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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME DÉBAT DE LA SITUATION DES DÉFENSEURS DES DROITS DE L'HOMME ET DE LA LIBERTÉ DE RELIGION ET DE CONVICTION

Compte rendu de séance
Le Président José Ramos-Horta de Timor-Leste s'adresse au Conseil

Le Conseil des droits de l'homme a examiné ce matin les rapports présentés par la Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l'homme, Mme Margaret Sekaggya, et la Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion ou de conviction, Mme Asma Jahangir. Le Président du Timor-Leste, M. José Ramos-Horta, s'est adressé au Conseil en début de séance.

Le Président Ramos-Horta a notamment déclaré que son pays visait l'établissement d'une société basée sur la générosité, la non-discrimination et l'inclusion, avec le souci d'œuvrer pour les plus pauvres et les persécutés fuyant la tyrannie et l'extrême pauvreté. Il a assuré que son pays s'était remis de la crise politique qu'il a traversée en 2006, le peuple timorais ayant connu depuis trois années de paix et de croissance économique. Il a indiqué que dans les efforts consentis pour rétablir la paix entre communautés longtemps ennemies, il faut souvent se résoudre à des compromis en matière de justice; le Timor-Leste souhaite aborder ces questions difficiles avec prudence, gardant constamment à l'esprit la nécessité de réconcilier le peuple, d'aider les victimes et d'avancer pas à pas vers la démocratie et la paix durable. Il a par ailleurs salué la patience, le courage, la modération et la sagesse de Aung San Suu Kyi et d'autres leaders favorables à la démocratie au Myanmar en choisissant la voie du dialogue, en dépit des violences et indignités qu'ils doivent subir.

Présentant son rapport, Mme Sekaggya a expliqué que, dans de nombreux pays, les défenseurs des droits de l'homme sont stigmatisés par des acteurs, étatiques ou non, qui tentent de les présenter comme des ennemis de l'État ou des terroristes. Ces accusations rendent encore plus difficile un cadre de travail déjà fragile, font passer les défenseurs des droits de l'homme pour des délinquants et les rendent plus vulnérables aux agressions. Il faut au contraire insister sur l'importance fondamentale de leur travail dans la promotion et la protection des droits de l'homme, a déclaré la Rapporteuse spéciale, demandant en outre aux États de ne pas criminaliser des activités pacifiques et légitimes comme celles des syndicalistes ou des responsables d'organisations non gouvernementales et de mouvements sociaux. La République démocratique du Congo et la Colombie se sont exprimées à titre de pays concernés par le rapport de Mme Sekaggya.

Pour sa part, Mme Jahangir s'est inquiétée d'un recours inapproprié aux appareils d'État pour procéder à une manipulation religieuse pouvant parfois mener à des arrestations arbitraires, à des actes de torture et à des meurtres extrajudiciaires. Elle a indiqué que de telles pratiques ne sont pas limitées à une région ou à quelques pays, et son rapport présente plusieurs exemples de discriminations et de violences au nom de la religion ou de la conviction. Ces phénomènes sont au cœur de nombreux conflits basés sur la religion. Dans le cadre de ses missions, Mme Jahangir a souvent remarqué une tendance à nier l'origine religieuse des tensions: par conséquent, l'analyse et les mesures correctives ne sont pas assez efficaces et n'abordent pas les causes profondes des problèmes. L'ex-République yougoslave de Macédoine, la Serbie et la République populaire démocratique lao ont fait des déclarations à titre de pays concernés par le rapport de Mme Jahangir.

Dans le cadre du débat interactif, des représentants ont regretté, avec la Rapporteuse spéciale, les progrès encore relatifs enregistrés dans la protection des défenseurs des droits de l'homme, trop souvent assimilés à des «terroristes», «ennemis de l'État» ou «opposants politiques». Il a été souligné par certains que la promotion et la protection des droits de l'homme relevant des États, les individus doivent cadrer leur action dans les limites imposée par le droit et que, d'autre part, compte tenu de l'absence de définition officielle, l'identification des défenseurs des droits de l'homme est parfois problématique. Des délégations ont dénoncé les attaques subies par les défenseurs des droits de l'homme dans certains pays et les tentatives de restreindre les activités de particuliers participants à des manifestations pacifiques.

Une délégation a observé que le rapport de la Rapporteuse spéciale sur la liberté religieuse insiste, avec raison, sur les signaux précurseurs de la discrimination. Les cas d'interdictions récentes de construction de minarets ou l'interdiction de porter certains vêtements dans l'espace public ont été soulevés. Certains se sont demandés si les stéréotypes négatifs, diffamatoires ou cherchant à ridiculiser faisaient partie de la liberté d'expression. Une délégation s'est inquiétée du sort des chrétiens dans certains pays.

Les délégations suivantes ont fait des déclarations dans le cadre de ce débat interactif: Union européenne, Suède, Pologne, Pakistan (au nom de l'Organisation de la Conférence islamique), Inde, Danemark, Fédération de Russie, Canada, Italie, Djibouti, Suisse, Irlande, États-Unis, Hongrie, Autriche, Brésil, Australie, France, Indonésie, Slovénie, Bangladesh, Royaume-Uni, Chine, Mexique, Norvège et Nicaragua.


Cet après-midi, le Conseil terminera son débat interactif sur la situation des défenseurs des droits de l'homme et sur la liberté de religion ou de conviction, avant de porter son attention sur les rapports concernant la violence à l'encontre des enfants et l'élaboration d'un protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant.


Allocution du Président du Timor-Leste

M. JOSÉ RAMOS-HORTA, Président du Timor-Leste, a notamment déclaré que la société modèle à laquelle s'efforcent d'atteindre le Gouvernement et le Parlement de son pays, sera basée sur la générosité, la non-discrimination et l'inclusion; elle œuvrera pour les plus pauvres, les persécutés fuyant la tyrannie et l'extrême pauvreté; et tendra la main aux victimes du VIH/sida et de la lèpre. Le Président a ensuite fait valoir que son pays s'était remis de la crise politique qu'il a traversée en 2006, le peuple timorais ayant connu depuis cette date trois années de paix et de croissance économique. Dili, la capitale, est florissante, les finances nationales sont saines tandis que la direction et les institutions politiques du pays bénéficient d'un net regain de confiance. Le système judiciaire national - injustement critiqué par certains observateurs internationaux et politiciens locaux - ainsi que les politiques nationales, sont axés sur la réconciliation et la magnanimité, a assuré M. Ramos-Horta.

D'une manière générale, les victimes de toutes violations exigent la vérité, la reconnaissance de leurs souffrances et des réparations individuelles ou collectives, a souligné le Président du Timor-Leste, précisant que l'État a l'obligation de répondre à ces besoins fondamentaux. Cette attente de justice, de respect des droits de l'homme et de la dignité est perceptible dans tous les États, riches ou pauvres, du Nord comme du Sud. Cependant, partout où les conflits font rage, il faut d'abord créer l'espace et imposer les conditions nécessaires au dialogue préalable à la fin des hostilités, avant de lancer le long processus de guérison, de réconciliation, d'éradication de la pauvreté. Et dans les efforts consentis pour rétablir la paix entre communautés longtemps ennemies, il faut souvent se résoudre à des compromis en matière de justice, a observé le Président timorais. Certes, l'idée de rendre une justice aveugle semble héroïque, mais le risque existe alors qu'apparaissent de nouvelles tensions et de nouveaux conflits. L'Espagne et le Portugal, l'Afrique du Sud, par exemple, ont donné, dans leurs processus de transition respectifs, des leçons importantes concernant la sagesse de la démarche consistant à s'abstenir d'emprisonner chacun des anciens collaborateurs de régimes détestés. C'est la voie qu'a choisi le Timor-Leste, préférant aborder ces questions difficiles avec prudence, gardant constamment à l'esprit la nécessité de réconcilier le peuple, d'aider les victimes et d'avancer pas à pas vers la démocratie et la paix durable.

S'agissant de sa région du monde, M. Ramos-Horta a souligné que Mme Aung San Suu Kyi et d'autres leaders favorables à la démocratie ont fait preuve d'une patience, d'un courage, d'une modération et d'une sagesse remarquables en choisissant la voie du dialogue, en dépit des violences et indignités qu'ils doivent subir. Le Président a appelé «les vieux généraux» du Myanmar à faire preuve de sagesse, de courage et d'humilité, et à changer d'orientation. Se tournant vers la situation au Moyen Orient, le Président timorais a observé que le seul peuple à payer encore pour le legs de la deuxième guerre mondiale, et de l'extermination des Juifs, est le peuple palestinien, qui n'était en rien responsable de ces événements. M. Ramos-Horta s'est incliné devant les Palestiniens qui, subissant l'humiliation sous toutes ses formes, refusent toujours de répondre à la violence par la violence. À ceux qui ont recours à la violence, le Président a rappelé l'exemple du Mahatma Gandhi: la désobéissance civile et la non-violence, plutôt que les roquettes et les attentats-suicides, finiront par épuiser l'armée israélienne, mobiliser la conscience de la société israélienne et ainsi conduire à la paix.


Débat sur les défenseurs des droits de l'homme et sur la liberté de religion ou de conviction

Présentation des rapports

MME MARGARET SEKAGGYA, Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l'homme, a présenté son rapport, qui rend compte notamment des missions qu'elle a effectuées en République démocratique du Congo du 21 mai au 3 juin 2009 et en Colombie du 13 au 18 septembre 2009. Elle a expliqué avoir consacré son deuxième rapport annuel à la question de la sécurité des défenseurs des droits de l'homme qui, 12 ans après l'adoption de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l'homme et malgré plusieurs mécanismes de protection, est loin d'être assurée. Les défenseurs des droits de l'homme continuent d'être persécutés, soumis à des menaces, des arrestations et détentions arbitraires, voire des disparitions ou des assassinats, a-t-elle expliqué. Mme Sekaggya a expliqué que son rapport présente une compilation des réponses que lui ont faites les États suite à un questionnaire qu'elle leur avait adressé concernant la sécurité des défenseurs des droits de l'homme: elle a regretté que le nombre de réponse ait été étonnamment bas. Elle a expliqué avoir identifié un certain nombre de tendances, non exhaustives toutefois du fait du large spectre de moyens utilisés par les adversaires des défenseurs des droits de l'homme pour les empêcher de faire leur travail. Elle a expliqué que dans de nombreux pays, les défenseurs des droits de l'homme sont stigmatisés par des acteurs étatiques ou non qui tentent de les présenter comme des ennemis d'État ou des terroristes. Ces accusations contribuent à rendre encore plus difficile un environnement de travail déjà fragile, a souligné la Rapporteuse spéciale, préconisant, au contraire, d'insister sur l'importance fondamentale du travail de ces individus ou groupes dans la promotion et de protection des droits de l'homme. Mme Sekaggya a en outre rappelé les risques encourus dans certains pays spécifiques par les défenseurs des droits des femmes ou des gays, lesbiennes et transsexuels, qui sont dénigrés et font l'objet d'atteintes à leur intimité et soumis au harcèlement sexuel, voire au viol. Elle a appelé les États à s'abstenir de faire référence aux traditions et à des considérations religieuses ou morales pour échapper à leur obligation de protection des défenseurs des droits de l'homme. Elle a en outre demandé aux États de ne pas criminaliser des activités pacifiques et légitimes comme celles des syndicalistes ou des responsables d'organisations non gouvernementales et de mouvements sociaux.

Répétant que de nombreuses agressions contre les défenseurs des droits de l'homme sont le fait d'acteurs non étatiques, Mme Sekaggya y a vu la conséquence directe de la stigmatisation de ces derniers par des responsables publics ou les médias et a rappelé que ni l'origine non étatique des agresseurs ni des structures fédérales n'exemptaient les États de leur obligation de protection. Le rapport insiste aussi sur les obligations qu'ont les États d'enquêter sur les violations des droits des défenseurs des droits de l'homme et de poursuivre leurs auteurs. Cela peut impliquer des réformes du système judiciaire pour améliorer l'accès à la justice, renforcer la règle de droit et l'indépendance des juges, a précisé la Rapporteuse spéciale. Elle a par ailleurs expliqué n'avoir reçu que 109 réponses aux 271 communications - dont 94 concernent des violations des droits de défenseurs des droits des femmes - qu'elles a adressés aux États entre décembre 2008 et décembre 2009, soit un taux de 40%; elle a appelé les États à apporter des réponses substantielles, dans des délais raisonnables.

En ce qui concerne sa mission en République démocratique du Congo, Mme Sekaggya a expliqué que le rapport décrit le cadre institutionnel et juridique de promotion et de protection des droits de l'homme, qui a été renforcé ces dernières années mais qui reste marqué par de graves insuffisances. Elle a en effet fait valoir que plusieurs institutions qui, sur le papier, devraient avoir des effets positifs, sont en fait dépourvues de toute ressources et de soutien politique, et vouées à l'échec. Le rapport montre que les défenseurs des droits de l'homme sont stigmatisés et menacés, agressés ou tués, et qu'il existe une large impunité pour les auteurs de ces agressions. La Rapporteuse spéciale a regretté la récente disparition du Ministère des droits de l'homme, fusionné avec le Ministère de la justice, et a appelé à maintenir la question des droits de l'homme au centre des priorités nationales. Elle s'est émue des restrictions apportées à la liberté d'expression ou au droit d'association. Enfin, elle s'est félicitée de l'action de la communauté internationale qui aide à créer un environnement plus sûr pour les défenseurs des droits de l'homme dans le pays.

Concernant la Colombie, la Rapporteuse spéciale a expliqué que son rapport présentait brièvement le contexte dans lequel travaillent les défenseurs des droits de l'homme et les difficultés auxquelles ils sont confrontés. Elle a dit prendre note des difficultés auxquelles le Gouvernement est confronté dans l'adoption d'un plan d'action en faveur des droits de l'homme. Elle a dit en conclure que, malgré les efforts positifs du Gouvernement, les schémas de harcèlement contre les défenseurs des droits de l'homme et souvent leurs familles persistent en Colombie et qu'il reste beaucoup à faire pour leur garantir un environnement sûr. Elle a expliqué avoir présenté un certain nombre de recommandations pour le Gouvernement et autres parties prenantes, en insistant sur la nécessité de les mettre toutes en œuvre. Prenant note de la volonté affichée par le Gouvernement de maintenir un dialogue constructif avec les défenseurs des droits de l'homme, elle lui a demandé de prendre des mesures promptes et efficaces pour que ce dialogue puisse effectivement se poursuivre.

Le Conseil est saisi des rapports de la Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l'homme (A/HRC/13/22 et Add.1 à 4). Le rapport donne une vue d'ensemble de l'évolution de la situation et des difficultés rencontrées par les défenseurs des droits de l'homme relatives à la sécurité et à l'environnement dans lesquels ils mènent leurs activités, ainsi que des situations d'insécurité et des programmes de protection physique, avant de formuler des recommandations. Le rapport présente en outre 266 communications envoyées à la rapporteuse spéciale dans le cours de l'année (A/HRC/13/22/Add.1), ainsi que les compte-rendu des missions effectuées par la Rapporteuse spéciale en République démocratique du Congo (du 21 mai au 3 juin - A/HRC/13/22/Add.1) et en Colombie (du 13 au 18 septembre 2009, à paraître en français - A/HRC/13/22/Add.2). Le rapport contient enfin les réponses de gouvernements et d'organisations non gouvernementales à un questionnaire adressé par la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l'homme dans une série de pays (A/HRC/13/22/Add.4).

MME ASMA JAHANGIR, Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion ou de conviction, a déclaré en préambule s'être acquittée de ce mandat depuis près de six ans: elle présente aujourd'hui son dernier rapport à ce titre. Elle a souligné que la liberté de religion et de conviction a connu des avancées mais que beaucoup reste à faire. Elle a fait remarquer que les questions de religion sont particulièrement sensibles: il s'agit, d'une part, de promouvoir la liberté de religion tout en assurant, d'autre part, la protection des personnes contre des abus qu'ils subissent au nom de la religion. La Rapporteuse spéciale a tenu à saluer le rôle courageux des États, de la société civile et des individus qui ont relevé des défis difficiles en faisant face aux forces de l'intolérance. Ces voix courageuses sont malheureusement rares, a-t-elle souligné, regrettant également que l'on observe de plus en plus une tendance à une approche apologique au travers de laquelle la religion est utilisée comme instrument d'oppression.

Mme Jahangir a expliqué que les informations qu'elle a recueillies au cours de son mandat permettent d'identifier quelques tendances générales. La tendance la plus importante est le vaste ensemble de discriminations et de violences subies par les membres de minorités religieuses. Plusieurs d'entre eux se trouvent dans une situation vulnérable, a souligné la Rapporteuse spéciale. Certaines lois discriminent ouvertement sur la base de l'appartenance à la religion ou bien encore en raison de la perception d'un manque de ferveur religieuse. Une autre tendance palpable, a poursuivi Mme Jahangir, est le fait que sont visés des lieux de culte ou autres bâtiments religieux. Il est regrettable, selon elle, que des sociétés ayant des niveaux de richesse et d'éducation élevés aient ouvertement exprimé leur aversion envers les signes religieux dans l'espace public. Ce rapport, a-t-elle continué, présente plusieurs exemples de discriminations et de violences au nom de la religion ou de la conviction. Ces phénomènes sont au cœur de bien des conflits fondés sur la religion, a-t-elle souligné, indiquant avoir souvent remarqué, durant ses missions, une tendance à nier l'origine religieuse des tensions.

Pour la Rapporteuse spéciale, les États doivent relever le défi de mettre fin à toutes les formes de discrimination fondée sur la religion et de favoriser une opinion publique informée, qui réagisse au sectarisme et aux préjugés. Il est dans ce contexte indispensable de faire extrêmement attention aux signes avant-coureurs de la violence et de la discrimination, signaux que Mme Jahangir a énumérés: l'absence de législation adéquate assurant la liberté de religion et de conviction dans toutes ses dimensions; l'absence de reddition des comptes ou l'impunité pour les crimes et les violations de droits de l'homme visant les membres d'une communauté religieuse spécifique; des signes visibles de discrimination religieuse dans la pratique des États et dans les politiques publiques; la persistance de stéréotypes dans les discours officiels, stéréotypes visant des groupes religieux spécifiques; des attaques violentes par des acteurs non étatiques à l'encontre de personnes sur la base de leur appartenance religieuse; la persistance de tensions religieuses au niveau de la société; ainsi que la diffusion de messages appelant à la haine religieuse par des leaders religieux ou des faiseurs d'opinion dans les médias, voire par les individus dans les blogs et sur les forums en ligne.

Avant de conclure, Mme Jahangir a rappelé l'approche initiale du mandat qui consiste à envoyer des lettres de suivi dans les pays visités après les missions et à transmettre des tableaux de suivi, en l'occurrence aux huit États visités durant la période 2005-2007. Ces tableaux de suivi disponibles en ligne contiennent les conclusions et les recommandations faites dans le cadre des rapports de mission. Dans ce contexte, Mme Jahangir a souhaité aborder les cas récurrents de violences intercommunautaires au Nigéria. Elle s'est alarmée de la résurgence de tensions religieuses et de violents affrontements à Jos, où des centaines de Chrétiens et de Musulmans ont été tués durant les dernières semaines. En conclusion, la Rapporteuse spéciale a indiqué que son mandat est un «mandat réel», car il met en relief les pratiques discriminatoires, notamment celles dont font l'objet les femmes, dans le cadre de l'intolérance religieuse. Elle a signalé avoir demandé, lors de ses entretiens avec des responsables religieux, que soit reconnue l'égalité entre les hommes et les femmes, ces dernières ne jouissant parfois pas du droit à l'égalité, au nom de la tradition.

Le Conseil est saisi des rapports de la Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion ou de conviction (A/HRC/13/40 et Add.1 à 4). Le rapport traite notamment des signes précurseurs de la discrimination et de la violence exercées en raison ou au nom de la religion ou de la conviction. La Rapporteuse spéciale y donne un aperçu de certaines tendances générales et des sujets de préoccupation relevant de son mandat, en établissant une distinction entre la discrimination et la violence exercées du fait de l'appartenance religieuse de la victime et celles exercées sur le fondement ou sous prétexte des principes religieux de l'auteur. Le rapport présente un résumé des cas individuels communiqués par la Rapporteuse spéciale aux gouvernements l'an dernier ainsi que des réponses reçues (A/HRC/13/40/Add.1). Trois compléments au rapport contiennent les comptes rendus des missions successives de la Rapporteuse spéciale en ex-République yougoslave de Macédoine, en République de Serbie, y compris au Kosovo et en République démocratique populaire lao.

Déclarations des pays concernés

M. SÉBASTIEN MUTOMB MUJING (République démocratique du Congo) a remercié Mme Sekaggya, Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l'homme, qui a rendu visite à son pays en 2009. La délégation a pris connaissance de ses recommandations, dont certaines sont déjà appliquées: organisation de consultations; révision de la loi sur les télécommunications; et invitations d'autres titulaires de procédures spéciales. La République démocratique du Congo se félicite de la reconnaissance, par Mme Sekaggya, de ses efforts en vue de la protection des défenseurs des droits de l'homme et de leurs activités. Le rapport appelle cependant certaines observations. Le représentant a en effet tenu à souligner que son pays ne stigmatise pas les défenseurs des droits de l'homme, pas plus qu'il n'oppose d'obstacles à leur action. La République démocratique du Congo ne tolère pas l'impunité des auteurs de crimes contre les défenseurs des droits de l'homme et les journalistes. Cependant, aucun État de droit n'accepterait que des citoyens commettent des infractions ordinaires sous couvert de la défense des droits de l'homme, a fait valoir le représentant. Les cas d'assassinats de journalistes cités dans le rapport sont des crimes de droit commun dont la justice s'est saisie en toute indépendance, a-t-il assuré.

M. TOMÁS CONCHA (Colombie) a estimé que les recommandations contenues dans le rapport de Mme Sekaggya permettront d'aider la Colombie à améliorer les conditions de travail des défenseurs des droits de l'homme dans son pays. Il a rappelé que les engagements pris par son pays dans le cadre de l'Examen périodique universel constituent sa feuille de route pour améliorer la situation des droits de l'homme dans le pays. Il a insisté sur les aspects positifs du rapport de Mme Sekaggya et sur la bonne volonté de la Colombie. La politique de sécurité du Gouvernement actuel a permis d'améliorer considérablement la sécurité dans le pays, a affirmé le représentant, qui a aussi insisté sur l'importance accordée au dialogue social. Il a affirmé que le Gouvernement déplore les problèmes qui persistent, mais les harcèlements ou menaces contre les défenseurs des droits de l'homme ne constituent en aucun cas le résultat d'une politique nationale. Au contraire, le Gouvernement colombien apprécie le travail des défenseurs des droits de l'homme et souhaite qu'il se déroule dans de bonnes conditions, a insisté le représentant.

M. AZIS POLOZANI (ex-République yougoslave de Macédoine) a remercié Mme Asma Jahangir, Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion ou de conviction, qui s'est rendue en Macédoine en avril 2009 dans le cadre de son mandat. Il a estimé que le rapport brosse un tableau équilibré de la situation des droits religieux dans son pays, des progrès réalisés et des problèmes rencontrés qui nécessitent une attention supplémentaire. S'agissant du paragraphe 28 du rapport sur la décision de la Cour constitutionnelle portant sur l'enseignement des matières religieuses dans les écoles publiques, le délégué macédonien a assuré que son pays respectait strictement l'indépendance de la magistrature. Il a par contre pleinement partagé l'approche adoptée dans la partie V du rapport sur les symboles religieux. Cependant, il ne peut se rallier complètement à ce qui est dit dans sous-chapitre B, en particulier dans le paragraphe 33, dont certains éléments ne peuvent pas conduire à des conclusions évidentes, et dans le paragraphe 30, qui mentionne un cas unique, le seul à avoir été recensé en Macédoine jusqu'à aujourd'hui. S'agissant des conclusions et les recommandations du rapport, le délégué macédonien a informé la Rapporteuse spéciale que son pays avait adopté les solutions appropriées pour l'enseignement des religions dans les écoles primaires, sur les bases de la décision de la Cour constitutionnelle. En référence au paragraphe 60 du rapport, une loi a été promulguée en septembre 2009 pour renforcer le droit pénal contre la discrimination religieuse. De plus, des amendements ont été apportés au Code pénal pour inclure des sanctions contre la diffusion de messages racistes et xénophobes sur internet. Le représentant macédonien a estimé que son pays était sur la bonne voie pour mettre en œuvre les normes internationales concernant la liberté de religion et de conviction et continuera à favoriser une société multiethnique, multiculturelle et multi religieuse. À cet égard, il a attiré l'attention sur la Seconde conférence mondiale sur les civilisations et les religions qui se tiendra à Ohrid en mai 2010.

M. UGLJESA ZVEKIE (Serbie) a remercié Mme Asma Jahangir, Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion, et rappelé que son pays avait été la victime, depuis cinquante ans, de nombreuses tentatives de limiter la liberté religieuse. Le Gouvernement actuel est donc fermement engagé en faveur de la promotion de cette liberté. Ses démarches sont cependant tributaires d'un passé difficile et d'une situation compliquée par la sécession de la province du Kosovo et Metohija. Cela étant, la loi serbe sur la liberté religieuse de 2006 correspond aux plus hautes normes juridiques internationales en la matière a assuré le représentant. L'accord de l'église orthodoxe n'est pas nécessaire en préalable à l'ouverture de lieux de culte d'autres obédiences, a aussi fait savoir le représentant, assurant en outre qu'aucun représentant de l'État n'a jamais exercé quelque pression que ce soit sur des enfants ou des adultes afin de les obliger à suivre un service religieux. La situation des droits de l'homme dans la province du Kosovo et Metohija est catastrophique, a repris le représentant: le monastère de Koèani, l'un des berceaux de l'orthodoxie, doit y être placé sous la protection de la KFOR, tandis que les Serbes y sont confrontés à la discrimination religieuse et à la destruction de leurs lieux de culte. La Serbie fait sienne la recommandation de la Rapporteuse spéciale sur la nécessaire coopération de tous les gouvernements, églises et organisations de la société civile autour du plein respect du droit à la liberté de religion de tous les peuples, a conclu son représentant.

M. YONG CHANTHALANGSY (République démocratique populaire lao) a remercié la Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion et de croyance pour son rapport. Face aux recommandations de la Rapporteuse spéciale sur les lois adoptées dans ce domaine, il a précisé que son gouvernement considérait les lois comme un processus en évolution. Le représentant lao a rappelé que les minorités tribales et religieuses de son pays sont isolées car elles vivent dans des montagnes. Il a reconnu que des agressions contre des minorités religieuses se sont produites mais a affirmé que le Gouvernement avait pris des mesures. Il a ajouté que son pays comptait environ 4 millions de bouddhistes et quelque 100 000 chrétiens de diverses confessions, ainsi que des animistes dont il faut aussi protéger les droits. La constitution lao protège la liberté de religion comme la liberté de ne pas croire, a-t-il ajouté, précisant qu'aucun des 49 groupes ethniques du pays ne jouissait d'un statut spécial.

Débat

MME LEONOR VIEIRA SOUSA (Union européenne) a remercié Mme Sekaggya pour son rapport sur la situation des défenseurs des droits de l'homme. L'Union européenne demeure préoccupée par le fait que les défenseurs des droits de l'homme se heurtent à des risque et à l'insécurité au quotidien. La déléguée de l'Union européenne s'est également montrée inquiète de l'absence de réponses de certains aux demandes répétées de visites de la Rapporteuse spéciale. Elle s'est également alarmée que la criminalisation des défenseurs des droits de l'homme n'a pas diminué dans certains États. Elle a également dénoncé les attaques subies par les défenseurs des droits de l'homme en Iran et les tentatives de restreindre les activités de particuliers participants à des manifestations pacifiques. La représentante de l'Union européenne a demandé à la Rapporteuse spéciale quelles mesures pourraient être prises pour diffuser les bonnes pratiques dans ce domaine.

Commentant le rapport sur la liberté de religion ou de conviction de Mme Jahangir, la représentante de l'Union européenne a partagé l'opinion qu'au niveau de la haine religieuse, c'est l'appareil judiciaire qui doit dire si cela constitue une incitation à l'hostilité ou à la violence, en tenant compte des contextes particuliers. Le rapport mettant l'accent sur la prévention, la représentante de l'Union européenne a souhaité savoir si la communauté internationale pouvait jouer un rôle plus important encore dans la mise en place de systèmes d'alerte rapide. Elle s'est également demandé quel pourrait le rôle des États qui ont la responsabilité de protéger la liberté de croyance. L'Union européenne souhaiterait également savoir si le successeur de Mme Jahangir réitérera sa demande de se rendre en Iran, où semblent se poser également des problèmes en matière de liberté religieuse.

M. HANS DAHLGREN (Suède) a remercié Mme Jahangir de son long travail acharné, empreint de tolérance et d'honnêteté intellectuelle sur la question de la liberté de religion ou de conviction. Mme Asma Jahangir observe dans son rapport que les femmes sont les principales cibles de l'intolérance religieuse, par le biais notamment de lois civiles discriminatoires. Le représentant a demandé quelles bonnes pratiques permettraient de surmonter ces discriminations. Le représentant a encore déploré, avec la Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l'homme, Mme Margaret Sekaggya, les progrès encore relatifs enregistrés dans la protection des défenseurs des droits de l'homme, trop souvent assimilés à des «terroristes», «ennemis de l'État» ou opposants politiques, dans certains pays.

M. YENY BAVRSKI (Pologne) a demandé à connaître les suggestions de la Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion ou de conviction concernant la lutte contre les discriminations subies par les minorités religieuses dans de nombreux pays. De même, il a souhaité savoir que pourrait faire la communauté internationale pour promouvoir l'interdiction de toutes les restrictions à la liberté de changer de religion. Le représentant polonais a par ailleurs demandé des informations sur les visites qu'elle tentait de réaliser et quelles étaient selon elles les principales menaces à la liberté de religion et de croyance pour les années à venir.

M. MARGHOOB SALEEM BUTT (Pakistan au nom de l'Organisation de la Conférence islamique) a appuyé le point de vue de la Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion ou de conviction: la prévention est le facteur déterminant pour créer un climat de tolérance religieuse. Il a noté que différentes manifestations ont été mises en exergue dans le rapport de Mme Jahangir s'agissant des signaux précurseurs de discrimination et lui a demandé de bien vouloir préciser son avis sur les interdictions récentes de construction de minarets ou l'interdiction de porter certains vêtements dans l'espace public. Le délégué pakistanais s'est aussi demandé si les stéréotypes négatifs, diffamatoires ou cherchant à ridiculiser faisaient partie de la liberté d'expression. Concernant le rapport de Mme Sekaggya sur la situation des défenseurs des droits de l'homme, l'Organisation de la Conférence islamique estime que tous les États doivent prendre des mesures pour protéger les individus impliqués dans la protection des droits de l'homme. Le représentant a appelé à un dialogue avec les militants et défenseurs de droits de l'homme pour prendre en compte leurs besoins spécifiques en matière de sécurité. Il a appelé à une relation saine et constructive entre l'État et les acteurs de la société civile, les États devant reconnaître l'importance des défenseurs des droits de l'homme.

M. GOPINATHAN ACHAMKULANGARE (Inde) a dit apprécier le travail de la Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion ou de conviction, Mme Asma Jahangir, dont le dernier rapport dresse un bilan et esquisse des tendances générales. Le rapport insiste avec raison sur le rôle des gouvernements dans la protection des droits de l'homme en tant que facteur important de l'harmonie entre les religions, a souligné le représentant. Le Gouvernement indien se réjouit de poursuivre sa collaboration avec le mandat.

M. ARNOLD DE FINE SKIBSTED (Danemark) a rappelé que l'État était le principal garant de la liberté de religion et de croyance, ainsi que des mesures à prendre pour la faire respecter. Il a demandé à la Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion ou de conviction comment l'État pouvait faciliter l'inclusion des minorités religieuses dans le débat politique et le processus de prise de décision. Il a aussi souhaité savoir comment la communauté internationale pouvait mieux traiter des discriminations à l'encontre des femmes commises au nom de la religion. Enfin, le représentant danois a souhaité que Mme Jahangir explique comment le Conseil pourrait mieux traiter des violations du droit à la liberté de religion et de croyance et assurer un meilleur suivi des recommandations faites en ce sens dans le cadre de l'Examen périodique universel.

M. ALEXEY GOLTYAEV (Fédération de Russie) a reconnu l'importance et l'actualité des problèmes évoqués par le rapport de Mme Jahangir sur la liberté de religion ou de conviction. Il a estimé que l'un des instruments les plus efficaces pour lutter contre l'intolérance était la promotion du respect des autres religions. Il a également relevé le caractère inacceptable de l'incitation à la haine religieuse sous couvert de liberté d'opinion. La Fédération de Russie aimerait que Mme Jahangir ou son successeur s'intéresse de très près aux discriminations pour raisons de religion dans la province serbe du Kosovo où des profanations de lieux sacrés et de tombes chrétiennes se sont déroulées, de même que des violences contre des chrétiens orthodoxes. Le délégué russe s'est montré beaucoup plus critique s'agissant du rapport de Mme Sekaggya sur la situation des défenseurs des droits de l'homme. Il a regretté que ce rapport «regorge d'inexactitudes factuelles»; la Rapporteuse spéciale interprète la catégorie des défenseurs des droits de l'homme de manière arbitraire, une catégorie dont la définition juridique ne figure dans aucun document; et elle fait fi des droits, des lois et des intérêts des États souverains ce qui, pour le délégué russe, équivaut à une ingérence dans leurs affaires intérieures. Il a invité Mme Sekaggya à œuvrer de manière plus responsable et plus précise dans l'accomplissement de son mandat.

M. JOHN VON KAUFMANN (Canada) a remarqué, non sans inquiétude, les nombreuses tendances générales dégagées par la Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion dans son rapport, qui semblent indiquer une tendance négative au plan international pour la protection de la liberté de religion ou de conviction. Quelles mesures peut prendre la communauté internationale pour inverser cette tendance négative, a demandé le représentant, qui a en outre voulu savoir si Mme Jahangir pouvait mettre en évidence des exemples de lutte contre l'intolérance religieuse en favorisant l'accès à une éducation de qualité ou par d'autres moyens. Le Canada tient en outre à exprimer ses vives préoccupations concernant les mauvais traitements que continuent de subir les minorités en Iran, en particulier la situation de sept dirigeants bahá'í dans ce pays. Les communications de plusieurs procédures spéciales indiquent que la communauté bahá'íe a été victime de persécutions, de discrimination et de détention. Le représentant a demandé à Mme Jahangir de faire part au Conseil de faits nouveaux au sujet de la situation des bahá'ís en Iran.

M. ROBERTO VELLANO (Italie) a rappelé le caractère fondamental du droit à la liberté de religion et de croyance et s'est dit particulièrement préoccupé des attaques et persécutions contre les minorités religieuses. Il a à cet égard déploré les massacres de Chrétiens en Iraq et au Nigéria, ainsi que les persécutions de Chrétiens en Asie, en Afrique et au Moyen-orient. Il a réitéré l'engagement de son pays à lutter contre toute forme de discrimination fondée sur la religion, rappelant à cet égard que le Parlement italien a adopté en 2008 des résolutions s'inquiétant des persécutions fondées sur la religion et en faveur de la défense de la liberté religieuse comme élément prioritaire de la politique étrangère de l'Italie. Il a indiqué que son pays entend convoquer une conférence internationale sur la liberté de religion dans les mois à venir. Le représentant a souhaité savoir quelles mesures spécifiques les États et la communauté internationale devraient prendre, notamment au sein du Conseil, pour prévenir et éradiquer les persécutions commises au nom de la religion. Le représentant italien a enfin voulu connaître les propositions de la Rapporteuse spéciale pour assurer un suivi approprié des recommandations relatives à la liberté de religion et de croyance faites dans le cadre de l'Examen périodique universel?

M. AHMED MOHAMED ABRO (Djibouti) a indiqué que son pays entendait considérer avec attention les recommandations de la Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l'homme, Mme Sekaggya. Djibouti souhaite par ailleurs savoir si la Rapporteuse spéciale a été en mesure d'identifier des bonnes pratiques s'agissant de l'identification et de l'élimination des risques qui pèsent sur les défenseurs des droits de l'homme.

M. JUNG LAMBER (Suisse) a déclaré que son pays était préoccupé par la propension de certains gouvernements à invoquer la sécurité publique et nationale pour limiter la marge de manœuvre des défenseurs des droits de l'homme. La Suisse constate également avec inquiétude que certains États criminalisent les activités des défenseurs et estime que la protection lacunaire de ces personnes par un État relève fréquemment d'un manque de volonté politique. La Suisse souhaite en apprendre davantage sur les possibilités pour la communauté internationale d'encourager les États à assurer concrètement la sécurité des défenseurs des droits de l'homme. À cet égard, il s'est demandé si la mise en place de systèmes d'alerte rapide, au niveau régional, ne serait pas une solution appropriée. Concernant la liberté de religion, le représentant de la Suisse a observé, avec Mme Jahangir, que, l'intolérance nourrissant l'intolérance, la lutte contre la discrimination doit se trouver au cœur du travail de promotion des droits humains. Or, le combat contre la discrimination concerne de trop nombreux autres domaines où les idées préconçues et les peurs sont présentes. Quelles synergies peuvent-elles être trouvées avec le travail qui se fait dans la lutte contre tous les autres types de discrimination, a voulu savoir le représentant.

M. MICHEÁL TIERNEY (Irlande) a demandé à la Rapporteuse spéciale sur les défenseurs des droits de l'homme de partager avec le Conseil certaines des bonnes pratiques en termes de formation des forces de police et de sécurité qu'elle a relevées. Il a déploré les tentatives de discréditer ou cibler les défenseurs des droits de l'homme dans certains États qui ne reconnaissent pas la légitimité de leur travail pacifique. Il a souhaité avoir davantage de précisions sur la mise en place de systèmes d'alerte rapide pour prévenir les menaces contre les défenseurs des droits de l'homme. Le représentant irlandais a par ailleurs attiré l'attention sur la situation des droits de l'homme en Iran, soulignant que les événements récents montrent la volonté extraordinaire des iraniens ordinaires de préserver leurs droits et libertés fondamentales. Il a appelé ce pays à prendre au sérieux ses obligations internationales en matière de droits de l'homme, et notamment celle de protéger les défenseurs des droits de l'homme dans le pays. D'autre part, il a demandé à la Rapporteuse spéciale de fournir des exemples des difficultés qui apparaissent quand les défenseurs des droits de l'homme ne sont pas suffisamment consultés pour l'élaboration des mécanismes destinés à les protéger.

MME BETTY KING (États-Unis) a estimé qu'il incombe aux gouvernements de créer un climat propice à la lutte contre les persécutions et les préjugés. Elle s'est déclarée préoccupée par la tendance de certains gouvernements à imposer des limites aux cultes, aux costumes religieux ou à certaines langues minoritaires. Les États ont pourtant tous les outils voulus pour lutter contre la discrimination et la violence, a-t-elle souligné. D'autre part, les États-Unis saluent le rapport de Mme Sekaggya sur la situation des défenseurs des droits de l'homme et notamment l'idée de mettre en place des systèmes d'alerte rapide lorsque le climat contre les défenseurs des droits de l'homme se détériore. La déléguée américaine a souhaité avoir davantage de précisions sur la manière dont Mme Sekaggya conçoit un tel système. Par ailleurs, elle a rappelé que les militants de la société civile jouent un rôle critique et doivent se faire le porte-parole des victimes. Elle a tout particulièrement apprécié que le rapport fasse mention des défenseurs des droits de l'homme dans la communauté homosexuelle, lesbienne et transgenre.

MME KLARA TUNYOGI AKOTS (Hongrie) a salué le rapport de la Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l'homme, rappelant que son pays avait parrainé la résolution par laquelle le Conseil condamne les mesures de représailles contre les «individus» collaborant avec les titulaires de procédures spéciales. Or, ces «individus» sont bien souvent des défenseurs des droits de l'homme, de plus en plus souvent confrontés à l'insécurité, aux menaces, au harcèlement, à la violence, aux agressions et au meurtre. La représentante hongroise a voulu savoir quelles mesures Mme Sekaggya estimait envisageables pour aider les représentants et mécanismes des Nations Unies à favoriser la prévention face à ces menaces et agressions. Elle s'est également félicitée de la mention, dans son rapport, des menaces et agressions commises par des acteurs non étatiques, et de la responsabilité des États de mettre un terme à ce phénomène inquiétant.

M. CHRISTIAN STROHAL (Autriche) s'est dit préoccupé des cas de plus en plus fréquents de représailles menées contre les personnes qui coopèrent avec les procédures spéciales. C'est pourquoi l'Autriche se réjouit de l'orientation du rapport de Mme Sekaggya et estime que les agents de l'État et de l'appareil judiciaire devraient recevoir une formation sur la protection des défenseurs des droits de l'homme. D'autre part, l'Autriche accorde une grande importance à la protection de la liberté de religion et de croyance partout dans le monde, a affirmé le représentant, relevant l'importance à cet égard du dialogue interreligieux à tous les niveaux. Ce dialogue, a-t-il précisé, doit être inclusif et notamment impliquer les membres de minorités religieuses, les femmes et les personnes athées.

MME MARIA NAZARETH FARANI AZEVÊDO (Brésil) a souligné l'importance que son pays accordait à la situation des défenseurs des droits de l'homme, et le Brésil accueille avec bienveillance les critiques qui lui sont adressées par Mme Sekaggya. La représentante a indiqué que son pays avait mis sur pied, en 2004, un programme national qui vise, notamment, la formation des forces de police en matière de les droits des défenseurs des droits de l'homme, ainsi que la protection des activistes menacés. En ce qui concerne le rapport de Mme Jahangir, Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion ou de conviction, le Brésil appuie l'idée de mettre sur pied des mécanismes d'alerte rapide. Le pays regrette au plus haut point les actes d'incitation à la haine religieuse qui se sont déroulés un peu partout dans le monde. Il faut mettre toutes les religions sur un pied d'égalité, a insisté le représentant. Il a aussi souligné que le troisième forum de l'Alliance des civilisations aura lieu en mai 2010 au Brésil.

MME ANGELA ROBINSON (Australie) a observé que les défenseurs des droits de l'homme - en particulier les femmes - sont, du fait de leurs activités, souvent menacés par des agents de l'État. La Rapporteuse spéciale, Mme Margaret Sekaggya, a raison de rappeler aux États leur obligation de protéger les individus, y compris les défenseurs des droits de l'homme, placés sous leur juridiction. La représentante australienne a demandé à Mme Sekaggya davantage de renseignements concernant les mesures électroniques susceptibles d'assurer une meilleure sécurité aux défenseurs. À la Rapporteuse spéciale sur le droit à la religion, la représentante australienne a demandé des exemples de bonnes pratiques dans le domaine du dialogue entre religions, afin de promouvoir la compréhension et la tolérance mutuelles. La représentante a enfin dit la préoccupation de son pays devant la discrimination et la violence auxquelles est soumise la communauté bahá'í en Iran.

M. JEAN-BAPTISTE MATTÉI (France) a demandé à Mme Jahangir s'il serait utile à ses yeux que le Conseil initie la rédaction de lignes directrices pour aider les pays à assurer un enseignement public de qualité sur le fait religieux, estimant que ces lignes directrices pourraient s'inspirer des principes de Tolède mis en place dans le cade de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Il a demandé de quelle manière les États pourraient lutter plus efficacement contre la discrimination ou la violence exercée au nom de la religion ou de la conviction. Il a demandé quelles mesures le Conseil pourrait prendre pour garantir la liberté de changer de religion et de croyance ou de ne pas en avoir et s'assurer que certains États, tel l'Iran, n'incriminent plus l'apostasie. M. Mattéi s'est dit particulièrement inquiet de la situation réservée aux défenseurs des droits de l'homme en Iran, faisant état d'une quarantaine d'arrestations de personnes défendant les droits des femmes, des enfants des journalistes ou des détenus depuis décembre 2009. Il a par ailleurs appelé les 22 États qui n'ont pas encore répondu aux demandes de visite de Mme Sekaggya à l'autoriser à effectuer une visite dans les meilleurs délais. Le représentant français a en outre demandé à la Rapporteuse spéciale quelles mesures il faudrait prendre pour remédier au climat d'impunité généralisée qui entoure les auteurs d'attaques contre les défenseurs des droits des personnes homosexuelles, lesbiennes ou transsexuelles.

MME EMMY RAHMAWATI (Indonésie) a souligné que son pays avait fait face depuis 65 ans à un grand nombre de défis, dont le premier était de défendre les principes de la démocratie et la liberté de religion. Aujourd'hui, l'Indonésie est un pays démocratique et un État de droit, a-t-elle affirmé. Elle a également réitéré l'engagement de l'Indonésie de protéger les dirigeants religieux et les droits de l'homme, comme le prévoit sa Constitution. Commentant ensuite le rapport sur la situation des défenseurs des droits de l'homme, la représentante a précisé que l'Indonésie travaille depuis des décennies à une société plus ouverte. Le Gouvernement travaille en étroite collaboration avec les défenseurs des droits de l'homme, a précisé la déléguée indonésienne, ajoutant que le Gouvernement apprécie leur rôle et entend le faciliter et le renforcer.

M. MARKO HAM (Slovénie) s'est félicité de la qualité des rapports et des travaux des deux Rapporteuses spéciales. Le représentant a insisté sur l'importance de la «Déclaration sur le droit et la responsabilité des individus, groupes et organes de la société de promouvoir et protéger les droits de l'homme et les libertés fondamentales universellement reconnus», et indiqué que son Gouvernement a fait traduire ce document en langue slovène afin de contribuer à la sensibilisation du grand public au rôle des défenseurs des droits de l'homme. La Slovénie, tout en notant que les activités de ces personnes sont de mieux en mieux reconnues, s'inquiète des menaces que font peser sur eux des acteurs non étatiques, des entités privées ainsi que des agents de services de renseignement. La Slovénie est donc d'accord avec Mme Sekaggya pour estimer que la sécurité des défenseurs des droits de l'homme passe par la fin de l'impunité des auteurs de crimes commis contre eux.

MME NAHIDA SOBHAN (Bangladesh) a émis des réserves sur ce qu'elle a appelée «le concept étroit de défenseurs des droits de l'homme» présenté dans le rapport de Mme Sekaggya. Le Bangladesh considère que quiconque est engagé dans la défense des droits de l'homme est un défenseur, y compris les gouvernements agissant en ce sens et non pas seulement des individus ou organisations non gouvernementales. La représentante a en outre estimé que le statut de défenseurs des droits de l'homme leur conférait aussi des responsabilités et qu'ils ne pouvaient prétendre à davantage de droits que les autres citoyens. Il est vrai qu'ils sont parfois victimes de persécutions, a reconnu la représentante, qui a ajouté que son pays n'était évidemment pas favorable à de tels actes. Mais elle a ajouté que certains défenseurs des droits de l'homme utilisaient leur statut à des fins cachées ou dans le cadre d'ambitions personnelles. En ce qui concerne la liberté de religion, la représentante du Bangladesh a insisté sur le droit des migrants à pratiquer leur religion librement, ajoutant qu'ils en étaient parfois privés au nom de l'intégration sociale. Elle a suggéré à la Rapporteuse spéciale de se pencher sur cette question. Enfin, elle a insisté sur le rôle prééminent des États pour traiter des signes précurseurs de discrimination contre la liberté de religion ou de conviction.

MME NICOLA FREEDMAN (Royaume-Uni) s'est félicitée que la Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l'homme, Mme Margaret Sekaggya, ait insisté sur les systèmes d'alerte précoce qui peuvent jouer un rôle essentiel dans la protection des défenseurs des droits de l'homme. Elle a appuyé l'idée que les institutions nationales des droits de l'homme prennent en charge les défenseurs des droits de l'homme et a demandé à la Rapporteuse spéciale comment elle envisageait de poursuivre dans cette direction spécifique. La représentante du Royaume-Uni a également insisté sur les violences à l'encontre des défenseurs des membres des communautés gay, lesbienne et transgenre. À cet égard, elle s'est inquiétée du projet de loi stigmatisant les défenseurs des droits des personnes gay et lesbiennes en Ouganda. Concernant le rapport de la Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion ou de conviction, la représentante britannique a souligné les efforts consentis par son pays pour mettre en œuvre les recommandations de Mme Jahangir suite à sa visite en 2007. Enfin, elle s'est inquiétée de la situation en Iran où, a-t-elle souligné, certains membres de communautés minoritaires risquent d'être victimes d'arrestations, de harcèlement ou même de la peine de mort: chrétiens, juifs, bahá'í ou zoroastriens. La représentante du Royaume-Uni a demandé aux autorités iraniennes de garantir la liberté de religion.

M. LIU JINGUANG (Chine) a indiqué que son Gouvernement attachait une importance toute particulière à la liberté de religion de ses citoyens, de même qu'il favorise la cohabitation harmonieuse de différentes religions, sur la base du dialogue. La Chine est consciente du rôle constructif que les religions peuvent jouer dans l'édification d'une société harmonieuse. Pour le représentant chinois, la communauté internationale doit accorder une attention particulière au problème de la discrimination religieuse, qui ne doit pas être compromise par des discours de haine prononcés au nom de la liberté d'expression. D'autre part, il a déploré que le terrorisme soit souvent associé à une religion en particulier. Les États doivent encourager le rôle positif des médias et de la société civile dans l'instauration d'un état d'esprit propice à la tolérance religieuse, a-t-il insisté. La Chine attache également une grande importance au rôle des défenseurs des droits de l'homme dans l'édification d'une société harmonieuse. La promotion et la protection des droits de l'homme relevant des États, les individus doivent cependant cadrer leur action dans les limites imposées par le droit, a souligné le délégué. Il a également fait valoir qu'en l'absence de définition officielle, l'identification des défenseurs des droits de l'homme est parfois problématique. Il a souhaité un échange de vues à ce propos avec la Rapporteuse spéciale, Mme Sekaggya.

M. SALVADOR TINAJERO (Mexique) a affirmé que le travail des défenseurs des droits de l'homme était prioritaire aux yeux de son Gouvernement: celui-ci accorde une grande importance aux conditions de travail des défenseurs des droits de l'homme et aux difficultés qu'ils rencontrent. Le Mexique plaide au plan international pour la protection de ces personnes et invite les États à adopter des plans d'actions en ce sens. Le Mexique soutient également les efforts entrepris aux Nations Unies et en Amérique latine et travaille avec des organisations non gouvernementales œuvrant dans le domaine de la liberté d'expression, ainsi qu'avec le bureau mexicain du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme.

MME CLAIRE HUBERT (Norvège) a souligné qu'il était important que les pays répondent favorablement aux demandes de visites sur le terrain formulées par la Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l'homme, ajoutant qu'il était surprenant selon elle qu'il y ait encore 22 visites en attente. Évoquant le rapport de la Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion ou de conviction, la représentante de la Norvège a salué l'analyse de Mme Jahangir s'agissant des signes de discrimination et de violence. La discrimination encourage la méfiance, le ressentiment, la violence, le crime et l'insécurité, a ajouté la représentante norvégienne. La lutte contre la discrimination doit donc être intensifiée, a-t-elle estimé, s'inquiétant en particulier des violences que subissent de nombreuses minorités religieuses. Le Conseil des droits de l'homme n'est pas encore au maximum de son potentiel à cet égard, a-t-elle estimé.

M. NESTOR CRUZ TORUÑO (Nicaragua) a déclaré que s'il importe en effet de mettre l'accent sur la sécurité des défenseurs des droits de l'homme, comme le fait Mme Sekaggya, il conviendrait aussi de s'intéresser aux mesures prises par les États pour protéger les droits des acteurs sociaux et des personnes œuvrant pour les droits sociaux et économiques des populations. Le Gouvernement du Nicaragua estime en effet qu'il est important de protéger tous les droits de l'homme, quels qu'ils soient.

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La documentation relative à la présente session du Conseil, notamment l'ordre du jour annoté (A/HRC/13/1), est disponible sur la page Internet consacrée à la documentation de la treizième session du Conseil: http://www2.ohchr.org/english/bodies/hrcouncil/13session/reports.htm

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

HRC10/025F