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LE COMITÉ CONSULTATIF DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE UN PROJET DE DÉCLARATION SUR L'ÉDUCATION AUX DROITS DE L'HOMME

Compte rendu de séance

Le Comité consultatif du Conseil des droits de l'homme a tenu, ce matin, un débat sur l'éducation et la formation dans le domaine des droits de l'homme. Il était saisi, dans ce cadre, d'un avant-projet de déclaration des Nations Unies sur l'éducation et la formation aux droits de l'homme, présenté par le Rapporteur du groupe de rédaction chargé de la question, M. Emmanuel Decaux.

M. Decaux a souligné la tâche ambitieuse que représentait le mandat confié au Comité consultatif par le Conseil des droits de l'homme s'agissant de l'élaboration d'un projet de déclaration sur l'éducation et la formation aux droits de l'homme. Les travaux menés par le groupe de rédaction s'appuient sur des travaux antérieurs, notamment dans le cadre de la Décennie mondiale pour l'éducation aux droits de l'homme et le Programme mondial d'éducation dans le domaine des droits de l'homme.

Les participants ont notamment mis l'accent sur le fait que l'éducation aux droits de l'homme doit s'étendre à ceux qui n'ont pas accès au système éducatif formel et sont généralement les personnes les plus défavorisées et les plus vulnérables. Il est important, par conséquent, de ne pas miser exclusivement sur l'éducation dans le système formel, mais aussi tenir compte, notamment, de l'éducation reçue au sein de la famille. Plusieurs intervenants ont aussi souligné l'importance de commencer par former les enseignants et les formateurs, de même que ceux qui sont susceptibles de se rendre coupables de violations des droits de l'homme, en particulier dans le système pénal et les forces de sécurité. Il a aussi été rappelé que l'objectif final de cette éducation doit être de créer des sociétés solidaires, ouvertes et inclusives, respectueuses de la dignité humaine.

Outre les membres du Comité consultatif, des déclarations ont été faites par les représentants des Philippines (au nom de la Plate-forme pour l'éducation en matière des droits de l'homme), de l'Algérie, du Pakistan, du Nigéria, de la Fédération de Russie et des États-Unis, ainsi que les représentants du Comité international de coordination et les organisations non gouvernementales suivantes: Amnesty international; Soka Gakkai International (au nom également de l'Organisation internationale pour le développement de la liberté d'enseignement; et Human Rights Education Associates); Mouvement indien «Tupaj Amaru»; Consejo Indio de Sudamérica; et Association mondiale pour l'école instrument de paix

Cet après-midi, à 15 heures, le Comité consultatif doit reprendre l'examen de la question de la l'élaboration des principes et directives concernant l'élimination des discriminations à l'encontre des personnes touchées par la lèpre et de leur famille et se pencher sur son règlement intérieur.



Débat sur l'éducation et la formation aux droits de l'homme

Présentation des travaux du groupe de rédaction de l'avant-projet de déclaration sur l'éducation et la formation aux droits de l'homme

M. EMMANUEL DECAUX, expert du Comité consultatif et Rapporteur du groupe de rédactiona déclaré que ce mandat est le premier à avoir été confié au Comité consultatif par le Conseil des droits de l'homme en vertu du la résolution 6/10. Le mandat est ambitieux et doit tenir compte des expériences réalisées dans le cadre de la Décennie des Nations Unies pour l'éducation aux droits de l'homme (1995-2004) ainsi que celles du Programme mondial d'éducation dans le domaine des droits de l'homme. Le groupe de rédaction du Comité consultatif, présidé par Mme Warzazi, a adopté le rapport intérimaire qui consacrait le cadre de travail. Un document a été préparé après le séminaire de Marrakech. La démarche choisie par le Comité consultatif a été entérinée par le Conseil des droits de l'homme et le nombre considérable de parrains dont bénéficie ce mandat est une preuve de l'intérêt que suscitent ces travaux. Un bilan quantitatif figure dans le document qui montre une forte attente de la part de parties prenantes; leur nombre dépasse plus de 70. C'est un facteur encourageant, de même que l'implication sérieuse, quoique tardive, des institutions nationales des droits de l'homme. Les contacts entamés avec l'UNESCO se sont poursuivis, entre autres sous la forme d'une réunion d'experts venus du monde entier. Quant au séminaire de Marrakech, le Maroc, hôte du séminaire, mais aussi d'autres pays tels que le Costa Rica, la Slovénie et la Suisse se sont montrés particulièrement actifs dans son organisation, qui a bénéficié d'excellent panélistes.

Le processus d'élaboration de la déclaration est une fusée à trois étages, dont la troisième étape sera la finalisation du texte, a déclaré M. Decaux. La phase actuelle de discussion fait suite à la phase de consultation et de documentation. Cette deuxième étape implique la contribution de l'ensemble des participants au groupe de rédaction, y compris ceux qui n'ont pu être présents à Marrakech. Le Comité consultatif devrait idéalement être saisi d'un projet lors de sa session de janvier 2010, sur la base des travaux en cours. Ce projet aurait deux annexes: d'une part les réponses au questionnaire, et d'autre part le rapport du séminaire de Marrakech. À ce stade, il est utile d'avoir un véritable débat d'orientation. Rien n'est figé à ce stade, il s'agit d'un travail en évolution. Il importe aussi de procéder à de nouvelles consultations. M. Decaux a suggéré qu'il serait utile de soumettre le projet pour commentaires à d'autres organes tels le mécanisme d'experts sur les droits des peuples autochtones ou encore les organes conventionnel. M. Decaux a finalement rappelé que le texte est divisé en trois volets; soit les Principes généraux des droits et obligations, la mise en œuvre du suivi interne et international, ainsi que les paramètres tels que les médias, dont il faut tenir compte. Ce troisième volet est encore à l'état d'esquisse. M. Decaux a rappelé que si le texte doit être complet, il faut néanmoins qu'il reste suffisamment concis pour être applicable.

Débat

M. DHEERUJLALL SEETULSINGH, expert du Comité consultatif, a lui aussi estimé que cette déclaration ne devrait pas être trop longue, cinq ou six pages au maximum. On ne peut pas tout y inclure, a-t-il souligné, souhaitant que ce document ne devienne pas trop fastidieux. Il a souhaité que le texte contienne une définition simple et claire de l'éducation aux droits de l'homme. Par ailleurs, l'expert s'est réjoui que dans de nombreux pays d'Afrique, la technologie de l'information et de la communication soit, bien qu'encore imparfaite, de plus en plus accessible. Enfin, il a fait observer que la déclaration n'aurait aucune valeur si les États y adhéraient sans suivi ni contrôle. Les travaux doivent se poursuivre à cet égard dans le cadre du groupe de rédaction, a-t-il souligné. Il a dit ne pas douter que le document qui sera présenté à la prochaine session du Comité sera un document amélioré, achevé et complet.

M. VLADIMIR KARTASHKIN, expert du Comité consultatif, a déclaré que le succès du travail dépendra dans une large mesure des efforts considérables fournis par les membres du groupe de rédaction et avant tout de l'investissement de son rapporteur, M. Decaux. Il a recommandé qu'il soit fait référence dans le déclaration à la partie de la Déclaration universelle des droits de l'homme qui a trait à l'éducation. L'éducation et la formation dans le domaine des droits de l'homme doivent s'étendre au plus grand nombre possible, depuis les étudiants jusqu'aux peuples autochtones. Cette éducation doit s'appuyer sur la Déclaration universelle des droits de l'homme. De même, la déclaration doit être de nature universelle, afin qu'il soit clair que l'éducation doit être appliquée dans l'ensemble des pays et régions du monde. Il ne faut se masquer la face; dans certaines parties du monde, les droits de l'homme sont niés ou rejetés. Il est donc essentiel d'insister sur l'universalité de l'éducation et de la formation aux droits de l'homme dès le préambule de la déclaration.

M. BABA KURA KAIGAMA, expert du Comité consultatif, a fait remarquer que l'élaboration de cette déclaration constitue l'un des plus grands défis lancés au Comité. Ce dernier doit en effet tenir compte des documents existants ainsi que de la nécessité d'adapter les normes aux différents contextes, a-t-il relevé, soulignant la difficulté de la tâche. Par ailleurs, M. Kaigama a attiré l'attention sur le rôle joué par les institutions religieuses pour atteindre cet objectif d'éducation en matière de droits de l'homme. Il a souhaité que ce rôle soit mentionné dans le document.

MME PURIFICACION V. QUISUMBING, experte du Comité consultatif, a salué la richesse de l'avant-projet présenté par M. Decaux. Comme il s'agit d'un document en cours d'élaboration elle a recommandé que les discussions se concentrent sur les questions de fond et de contenu au lieu de porter principalement sur la formulation, qui doit toutefois rester simple afin d'être comprise par le plus grand nombre. Il importe donc de rester vigilant sur le style du document qui sera présenté en janvier et éviter un style trop «académique». Les paragraphes sur la mise en œuvre pourraient être simplifiés. Il faudrait par ailleurs indiquer que l'éducation aux droits de l'homme doit être dispensée à tous les niveaux, depuis l'école maternelle jusqu'aux formations universitaires. Par contre, l'éducation et la formation aux droits de l'homme dans le domaine du système pénal, qui s'adresse aux parties prenantes telles que la police jusqu'aux magistrats, mérite plus d'attention, en raison des nombreuses violations de droits de l'homme constatées à ce niveau.

M. BERNARDS ANDREWS NYAMWAYA MUDHO, expert du Comité consultatif, a insisté sur la nécessité de mieux harmoniser ce texte et de corriger les déséquilibres entre les deux langues de travail. Il a en effet estimé que le fait qu'il s'agisse d'un avant-projet ne doit pas empêcher d'être stricts dans les libellés et terminologies. Que l'on soit d'accord ou pas, il faut se comprendre, a insisté l'expert, précisant que ce texte doit permettre aux membres du Comité de se retrouver autour d'un certain nombre de paramètres.

M. WOLFGANG STEFAN HEINZ, expert du Comité consultatif, a proposé qu'il soit fait mention de la société civile au même titre que les institutions nationales de droits de l'homme abordés aux paragraphes 19 et 20 de l'avant-projet. La recherche universitaire ou encore les mouvements de base de défense de droits de l'homme pourraient être mentionnés à titre d'illustration. Il faudrait aussi préciser quels organes conventionnels pourraient se charger du suivi international.

MME CHUNG CHINSUNG, experte du Comité consultatif, a estimé que l'avant-projet présenté par M. Decaux était tout à fait prometteur. Elle a toutefois souhaité que le rôle crucial de l'éducation aux droits de l'homme pour lutter contre les pratiques discriminatoires soit réitéré dès la première partie du document. De nombreuses violations des droits de l'homme se produisent en raison d'incompréhensions et de l'importance de stéréotypes, a en effet souligné l'experte, rappelant l'importance de l'éducation aux droits de l'homme dans la lutte contre les attitudes stéréotypées. Mme Chung a par ailleurs souligné que l'éducation des enfants aux principes fondamentaux des droits de l'homme à un stade précoce était très importante. Enfin, elle a recommandé d'insister également sur le rôle des institutions nationales des droits de l'homme dans l'éducation aux de droits de l'homme.

M. JOSÉ ANTONIO BENGOA CABELLO, expert du Comité consultatif, a fait référence à l'annexe, en proposant qu'il serait bon d'avoir une trace de ce qui a été dit lors du débat général. Il a aussi demandé des critères de suivi et d'évaluation. Il a proposé que ces critères tiennent compte de la mise en place de programmes sur les droits de l'homme dans le système éducatif. Il s'agit d'une question complexe et il n'est pas toujours facile de savoir comment la mettre en pratique. S'agit-il du droit à être informé sur l'existence de droits de l'homme? Le fait d'être informé sur l'existence de droits de l'homme ne signifie pas que ces droits s'appliquent automatiquement à vous. Cependant, le droit à l'éducation et la formation aux droits de l'homme semblent indiquer que l'État à l'obligation de diffuser l'information sur l'existence de droits de l'homme. Le paragraphe qui traite de cette obligation devrait être formulé d'une façon plus forte, a estimé M. Bengoa. Dans de nombreux pays, l'université peut jouer un rôle essentiel, par le biais des recherches en droits de l'homme qu'elles peuvent effectuer. Cela ne doit pas être négligé. Par ailleurs, les ministères sont souvent en concurrence entre eux, dans certains contextes, on imagine difficilement des initiatives trans-ministérielles. Il est cependant essentiel de mettre d'avantage l'accent sur la formation des forces de sécurité dans le texte de la déclaration. Finalement, il faudrait aussi rappeler l'indivisibilité des droits de l'homme, qui ne se limitent pas aux droits civils et politiques, car souvent, les droits de l'homme sont compris par le grand public dans ce sens restreint. L'éducation aux droits de l'homme doit, sans ambiguïté, plaider pour une approche plus globale des droits de l'homme.

MME MONA ZULFICAR, experte du Comité consultatif, a estimé que la traduction en anglais ne rend pas justice au texte, original, français. Elle a souhaité une meilleure traduction. S'agissant de la question de l'universalité et de la spécificité des cultures, elle a fait observer que les pratiques traditionnelles et les cultures peuvent aussi représenter des obstacles à la réalisation des droits de l'homme et être la source de violations des droits de l'homme. Elle a par conséquent appelé à la prudence. Tout en reconnaissant la nécessité de respecter les cultures, elle a relevé l'importance d'éviter que les cultures ne soient utilisées pour déroger aux principes des droits de l'homme. D'autre part, elle a appuyé l'idée soulevée par Mme Chung sur l'importance de mettre l'accent sur l'éducation primaire. Enfin, s'agissant du suivi et de l'évaluation, Mme Zulficar a estimé que le projet de déclaration mettait à juste titre l'accent sur les stratégies nationales, le rôle du gouvernement, ainsi que celui des institutions nationales des droits de l'homme. Elle a suggéré d'envisager un mécanisme créatif multilatéral qui pourrait jouer un rôle de coordination entre tous les organes conventionnels.

M. ANSAR AHMED BURNEY, expert du Comité consultatif, a rappelé que l'éducation aux droits de l'homme en tant que partie du système éducatif ne touchera par définition pas ceux qui sont privés de scolarité. C'est du ressort de l'État d'assurer que l'ensemble des citoyens puisse avoir accès à l'éducation aux droits de l'homme, a-t-il souligné.

MME AMINA LEMRINI (Comité international de coordination - CIC) a présenté la contribution concertée des institutions nationales des droits de l'homme au projet de déclaration sur l'éducation aux droits de l'homme. Elle a d'emblée souligné l'importance qu'accordent les institutions nationales des droits de l'homme à cette question, rappelant notamment que le mandat et les compétences des institutions mentionnent de manière explicite qu'elles doivent être associées à des programmes de formation dans le domaine des droits de l'homme et sont appelées à collaborer avec les Nations Unies. Elle a d'ailleurs précisé que la CIC a consacré sa dernière réunion de mars dernier à ce projet de déclaration. Elle a affirmé que le CIC soutenait l'idée de ce projet porteur d'une grande valeur ajoutée car destiné à rassembler le cadre de référence en matière d'éducation aux droits de l'homme mais aussi à faciliter l'implication de tout un ensemble d'acteurs. Elle a souhaité que ce texte adopte une approche globale et fasse un lien entre l'objectif de l'éducation aux droits de l'homme et le droit à l'éducation. Elle a souhaité que ce texte soit fondé sur l'universalité et l'indivisibilité des droits de l'homme et que l'esprit de cette déclaration soit puisé dans les textes fondateurs des droits de l'homme. Elle a également souhaité que l'éducation aux droits de l'homme soit considérée par les systèmes éducatifs comme l'indicateur par excellence de la qualité d'éducation. Enfin, elle a souhaité que la déclaration insiste sur le fait que les États doivent inclure l'éducation dans le domaine des droits de l'homme comme composante transversale de toutes les politiques publiques. En ce qui concerne le suivi, la représentante a suggéré que les États élaborent des rapports périodiques. Un observatoire international pourrait être mis en place pour partager et diffuser les bonnes pratiques, a-t-elle ajouté. Elle a conclu son intervention en soulignant que le CIC souhaite une déclaration forte à portée pratique.

MME GRAINNE KILCULLEN (Amnesty International) a déclaré que l'éducation et la formation dans le domaine des droits de l'homme sont essentielles dans la prévention des violations de droits de l'homme. Amnesty International appuie l'approche globale et inclusive proposée par le Comité consultatif. La pratique doit être inclusive et intégrée et s'appliquer à l'ensemble des secteurs de la société, y compris le secteur informel. La responsabilisation et la participation active des sujets du droit sont essentielles et il faut aussi mettre l'accent sur le fait que les États ont des devoirs en la matière et sont redevables et responsables de leurs actes. L'éducation aux droits de l'homme ne doit pas se limiter à prôner la non-discrimination mais doit aussi promouvoir les mesures actives d'inclusion. Cette éducation doit être accessible à tous, y compris à ceux qui n'ont pas accès à l'éducation formelle, ainsi qu'aux personnes illettrées. La représentante a finalement rappelé l'importance du rôle qui doit être joué par les mécanismes de suivi, les éducateurs en droits de l'homme et les organisations non gouvernementales.

M. KAZUNARI FUJI (Soka Gakkai International, au nom également de l'Organisation internationale pour le développement de la liberté d'enseignement; et Human Rights Education Associates) a apprécié les éléments de base du premier projet de déclaration sur l'éducation et la formation aux droits de l'homme. Il s'est dit encouragé par les mesures prises pour procéder à la formulation de ce texte, rappelant qu'il était attendu du Comité qu'il présente un premier projet à la session du Conseil de mars 2010. Le représentant a toutefois regretté que ce document ait été disponible si tardivement, qui plus est en français. Il s'est dans cette perspective inquiété de l'efficacité et la productivité de cette session du Comité consultatif. Il a ensuite émis quelques propositions pour ce projet de déclaration et a notamment souhaité que toutes les parties prenantes soient appelées le plus rapidement possible à présenter leurs commentaires sur le projet. Il a également estimé que le texte devrait comprendre une référence au fait que la pleine réalisation des droits de l'homme pour tous, par le biais d'une culture universelle des droits de l'homme, est l'objectif ultime de l'éducation en matière de droits de l'homme. Une disposition devrait souligner que l'éducation informelle est tout aussi importante et pertinente que l'éducation formelle dans ce contexte, a-t-il ajouté. Enfin, il a fait remarquer que le texte devrait souligner la responsabilité de l'État de prévoir des ressources pour l'éducation aux droits de l'homme dans le cadre du budget annuel national.

M. LAZARO PARRY (Mouvement indien «Tupaj Amaru») a déclaré qu'aux yeux des organisations des peuples autochtones, les droits essentiels sont les droits de manger à sa faim, de se vêtir, d'avoir un toit. Si les États ne peuvent pourvoir à ces droits de base, alors il n'y a pas lieu de se préoccuper des droits secondaires tels que les droits à l'éducation. Or, tout est régi par les intérêts des grandes puissances économiques du monde. Les plus pauvres n'ont pas accès à l'éducation; il y a, encore une fois, discrimination dans ce domaine. La discrimination se retrouve aussi dans la manière d'enseigner. Il faut commencer par la formation des éducateurs et enseignants qui à leur tour formeront les enfants. Les États ont trop longtemps négligé leurs devoirs dans ce domaine et même l'UNESCO s'est montré négligente à cet égard, a estimé M. Pary. Comme l'a déclaré M. Bengoa, il faut commencer par former la police et les fonctionnaires des administrations qui font souvent obstacle au respect des droits de l'homme. L'éducation aux droits de l'homme doit commencer par instaurer le respect de la dignité de l'homme, de la protection de l'environnement nourricier et le sens de la solidarité. En vertu des Conventions internationales, les peuples autochtones ont le droit à l'éducation, de formuler leur propre politique d'éducation et cela à tous les niveaux d'éducation. Il est également dit que les ressources nécessaires doivent être allouées pour permettre l'épanouissement des individus et il serait important que l'éducation aux droits de l'homme pose ce principe avec fermeté.

M. RONALD BARNES (Consejo Indio de Sudamérica) a souhaité qu'il n'y ait pas de confusion sur ce que sont les peuples autochtones et leur souhait de pouvoir exercer leur droit à l'autodétermination. Il a rappelé que le Groupe de travail sur les peuples autochtones avait consacré un thème spécifique à l'éducation. En ce qui concerne le projet de déclaration, il a fait remarquer qu'en élaborant ce document, le Comité consultatif ne doit pas tenter délibérément de limiter le droit à l'autodétermination en ajoutant, par exemple, une disposition qui prévoirait que l'éducation en matière de droits de l'homme doit se faire conformément à certains principes précis. Il a rappelé que certains États s'efforcent de nier l'existence des traités internationaux qui couvrent le droit à l'autodétermination. Chaque population ou nation autochtone a le droit d'être traitée en tant que telle, a-t-il insisté.

MME MONIQUE PRINDEZIS (Association mondiale pour l'école instrument de paix) a souligné la grande richesse du séminaire de Marrakech sur l'éducation aux droits de l'homme. Un document basé sur ses conclusions a déjà été envoyé par l'Association au Comité consultatif. L'importance pour les États de s'acquitter de leurs devoirs s'agissant de la qualité des enseignants et des programmes scolaires ne peut être passée sous silence. L'éducation aux droits de l'homme doit suivre des principes fondamentaux, à savoir, acceptabilité (contenu pertinents conformes aux dispositions des droits de l'homme), adaptabilité (suffisamment souple pour s'adapter aux besoins des enfants et des sociétés en mutation), recevabilité (par le système scolaire), accessibilité (physiquement, financièrement et culturellement).

MME ERLINDA F. BASILIO (Philippines, s'exprimant au nom de la Plateforme pour l'éducation en matière de droits de l'homme réunissant les délégations du Costa Rica, de l'Italie, du Maroc, des Philippines, de la Slovénie et de la Suisse) a affirmé que les délégations de la Plateforme ont confiance en la compétence et les qualités du Comité consultatif pour l'élaboration de cette déclaration historique. Elle a fait remarquer que le nombre considérable de réponses au questionnaire envoyé par le Comité consultatif atteste de l'intérêt porté à cette question. Le moment est venu de rédiger une telle déclaration, a-t-elle souligné, se félicitant de la tenue, à Marrakech, du séminaire consacré à l'élaboration de la déclaration. Les participants se sont accordés sur l'importance de cette entreprise, a-t-elle noté, précisant qu'il a été estimé que la mise au point de la déclaration était parfaitement justifiée et contribuerait à renforcer la promotion et la protection des droits de l'homme. Cette déclaration permettra de faire avancer la cause des droits de l'homme, a-t-elle souligné, se disant persuadée que l'éducation aux droits de l'homme peut empêcher les violations des droits de l'homme en favorisant une culture de paix et de tolérance. Elle a fait remarquer qu'au niveau politique, cette déclaration transmettra un message clair de la communauté internationale sur l'importance et la priorité de la formation en droits de l'homme. Au niveau pratique, elle devrait fournir une définition claire de l'éducation en matière de droits de l'homme et son lien avec le droit à l'éducation. La déclaration devrait en outre permettre de clarifier les obligations juridiques des États et le rôle des autres acteurs, a ajouté la déléguée.

MME SIM MELLOUH (Algérie) a déclaré avoir pris connaissance du contenu de l'avant-projet avec grand intérêt. L'éducation aux droits de l'homme est un élément important dans l'éducation et ouvre les générations en formation à la solidarité et à l'ouverture. À cet égard, il faut que les medias et moyens de communication jouent pleinement leurs rôles pour étendre cette éducation à ceux qui n'ont pas accès au système scolaire. Elle a aussi noté avec intérêt le rôle que les entreprises, y compris les multinationales, peuvent avoir pour diffuser l'éducation et la formation aux droits de l'homme. Cela va dans le sens du projet de l'Algérie qui vise à promouvoir une société de paix et de tolérance.

M. MARGHOOB SALEEM BUTT (Pakistan) a fait remarquer qu'au cours du séminaire sur l'éducation en matière de droits de l'homme qui s'est tenu à Marrakech, plusieurs idées ont été exprimées, reflétant l'importance du sujet. Il a remercié le Gouvernement du Maroc pour cette initiative. Le représentant pakistanais a souligné que l'éducation en matière de droits de l'homme doit être faite à tous les niveaux et à l'intention de toutes les populations, afin de faire des droits de l'homme une réalité au sein de toutes les communautés. Il a toutefois relevé l'importance de ne pas perdre de vue la réalité et de demeurer concentré sur le droit fondamental à l'éducation. D'une manière générale, M. Butt a rappelé que l'objectif de l'éducation aux droits de l'homme consistait à créer des sociétés tolérantes, démocratiques et pluralistes où les droits de chacun seront respectés, sans distinction de race, de couleur, de religion, de sexe ou de statut social. Il a estimé que la déclaration devait aussi aborder des questions conceptuelles et apporter davantage de clarté à la définition du concept d'éducation aux droits de l'homme. Enfin, le représentant pakistanais a relevé l'importance de veiller à ce que l'éducation et la formation tiennent compte des évolutions récentes, comme le rôle des médias, la fracture numérique ou le niveau de développement économique.

M. OSITADINMA ANAEDU (Nigéria) a déclaré que son pays était d'avis que l'éducation aux droits de l'homme était un excellent moyen de promouvoir la prise de conscience de l'indivisibilité et de l'interdépendance de tous les droits. Ayant participé au séminaire de Marrakech, il a confirmé que les recommandations du séminaire permettraient aux membres du Comité consultatif d'y puiser des propositions intéressantes sur les questions de fond et sur la manière dont cette éducation peut être organisée au mieux. Il a par conséquent invité les membres à s'y référer. Par ailleurs, il a rappelé qu'il ne faudrait pas considérer que ce qu'apprend l'enfant à l'école est séparé et sans lien avec l'éducation qu'il reçoit à la maison. Ces deux sources d'éducation sont intimement liées et contribuent toutes deux à former la personne. L'éducation à domicile, reçue de la famille, ne doit donc pas être négligée par la déclaration.

M. ALEXEY GOLTYAEV (Fédération de Russie) a estimé que l'éducation aux droits de l'homme était extrêmement importante et essentielle dans le processus de promotion et de protection des droits de l'homme. Il a souligné qu'une attention particulière était accordée à cette question en Fédération de Russie. En effet, les droits de l'homme sont une discipline à part dans l'enseignement secondaire, et le pays travaille actuellement avec le Haut-Commissariat au lancement d'un programme de Master en matière d'éducation aux droits de l'homme. La Fédération de Russie dispense aussi une éducation en matière de droits de l'homme au niveau international. Pour le représentant russe, la déclaration devrait comporter une distinction entre le droit à l'éducation et l'éducation et la formation aux droits de l'homme en tant que processus. L'accent devrait aussi être mis sur la mise en place de politiques et le partage de meilleures pratiques en matière d'éducation aux droits de l'homme. Le délégué a en outre estimé que l'éducation et la formation aux droits de l'homme devaient être définies conformément aux valeurs d'une société donnée. Enfin, il a invité le Comité à travailler dans le sens d'un texte qui aille vers un maximum de responsabilité et d'objectivité.

MME ANNA L. CHAMBERS (États-Unis) a déclaration que sa délégation reconnaissait l'utilité de la discussion d'aujourd'hui et estimait important de se mettre d'accord sur ce que l'on entend par le concept même d'éducation aux droits de l'homme. Elle a invité le Comité consultatif à tenir dûment compte des commentaires présentés aujourd'hui afin de parvenir à un résultat acceptable pour tous.

M. EMMANUEL DECAUX, expert du Comité consultatif et Rapporteur du groupe de rédaction, a dit avoir pris note des suggestions faites ce matin. Il a reconnu qu'aucun document n'a été adopté à la fin du Séminaire de Marrakech, soulignant dès lors la nécessité pour le groupe de rédaction de continuer à travailler sur le texte. Il s'est réjoui des convergences d'opinion apparues au sein du Comité consultatif comme au sein du groupe de rédaction. Il a fait remarquer qu'il s'agit d'avoir une double approche, un grand recul à l'égard du texte, car il est important d'avoir des regards neufs, mais également un travail de détail. Il a fait remarquer que le lien avec l'éducation de base, souligné par un expert, apparaissait très tôt dans le texte. C'est un fondamental, à l'instar de la culture des droits de l'homme, a-t-il insisté. M. Decaux a assuré qu'il s'efforcerait d'inclure autant que possible les contributions des différentes parties prenantes. Il a également reconnu que face aux attentes, il importe d'être précis, concis, et d'employer des phrases simples. Il faut que tout le monde puisse se reconnaître dans ce document, puisse le citer, puisse le comprendre, a-t-il insisté. Il a souligné que l'accent doit être mis sur le suivi, proposant à cet égard et à titre d'exemple que l'Examen périodique universel du Conseil des droits de l'homme comprenne un volet consacré à l'éducation aux droits de l'homme.


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