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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME SE PENCHE SUR LE DROIT DE L'ENFANT DE JOUIR DU MEILLEUR ÉTAT DE SANTÉ POSSIBLE

Compte rendu de séance
Il entame ainsi une journée annuelle de réunions consacrées aux droits de l'enfant

Le Conseil des droits de l'homme a entamé ce matin sa journée annuelle de réunions consacrées aux droits de l'enfant, en tenant une réunion-débat le droit de l'enfant de jouir du meilleur état de santé possible.

Ouvrant les débats, la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, Mme Navi Pillay, a présenté le rapport qu'elle préparé sur le sujet à la demande du Conseil, soulignant notamment que les deux tiers des 6,9 millions d'enfants qui meurent chaque année dans le monde avant l'âge de cinq ans pourraient être sauvés par un traitement ou des mesures de prévention. Le risque de mourir avant l'âge de cinq ans est dix-huit fois plus élevé dans les pays en développement que dans les pays développés, a-t-elle poursuivi, précisant que quelque 300 enfants meurent toutes les heures de malnutrition à travers le monde. Cela est inacceptable, a déclaré Mme Pillay, appelant à des mesures concrètes et urgentes de la part des États. La Haut-Commissaire a également souligné qu'en 2010, il y avait 42 millions d'enfants en surpoids dans le monde et que ce chiffre continue d'augmenter, faute d'activités menées dans le domaine de l'éducation à la consommation.

Le débat, qui était animé par le Dr. Richard Horton, rédacteur en chef de la revue médicale britannique The Lancet, a compté avec la participation des panélistes suivants: Mme Flavia Bustreo, Directrice générale adjointe à la santé de la famille, des femmes et des enfants à l'Organisation mondiale de la santé (OMS); M. Gustavo Giachetto, Directeur du programme sur la santé des enfants au Ministère de la santé publique de l'Uruguay; M. Ignacio Packer, Secrétaire général de la Fédération internationale Terre des hommes; Mme Najat Maalla M'jid, Rapporteuse spéciale sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants; Mme Selina Amin, Directrice de projet à Plan International Bangladesh; ainsi que deux adolescents, Tama Mercier, une jeune Haïtienne, et Jonas, jeune Bolivien.

Mme Bustreo a dénoncé la persistance du phénomène inacceptable des fillettes qui meurent en donnant naissance à un autre enfant; clairement, il s'agit de parler de mariages et de grossesses précoces, a-t-elle insisté. Mme Amin a elle aussi souligné que le mariage des enfants constitue une violation des droits de l'enfant. Les statistiques à cet égard sont consternantes, un enfant sur trois étant marié précocement dans les pays en développement, a-t-elle fait observer, avant de déplorer que l'éducation sexuelle soit bien trop souvent absente des programmes scolaires. Mme M'jid a quant à elle souligné que les personnels de santé ne sont pas toujours suffisamment formés pour détecter les signes directs et indirects révélant l'exploitation sexuelle. M. Packer a pour sa part souligné qu'il est possible de parvenir à un accès universel à la santé dans les pays en développement à condition qu'existe une volonté politique à cette fin. Une augmentation de 10% des ressources allouées à la santé suffirait à parvenir à un accès pour tous à la santé sans qu'il ne soit nécessaire de demander aux usagers de participer aux frais, a-t-il affirmé.

Au cours du débat, les pays qui se sont exprimés se sont essentiellement attachés à présenter leurs politiques et leurs actions en faveur de la santé de l'enfant. Certains intervenants ont souhaité qu'à l'avenir, les rapports qui seront présentés au Conseil concernant ces questions tiennent davantage compte des différents points de vue existants, notamment pour ce qui a trait à l'éducation sexuelle, le Groupe des pays africains et le Groupe arabe déplorant, pour leur part, que le rapport de la Haut-Commissaire ne tienne pas dûment compte des préoccupations, spécificités et valeurs régionales.

Les délégations des pays suivants ont pris la parole: Thaïlande, Uruguay (au nom du Groupe des pays d'Amérique latine et des Caraïbes), Suisse, Soudan, Arménie, Jordanie, Turquie, Qatar, États-Unis, Slovénie, République arabe syrienne, Gabon (au nom du Groupe africain), Union européenne, Bahreïn (au nom du Groupe arabe), Paraguay, République du Congo, Allemagne, Émirats arabes unis, Népal, Estonie, Sri Lanka, Suède (au nom d'un groupe de pays), Haïti, Norvège et la République islamique d'Iran, ainsi que l'Organisation de la coopération islamique, l'Union européenne et le Conseil de l'Europe. La Commission nationale des droits de l'homme du Maroc ainsi que les organisations non gouvernementales suivantes se sont aussi exprimées: Human Rights Watch, Caritas International, Défense des enfants – International et Organisation internationale de perspective mondiale.


Avant de reprendre cet après-midi sa réunion annuelle consacrée aux droits de l'enfant, le Conseil se penchera, au cours d'une séance supplémentaire de la mi-journée, sur des rapports qui lui sont soumis concernant la violence à l'encontre des enfants et la vente d'enfants.


Débat annuel sur les droits de l'enfant, consacrée au droit qu'a l'enfant de jouir du meilleur état de santé possible

Remarques d'introduction

MME NAVI PILLAY, Haut-Commissaire aux droits de l'homme, a rappelé que le droit à la santé est un droit reconnu par la Déclaration universelle des droits de l'homme et par l'article 12 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Les deux tiers des 6,9 millions d'enfants qui meurent chaque année dans le monde avant l'âge de cinq ans pourraient être sauvés, par traitement ou prévention, a-t-elle souligné. Le risque de mourir avant l'âge de cinq ans est dix-huit fois plus élevé dans les pays en développement, a-t-elle poursuivi, précisant que toutes les heures, quelque 300 enfants meurent de malnutrition à travers le monde. Cela est inacceptable, a déclaré Mme Pillay, appelant à des mesures concrètes et urgentes de la part des États.

En 2010, a poursuivi la Haut-Commissaire, il y avait 42 millions d'enfants en surpoids dans le monde. Ce chiffre continue d'augmenter, faute d'activités menées dans le domaine de l'éducation à la consommation, a-t-elle souligné. La communauté des États doit par conséquent se pencher sur toutes ces questions, sans oublier les autres enfants, tels ceux des rues, ceux qui se trouvent dans les hôpitaux ou encore ceux qui se trouvent dans des situations d'extrême pauvreté; leur vulnérabilité particulière doit être reconnue et abordée comme telle, a insisté Mme Pillay. Selon elle, les défis d'aujourd'hui nécessitent une coopération entre tous les acteurs pertinents: États, familles, institutions ou encore secteur privé.

Le Conseil est saisi du rapport de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme sur le droit de l'enfant de jouir du meilleur état de santé possible (A/HRC/22/31) qu'il avait demandé à la Haut-Commissaire de préparer sur la question faisant l'objet du débat de la réunion annuelle consacrée aux droits de l'enfant.

Panélistes

MME FLAVIA BUSTREO, Directrice générale adjointe à la santé de la famille, des femmes et des enfants à l'Organisation mondiale de la santé (OMS), a rappelé que la mortalité infantile a diminué de moitié depuis le début de la décennie 1990. Mais un phénomène inacceptable persiste, a-t-elle aussitôt ajouté, à savoir celui des fillettes qui meurent en donnant naissance à un autre enfant. Clairement, il s'agit de parler de mariages et de grossesses précoces, a insisté Mme Bustreo. Évaluant à 10% la part des grossesses qui touchent des filles de mois de 18 ans, elle a indiqué que 30% des décès maternels à travers le monde concernent les filles de cette tranche d'âges. L'OMS a observé que les progrès enregistrés au niveau global ne se produisent pas ou ne se répercutent pas chez les enfants les plus défavorisés; les enfants et jeunes adolescents n'ont pas toujours accès à la santé, a indiqué Mme Bustreo. L'une des raisons qui explique cette situation est que la ratification par les États des instruments internationaux pertinents ne garantit pas à elle seule une traduction concrète sur le terrain en termes d'application des dispositions prévues par ces instruments.

M. GUSTAVO GIACHETTO, Directeur du programme sur la santé des enfants au Ministère de la santé publique de l'Uruguay, a indiqué que son pays a adopté une réforme du secteur de la santé dont le but est d'accroitre l'accès à la santé pour tous. Cette réforme cible particulièrement les femmes et les enfants, avec des mesures très concrètes, a-t-il fait valoir. Ainsi, toute une série d'actes obligatoires et de prestations sont définis dans le cadre de cette réforme, avec un cadre évolutif tout au long du processus de développement de l'enfant. Des programmes de formation, de sensibilisation et de fourniture de services ont été également mis en place, a ajouté M. Giachetto, citant notamment un programme de lutte contre le tabac, l'alcool et autres drogues.

M. IGNACIO PACKER, Secrétaire général de la Fédération Internationale Terre des hommes, a estimé qu'il est possible de parvenir à un accès universel à la santé dans les pays en développement, à condition qu'existe une volonté politique à cette fin et que des mesures fortes soient prises. La simple mise à disposition de ressources ne saurait suffire: ce qu'il faut, c'est à la fois un cadre, mais aussi une pérennité des financements et la réalisation d'investissements dans l'amélioration de la qualité des soins. Des organisations internationales et des gouvernements ont conseillé aux pays en développement de demander des frais aux usagers de la santé; mais ce n'est pas la bonne voie à suivre, a déclaré M. Packer. Une augmentation de 10% des ressources allouées à la santé suffirait à parvenir à un accès pour tous à la santé sans qu'il ne soit nécessaire de demander aux usagers de participer aux frais, a-t-il souligné, précisant que ce chiffre est tiré de l'exemple d'un pays comme le Burkina Faso.

TAMA MERCIER, adolescente haïtienne de 16 ans, s'est présentée en langue créole comme «jeune leader et pair éducateur soutenue par l'Organisation de perspective mondiale Haïti». Elle a souligné que les défis empêchant les enfants de jouir pleinement du droit à la santé provenaient essentiellement de trois facteurs: l'absence de continuité de l'État du fait d'une instabilité gouvernementale; la difficulté d'accès aux soins de santé; et les problèmes économiques.

JONAS, jeune Bolivien, a indiqué s'occuper d'un réseau d'adolescents dans la localité de Monte Agudo. Il a souligné que sans accès aux soins de santé, il n'est possible d'accomplir aucune des tâches qui attendent les jeunes en tant qu'êtres humains. Des décès pourraient être évités, en particulier dans les milieux autochtones, en agissant sur les coûts prohibitifs des établissements de santé et des traitements, a-t-il souligné. Jonas a souligné que représenter les jeunes de Monte Agudo lui a permis d'acquérir une connaissance des droits humains. «On dit toujours que nous (les jeunes) sommes l'avenir; mais n'oubliez pas que nous sommes aussi le présent», a-t-il conclu.

MME NAJAT MAALLA M'JID, Rapporteuse spéciale sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, a souligné que les violences sexuelles constituaient la plus grave atteinte au droit à la santé: maladies urogénitales, avortements clandestins, sans parler des troubles du comportement. Elle a expliqué comment le corps médical pouvait s'efforcer de détecter les cas d'une telle violence, alors qu'une détection précoce n'est pas toujours aisée. Les personnels de santé ne sont, en outre, pas nécessairement suffisamment formés à cette détection permettant de reconnaître les signes directs et indirects révélant l'exploitation sexuelle. La protection des enfants est pluridisciplinaire et le corps médical joue un rôle clé dans la mesure où il doit signaler les cas à la justice et permettre ainsi au juge de prendre les sanctions appropriées, a insisté la Rapporteuse spéciale. Cela explique l'importance de la collaboration entre médecine et justice, même si le «corps soignant» a un rôle prééminent, a-t-elle conclu.

MME SELINA AMIN, Directrice de projet à Plan International Bangladesh, a expliqué que le mariage des enfants constituait une violation des droits de l'enfant. Les statistiques à cet égard sont consternantes, a-t-elle souligné, rappelant que dans les pays en développement, un enfant sur trois est marié précocement. L'ironie est que cela procède, pour les parents des fillettes en particulier, d'une volonté de les protéger du risque d'agression sexuelle, a fait observer Mme Amin. Ainsi, a-t-elle poursuivi, une petite fille peut-elle un jour jouer avec ses copines et, le lendemain, se retrouver mariée avec un homme deux fois plus âgé qu'elle. Elle se retrouve confrontée à une vie sexuelle à laquelle elle n'est absolument pas préparée, sans parler de risques pour sa santé, y compris celui d'être infectée par le VIH-sida. Il faut mettre un terme à cette pratique, a insisté Mme Amin. Dans de nombreuses régions du monde, l'éducation sexuelle est absente des programmes scolaires, alors que cela devrait faire partie du programme d'enseignement de base, a-t-elle affirmé.

Animateur du débat, le DR. RICHARD HORTON, rédacteur en chef de la revue médicale britannique The Lancet, a résumé les exposés des intervenants, en affirmant que cette exigence de réaliser le droit à la santé des enfants était tout à fait à la portée des États et de la communauté des nations.

Débat interactif

La Thaïlande a insisté sur la nécessité de concevoir la santé comme faisant partie intégrante du développement socioéconomique et non pas uniquement comme étant l'absence de maladie. Aussi, convient-il de veiller à ce que tous les enfants aient accès aux biens et services de santé, à partir d'une approche axée sur les droits, a-t-elle insisté. Dans ce contexte, la Thaïlande veille au bien-être des enfants des différents groupes ethniques et porte davantage d'attention à la coopération entre États et avec tous les partenaires, en incluant les enfants.

L'Uruguay (au nom du Groupe des pays d'Amérique latine et des Caraïbes - GRULAC) a renvoyé aux divers instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme qui traitent des questions de santé et a invité les États à créer un climat propice à la réduction de la mortalité infantile et à traiter comme il se doit des questions liées à la violence et à l'éducation sexuelles. La couverture de santé universelle, avec des interventions de santé efficaces et accessibles, doit devenir une priorité pour tous les pays, a déclaré l'Uruguay, attirant par ailleurs l'attention sur les conclusions pertinentes de la Conférence de Rio + 20 concernant la lutte contre la pauvreté et la résolution des causes sous-jacentes à la crise économique.

Le Paraguay, le Népal et la République du Congo ont décrit leur arsenal juridique qui vient renforcer les dispositions constitutionnelles en faveur des droits de l'enfant. Dans ce dernier pays, un parlement des enfants a été mis en place en septembre 2003 qui leur permet de participer aux différents séminaires et ateliers sur les questions de l'enfance et aux réunions internationales portant sur les programmes de coopération avec le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF). Sri Lanka a pour sa part indiqué avoir instauré un code de protection et de promotion de l'allaitement maternel. L'Estonie a fait valoir que dans le pays, 95% des enfants sont vaccinés et que les soins de santé y sont gratuits pour les femmes et les enfants. En Haïti, ce sont 85% des enfants qui sont vaccinés.

La Suisse a souligné que l'éducation sexuelle et les informations concernant la santé sexuelle et procréative, qui font partie de l'éducation générale en Suisse, aident les jeunes à agir de façon responsable et à prendre des décisions informées. Ce type d'éducation renforce en outre la capacité des enfants et des adolescents à gérer les images liées à la sexualité diffusées au sein de la société (nouveaux médias, Internet) et contribue à prévenir le VIH-sida et d'autres maladies sexuellement transmissibles ainsi que des grossesses non désirées. La Suisse a par ailleurs affirmé que chez les enfants, une éducation sexuelle adaptée à l'âge contribue aussi à prévenir les abus sexuels, lorsqu'est abordée la question des relations et du consentement individuel. La Suisse a par ailleurs souligné que depuis le mois de juillet 2012, la Suisse a introduit dans son Code pénal une nouvelle disposition relative aux mutilations génitales féminines, qui envoie un signal fort contre cette grave violation des droits de l'homme, permettant même la poursuite des auteurs de mutilations commises à l'étranger, y compris si ces actes ne sont pas punissables dans le pays où ils ont été commis. La Suède, au nom d'un groupe transrégional, a pour sa part appelé à l'éradication des pratiques de discrimination à l'encontre des fillettes et des femmes, telles que les mutilations sexuelles ou les mariages forcés et précoces. Les objectifs du Millénaire pour le développement ne pourront pleinement être réalisés que si les droits de l'enfant à la santé sont préservés, a souligné la Suède. Dans ce contexte la Norvège a jugé prioritaire la réduction du nombre particulièrement élevé des enfants qui meurent de maladie prévisible.

Les Émirats arabes unis ont pour leur part souligné qu'adultes et enfants ont besoin d'être écoutés. Les familles et autres prestataires sociaux sont les cadres les plus appropriés pour éviter que les enfants n'adoptent de mauvais comportements, ont-ils en outre affirmé.

Le Soudan a présenté les différents programmes qu'il exécute conformément à la nouvelle législation relative aux droits fondamentaux et aux droits de l'enfant. Les efforts en la matière se sont caractérisés par un accroissement de l'enveloppe budgétaire consacrée aux soins de santé des enfants; mais le Soudan a rappelé avoir eu à faire face à des conflits dans plusieurs régions, à l'absence d'eau potable et à des difficultés d'ordre budgétaire. L'Arménie a indiqué que son programme national pour le développement de l'enfant a été révisé et mis à jour dans le contexte de la mise en œuvre d'une politique de promotion et de protection de l'enfant. L'Arménie a fait part de l'introduction dans ce pays d'un système de protection sociale unifié, qui a été élargi à toutes les régions et a été consolidé pour tout ce qui a trait aux soins de santé, au développement psychomoteur et à l'assistance aux enfants ayant des besoins spécifiques. La Jordanie a indiqué que sa stratégie nationale fondée sur les droits et besoins des enfants couvre tous les cycles de la vie, dès la grossesse. Le Gouvernement jordanien s'est engagé à assurer les meilleures normes possibles de santé de l'enfant, dans le cadre du respect de la dignité de tous les membres de la société, a rappelé la Jordanie.

La Turquie a fait valoir qu'en septembre 2010, lors de l'amendement de la Constitution turque, les droits de l'enfant y ont été inscrits en tant que droits distincts et prioritaires. Les violences faites aux enfants font l'objet d'une ligne téléphonique gratuite 7 jours sur 7 et l'enregistrement des naissances est systématique, a indiqué la délégation.

Le Qatar a souligné que la stratégie nationale de santé du pays pour les années 2011-2016 vise à la mise en place d'un système de haute qualité pour les femmes et les enfants. Dans ce contexte, l'État prend en charge tous les aspects du développement de l'enfant et a le souci de faire grandir les enfants dans un environnement sûr et sain. Le Qatar souhaiterait néanmoins que les prochains rapports qui seront présentés ici concernant ces questions tiennent davantage compte des diversités de vues, notamment en ce qui concerne l'éducation sexuelle. La République arabe syrienne a déploré que le rapport de la Haut-Commissaire ne soit pas à la hauteur des attentes et mentionne l'accès des adolescentes à l'avortement sans tenir comte des risques pratiques. La Syrie a par ailleurs dénoncé le détournement des ressources en eau dans le territoire arabe occupé; les entraves à l'accès des enfants palestiniens à des services de santé de qualité; ainsi que les difficultés auxquelles se heurtent les familles et les enfants à cause de l'occupation étrangère. L'Iran a souligné que le nombre d'enfants ciblés par les conflits armés doit aussi retenir l'attention. Dans ce contexte, le représentant de l'Organisation de la coopération islamique (OCI) s'est étonné que le rapport de la Haut-Commissaire ne fasse pas référence à la situation des enfants palestiniens. Le Gabon (au nom du Groupe des pays africains) a rappelé les clauses de la Charte africaine du bien-être de l'enfant. Le continent africain déploie des efforts considérables pour améliorer la santé de l'enfant, a-t-il souligné; mais il n'en demeure pas moins confronté à une série de problèmes - d'ordre financier en particulier – qui font que l'Afrique ne sera pas en mesure d'atteindre l'objectif 4 du Millénaire pour le développement. Le rapport de la Haut-Commissaire, pour sa part, ne tient pas dûment compte des préoccupations et valeurs africaines, a en outre affirmé le Gabon. Le Bahreïn, au nom du Groupe arabe, a quant à lui rejeté le contenu du rapport présenté par la Haut-Commissaire en ce sens qu'il ne tient pas compte des spécificités nationales et régionales. Les pays du Groupe arabe rejettent en outre les termes employés dans le rapport qui empiètent sur la souveraineté des États.

Les États-Unis ont souligné que leur politique visant l'épanouissement de l'enfant se fonde sur une approche qui prend en compte tous les cycles de l'enfance. Le dépistage de conditions nocives comme le tabagisme ou la toxicomanie chez la mère fait partie de la politique de santé, ont-ils ajouté. Les États-Unis ont tenu à saluer la baisse des taux de mortalité maternelle et infantile dans certains pays en développement, en particulier en Afrique.

La Slovénie s'est félicitée de la participation d'enfants au présent débat du Conseil et a soulevé un certain nombre de questions constituant des enjeux en matière de santé des enfants, comme la violence ou la stigmatisation. L'Allemagne s'est enquise de ce que peuvent faire les États pour protéger les enfants, tant au niveau législatif qu'au niveau de la prise de mesures concrètes. L'Union européenne a souligné que la jouissance par les enfants de leur droit à la santé est un préalable à la jouissance de leurs autres droits. L'Union s'est enquise auprès des panélistes d'exemples de discriminations ayant eu un impact sur le droit des enfants à la santé; qu'en est-il en outre de l'obligation redditionnelle s'agissant de ces questions, tant au niveau international qu'au niveau régional, a-t-elle demandé?

Enfin, le Conseil de l'Europe a dénoncé le phénomène de la sélection du sexe des enfants avant leur naissance, soulignant qu'il s'agit là d'un grave problème, en particulier dans les pays asiatiques. Préférer avoir un garçon aboutit à un grave déséquilibre sociologique et démographique, a-t-il averti.

La Commission nationale des droits de l'homme du Maroc a indiqué que la politique nationale marocaine relative aux enfants, qui repose sur les dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant, a été révisée à l'issue de l'adoption de la nouvelle Constitution de juillet 2011, ce qui a permis aux populations les plus vulnérables de bénéficier d'un accès accru à des services de santé de meilleure qualité. Pour autant, le secteur de la santé souffre d'une pénurie en personnel médical et paramédical, ainsi que d'une disparité entre zones urbaines et rurales, a ajouté la Commission. Elle a rappelé qu'elle vient de publier deux rapports relatifs aux droits des enfants dans les unités psychiatres, pour l'un, et dans les centres de protection des enfants, pour l'autre.

Parmi les organisations non gouvernementales qui se sont exprimées, Human Rights Watch a pointé du doigt une série d'entraves en termes d'accès des enfants à des services de santé répondant à leurs besoins, notamment dans le secteur de la pédiatrie. L'organisation a insisté sur le droit de l'enfant à vivre dans un environnement sain et a attiré l'attention sur l'impact de la pollution et de l'exposition au mercure et à d'autres substances toxiques qui occasionnent des maladies aux effets dévastateurs, souvent chroniques, comme le saturnisme. Elle a rappelé aux gouvernements leurs obligations quant à la réglementation du secteur privé dans ce contexte.

Caritas International a noté que suite à la crise économique mondiale, certains pays ont réduit leurs prestations de santé aux migrants ou les ont rendues payantes, alors que les familles migrantes n'ont pas les moyens de payer leurs soins de santé. Cette situation met en danger la santé de l'enfant, a prévenu l'organisation, avant d'exhorter les pays d'accueil à assurer un accès gratuit aux soins pédiatriques pour les enfants de migrants.

Défense des enfants – International, au nom d'un groupe d'organisations non gouvernementales, a rappelé que les enfants en détention constituent un groupe particulièrement vulnérable à qui des droits, y compris celui à la santé, sont déniés. L'évaluation de la situation de ces enfants doit être une priorité, a souligné l'organisation, appelant les États à envisager, pour ces enfants, d'autres solutions que la détention. L'Organisation internationale de perspective mondiale, s'exprimant aussi au nom d'un groupe d'organisations non gouvernementales, a appelé le Conseil à envisager la mise en place, pour la surveillance de la mortalité et de la morbidité infantiles, d'un mécanisme similaire à celui qu'il a créé pour la mortalité et la morbidité maternelles.

Réponses et commentaires des panélistes

MME BUSTREO s'est félicitée du fait qu'il y ait consensus sur le caractère essentiel de l'accès tant à l'éducation (en matière de santé) qu'à la santé elle-même. Il convient alors de chercher comment peut être mesuré cet accès universel et c'est là que surgissent des lacunes béantes, a-t-elle poursuivi. En effet, il est fréquent dans nombre de pays en développement que l'on ignore jusqu'aux dates et lieux de naissance des enfants, a notamment souligné la Directrice générale adjointe à la santé de la famille, des femmes et des enfants à l'OMS. Elle a rappelé que les organisations internationales et autres institutions spécialisées ont l'obligation de partager leurs connaissances et compétences. Elle a par ailleurs cité en exemple de programme particulièrement réussi celui mené au Brésil et désormais de renommée mondiale: Bolsa familia, qui verse aux familles des subventions assorties de conditions comme celle d'envoyer leurs enfants à l'école ou de rechercher un travail. Mme Bustreo a par ailleurs exhorté au resserrement de la coopération Sud-Sud, entre pays ayant des moyens et problèmes comparables.

M. GIACHETTO a indiqué que son pays mène, s'agissant des droits de l'enfant, y compris le droit à la santé, une politique multisectorielle complète qui tient compte des facteurs sociaux. Les réformes entreprises en Uruguay visent à mettre un œuvre un système complet de soins à l'enfance, en privilégiant une réflexion et une approche intersectorielles, a-t-il insisté. Pour ce qui est de l'impact de la discrimination sur la santé des enfants, le Directeur uruguayen du programme sur la santé des enfants a attiré l'attention sur la nécessité de recenser les groupes vulnérables et leurs besoins en matière de soins de santé. Le principe d'équité est particulièrement important pour la définition de services de base devant être mis à la disposition de tous, sans distinction et indépendamment de la race, du sexe et de l'origine de l'individu.

M. PACKER a pour sa part souligné que la création d'un poste de médiateur est certes un moyen fort de recueillir le point de vue des enfants et des familles; mais encore faut-il qu'on donne à une telle institution les moyens d'agir, d'intervenir et de se faire réellement entendre. Le Secrétaire général de la Fédération Internationale Terre des hommes a préconisé que soit étudiée la manière dont les individus conçoivent la santé, notamment les migrants qui proviennent souvent des minorités. Il convient de s'employer à diffuser des informations couvrant toute la panoplie des services de santé auprès de toutes les communautés, y compris en interpelant les chefs communautaires.

MME M'JID a souligné que si les États doivent certes s'engager à lutter contre les différentes formes de violence sexuelle – qu'il s'agisse des viols en temps de guerre, des mutilations génitales ou d'autres formes de violences sexuelles –, cela ne saurait suffire; il faut en effet que ces engagements soient suivis d'effets. À cet égard, l'existence d'un cadre juridique approprié est fondamentale, a-t-elle ajouté. En outre, la coopération entre États est capitale, car ces violences ne sauraient être plus longtemps tolérées. Relevant une diversité de points de vue manifeste dans le dialogue interactif, la Rapporteuse spéciale sur la vente d'enfants a plaidé en faveur d'une clarification de la manière dont il faut comprendre les principes relatifs aux droits de l'enfant. Un des problèmes majeurs à cet égard reste celui de l'éducation sexuelle et de la santé génésique, tant pour les pays musulmans que pour les pays catholiques, où l'on perçoit parfois l'éducation sur ces questions comme un encouragement à la sexualité. Mme M'jid a rappelé que l'information s'agissant de ces questions contribue à diminuer les risques et à les prévenir. Elle a appelé à la définition et à la diffusion d'une information éclairée et scientifiquement prouvée pour étayer le concept de jouissance du meilleur état de santé des enfants en termes de prévention des violences sexuelles.

MME AMIN a rappelé que les parents étaient les premiers décideurs quant à l'avenir de leur progéniture. Le moment est venu, selon elle, que les parents comprennent ce que sont les droits de l'enfant. Lorsque l'on éduque les parents, lorsque ceux-ci parlent à d'autres parents dans le cadre de groupes communautaires, on peut constater une évolution des comportements face aux enfants, a insisté Mme Amin. La Directrice de projet Plan International Bangladesh a ensuite fait valoir que les résultats enregistrés de par le monde en termes de réduction de la mortalité infantile n'auraient pu être atteints sans l'éducation, qui s'est avérée un outil incontournable. Dans les écoles privées, qui acceptent davantage les modules proposés, ont pu être diffusés des matériels didactiques adéquats; au niveau de l'enseignement public, des éléments sont néanmoins en train d'être également versés et intégrés aux cursus. En outre, des informations sont transmises aux médias nationaux et les radios locales diffusent des émissions pertinentes. Des efforts sont également consentis pour atteindre les familles à domicile.

Le jeune Bolivien JONAS a quant à lui souligné que des enfants dûment formés à des problèmes tels que le VIH-sida pourraient à leur tour efficacement former leurs pairs à ces problèmes. Comme, en Bolivie, il est généralement tabou de parler de sexualité, surtout lorsqu'il s'agit d'en parler entre parents et enfants, une telle interaction entre enfants pourrait permettre de contourner cet obstacle, a souligné Jonas.

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HRC13/024F