Fil d'Ariane
LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME OUVRE LES TRAVAUX DE SA ONZIÈME SESSION
Le Conseil des droits de l'homme a ouvert ce matin sa onzième session, qui se tient jusqu'au 18 juin au Palais des Nations à Genève. Il a tenu un dialogue interactif avec les titulaires des mandats relatifs aux droits de l'homme et aux sociétés transnationales, au droit à l'éducation et aux droits de l'homme des migrants, et engagé avec eux un débat interactif, qui ont présenté leurs rapports.
M. John Ruggie, Représentant spécial du Secrétaire général sur la question des droits de l'homme et des sociétés transnationales, a déclaré que les droits de l'homme sont particulièrement menacés en temps de crise économique. Certains gouvernements pensent pouvoir tirer des avantages de la crise par le biais d'une érosion des droits de l'homme, mais cette attitude est illusoire: aucune solution durable à la crise ne peut en effet être trouvée sur une base aussi précaire. Ce sont, au contraire, les manquements et les faiblesses des politiques en place qui ont mené à la présente crise. Dans le cadre du débat interactif de ce matin, des États ont rappelé que la responsabilité première de la protection des droits de l'homme revient aux autorités nationales et à leurs représentants, tandis que les entreprises privées sont obligées de respecter la loi et que les victimes de violations de leurs droits doivent disposer de moyens de recours. Il importe que les entreprises soient dotées, ou se dotent, de codes de conduite, tels ceux préparés sous les auspices des Nations Unies. D'autres délégations ont observé qu'il appartient aux États de faire assumer aux entreprises des responsabilités plus étendues, propices au bien-être de la société en général. Il serait en effet erroné de baisser la garde sur la responsabilité des entreprises en matière de respect des droits de l'homme.
M. Vernor Muñoz Villalobos, Rapporteur spécial sur le droit à l'éducation a précisé que son rapport démontre la nécessité urgente de redoubler d'efforts pour respecter, protéger et réaliser le droit à l'éducation des détenus. Il a rappelé que la possibilité de se former à l'intérieur des prisons avait un impact décisif dans la réussite de la réintégration sociale, en matière d'emploi en particulier, à la sortie de prison. Concernant plus spécifiquement, les adolescents détenus, il a rappelé que ceux-ci réintégraient rarement le système scolaire à leur sortie. Il y a un grand paradoxe dans le fait que les systèmes carcéraux aient pour objectif de «réhabiliter» les prisonniers alors que, dans les faits, ils n'offrent pas de possibilités éducatives qui rendraient possibles cet engagement, a observé M. Muñoz Villalobos. Le Guatemala et la Malaisie sont intervenus à titre de pays concernés, le Rapporteur spécial ayant récemment effectué des visites dans ces pays. Plusieurs délégations ont relevé avec le Rapporteur spécial que l'incarcération ne doit pas priver des droits humains fondamentaux, notamment de celui à l'éducation. L'objectif de la peine doit être de permettre une réintégration dans la société et la pleine participation à celle-ci. Une délégation a observé que l'éducation des personnes détenues est un objectif qu'il faut atteindre mais que dans la réalité se posent des questions de moyens financiers, d'où l'importance de la coopération internationale.
Pour M. Jorge Bustamante, Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants, la protection des enfants migrants, qui fait l'objet de son rapport thématique, souffre de deux lacunes: la première tient à l'absence de dispositions spécifiques aux enfants dans la plupart des lois, la seconde aux politiques publiques concernant les enfants. Dans de nombreux pays, les mesures de protection des enfants - pour l'essentiel fondées sur la Convention des droits de l'enfant - ne tiennent pas encore compte des conditions particulières et des besoins des enfants migrants. Ceci est évident en matière d'éducation, de soins de santé et d'enregistrement des naissances, notamment. Le Guatemala et le Mexique ont fait des déclarations à titre de pays concernés par les rapports de M. Bustamante, qui rend compte de visites effectuées dans ces pays. D'autres délégations ont souligné que la migration est bien souvent une chance, encore trop théorique malheureusement, pour les enfants des migrants. Dans la réalité, ces situations de migration s'accompagnent de violations grossières des droits de l'homme: il est donc important d'accorder toute l'attention nécessaire à leurs droits, à ceux des femmes migrantes en particulier.
Les États suivants ont participé au débat interactif avec les trois titulaires de mandats: Brésil, Argentine, République tchèque (au nom de l'Union européenne), Pakistan (au nom de l'Organisation de la Conférence islamique), Fédération de Russie, Royaume-Uni, Suisse, Émirats arabes unis (au nom du Groupe arabe), Turquie, Thaïlande, Suède, Azerbaïdjan, Inde, Égypte (au nom du Groupe africain), Maroc, États-Unis, Algérie, Danemark, Finlande, Djibouti, Costa Rica, Équateur, Norvège, Philippines, Yémen, Canada, Portugal et Chine.
Cet après-midi, à 15 heures, le Conseil achèvera le débat interactif avec les trois titulaires de mandats et sera ensuite saisi de nouveaux rapports concernant l'indépendance des juges et des avocats, la liberté d'expression et le droit à la santé. Auparavant, il entendra une déclaration du Ministre des droits de l'homme et de la gestion des catastrophes de Sri Lanka.
Examen de rapports de titulaires de mandats
Présentation des rapports
Le Représentant spécial du Secrétaire général chargé de la question des droits de l'homme et des sociétés transnationales et autres entreprises, le Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants et le Rapporteur spécial sur le droit à l'éducation ont présenté des rapports au Conseil.
M. JOHN G. RUGGIE, Représentant spécial du Secrétaire général sur les droits de l'homme et les sociétés transnationales et autres entreprises, a rappelé qu'il y a un an, le Conseil a adopté le cadre politique pour aborder les problèmes de droits de l'homme posés par les sociétés transnationales et autres entreprises; c'est la première fois qu'une plate-forme commune réunit les responsabilités des États et des entreprises. Ces responsabilités sont de nature différente, mais elles sont complémentaires. Le Conseil a, par la même occasion, étendu ses mandats en lui demandant de fournir des recommandations pratiques: le rapport de 2009 fait part du résultat de ce travail, a indiqué le Représentant spécial. Il a remercié les Gouvernements de l'Inde et de l'Argentine d'avoir activement facilité les consultations qui ont eu lieu dans ces pays.
Les droits de l'homme sont particulièrement en danger en période de crise économique, a souligné M. Ruggie. Certains gouvernements pensent pouvoir tirer des avantages de la crise, ce qui passe par une érosion des droits de l'homme. Mais c'est illusoire; aucune solution durable à la crise ne peut en effet être trouvée sur une base aussi précaire. Ce sont au contraire les manquements et faiblesses des politiques en place qui ont mené à la présente crise. Depuis le premier rapport de 2006, le Représentant attire l'attention sur le fossé grandissant entre la liberté concédée aux entreprises et les capacités des États à gérer les effets néfastes de la libéralisation. Les marchés économiques doivent être réglementés et répondre à des valeurs supérieures. Il incombe aux gouvernements d'adopter des politiques qui portent les entreprises à assumer leur responsabilité sociale.
Le Représentant spécial estime que les gouvernements doivent d'abord renforcer une culture d'entreprise respectueuse des droits de l'homme. Ils doivent, par exemple, éviter de signer des accords qui les forcent à accepter un arbitrage contraignant, si l'entreprise devait estimer que la législation nationale entrave ses activités. Cela peut forcer ledit État à payer des réparations importantes à l'entreprise en cas de litige. Certes, les investisseurs ont droit à une protection légale, mais les intérêts généraux doivent primer sur les intérêts particuliers. Deuxièmement, les gouvernements doivent prendre en compte les aspects de droits de l'homme lorsqu'ils font affaire avec les acteurs de la vie économique. Ils doivent en outre adopter une législation qui encourage le respect de la responsabilité sociale des entreprises. Les 19 plus grands cabinets juridiques du monde examinent en ce moment quelles sont les législations nationales qui sont le plus favorable aux droits de l'homme, a indiqué le Représentant spécial. La coopération internationale est essentielle dans ce domaine afin d'adopter des politiques internes visant à éviter des violations des droits de l'homme. Cela est particulièrement important pour les sociétés qui sont affectées par des conflits, et qui par conséquent sont d'autant plus vulnérables aux abus.
Le Représentant spécial s'apprête à élaborer des lignes directrices sur le respect des droits de l'homme pour les entreprises. Il entamera ce travail à l'automne, qui s'étendra aussi à l'examen des moyens de poursuite et de remède aux violations des droits de l'homme. La responsabilité incombe aux États de mettre en place des mécanismes et des moyens de règlement des différents et litiges qui portent sur les questions touchant les droits de l'homme, a-t-il conclu.
Le rapport sur la question des droits de l'homme et des sociétés transnationales et autres entreprises (A/HRC/11/13, disponible en anglais seulement) est consacré à la mise en œuvre du cadre de «protection, respect et recours» et définit les orientations stratégiques de l'action du Représentant spécial dans ce contexte. Le cadre repose sur trois piliers: l'obligation des États de protéger les individus contre les violations de droits de l'homme commises par des tiers, notamment des entreprises commerciales; la responsabilité des entreprises elles-mêmes d'éviter d'agir de manière à enfreindre les droits d'autrui; et un meilleur accès des victimes aux recours judiciaires et non judiciaires. Le mandat du Représentant spécial est de traduire ce cadre en principes directeurs concrets.
Dans un contexte de crise économique majeure, la question peut se poser de la pertinence d'une approche «droits de l'homme» du comportement des sociétés. Trois raisons justifient en réalité cette démarche. D'abord, les droits de l'homme sont particulièrement menacés en temps de crise, la crise économique étant particulièrement dangereuse pour la jouissance des droits économiques et sociaux. Les gains que les gouvernements espèrent tirer d'un relâchement des normes de droits de l'homme au profit de l'activité des entreprises sont illusoires, car aucune reprise durable ne saurait intervenir sur des bases aussi fragiles. D'autre part, les carences et échecs en matière de gouvernance à l'origine de la crise économique actuelle expliquent également les violations des droits de l'homme commises par les entreprises. Dans les deux cas, il appartient aux pouvoirs publics d'adopter des politiques incitant à une plus grande responsabilité des entreprises. Quant aux sociétés commerciales, elles doivent adopter des stratégies adaptées à une réalité incontournable: leurs perspectives à long terme sont étroitement liées au bien-être de la société en général. Le rapport indique enfin que le cadre de «protection, respect et recours» identifie des manières précises d'atteindre ces objectifs: pour les gouvernements, en inscrivant leur action en matière d'entreprises et de droits de l'homme dans le contexte des politiques régissant les pratiques commerciales; pour les entreprises, en prenant conscience des violations des droits d'autrui qu'elles commettent et en y remédiant. Le «recours» aux dispositifs correctifs juridiques et non juridiques, s'il permet aux individus de faire valoir leurs droits, joue aussi un rôle utile de mise en garde aux gouvernements, aux entreprises et à la société.
Le Représentant spécial soumet également un additif à son rapport dans lequel il recense des dispositions, commentaires et décisions internationales et régionales relatifs aux obligations des États en matière d'accès aux recours contre les violations des droits de l'homme commises par des tiers (A/HRC/11/13/Add.1, disponible en anglais seulement).
M. JORGE AGUSTÍN BUSTAMANTE, Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants, a déclaré que la protection des enfants migrants, qui fait l'objet de son rapport thématique, souffre de deux lacunes: la première tient à l'absence de dispositions spécifiques aux enfants dans la plupart des lois; il est possible de remédier en partie à ce problème par une harmonisation des lois nationales avec les dispositions de la Convention sur les droits de l'enfants et autres instruments régionaux des droits de l'homme. La seconde lacune concerne les politiques publiques concernant les enfants. Dans de nombreux pays, les mesures de protection des enfants - pour l'essentiel fondées sur la Convention des droits de l'enfant - ne tiennent pas encore compte des conditions particulières et aux besoins des enfants migrants. Ceci est évident en matière d'éducation, de soins de santé, d'enregistrement des naissances, de formation professionnelle des adolescents et d'exploitation commerciale. Parmi les recommandations contenues dans son rapport, M. Bustamante a évoqué la nécessité pour les États de renforcer la collecte de données statistiques concernent l'impact des migrations d'enfants dans les pays d'origine, de transit et de destination. Les États devraient en outre partager entre eux des informations sur les principaux indicateurs relatifs aux effets des migrations sur les enfants ainsi que sur les défis et meilleures pratiques dans ce domaine.
M. Bustamante a par ailleurs fait état de ses missions au Mexique et au Guatemala et indiqué porter bientôt son attention sur la protection des migrants au Royaume-Uni, en Roumanie et au Sénégal. Le Rapporteur spécial a précisé que sur vingt-six communications envoyées, seuls onze États ont apporté des réponses. Il s'est toutefois félicité des nombreuses initiatives et activités mises en place par les gouvernements en faveur de la réalisation des droits de l'enfant dans le contexte des migrations. Le rapport salue ainsi les efforts consentis par certains États pour étendre la couverture de santé à toutes les personnes, indépendamment de leur statut migratoire, comme c'est le cas en Suède, où les enfants sans papiers sont soignés tout comme les enfants résidents; ou pour faire bénéficier les enfants migrants des services à la petite enfance, comme c'est le cas en Allemagne et au Canada.
Le rapport sur les droits de l'homme des migrants (A/HRC/11/7, à paraître en français), est axé sur la protection des enfants dans le contexte des migrations. Le Rapporteur spécial y rappelle l'obligation des États de garantir la protection des enfants à toutes les étapes du processus de migration. Il présente un aperçu du cadre juridique applicable au plan international, propose un cadre théorique et examine brièvement la situation de trois catégories d'enfants particulièrement affectés par le processus migratoire: les enfants laissés dans leur pays par des parents migrants, les enfants migrants et les enfants migrants dans leur pays d'accueil. Le rapporteur spécial souligne l'importance de l'existence d'un cadre juridique propice à la protection des droits de tous les enfants dans le contexte des migrations, notamment par la ratification des instruments internationaux de droits de l'homme pertinents et leur traduction en lois et règlements au niveau des pays. Ces lois et règlements devraient être conçus dans l'optique du respect des droits de l'homme tels que la notion d'intérêt supérieur de l'enfant, le principe de non-discrimination et le droit de l'enfant d'être entendu lors des prises de décision le concernant.
Par ailleurs, la protection des droits de l'homme de l'enfant doit être garantie par les États d'origine, de transit et de destination, à tous les stades du processus migratoire et dans toutes les procédures de gestion des migrations. Les États de transit et de destination en particulier doivent prêter une attention particulière à la protection des enfants sans papiers, non accompagnés et séparés de leurs parents; ils doivent assurer la protection des enfants demandeurs d'asile et victimes de la criminalité organisée transfrontalière, notamment de la traite des êtres humains, de la vente d'enfants, de la pornographie et de la prostitution impliquant des enfants. Dans ce contexte, les besoins des fillettes migrantes doivent faire l'objet d'une attention particulière. Le Rapporteur spécial estime que les États devraient s'inspirer de la sixième Observation générale du Comité des droits de l'enfant dans leur traitement des enfants migrants non accompagnés et séparés de leurs parents. Les États devraient en outre reconnaître que les enfant migrants sont particulièrement exposés au risque de travail des enfants et, dans ce contexte, qu'ils doivent tenir compte des dispositions de la Convention de l'Organisation internationale du travail concernant l'interdiction des pires formes de travail des enfants et l'action immédiate en vue de leur élimination (no 182).
En ce qui concerne sa mission au Mexique (A/HRC/11/7/Add.2, à paraître en français), effectuée du 9 au 15 mars 2008, le Rapporteur spécial analyse la protection des migrants dans ce pays dans une perspective élargie, replaçant le Mexique dans le contexte des flux migratoires vers les États-Unis à partir de l'Amérique centrale. Le rapport met en lumière le cadre juridique relatif aux droits de l'homme des migrants au niveau fédéral, soulignant les lacunes en matière d'application des lois existantes et pointant les mesures problématiques. Le rapport se poursuit par une analyse de certains aspects du phénomène migratoire tel qu'il se présente au Mexique, notamment la diaspora mexicaine, les ressortissants mexicains expulsés des États-Unis, les travailleurs migrants des secteurs agricole et domestique, les enfants migrants, entre autres.
Le Rapporteur spécial recommande notamment l'adoption de réformes législatives visant à mettre un terme à l'impunité des auteurs des violations des droits de l'homme, qui est une faiblesse du système du système judiciaire mexicain. À cet égard, le Rapporteur spécial recommande que le Gouvernement rende obligatoire la publication de rapports annuels concernant le nombre des cas ayant entraîné des sanctions judiciaires, telles qu'arrestations et condamnations d'auteurs de violations des droits de l'homme des migrants, et notamment le nombre de poursuites judiciaires intentées contre les responsables de travail des enfants. Il recommande en outre que le Mexique, plus particulièrement son Institut national des migrations, prenne les mesures nécessaires pour que le contrôle des migrations et la prise en charge des migrants soient assurés exclusivement par les autorités compétentes et que toute violation de ce principe soit dûment signalée.
S'agissant de sa mission au Guatemala (A/HRC/11/7/Add.3), effectuée du 24 au 28 mars 2008, le Rapporteur spécial note que le Gouvernement est soucieux de remédier à certains des problèmes liés au respect des droits de l'homme des migrants mais s'inquiète des lacunes et imprécisions concernant le cadre législatif qui réglemente les migrations au Guatemala. Le Rapporteur spécial constate avec alarme que ces lacunes conduisent à des violences et à des violations des droits de l'homme des migrants, violations qui pour la plupart ne feraient l'objet d'aucune plainte. Le Rapporteur spécial est aussi préoccupé par les renseignements qu'il a reçus sur des cas dans lesquels, lors de l'interception et de l'expulsion de migrants des États-Unis d'Amérique vers le Guatemala, des violations des droits de l'homme auraient été commises telles que des mauvais traitements, l'absence de soins médicaux dans les centres de détention, l'absence d'information sur la procédure d'expulsion et l'impossibilité pour les migrants d'entrer en contact avec leur représentant consulaire. Le Rapporteur spécial est également préoccupé par le déroulement des procédures d'expulsion de migrants clandestins depuis le Guatemala, qui sont retardées plus que de raison, en particulier dans les cas de migrants qui ne sont pas originaires d'Amérique centrale, dont le pays d'origine ne dispose pas de représentation diplomatique au Guatemala.
Dans ses recommandations, le Rapporteur spécial insiste sur la nécessité d'intensifier la lutte contre la corruption et l'impunité et de garantir la poursuite en justice des responsables et l'application effective des condamnations. Il appelle exhorte l'État à continuer de collaborer dans ce sens avec la Commission internationale contre l'impunité au Guatemala. Le Rapporteur spécial constate par ailleurs avec satisfaction le grand travail accompli par les organisations de la société civile, l'Église, des universitaires et d'autres institutions afin de promouvoir les droits de l'homme des migrants. Il encourage l'État à maintenir le dialogue ouvert avec ces partenaires sociaux et à renforcer leur participation aux prises de décisions en matière de politiques migratoires.
M. Bustamante a également soumis une liste des communications qu'il a adressées aux Gouvernements et des réponses reçues (A/HRC/11/7/Add.1, disponible en anglais seulement).
M. VERNOR MUÑOZ VILLALOBOS, Rapporteur spécial sur le droit de l'éducation, a indiqué s'être rendu au Guatemala en juillet 2008 et au Paraguay en avril dernier, visites dont il fera rapport lors d'une prochaine session du Conseil. Il a consulté, en outre, les États et les organisations non gouvernementales, les organismes multilatéraux, les agences de l'ONU et diverses institutions éducatives. Il a précisé avoir consacré le rapport thématique de cette année au droit à l'éducation des prisonniers, groupe sujet à la discrimination d'une manière générale et à la discrimination à l'éducation en particulier. Il a souligné avoir appelé les détenus à exprimer leurs revendications à cet égard. Les réponses obtenues confirment la nécessité que les personnes privées de liberté soient prises en compte par les autorités compétentes et définissent des stratégies pédagogiques pertinentes. M. Muñoz Villalobos a précisé que son rapport démontrait la nécessité urgente de redoubler d'efforts pour respecter, protéger et réaliser le droit à l'éducation des détenus. Il a rappelé que la possibilité de se former à l'intérieur des prisons avait un impact décisif dans la réussite de la réintégration sociale, en matière d'emploi en particulier, à la sortie de prison. Bien que la majorité d'entre eux ne soient incarcérés que pour une durée limitée, il est courant que l'on oublie les conséquences de ne pas leur garantir leur droit à l'éducation, a-t-il noté. Concernant plus spécifiquement les adolescents détenus, il a rappelé que ceux-ci réintégraient rarement le système scolaire à leur sortie. Il y a un grand paradoxe dans le fait que les systèmes carcéraux aient pour objectif de «réhabiliter» les prisonniers alors que dans les faits ils n'offrent pas de possibilités éducatives qui rendraient possibles cet engagement, a observé M. Muñoz Villalobos.
Le Rapporteur spécial a rappelé que plus de neuf millions de personnes étaient incarcérées de par le monde, en détention préventive ou ayant été condamnées. Leur nombre a augmenté ces dernières années dans près des trois quarts des États. La majorité d'entre eux appartenait déjà à des milieux défavorisés avant leur incarcération. Un des obstacles au droit à l'éducation est l'absence de personnel, de bibliothèques et de matériel didactique. Pour préparer son rapport, M. Muñoz Villalobos a envoyé un questionnaire à tous les États membres, ainsi qu'aux organisations intergouvernementales et non gouvernementales œuvrant dans le domaine éducatif. Malgré la variété des réponses, on peut recenser des points communs. Ainsi, la nécessité de maintenir l'ordre et la sécurité dans les centres de détention est la raison principale justifiant les restrictions en matière d'éducation, surtout lorsque celles-ci nient qu'il s'agisse par là d'une forme supplémentaire de punition au lieu de contribuer à la prétendue réhabilitation du détenu. En outre, les États ayant une forte population carcérale étrangère ne semblent pas avoir conscience de la nécessité de leur fournir des programmes spécifiques d'éducation.
Le Rapporteur spécial a enfin évoqué les cas de la Malaisie et du Guatemala, deux pays où il s'est rendu, respectivement en 2007 et 2008. Il a noté les investissements importants faits par le premier dans le domaine éducatif, contrairement au second qui devrait consacrer un budget approprié à cet égard, a-t-il dit.
Le rapport thématique du Rapporteur spécial sur le droit à l'éducation est consacré cette année au droit à l'éducation des personnes en détention (A/HRC/11/8, disponible en anglais seulement). Le Rapporteur spécial y relève notamment que les États doivent prendre des mesures en vue de la réalisation du droit à l'éducation des personnes en détention dans une mesure supérieure à celle constatée actuellement. À cette fin, les États doivent, notamment, garantir le droit à l'éducation des personnes en détention dans des dispositions constitutionnelles et / ou juridiques. Cette éducation doit être assurée par des fonds publics. Le Rapporteur spécial recommande que les autorités en charge de l'éducation publique mettent à la disposition des personnes détenues à quelque titre que ce soit des enseignements couvrant au minimum le programme d'instruction obligatoire au niveau primaire et, si possible, au niveau secondaire. Les enseignants en milieu de détention devraient avoir accès à des formations continues ciblées et être reconnus dans leur statut, par le biais de conditions de travail et salariales adaptées. L'évaluation et le contrôle des programmes d'enseignement dispensés en milieu de détention devraient être du ressort du Ministère de l'éducation. Le contenu de ces programmes devrait être basé sur la recherche actuelle en matière pédagogique. À cette fin, la communauté internationale devrait instituer des mécanismes d'échange et de coopération entre États afin de faciliter le partage des résultats de la recherche et des meilleures pratiques. Le Rapporteur spécial recommande encore que les enfants en détention aient accès à l'éducation obligatoire et soient mis en situation d'en bénéficier. Les programmes d'enseignement doivent en outre tenir compte des besoins spécifiques des femmes et des fillettes. Le Rapporteur spécial estime enfin que la privation de liberté doit être une mesure de dernier recours, compte tenu des conséquences graves – en termes psychologiques, sociaux et économiques – qu'elle entraîne pour les détenus. Il encourage par conséquent la recherche de solutions alternatives à la détention des enfants aussi bien que des adultes.
Dans la relation de sa mission en Malaisie (A/HRC/11/8/Add.2), effectuée du 5 au 13 février 2007, M. Muñoz Villalobos examine la question du droit à l'éducation à tous les niveaux d'enseignement: préscolaire, primaire, secondaire et supérieur dans ce pays. Il constate que la Malaisie a fourni de grands efforts pour améliorer son système éducatif et qu'elle entend en faire l'un des principaux moteurs du développement dans le pays. Il relève que, grâce à ces efforts, le taux de scolarisation a atteint un niveau élevé et que la parité entre hommes et femmes est devenue une réalité dans les établissements d'enseignement. En outre, il constate que des ressources importantes ont été investies dans les infrastructures et dans la formation des enseignants. Toutefois, le Rapporteur spécial note que la Malaisie a encore quelques difficultés à garantir le droit à l'éducation; il estime donc qu'il est nécessaire d'intensifier les efforts pour que l'ensemble de la population puisse exercer pleinement ce droit dans le pays. Beaucoup de personnes n'ont toujours pas accès à quelque type d'éducation que ce soit, notamment les enfants réfugiés, les demandeurs d'asile, les apatrides, les enfants de travailleurs migrants, les sans-papiers, les enfants des rues et les enfants autochtones qui, pour la plupart, vivent dans des régions reculées. En outre, le Rapporteur spécial constate que les communautés chinoise et tamoule sont généralement mécontentes des politiques en matière d'éducation et surtout en ce qui concerne les ressources allouées à leurs écoles et les langues d'enseignement. Il constate également que les châtiments corporels sont généralisés à l'école en dépit de l'intention déclarée du Gouvernement malaisien d'éliminer cette pratique. Pour ce qui est de l'enseignement supérieur, le Rapporteur spécial relève que, malgré les efforts déployés pour élargir l'accès à l'université, la couverture de l'enseignement supérieur public continue d'être faible. Le Gouvernement de la Malaisie devrait notamment garantir le principe de gratuité de l'éducation, indépendamment de l'appartenance ethnique ou de la nationalité, au moins dans l'enseignement primaire, avec une extension progressive au secondaire. Le Rapporteur spécial préconise en outre une décentralisation du système scolaire malaisien, de telle sorte que les autorités locales et tous les acteurs du processus éducatif participent effectivement à la conception des politiques éducatives les concernant. Les centres éducatifs malaisiens devraient en outre lancer des initiatives linguistiques interculturelles, afin de renforcer la coexistence harmonieuse entre les différentes communautés ethniques du pays. M. Muñoz Villalobos recommande également que la loi sur l'éducation de 1996 soit amendée dans le sens de la suppression de l'obligation de présenter un certificat de naissance à l'inscription à l'école, de manière à garantir le droit à l'éducation de tous les enfants vivant sur le territoire national, comme il est prescrit par les normes internationales, et indépendamment de leur statut de réfugiés, de demandeurs d'asile ou d'enfants des rues, par exemple. Enfin, le Rapporteur spécial recommande la création d'une unité des affaires autochtones au sein du Ministère de l'éducation, en lien avec les communautés concernées, notamment celles vivant dans l'île de Bornéo, unité chargée de répondre aux besoins éducatifs de ces communautés en tenant compte de leurs opinions.
En se qui concerne sa mission au Guatemala (A/HRC/11/8/Add.3, disponible en espagnol uniquement), effectuée du 20 au 28 juillet 2008, le Rapporteur spécial analyse les principales caractéristiques du système éducatif guatémaltèque en termes d'organisation, de couverture, d'infrastructure, de part des dépenses publiques. Il observe que ce système est grevé de plusieurs difficultés, notamment la faiblesse de la part du produit intérieur brut dévolu au secteur de l'enseignement (2% environ, soit le taux le plus bas de la région) ou encore le fait que le droit à l'éducation des peuples autochtones soit réduit à la seule dimension du bilinguisme. Le Rapporteur spécial estime que le Gouvernement du Guatemala devrait chercher à obtenir un consensus national afin de doter les pouvoirs publics du budget leur permettant de remplir leurs obligations dans le domaine de l'éducation. Le Rapporteur spécial soutient le projet visant à stabiliser le budget de l'éducation et à créer de nouveaux postes d'enseignement. Il recommande également d'augmenter le budget de l'éducation interculturelle bilingue en proportion de la population servie et de renforcer la participation du Ministère de l'éducation interculturelle bilingue à l'établissement de critères de multiculturalisme, d'interculturalité et de multilinguisme, afin que les particularités des communautés autochtones soient prises en compte.
Un autre additif au rapport de M. Muñoz Villalobos contient un résumé des communications adressées aux États et des réponses reçues (A/HRC/11/8/Add.1).
Interventions des pays concernés
M. CARLOS RAMIRO MARTÍNEZ ALVARADO (Guatemala) a déclaré que divers détenteurs de mandat ont visité le pays, ce qui reflète la ferme volonté du Guatemala à coopérer avec le Conseil des droits de l'homme. Le Guatemala est un pays de transit de migrants qui cherchent des opportunités ailleurs. Le Gouvernement guatémaltèque s'efforce de gérer au mieux ce flux de migration. Une législation s'applique aux migrants nationaux et étrangers, portant sur les rémunérations, sur l'emploi, sur l'accès aux soins de santé et à l'éducation. Un soutien fiscal aux instances qui fournissent une aide aux migrants et à leurs familles est également prévu. En outre, une initiative est en voie d'élaboration dans le but de renforcer la protection des migrants, entre autres celle des personnes victimes de l'exploitation sexuelle et de la traite des personnes. La législation vise aussi l'amélioration de l'accès des soins de santé des migrants, y compris au traitement du VIH/sida, ainsi que de la protection des mineurs.
MME MABEL GÓMEZ OLIVER (Mexique) a félicité M. Bustamante, Rapporteur spécial sur les droits des migrants, et rappelé l'engagement de son pays pour la protection des droits de toutes les personnes. Le Mexique est d'accord avec la nécessité soulignée par M. Bustamante de protéger les droits des migrants: le pays développe à cette fin des politiques ciblées et générales répondant aux préoccupations signalées par le Rapporteur spécial. Il a ainsi été amené à réviser certaines normes et pratiques affectant la jouissance des droits de l'homme. Les lois mexicaines ont été révisées par exemple dans le sens d'une décriminalisation des migrants. Par ailleurs, les personnels chargés de faire respecter la loi suivent un programme de renforcement de leurs compétences dans le domaine des droits des personnes migrantes. L'attention aux victimes est garantie par la création d'un réseau national chargé de venir en aide aux victimes de violations de leurs droits. L'aide aux enfants et adolescents est assurée par le biais de vingt-neuf abris répartis sur l'ensemble du territoire; un mécanisme parallèle de protection des enfants migrants non accompagnés a été mis sur pied avec l'aide du Fonds des Nations Unies pour l'enfance. En 2008, le Mexique a, par ailleurs, organisé un séminaire sur les droits des enfants migrants, avec la coopération du bureau national du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme. La représentante mexicaine a une nouvelle fois félicité le Rapporteur spécial et l'a encouragé à poursuivre sa mission.
M. AMIR SALLEH (Malaisie) a souligné que depuis la visite de M. Muñoz Villalobos en 2007, plusieurs faits nouveaux de première importance sont intervenus, certains dus à des facteurs internes, d'autres à des facteurs externes. Parmi ces derniers, figure la crise économique et financière, a-t-il rappelé, qui a eu des conséquences sur les projets en cours. Le Gouvernement malaisien avait déjà entrepris la mise en œuvre d'un plan de développement de l'éducation pour la période 2006-2010, ainsi que deux plans de relance économiques et financiers. Le représentant a précisé que 2,6 milliards de ringgits avaient été alloués au secteur scolaire. Le représentant de la Malaisie a démenti les observations du Rapporteur spécial concernant le mécontentement des minorités en raison d'un prétendu manque de soutien de l'État à leurs écoles. Il a rappelé que l'instruction dans les écoles chinoises et indiennes se faisait dans les langues respectives de ces communautés. L'État fournit son appui à l'ensemble du système éducatif public, a-t-il souligné. Par ailleurs, concernant les châtiments corporels, le représentant a réitéré ce qui avait été annoncé par la Malaisie lors de son examen périodique universel quant au moratoire demandé aux établissements scolaires concernant ce genre de pratiques. Au sujet de la sous-représentation des femmes dans les postes de direction dans le secteur de l'éducation, l'orateur a indiqué qu'il s'agissait d'un héritage du passé et que l'équilibre devrait se rétablir dans les prochaines années, 65% des enseignants étant des femmes à l'heure actuelle.
M. CARLOS RAMIRO MARTÍNEZ ALVARADO (Guatemala), intervenant au sujet du rapport du Rapporteur spécial sur le droit de l'éducation, a remercié M. Muñoz Villalobos pour son rapport et les recommandations adressées au Guatemala. Il a souligné que la politique nationale de l'éducation pour la période 2008-2012 vise une amélioration de l'éducation, notamment en l'étendant aux enfants pauvres. La promotion de l'éducation bilingue est également prévue. Un programme s'applique déjà à des familles issues des zones prioritaires afin de leur permettre l'accès aux soins de santé et à l'éducation. L'accès d'un million quatre cent mille enfants devrait, grâce au programme de gratuité de l'éducation, être assuré, y compris l'accès les enfants et jeunes déscolarisés pour des raisons financières. Le programme comprend aussi un volet de construction et d'agrandissement d'écoles, qui est déjà bien avancé et qui bénéficie d'un budget substantiel, qui devrait encore augmenter. Le représentant guatémaltèque a ajouté que des efforts à long terme sont entrepris pour renforcer le système éducatif du pays. Le Guatemala consacre 2,80% de son produit intérieur brut à l'éducation. Le pays s'approche ainsi des recommandations faites par l'UNESCO en la matière.
Débat interactif
MME MARIA NAZARETH FARANI AZEVÊDO (Brésil) a déclaré que son pays apprécie le rapport du Représentant spécial du Secrétaire général chargé de la question des droits de l'homme et des sociétés transnationales, M. Ruggie. La crise a en effet montré comment les secteurs privé et public devront collaborer pour la surmonter. La représentante brésilienne a appuyé dans ce contexte l'affirmation du Représentant spécial selon laquelle il est particulièrement opportun d'aborder la situation sous l'angle des droits de l'homme. Le Conseil s'est fait l'écho de cette préoccupation en organisant une session extraordinaire consacrée à la crise économique et financière, a-t-elle rappelé. Elle a cité une déclaration de l'organisation Amnesty International estimant que le monde était actuellement «assis sur une poudrière» sociale. La communauté internationale serait bien avisée de prêter une oreille attentive aux contributions des organisations de la société civile. D'autre part, la relation entre la pleine réalisation des droits de l'homme et les activités des sociétés transnationales exige que soient prises des mesures de coopération entre pays développés et en développement. Se référant ensuite au rapport de M. Jorge Bustamante, sur les droits de l'homme des migrants, la représentante a fait part de l'intérêt de son pays pour la protection des mineurs migrants et a indiqué que le Brésil avait répondu au questionnaire du Rapporteur spécial.
M. SEBASTIÁN ROSALES (Argentine) a rappelé que les 14 et 15 mai dernier, s'est tenue à Buenos Aires une concertation régionale organisée par le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies chargé de la question des droits de l'homme et des sociétés transnationales, M. John Ruggie. La première journée de cette réunion a été consacrée au devoir de protection qui incombe à l'État, tandis que lors de la seconde journée, les participants réfléchissaient à la responsabilité qui incombe aux entreprises en matière de respect des droits des travailleurs. Le représentant de l'Argentine a souligné que la réunion avait permis d'insister sur la nécessité d'avoir accès à des recours plus efficaces face aux conflits résultant des effets néfastes des activités des entreprises sur les droits de l'homme. Plus les nécessités sont grandes à cet égard et plus difficiles sont généralement les recours judiciaires, a-t-il rappelé. Quant aux mécanismes non judiciaires de règlement des conflits, à commencer par le niveau de l'entreprise, ils sont peu développés. Comme l'a constaté M. Ruggie, il y a à peine trois ou quatre ans il n'existait pas de base pour des solutions de compromis. Depuis 2008, grâce à une résolution unanime du Conseil des droits de l'homme, a été rédigée une feuille de route établissant un cadre pour les rôles respectifs de l'État et de l'entreprise. Sur cette base, il convient maintenant de voir comment cela fonctionne dans chaque région. La responsabilité sociale des entreprises, c'est leur obligation de respecter les droits de l'homme, a rappelé le représentant argentin.
MME ZUZANA STIBOROVÁ (République tchèque au nom de l'Union européenne) a félicité les trois titulaires de mandat qui ont présenté leurs rapports ce matin et a déclaré que pour l'Union européenne, si les activités économiques doivent certes s'exercer dans le respect des droits de l'homme, on ne saurait pour autant attribuer de responsabilité au secteur privé. Ce sont les États qui sont responsables des abus qui ont lieu sur leur sol. Les droits de l'homme sont d'autant plus importants que la crise économique risque d'entraîner leur érosion, a poursuivi la représentante. Elle a demande à M. Ruggie si des mesures comme les mécanismes de règlement des litiges sont transposables à tous les pays. Pour ce qui est des droits de l'homme des migrants, elle a demandé à M. Bustamante comment peut être abordée au mieux, dans ce contexte, la dimension de l'égalité entre hommes et femmes. Par ailleurs, quelles sont les législations les plus urgentes à mettre en place pour protéger les enfants qui sont abandonnées dans leurs pays d'origine, a-t-elle demandé? Elle a en outre invité le Rapporteur spécial à se pencher plus particulièrement sur le phénomène des mineurs non accompagnés. S'agissant d'autre part du droit à l'éducation, la représentante s'est enquise auprès de M. Vernor Muñoz des mesures concrètes qui devraient être prises pour se conformer à ses recommandations; elle a souhaité savoir si ce Rapporteur spécial envisageait de poursuivre à l'avenir un travail sur l'importante question de l'éducation des mineurs en détention et, le cas échéant, comment il entendait s'y prendre.
M. MARGHOOB SALEEM BUTT (Pakistan au nom de l'Organisation de la Conférence islamique) a indiqué partager les conclusions du rapport de M. Ruggie sur les droits de l'homme et les sociétés transnationales - conclusions selon lesquelles il appartient aux États d'imposer aux entreprises des responsabilités plus étendues, propices au bien-être de la société en général. Il serait en effet erroné de baisser la garde s'agissant de la responsabilité des entreprises en matière de respect des droits de l'homme. Cette tâche est cependant très délicate compte tenu du contexte actuel de chômage croissant, un défi qui ne sera relevé que grâce à l'adoption de politiques de croissance favorables au développement. À ce titre, une conclusion rapide du cycle de négociations de Doha et le renoncement aux politiques protectionnistes de la part des pays industrialisés peuvent favoriser l'emploi, a souligné le représentant pakistanais. Il s'est également dit d'accord avec le fait que l'éducation des personnes en détention est la première étape de leur réintégration socioéconomique. L'élaboration de programmes d'enseignement adaptés à ces personnes doit bénéficier du soutien de la communauté internationale. À cet égard, le représentant a préconisé les échanges de type "Debt-to-Education Swaps" (conversion de parties de la dette en crédits pour l'éducation).
M. DMITRY STEGNIY (Fédération de Russie) a souligné l'importance croissante du mandat de M. Ruggie. Quant au rapport de M. Bustamante, la Fédération de Russie est d'accord avec ce Rapporteur spécial pour dire que la migration est bien souvent une chance, encore trop théorique malheureusement, pour les enfants des migrants. Dans la réalité, a-t-il ajouté, les situations de migration s'accompagnent de grossières violations des droits de l'homme. Il est donc important d'accorder toute l'attention nécessaire aux droits des migrants, en particulier des femmes migrantes. Concernant enfin le rapport sur le droit à l'éducation, le développement de ce droit - y compris pour les détenus - relève de l'intérêt bien compris des États eux-mêmes, a souligné le représentant russe.
M. PETER GOODERHAM (Royaume-Uni) a déclaré que le Royaume-Uni soutient les efforts déployés pour rendre opérationnels le cadre de protection et de respect des droits de l'homme par les entreprises et les recours en cas de violation; cela est d'autant plus important que le climat économique actuel constitue pour les gouvernements une tentation à baisser la garde. Le représentant britannique a demandé des lignes directrices précises qui pourraient orienter les États dans l'adoption de mesures de protection, notamment pour ce qui est de renforcer leur législation antidiscriminatoire, et encourager les entreprises à développer des codes de bonne conduite.
MME MURIEL BERSET (Suisse) a salué le rapport de M. Ruggie, qui souligne à juste titre que l'agenda pour les droits de l'homme revêt, en temps de crise, une importance toute particulière. La Suisse invite le Représentant spécial à concrétiser au même niveau les deux piliers que sont l'obligation de protection de l'État et la responsabilité des entreprises. Quel rôle les politiques nationales en matière de responsabilité sociale des entreprises peuvent-elles jouer pour remédier à «l'incohérence verticale» en matière de protection de l'État, signalée par M. Ruggie dans son rapport, a demandé la représentante suisse? Elle a par ailleurs rappelé que son pays, conjointement avec le Maroc, a lancé l'initiative d'une déclaration pour l'éducation et la formation aux droits de l'homme, encadrée par le Pôle sur l'éducation composé en outre du Costa Rica, de l'Italie, de la Slovénie et des Philippines. La représentante a recommandé au Rapporteur spécial sur le droit à l'éducation de transmettre ses conclusions aux membres du Comité consultatif chargé d'élaborer un projet de déclaration sur l'éducation et la formation aux droits de l'homme.
M. OBAID SALEM SAEED AL ZAABI (Émirats arabes unis au nom du Groupe arabe) a évoqué les discriminations que subissent les détenus, soulignant à cet égard la nécessité de renforcer leur droit à l'éducation et ce, de façon gratuite. L'incarcération n'implique par la privation de droits humains fondamentaux comme le droit à l'éducation, a-t-il rappelé. L'objectif de la peine doit rester de permettre une réintégration du condamné dans la société et sa pleine participation à celle-ci; or, il y a un lien entre l'illettrisme et la délinquance, a fait observer le représentant. Les pays ne doivent pas justifier l'absence de politiques allant dans ce sens par le manque de ressources, a-t-il poursuivi. Le Groupe arabe est disposé à entendre les propositions du Rapporteur spécial pour que soit respecté le droit à l'éducation des détenus, a-t-il insisté. Il a enfin évoqué les détenus palestiniens et arabes dans les prisons israéliennes et le nécessaire respect de leurs droits.
M. FATIH ULUSOY (Turquie) a attiré l'attention sur la question des enfants migrants non accompagnés qui deviennent facilement victimes du trafic de personnes, ce qui particulièrement vrai pour les petites filles. La protection de ces enfants doit être dûment abordée, y compris la question de leur accès à l'éducation, a poursuivi le représentant turc. Ces enfants doivent avoir accès à l'éducation dans leur langue d'origine, a-t-il précisé. En outre, la question de la réunification familiale doit être placée sur le devant de la scène. Les politique migratoires doivent respecter le principe de regroupement familial. Relevant que certains pays imposent des critères de sélection des migrants, tels que la connaissance de la langue du pays hôte, le représentant turc a demandé l'avis du Rapporteur spécial sur de telles pratiques.
M. PITCHAYAPHANT CHARNBHUMIDOL (Thaïlande) s'est félicité du rapport sur les droits de l'homme des migrants, estimant que les pays concernés par la question des enfants migrants ont tous des responsabilités conjointes vis-à-vis d'eux. Soulignant que les États ne sont pas les seuls concernés par le renforcement de la collecte de données statistiques au sujet de l'impact des migrations sur les enfants, il a fait observer qu'en Thaïlande, la société civile et les organisations non gouvernementales disposent d'information de première main sur la situation sur le terrain; aussi, une approche multisectorielle s'impose-t-elle pour l'évaluation des situations. La Thaïlande a adopté une loi de répression de la traite des êtres humains (2008), dont l'objectif est de protéger les victimes de ce crime et d'assurer leur indemnisation, a poursuivi le représentant thaïlandais. Il a indiqué que son pays partageait les conclusions du Rapporteur spécial sur le droit à l'éducation, dont il a souligné apprécier le rapport. La Thaïlande observe toutefois que dans la réalité, l'éducation des personnes détenues pose des questions de moyens financiers, d'où l'importance que doit revêtir la coopération internationale à cet égard.
MME ANNA UGGLA (Suède) a qualifié le rapport de M. Ruggie d'étape importante dans la sauvegarde des droits de l'homme dans le contexte de la vie des entreprises. Elle a souligné que la crise économique ajoutait une urgence supplémentaire au travail du Rapporteur spécial. Aussi, a-t-elle demandé à ce dernier quelles mesures d'urgence il recommanderait aux États de prendre dans la situation actuelle afin de promouvoir les droits de l'homme et la responsabilité des entreprises de ce point de vue. La Suède reconnaît que dans certaines régions, généralement dans des pays dévastés par des guerres, l'État a, de fait, cessé de fonctionner ou alors, il n'exerce pas un contrôle suffisant; aussi, n'est-il pas surprenant que ce soit dans de telles situations que se produisent les pires violations, a-t-elle souligné, se félicitant donc que le Représentant spécial ait manifesté son intention de travailler sur ces situations.
M. ELCHIN AMIRBAYOV (Azerbaïdjan) a commenté le rapport de M. Bustamante sur les droits des migrants, qui met l'accent sur le cadre législatif visant la protection des enfants migrants. La Déclaration du Millénaire stipule que les dirigeants du monde ont la responsabilité de protéger tout le monde et particulièrement les enfants qui font partie des groupes les plus vulnérables, a-t-il rappelé. Mais le fait est que le manque de débouchés économiques pousse sur les routes un grand nombre d'enfants. Les enfants migrants sont vulnérables à l'exploitation, à la fois l'exploitation sexuelle et l'exploitation dans le travail, a poursuivi le représentant. Les enfants qui sont enrôlés dans la criminalité organisée ne sauraient être considérés comme coupables ou criminels, a-t-il souligné. En outre, la criminalisation de la migration illégale constitue une violation des droits de l'homme des enfants qui y prennent part. Le représentant azerbaïdjanais a par ailleurs souhaité connaître l'avis du Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants au sujet de la question des mineurs non accompagnés - une question qui n'est pas abordée dans son rapport. Comment les enfants abandonnés dans leur pays d'origine peuvent-ils concrètement participer à l'élaboration et à la mise en œuvre des politiques qui les concernent?
M. ACHAMKULANGARE GOPINATHAN (Inde) a remercié le Représentant spécial chargé de la question des droits de l'homme et des sociétés transnationales, M. Ruggie, rappelant que l'Inde attache une grande importance à ce mandat, compte tenu, notamment, des limites du marché que la crise a fait apparaître. M. Ruggie a effectué récemment une visite productive en Inde, où il a tenu des consultations régionales, a souligné le représentant indien. Il a encouragé M. Ruggie à mettre au point un modèle d'accord sur les investissements et le commerce, destiné aux États, et à explorer la manière dont la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement pourrait être mise à profit aux fins de la sensibilisation et du renforcement des capacités des États. Comme le rapport du Représentant spécial le met en évidence, très peu d'entreprises disposent de mécanismes de respect des droits de l'homme dans le cadre de leurs activités, a relevé le représentant indien; aussi, a-t-il indiqué, l'Inde accueillerait favorablement la rédaction par M. Ruggie de directives pratiques dans ce domaine. Le Représentant spécial devrait également s'intéresser à des codes de conduite pour les entreprises et aux sanctions pénales applicables en cas de manquement.
MME HEBA MOSTAFA RIZK (Égypte au nom du Groupe africain) a émis l'espoir que le Rapporteur spécial sur les droits de l'homme et les sociétés transnationales irait au-delà de la simple expression de principes et qu'il ferait des propositions quant à l'élaboration d'instruments juridiquement contraignants. Par ailleurs, le Groupe africain appelle le Rapporteur spécial à inclure dans son travail l'examen de la contribution des entreprises transnationales aux efforts de développement nationaux des pays hôtes. Il l'encourage à poursuivre dans son objectif déclaré d'élaborer des directives sur la prévention des abus liés au travail dans les zones de conflit. Concernant le droit à l'éducation, le Groupe africain, tout en étant d'accord sur les principes réaffirmés par le Rapporteur spécial, tient à rappeler que pour un certain nombre de pays, l'amélioration de leur système carcéral pâtit d'un manque de ressources. La représentante a souhaité savoir quelles recommandations le Rapporteur spécial pourrait faire pour permettre de faire face à ce problème et l'a appelé à œuvrer en faveur d'un meilleur partage des expériences de chacun.
Concernant les questions de migration, le Groupe africain s'associe à l'appel du Rapporteur spécial de ne pas criminaliser la migration, et en particulier de ne pas punir les sans-papiers de peines d'emprisonnement. Il souligne la nécessité de fournir une protection spéciale aux enfants migrants. Le Groupe africain souhaite enfin avoir l'avis du Rapporteur sur l'efficacité des législations antiracistes dans les pays d'immigration.
M. OMAR HILALE (Maroc) a salué tout particulièrement M. Muñoz Villalobos, que le Royaume de Maroc a eu le plaisir d'accueillir en 2006. L'étude thématique de cette année sur le droit à l'éducation cible un groupe vulnérable, soit les mineurs en détention. Le représentant a souligné sur la responsabilité des gouvernements envers les personnes qu'ils détiennent. Des efforts devraient être déployés pour assurer leur formation et éducation, par exemple par le développement de l'éducation non formelle, qui peut s'appliquer aux personnes en détention. Au Maroc, le droit à l'éducation est garanti à tous les citoyens sans discrimination aucune. La Charte nationale de l'éducation œuvre à la concrétisation de ce principe. Une formation professionnelle est ainsi prévue dans les prisons locales, afin de préparer la réinsertion des détenus dans la vie active, et des centres de réforme et d'éducation prennent en charge des mineurs et personnes condamnées à des peines de moins de 20 ans, en vue de leur réinsertion sociale. De plus, le Maroc a lancé une opération pilote de réinsertion post carcérale des prisonniers, qui permet d'accompagner le retour dans la vie active des détenus ayant purgé leur peine.
M. LAWRENCE RICHTER (États-Unis) a déclaré que son pays apprécie les travaux du Représentant spécial sur les droits de l'homme et les sociétés transnationales et autres entreprises, estimant que les États, les entreprises et la société civile ont tous un rôle important à jouer en matière des droits de l'homme. Par la diplomatie et les relations internationales, il faut encourager les États à remplir leurs obligations en matière de droits de l'homme, a souligné le représentant, y compris en donnant aux victimes les moyens de poursuivre leurs persécuteurs. Les entreprises ont également une obligation de promotion des droits de l'homme, tandis que le rôle de la société civile en matière de dénonciation des injustices doit être soutenu. Le représentant américain a demandé au Représentant spécial de fournir des éclaircissements sur les institutions internationales chargées d'arbitrer les conflits en matière de droits de l'homme au niveau des entreprises.
M. IDRISS JAZAÏRY (Algérie) a évoqué les rapports sur les migrants et celui sur le droit à l'éducation. Concernant le premier, il a regretté que la mise en œuvre de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, qui contient, a-t-il rappelé, un nombre important de dispositions pour la protection des enfants, soit fragilisée par sa non-ratification par les pays industrialisés, alors que ceux-ci affirment pourtant leur attachement aux droits de l'homme. «Nous les appelons à faire preuve de cohérence en la matière», a-t-il dit, s'étonnant que les migrants puissent être exclus des droits de l'homme. Par ailleurs, l'Algérie «défend la vision établissant un lien entre la migration et le développement, et la nécessité de traiter les causes profondes du phénomène migratoire». Il a demandé quelle était la position du Rapporteur concernant cette approche, particulièrement sous l'angle de la protection des enfants. Concernant le second rapport, M. Jazaïry a affirmé que l'éducation dans les établissements pénitentiaires faisait partie intégrante du système carcéral algérien. Il a appelé à l'échange des bonnes pratiques entre États dans ce domaine, ce qui n'exclut pas le soutien et l'assistance internationaux, particulièrement pour les pays en développement.
MME MARIE-LOUISE OVERVAD (Danemark) s'est adressée plus particulièrement du Représentant spécial sur les droits de l'homme et les entreprises. Les directives qu'il élaborera seront utiles pour tous les acteurs de la vie économique, mais plus particulièrement aux entreprises. Elle a exprimé son accord sur l'alignement des politiques des entreprises avec les droits de l'homme. Comment les États peuvent-ils utiliser au mieux les forums internationaux, entre autres le Conseil des droits de l'homme, pour renforcer le respect des droits de l'homme dans l'entreprise, a-t-elle demandé? Elle a aussi réclamé des recommandations pour les entreprises qui se trouvent exercer leurs activités dans des pays dont la législation viole les principes des droits de l'homme, tels que la liberté d'association, l'égalité entre hommes et femmes ou encore la liberté d'expression.
M. HANNU HIMANEN (Finlande) a rappelé que la responsabilité première de la protection des droits de l'homme revient aux États et à leurs représentants, tandis que les entreprises privées sont obligées de respecter la loi et que les victimes de violations de leurs droits doivent disposer de moyens de recours. La communauté internationale a son rôle à jouer en matière de renforcement des capacités des titulaires de droits. Il importe que les entreprises soient dotées, ou se dotent, de codes de conduite, tels que ceux préparés sous les auspices des Nations Unies. Le rôle du Représentant spécial est central dans la mesure où il permet de fédérer des initiatives et acteurs concernés. Le représentant finlandais a demandé à M. Ruggie d'étudier des possibilités de mettre au point les critères d'un mécanisme de plainte en cas d'insuffisance des dispositions nationales.
M. ABBAS DAHER DJAMA (Djibouti) a regretté la non-disponibilité des rapports en français. Concernant le droit à l'éducation, il a souligné que si, dans la majorité des pays en développement, le manque de moyens constituait un frein à l'accès à l'éducation, cette question ne devait néanmoins pas être éludée car la formation des détenus reste un des principaux moyens de prévention de la récidive et également une garantie supplémentaire de réintégration. Djibouti estime primordial par ailleurs qu'une attention soit accordée à l'éducation des personnes vulnérables comme les femmes et les enfants. Djibouti est préoccupé par la limitation d'accès aux formations lorsqu'elles sont disponibles pour éviter d'infliger une «punition» sans autre forme d'information. Le représentant a enfin souscrit à l'appel lancé par le Rapporteur spécial au Secrétaire général afin d'assister les pays dans l'amélioration des conditions de détention.
MME EUGENIA GUTIÉRREZ RUIZ (Costa Rica) a souligné la pertinence des recommandations de M. Bustamante sur la protection des enfants migrants. Il est important de tenir compte, notamment, de leur droit à l'éducation. Ces deux thèmes connaissent de nombreux recoupements. Au Costa Rica, l'éducation des migrants est prévue depuis l'alphabétisation jusqu'à l'université. Il met aussi en place une éducation artistique, comme complément à l'éducation scolaire et formelle. La représentante costaricienne a par ailleurs observé qu'il serait utile pour chaque pays de disposer d'exemples de bonnes pratiques de par le monde.
M. JUAN HOLGUÍN (Équateur) a observé que le mandat du Rapporteur spécial sur les droits des migrants s'appuie sur une résolution du Conseil des droits de l'homme encourageant le titulaire du mandat à se pencher sur l'élimination des obstacles qui s'opposent encore à la jouissance de leurs droits par les migrants. Les recommandations du Rapporteur spécial s'agissant des enfants migrants sont assez générales et ne tiennent malheureusement pas compte de la Directive européenne en matière migratoire. Le représentant équatorien a exprimé l'espoir que le prochain rapport traitera plus complètement des termes du mandat.
M. VEBJØRN HEINES (Norvège) a souligné que son pays soutenait fermement les conclusions du Représentant spécial sur les sociétés transnationales en ce qui concerne la protection des droits de l'homme dans le monde du travail. La Norvège se félicite que la responsabilité des entreprises à respecter les droits de l'homme ait atteint une reconnaissance universelle. Alors que la plupart d'entre elles assurent qu'elles les respectent, la question est de savoir si elles ont mis des procédures en place à cette fin, a-t-il souligné. L'orateur a enfin demandé au Représentant spécial si son observation sur la nécessité de profiter de la crise économique pour renforcer les droits de l'homme dans l'entreprise était largement partagée par les États et les sociétés.
MME ERLINDA F. BASILIO (Philippines) a remercié M. Bustamante d'avoir mis l'accent sur les vulnérabilité des enfants migrants, ce qui est particulièrement pertinent. Les droits de ces enfants doivent être respectés, quel que soit le statut légal de leurs parents. Les États ont l'obligation de protéger tous les enfants dans toutes les phases du processus de migration, et des mesures spéciales doivent être adoptées à l'intention des enfants. La réunification familiale dans le pays de destination est la manière la plus naturelle de promouvoir les meilleurs intérêts de l'enfant, car la famille constitue la cellule de base de la société. Par conséquent, les lois régissant la migration doivent viser la protection des familles. De même, elles doivent viser la régularisation de migrants illégaux, plutôt que la répression.
M. IBRAHIM S. AL-ADOOFI (Yémen) a évoqué le rapport sur le droit à l'éducation, soulignant la priorité donnée par son pays sur ce secteur, particulièrement après la réunification en 1990. Les programmes scolaires ont été réunifiés et la scolarisation dans les campagnes, y compris des filles, a été favorisée. Le nombre des écoles a été accru, en faisant en sorte que toutes les régions du pays en bénéficient. La conséquence en a été l'augmentation du nombre d'élèves. Pourtant, malgré ces efforts, l'analphabétisme reste élevé au Yémen, a-t-il reconnu. Il se situe à 45% pour l'ensemble de la population, 70% pour les femmes. Le Yémen est déterminé à améliorer cette situation, a-t-il assuré.
M. TERRY CORMIER (Canada) a remercié le Représentant spécial, M. Ruggie, estimant important de reconnaître que le lien entre les entreprises et les droits de l'homme ne doit pas être pris à la légère. Pour autant, les entreprises ont besoin avant tout de clarté en ce qui concerne les règlements. En termes pratiques, quelles leçons les entreprises peuvent-elles tirer du rapport de M. Ruggie? Beaucoup reste à faire pour déterminer les responsabilités respectives des entreprises et des États: quelles ont les réactions des institutions internationales concernées aux travaux réalisés dans ce domaine par M. Ruggie?
MME ANE MONEIRA (Portugal) a annoncé que cette année, de nouveau, le Portugal va présenter un projet de résolution sur le droit à l'éducation, qui portera notamment sur le droit des personnes en détention. Les impératifs de sécurité étant cités dans le rapport du Rapporteur spécial comme une cause de limitation d'accès à Internet en prison, elle a demandé comment cet obstacle peut être surmonté. La représentante portugaise a par ailleurs rappelé que l'UNESCO organise une série de conférences sur l'éducation et a souhaité avoir le point de vue du Rapporteur spécial sur les conférences qui ont déjà eu lieu et des précisions sur sa participation à ces évènements.
MME YANG XIGONING (Chine) a souligné que dans le contexte de la crise, les efforts pour améliorer les droits économiques et sociaux faisaient face à des efforts sans précédent. La Chine juge important le cadre «protection, respect et recours» qui est proposé dans le rapport sur la question des droits de l'homme et des sociétés transnationales. Ce n'est que par la collaboration que l'on pourra avancer dans ce domaine, a estimé la représentante chinoise. Concernant le rapport sur la migration, l'oratrice a souligné l'importance de leur protection, des enfants en particulier. Les pays d'origine et de destination doivent prendre en considération la situation unique des enfants migrants et doivent les protéger en conséquence. Elle a émis l'espoir que le Rapporteur spécial fera des recommandations encore plus réalistes et applicables. Enfin, concernant les droits des détenus à l'éducation, la Chine estime essentiel d'assurer le respect de ce droit, l'accent devant être mis sur l'éducation des détenus mineurs, y compris après leur libération. La délégation chinoise attend du Rapporteur spécial qu'il fasse des recommandations concrètes pour la mise en œuvre de ce droit à l'éducation dans les prisons.
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