interrogé? Cela doit mobiliser notre attention en vue d'analyser correctement ce phénomène, a-t-elle insisté. S'agissant de la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement, le verre est à la fois à moitié plein et à moitié vide, a-t-elle affirmé. À la base, rien n'est possible tant que l'on n'a pas des enfants bien nourris, a-t-elle souligné. Nous savons que la relation entre les enfants et le développement durable est celle d'une symbiose, a-t-elle ajouté, soulignant combien les enfants sont particulièrement vulnérables aux dysfonctionnements et aux crises de la société dans laquelle ils vivent. Mme Mohammed a souhaité que les objectifs de développement durable pour les prochaines décennies soient définis tout en relevant le défi du changement climatique. Elle a mis l'accent sur le rôle décisif que devront jouer les parlements, au niveau national, dans l'allocation des crédits en faveur du développement. Une occasion unique est offerte de définir le programme de développement pour l'après-2015 en conformité avec les conventions et traités internationaux, a-t-elle souligné. Les investissements dans les droits de l'enfant ne doivent pas appréhendés isolément, a-t-elle rappelé. On ne peut se permettre de laisser qui que ce soit au bord de la route et certainement pas les enfants, a conclu la Conseillère spéciale du Secrétaire général.

MME STEFANIE CONRAD, Conseillère pour les questions de citoyenneté et de gouvernance auprès de Plan International, a souligné que le tiers des 7,2 milliards de Terriens étaient des enfants, dont un bon nombre travaillent, dont certaines encore adolescentes sont déjà mères de famille – des jeunes qui doivent parfois prendre des décisions existentielles pour survivre ou faire vivre leur famille. Il est probable que ceux des délégués ici présents qui ont des enfants aient pu avoir à demander leur avis à leur progéniture face à des investissements familiaux importants devant être opérés, a-t-elle fait observer, avant de rappeler que les enfants ont le droit de participer à l'élaboration et au suivi des budgets. Pourtant, il est tout aussi probable que l'idée de consulter les jeunes filles et les jeunes garçons dans le cadre des processus budgétaires soit susceptible de faire froncer les sourcils de nombreuses personnes présentes dans cette salle, a-t-elle ajouté. Mme Conrad a souligné que certains décideurs attachent néanmoins une grande valeur à l'avis des enfants, lorsqu'il s'agit de décider d'investissements ; ainsi, au Brésil, les élèves de 200 écoles de Recife sont-ils consultés au sujet des investissements de la municipalité, a-t-elle fait valoir. Mme Conrad a précisé que, dans des pays comme le Ghana et le Kenya, Plan International avait soutenu et formé des enfants et des jeunes pour qu'ils soient en mesure d'analyser des budgets et d'assurer le suivi des dépenses.
M. ENRIQUE VÁSQUEZ, professeur d'économie à l'Université du Pacifique de Lima (Pérou), a souligné que la réalisation des droits de l'enfant dépendrait d'un usage optimal des budgets publics. Concrètement, pour atteindre cet optimum, la première des six bonnes pratiques qu'il a identifiées consiste, avant tout, à rendre visibles les enfants dans les statistiques officielles. Une deuxième bonne pratique consiste à élaborer des programmes publics qui mettent les enfants à l'abri des fluctuations liées aux cycles économiques, a-t-il indiqué. En troisième lieu, a ajouté M. Vásquez, les enfants doivent participer à la définition des priorités budgétaires, ce qui se fait désormais couramment dans plusieurs pays latino-américains, cette expérience novatrice ayant démarré au Brésil. Cela nécessite de créer davantage d'espaces participatifs au niveau local, a-t-il précisé. Quatrièmement, a poursuivi le professeur d'économie, il convient d'opter pour une programmation budgétaire fondée sur des objectifs concrets et s'inscrivant dans un cadre d'exercice pluriannuel, ce qui exige une articulation entre les différentes entités publiques afin de viser et d'atteindre prioritairement la réalisation des droits de l'enfant. En cinquième lieu, M. Vásquez a fait observer que sans le recours et le libre accès à l'information statistique, il est impossible de suivre ni de mesurer l'impact de l'investissement social en faveur de l'enfance. Enfin, il convient de jeter des ponts avec les organismes multilatéraux, les banques de développement et les entités financières afin qu'ils incorporent tous l'objectif des droits de l'enfant dans leurs politiques et programmes, a souligné M. Vásquez.

M. MARC DULLAERT, Président du Réseau européen des défenseurs des enfants (ENOC) et Défenseur des droits de l'enfant des Pays-Bas, a déclaré que la reconnaissance des enfants comme titulaires de droits aux termes de la Convention relative aux droits de l'enfant avait constitué un progrès très important. Il faut désormais considérer les enfants comme le capital le plus important pour l'avenir de chaque État, a-t-il ajouté. En outre, les enfants ne doivent pas seulement être des titulaires de droits; ils doivent aussi être des acteurs et reconnus comme ayant un potentiel énorme pour la société, a-t-il souligné. Trop souvent, a déploré le Président de l'ENOC, les États ne reconnaissent que du bout des lèvres les droits des enfants et considèrent en fait ces derniers comme des citoyens de seconde zone. M. Dullaert s'est dit inquiet de la situation actuelle des droits de l'enfant en Europe, du fait de la crise économique qui affecte le continent. Citant les statistiques d'Eurostat, il a fait état de 19 216 000 enfants menacés de pauvreté sur le continent, soit environ un enfant sur cinq dans l'Union européenne. Or, a-t-il rappelé, quand un enfant vit dans la pauvreté, ses droits à un niveau de vie décent sont bafoués, y compris en matière d'alimentation, d'habillement, de logement, d'éducation, de santé, d'assistance juridique, de sécurité sociale ou encore de protection contre toutes les formes de violence.

Au nom des 42 défenseurs des enfants de 33 pays européens réunis au sein de l'ENOC, M. Dullaert s'est donc dit très inquiet car la réponse apportée par les États à la crise économique et financière, avec l'adoption de mesures d'austérité, a entraîné une augmentation du nombre d'enfants pauvres et socialement exclus, les enfants étant à cet égard proportionnellement plus affectés encore que la population dans son ensemble. L'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe l'a d'ailleurs reconnu, a insisté le Président de l'ENOC. Il a regretté que ni la Commission européenne, ni le Fonds monétaire international n'aient mesuré l'impact sur les droits de l'enfant des accords d'assistance conclus entre les États de la zone euro, alors que des études en ce sens auraient pu inciter à limiter, pour les enfants, les conséquences négatives des mesures prises.

M. Dullaert a ensuite attiré l'attention sur un certain nombre de recommandations faites par l'ENOC. Ainsi, est-il recommandé que les États prennent des mesures nationales conformes aux résolutions de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe afin de supprimer la pauvreté infantile en Europe. Tous les États devraient adopter un plan national stratégique pour combattre la pauvreté et l'exclusion sociale des enfants, a-t-il souligné. La Stratégie du Conseil de l'Europe pour les droits de l'enfant, qui doit être adoptée cette année, ainsi que le prochain agenda pour les droits de l'enfant de l'Union européenne devraient mettre l'accent sur la pauvreté et les effets de la crise s'agissant des enfants, a en outre recommandé M. Dullaert. Enfin, les États européens devraient mettre en place des «budgets de l'enfant» qui identifient clairement (à l'aide de lignes budgétaires distinctes) les ressources du budget qui sont allouées aux droits de l'enfant. Les enfants ont droit à de telles mesures; tout est une question de priorité, donc de volonté et de vision politiques des États, car «l'avenir des enfants est notre capital le plus précieux», a conclu M. Dullaert.

M. YEHUALASHET MEKONEN, Chef de l'Observatoire de l'enfant africain, African Child Policy Forum, a rappelé une formule de l'Union africaine, selon laquelle investir aujourd'hui dans les enfants, c'est investir dans la paix, la stabilité, la sécurité, la démocratie et le développement durable. L'Afrique a fait des progrès méritoires dans le domaine des droits de l'enfant, notamment après l'adoption de la Convention relative aux droits de l'enfant, a-t-il souligné, citant une récente étude de son organisation qui fait état d'un engagement croissant des États et d'une meilleure réalisation des droits de l'enfant. Ces développements positifs se sont notamment traduits par une réduction remarquable de la mortalité infantile en Afrique et par une nette amélioration de l'accès des enfants à des services aussi essentiels que la santé, l'éducation et l'eau potable. Toutefois, malgré ces points positifs, des millions d'enfants africains restent confrontés quotidiennement à de multiples contraintes, a poursuivi M. Mekonen. Ainsi, en Afrique, la mort d'un enfant sur dix continue de procéder de causes évitables et l'exploitation des enfants est largement répandue alors que très peu d'efforts sont faits pour les protéger de ce point de vue. Les groupes d'enfants les plus vulnérables, handicapés ou sans parents, sont ignorés des programmes publics, a ajouté M. Mekonen. Enfin, a-t-il déploré, l'éducation avant le primaire (c'est-à-dire au niveau préscolaire), qui joue un rôle important dans le développement cognitif des enfants, ne concerne qu'un enfant africain sur cinq.

L'investissement dans les enfants n'est pas à la hauteur des besoins, a poursuivi M. Mekonen, déplorant que les dépenses dans l'éducation ne représentent en moyenne que la moitié de ce qui avait été convenu à Dakar. En outre, 70% des filles n'ont pas accès à l'éducation secondaire et la qualité de l'éducation se dégrade à tous les niveaux, a-t-il fait observer. En outre, a-t-il relevé, malgré une amélioration des investissements dans le domaine de la santé, le niveau reste insuffisant, au regard des besoins, dans de nombreux pays ; il en va de même pour les investissements dans la protection sociale. Si une allocation adéquate, c'est-à-dire suffisante, de ressources est un aspect de la question, la bonne utilisation des fonds en est un autre, a poursuivi M. Mekonen. Il a indiqué que selon une étude de la Banque mondiale, jusqu'à 30% des ressources allouées à l'éducation primaire n'atteignent pas leurs bénéficiaires, le matériel le plus basique restant parfois indisponible. Pourtant, a-t-il admis, un certain nombre de pays à faible revenu font tout ce qu'ils peuvent pour fournir de meilleurs services à leurs enfants. M. Mekonen a cité en exemple le Ghana et surtout le Rwanda.

Si l'investissement d'aujourd'hui dans les enfants est le développement durable de demain, il convient à cette fin de développer des programmes qui soient physiquement intellectuellement intégrés, a déclaré M. Mekonen, insistant sur la nécessité d'investir dans des mécanismes efficaces qui garantissent la participation des enfants aux décisions qui les concernent. Il s'agit là d'un moyen d'instiller une culture du respect de soi et des autres, sans laquelle il n'est pas possible de bâtir des communautés, a-t-il conclu.

Débat interactif

L'Équateur, au nom de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes, a déclaré que les investissements dans l'intérêt des enfants sont non seulement une obligation juridique mais présentent aussi un gain économique. Les États doivent donc tout faire pour garantir le minimum de droits aux enfants et à leur famille. Les entreprises également ont le devoir de pourvoir et de répondre à ces obligations. Cuba a souligné que plus de 17 000 enfants de moins de 5 ans meurent chaque jour de causes évitables, ce qui signifie que leurs droits de base n'ont pas été respectés; il faut donc une coopération internationale pour que ces droits soient respectés. Les pays développés doivent en effet remplir leurs obligations internationales et reverser 0,7% de leur PNB à l'aide publique au développement, comme ils s'y sont engagés, afin que les investissements dans l'intérêt de l'enfant soit assurés, a dit l'Algérie, qui a par ailleurs souligné que 25% de son budget était consacré aux ministères impliqués dans les questions liées à l'enfance; l'éducation à elle seule reçoit 20% de ce budget.

La Colombie a pour sa part investi plus d'un milliard et demi de dollars en faveur des jeunes et des enfants; l'éducation bénéficie cette année du budget le plus important de l'État, soit 13%. Le Kazakhstan consacre 60% de son budget total aux œuvres sociales, tandis que Monaco a consacré plus de 5% du budget de l'État à l'éducation en 2013. Au Qatar, les œuvres sociales occupent le premier poste budgétaire de l'État, alors qu'au Soudan, tout enfant de moins de 5 ans bénéficie de la couverture maladie universelle.

Le niveau d'investissement d'une nation pour ses enfants est aussi un indicateur du degré de civilisation, a dit le Bahreïn, ajoutant que les objectifs dans ce domaine devraient être ambitieux. La Bulgarie en ce qui la concerne accorde une priorité aux questions relatives à l'enfance, à travers notamment un plan et une stratégie nationale qui inclut par exemple des mesures d'aide en matière d'assistance juridique pour les enfants. L'Angola, qui a engagé un processus de collecte de données, a demandé le renforcement de la coopération avec les institutions internationales compétentes pour aider le Gouvernement dans cette tâche. La Sierra Leone a recommandé que chaque procédure spéciale accorde une place particulière aux droits de l'enfant et en tiennent compte dans les missions liées à leurs mandats.

Le Ghana joue un rôle de premier plan dans la lutte en faveur de l'éradication du travail des enfants, particulièrement des pires formes en Afrique subsaharienne grâce à l'assistance de l'Organisation internationale du travail, ce qui demeure un défi en raison des pratiques et croyances traditionnelles. L'Équateur, a souligné l'obligation des États d'investir dans les droits de l'enfant, faisant valoir qu'il avait effectué un investissement social sans précédent depuis 2007, ce qui a permis d'obtenir des résultats prometteurs. L'Australie a indiqué que son premier Commissaire national à l'enfance avait été nommé en 2013. Par ailleurs, le Gouvernement a alloué plus de deux milliards de dollars depuis 2008 pour améliorer l'accès à une instruction maternelle de qualité.

L'Indonésie a souligné que l'éducation jouait un rôle important dans la protection des droits de l'enfant. La Constitution stipule que l'État doit obligatoirement allouer 20% de son budget annuel à l'éducation. Les Maldives ont souligné que l'enseignement gratuit et obligatoire avait permis de scolariser 98% des enfants, l'archipel bénéficiant d'un des taux d'alphabétisation les plus élevés du monde. Un effort a aussi été fait en matière de santé.

La Malaisie a mis en avant elle aussi ses deux principales politiques, à savoir la Politique nationale de l'enfance et la Politique nationale de protection de l'enfance. Un Conseil consultatif des enfants a aussi été mis en place afin de conseiller le Gouvernement. Le Monténégro a évoqué son programme en faveur de la réforme de la justice des mineurs, vieux de 18 mois, qui a permis une diminution de plus de 20% des jeunes traduits en justice en une année.

L'Égypte a déclaré que les investissements dans les droits de l'enfant allaient bien au-delà de l'aspect matériel de la dépense publique et du budget. De tels investissements seraient irréalistes et incomplets si l'on omettait de prêter attention à des dimensions telles que l'impact des conflits armés, du changement climatique, des inégalités planétaires, des épidémies, de la détérioration de la sécurité alimentaire, de l'argent sale et de l'éclatement de la cellule familiale.

Organisations non gouvernementales

S'agissant des organisations non gouvernementales, l'Alliance internationale d'aide à l'enfance, au nom de plusieurs autres organisations non gouvernementales1, a rappelé qu'en 2012, 69 millions d'enfants sur les 174 millions que compte l'Amérique latine et les Caraïbes avaient été affectés par la pauvreté, dont 27 millions par la pauvreté extrême, ce qui signifie que plus d'un enfant sur deux a subi une atteinte à ses droits. Face à l'augmentation des inégalités et des discriminations que connaît la région, l'ONG recommande aux États de garantir les processus budgétaires qui accordent la priorité aux investissements en faveur des enfants et de leur famille aux revenus les plus bas, d'accorder la priorité à des systèmes de protection sociale qui garantissent le droit de chaque enfant à la sécurité sociale, et de mobiliser des ressources nationales par une fiscalité efficace et progressive, qui fasse contribuer davantage ceux qui en ont les moyens. Elle demande également que les enfants puissent participer au processus budgétaire.

L'Organisation mondiale contre la torture – OMCT, au nom également de Défense des enfants – international, a remercié tous ceux qui ont soutenu l'étude mondiale sur les enfants privés de liberté et a souligné qu'il fallait nommer un expert indépendant pour mener cette étude. Le Congrès juif mondial est convaincu que l'éducation doit servir de pont entre les cultures et les religions en apportant des valeurs de tolérance et d'acceptation. Il a aussi dit sa conviction qu'une éducation de qualité doive encourager l'imagination et la créativité.

La Fondation Assalam, dans une déclaration conjointe, a attiré l'attention sur la pratique de la torture, les sévices et les mauvais traitements sur des mineurs détenus au Moyen-Orient, y compris pour arracher des preuves contre des suspects. Les gouvernements de la région devraient aborder sérieusement ces problèmes et prendre des mesures appropriées. Südwind Entwicklungspolitik a attiré l'attention sur la situation en République islamique d'Iran où la lutte contre la pauvreté demeure incomplète: ainsi, le recensement de 2011 a montré que plus de 900 000 enfants âgés de 6 à 14 ans n'étaient pas scolarisés. Le Conseil mondial de l'environnement et des ressources a mentionné la situation de la région du Gilgit Baltistan à laquelle le gouvernement pakistanais dénie tout cadre constitutionnel, la zone étant disputée avec l'Inde. À l'heure actuelle, la moitié de la population est illettrée et 83% des écoles ne sont pas fonctionnelles. Il a appelé la communauté internationale à soutenir la population de la région. Human Rights Advocates s'est alarmé de la détention d'enfants migrants non accompagnés originaires d'Amérique centrale et du Mexique entrant illégalement aux États-Unis. Elle a mis en cause le caractère discriminatoire des pratiques des gardes-frontière américains.

Drepavie a appelé à mettre en œuvre des moyens afin d'améliorer une meilleure prise en charge de la drépanocytose, maladie génétique la plus répandue dans le monde et qui concerne plus de 50 millions de personnes. Elle exhorte les pays concernés à mettre en place des programmes nationaux ou à renforcer les programmes existants.

Réponses et conclusions des panélistes

MME MOHAMMED a rappelé à quel point il est utile de pouvoir mesurer l'efficacité des investissements réalisés en faveur de l'enfance.

Mme Mohammed a déclaré que la coopération internationale avait permis d'obtenir des succès, notamment dans le cadre du partenariat pour l'éducation. Il est donc important que les États organisent une réflexion pour intégrer la problématique de l'investissement pour les enfants dans le programme de développement pour l'après 2015. Mais pour que cette réflexion soit complète, il faut des données ventilées, car la question des investissements pour les enfants ne peut être abordée comme d'autres problématiques d'investissement. Le secteur privé doit également prendre part à cet effort, tenant compte que l'investissement pour les enfants ne rapporte pas de profits immédiats, a-t-elle dit.

MME CONRAD a elle aussi insisté sur la notion d'efficacité des investissements réalisés en faveur de l'enfance et a invité les États à associer des enfants aux orientation et décisions les concernant, en leur permettant non seulement de donner leur appréciation sur les services fournis et les investissements prévus, mais aussi de participer à la surveillance de l'application des mesures prises. Le contenu de l'éducation doit permettre aux jeunes de devenir de véritables citoyens et de participer aux procédures budgétaires, a insisté Mme Conrad.

Mme Conrad a déclaré que les objectifs du développement durable prolongent les objectifs de l'investissement dans l'intérêt des enfants. Mais pour y parvenir, il faut comprendre quelles sont vulnérabilité spécifiques souffrent les enfants dans chaque pays. Car les programmes qui ciblent les populations en général sont souvent moins performants. Il faut aussi comprendre les jeunes, car il y a un risque de voir la frustration finir en violence ou s'exprimer autrement.

M. VÁSQUEZ a estimé qu'il convenait de procéder à une compilation des bonnes pratiques. Il faut d'abord rendre visibles les enfants, leur donner une identité, a-t-il souligné, faisant observer que certains États ont des expériences utiles à faire partager dans ce domaine. Il faut ensuite savoir identifier les services publics qui concourent à assurer le respect et la promotion des droits de l'enfant et assurer leur fourniture, a poursuivi M. Vásquez. Là encore, l'important n'est pas seulement la quantité des ressources allouées, mais aussi la qualité associée à leur utilisation, a-t-il souligné. Enfin, il conviendrait de voir comment peut être mesuré l'impact des mesures prises et comment les gouvernements, la société civile et les enfants eux-mêmes peuvent accéder à l'information dans ce domaine. M. Vásquez a préconisé l'adoption de «budgets par résultats», c'est-à-dire associés à un objectif de résultats précis et permettant des adaptations en conséquence.

Pour M. Vásquez, il est clair qu'il faut augmenter les ressources et bien les gérer. Cela implique d'adopter des politiques fiscales tenant compte de ces problématiques. Mais cela exige aussi une planification, une mise en œuvre et un contrôle de ces politiques. «Les riches doivent payer plus» et cet argent doit être consacré à ceux qui en ont le plus besoin. Il faut aussi élargir l'assiette fiscale, afin que chacun participe à l'effort. Pour la mise en œuvre, des données ventilées sont nécessaires car elles permettent de mieux mettre en œuvre les investissements. Les gouvernements doivent aussi lutter contre la corruption ou l'évasion fiscale. Car «toute ressource perdue ne va pas là où on en a besoin», a-t-il dit.

M. DULLAERT a précisé le rôle des médiateurs ou défenseurs des enfants, expliquant qu'ils jouent un rôle important dans la collecte des données et ont donc une influence sur les orientations budgétaires. Il a recommandé à tous les États de créer un «budget de l'enfance», ce qui suppose des instruments de mesure précis. «N'attendez pas pour investir dans les enfants, sans quoi on risque de parler de générations perdues», a-t-il averti.

M. Dullaert a déploré que lorsqu'on parle d'enfants pauvres, on n'évoque jamais les pays riches. Or près de 90 millions d'enfant sont menacés de pauvreté dans les pays européens, a-t-il souligné, invitant ces pays à prendre des mesures pour remédier à cette situation.

M. MEKONEN s'est dit ravi de la volonté affichée par les intervenants d'échanger les expériences et d'assurer un suivi des mesures prises. Il a rappelé que, dans les pays en développement, l'investissement dans l'enfance se fait pour une bonne part à partir des ressources extérieures (issues de l'aide au développement), ce qui est préoccupant car, on l'a vu, en période de crise, l'assistance extérieure faiblit et l'investissement dans l'enfance s'en trouve fortement affecté. M. Mekonen a donc préconisé que, même dans les pays en développement, l'investissement dans l'enfance se fasse sur la base de ressources nationales. Il faut aussi investir dans l'enfance en fonction de faits tangibles, a-t-il en outre souligné ; or, il n'existe pratiquement pas d'observatoires de l'enfance en Afrique, sauf dans le nord du continent, a-t-il fait observer. M. Mekonen a également mis l'accent sur le manque de coordination entre les différentes institutions impliquées dans l'action en faveur de l'enfance, ce qui – a-t-il souligné – se traduit par un grand nombre d'occasions manquées.

M. Mekonen s'est félicité du constat commun selon lequel la question des enfants dépend du programme de développement durable. L'absence d'investissements aujourd'hui risque de coûter cher dans le futur en termes économiques et sociaux, a-t-il prévenu. Il faut donc revoir les priorités, programmes et méthodes, tout en adoptant une approche plurisectorielle. Dans ce contexte, l'échange d'expériences et de bonnes pratiques est nécessaire dans le cadre de la coopération internationale, a-t-il aussi plaidé.

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1 Les délégations suivantes ont participé au débat de ce matin: Équateur (au nom de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes), Cuba, Colombie, Bulgarie, Monaco, Algérie, Kazakhstan, Angola, Bahreïn, Qatar, Sierra Leone, Soudan, Équateur, Australie, Malaisie, Ghana, Indonésie, Égypte, Monténégro, Maldives, Alliance internationale d'aide à l'enfance (au nom de plusieurs autres organisations non gouvernementales1), Alsalam Foundation, Organisation mondiale contre la torture – OMCT (au nom également de Défense des enfants – international), Verein Südwind Entwicklungspolitik, Congrès juif mondial , Conseil mondial de l'environnement et des ressources, Human Rights Advocates Inc., Maarij Foundation for Peace and Development, Drepavie.


1Déclaration conjointe: Alliance internationale d'aide à l'enfance, Mouvement international ATD Quart Monde, Association genevoise pour l'alimentation infantile, Groupe des ONG pour la Convention relative aux droits de l'enfant, et Plan International.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

HRC15/030F