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LE CONSEIL DES DROITS DE L'HOMME SE DÉCLARE GRAVEMENT PRÉOCCUPÉ PAR L'AGGRAVATION DE LA CRISE ALIMENTAIRE MONDIALE

Compte rendu de séance

Le Conseil des droits de l'homme réuni en session extraordinaire, a adopté, cet après-midi, une résolution par laquelle il se déclare gravement préoccupé par l'aggravation de la crise alimentaire mondiale, qui compromet la réalisation du droit à l'alimentation pour tous, et demande aux États, ainsi qu'aux institutions multilatérales pertinentes et aux autres parties prenantes, de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la réalisation du droit à l'alimentation en tant qu'objectif essentiel en matière de droits de l'homme et d'envisager d'examiner toute politique ou mesure susceptible d'avoir un impact négatif sur la réalisation du droit à l'alimentation avant d'instituer une telle politique ou mesure.

Le Conseil invite l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture à lancer une invitation au Rapporteur spécial afin qu'il assiste et participe activement à la Conférence de haut niveau sur la sécurité alimentaire mondiale qui se tiendra à Rome 3 au 5 juin prochain afin qu'il assiste et participe activement à cette Conférence, de manière à contribuer à l'intégration d'une perspective des droits de l'homme dans l'analyse de la crise alimentaire mondiale, en mettant l'accent sur la réalisation du droit à l'alimentation. Il demande au Rapporteur spécial de lui faire une présentation, à sa prochaine session, sur ses recommandations initiales s'agissant des mesures requises pour promouvoir, respecter et protéger le droit à l'alimentation et le droit de chacun d'être à l'abri de la faim dans le contexte de la crise alimentaire actuelle, là où des mesures s'avèrent nécessaires pour promouvoir une sécurité alimentaire à moyen et long terme.

En fin de séance, le nouveau Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation, M. Olivier de Schutter, a déclaré que grâce à cette résolution, il avait reçu un mandat clair pour porter le message en provenance des droits de l'homme face à la crise alimentaire mondiale. Il faut travailler sur les causes structurelles et développer des politiques globales pour faire face à la crise alimentaire, a ajouté le Rapporteur spécial, qui a conclu a soulignant que les biocarburants peuvent constituer un danger si l'alimentation et les combustibles sont en compétition sur les terres arables.

Au cours du débat qui a précédé l'adoption du projet de résolution, plusieurs intervenants ont jugé inacceptable la persistance de pénuries alimentaires, compte tenu des capacités techniques permettant de nourrir plus du double de la population actuelle. Il a aussi été souligné que la crise alimentaire n'est pas une catastrophe naturelle, mais la conséquence de certaines stratégies suivies dans le monde, avec pour conséquence que plus de 850 millions de personnes sont aujourd'hui privées de leur droit à l'alimentation. Certains orateurs ont en outre estimé que la crise alimentaire mondiale actuelle est une conséquence directe de nombreuses années de privatisation d'institutions étatiques et des effets de la libéralisation des marchés axée sur les exportations. Faute d'une maîtrise du coût des aliments, a-t-il en outre été souligné, on doit craindre que les émeutes constatées ces derniers mois ne s'étendent à d'autres parties du monde, compromettant ainsi la paix et la sécurité internationales. La communauté internationale doit simultanément s'attaquer au problème du réchauffement climatique qui, par les inondations et la sécheresse qu'il occasionne, est un facteur des pénuries alimentaires.

D'autres intervenants ont estimé important que le Conseil se concentre exclusivement sur les aspects relatifs aux droits de l'homme de la question, certains estimant que si certains pays ne sont pas capables de réaliser le droit à l'alimentation de leur population, ils doivent accepter l'aide qui leur est proposée.

Nombre d'intervenants se sont par ailleurs félicités de la mise sur pied par le Secrétaire général des Nations Unies d'une équipe spéciale chargée de la crise mondiale de la sécurité alimentaire, espérant en particulier qu'elle saura promouvoir une réponse unifiée et durable au défi actuel en matière d'approvisionnement alimentaire. Plusieurs organisations non gouvernementales ont toutefois déploré l'absence, dans cette structure, de représentants des principales victimes de la crise alimentaire, et se sont élevées contre les politiques commerciales internationales qui sont à l'origine de la crise actuelle.

Les représentants des États suivants ont fait des déclarations: Fédération de Russie, Bolivie, Ghana, Zambie, Qatar, Royaume-Uni, Uruguay, Jordanie, République de Corée, Djibouti, Suisse, Maroc, République du Congo, Algérie, Vietnam, Venezuela, Turquie, Tunisie, Norvège, République dominicaine, Argentine, Portugal, Saint-Siège, Belarus, Équateur, Thaïlande, Singapour, Colombie, Nouvelle-Zélande, Luxembourg, Espagne, Belgique, Islande, Maldives, Finlande, Soudan, Irlande, Haïti, Émirats arabes unis, Bahreïn et Koweït. En outre, Cuba a fait une déclaration pour présenter le texte de la résolution et le Canada a fait un commentaire sur le texte.

Plusieurs organisations intergouvernementales sont aussi intervenues: Organisation des Nations Unies pour l'agriculture et l'alimentation; Programme alimentaire mondial; Organisation internationale de la francophonie; Organisation de la Conférence islamique; Union africaine; Programme des Nations Unies pour le développement; Fonds monétaire international; Banque mondiale.

Sont également intervenues les représentants des organisations non gouvernementales suivantes :
Confédération internationale d'organismes catholiques d'action charitable et sociale, au nom de plusieurs organisations non gouvernementales1; Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples - MRAP au nom de plusieurs organisations non gouvernementales2; Centre Europe tiers-monde - CETIM) au nom de plusieurs organisations non gouvernementales3; Pour le droit a se nourrir - FIAN; Fédération internationale des ligues des droits de l'homme; North-South XXI; Amnesty International; Fédération syndicale mondiale; Union des juristes arabes; Centre international des droits de la personne et du développement démocratique - droits et démocratie; World Vision International; Indian Movement “Tupaj Amaru”; et la Commission internationale de juristes.


Adoption de la résolution

Par sa résolution sur l'impact négatif de l'aggravation de la crise mondiale de l'alimentation sur le droit à l'alimentation pour tous (A/HRC/S-7/L.1/Rev.1 amendé), adoptée par consensus, le Conseil se déclare gravement préoccupé par l'aggravation de la crise alimentaire mondiale, qui compromet gravement la réalisation du droit à l'alimentation pour tous. Il se dit aussi gravement préoccupé que cette crise menace de saper encore davantage la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement, en particulier le premier d'entre eux visant à réduire de moitié d'ici 2015 la proportion de personnes souffrant de la faim dans le monde. Il demande aux États, agissant individuellement et par le biais de la coopération et de l'assistance internationales, ainsi qu'aux institutions multilatérales pertinentes et aux autres parties prenantes, de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la réalisation du droit à l'alimentation en tant qu'objectif essentiel en matière de droits de l'homme et d'envisager d'examiner toute politique ou mesure susceptible d'avoir un impact négatif sur la réalisation du droit à l'alimentation avant d'instituer une telle politique ou mesure. Le Conseil souligne que les États ont l'obligation première de déployer leurs meilleurs efforts pour répondre aux besoins alimentaires vitaux de leur propre population, en particulier des groupes et ménages vulnérables.

Par ailleurs, le Conseil engage les États Membres et les autres parties prenantes concernées à participer activement à la Conférence de haut niveau sur la sécurité alimentaire mondiale: les défis du changement climatique et des bioénergies, devant se tenir du 3 au 5 juin 2008 à Rome, organisée par l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture. Il invite la FAO à lancer une invitation au Rapporteur spécial afin qu'il assiste et participe activement à cette Conférence, de manière à contribuer à l'intégration d'une perspective des droits de l'homme dans l'analyse de la crise alimentaire mondiale, en mettant l'accent sur la réalisation du droit à l'alimentation. Le Conseil demande au Rapporteur spécial de lui faire une présentation, lors de sa huitième session, sur sa participation à ladite Conférence et sur ses recommandations initiales s'agissant des mesures requises, à tous les niveaux, pour promouvoir, respecter et protéger le droit à l'alimentation et le droit de chacun d'être à l'abri de la faim dans le contexte de la crise alimentaire actuelle, là où des mesures s'avèrent nécessaires pour promouvoir une sécurité alimentaire à moyen et long terme. Le Conseil demande en outre au Rapporteur spécial de lui présenter un rapport lors de sa neuvième session traitant de l'impact de la crise alimentaire mondiale sur la protection du droit à l'alimentation et des solutions requises dans une perspective de droits de l'homme.


Déclarations concernant le projet de résolution

M. JUAN ANTONIO FERNÁNDEZ PALACIOS (Cuba) a présenté le projet de résolution (A/HRC/S-7/L.1/Rev.1) en précisant que ce texte est co-parrainé par 78 pays dont 28 membres du Conseil. Le texte est le fruit d'une coopération et d'un accord entre tous les membres et observateurs et constitue la réponse appropriée de cet organe face à un problème d'une portée mondiale. Le représentant cubain a indiqué que lors des consultations qui ont été menées sur ce texte, des divergences qui paraissaient insurmontables ont pu être surmontées. Aussi, le représentant cubain a-t-il transmis ses profonds remerciements à toutes les délégations pour le sens des responsabilités et l'esprit de compromis dont elles ont fait preuve.

M. TERRY CORMIER (Canada) a expliqué que son pays a participé de manière constructive aux négociations sur ce texte. Il a toutefois regretté l'accent disproportionné mis sur la coopération internationale plutôt que sur la responsabilité des États d'assurer la réalisation du droit à l'alimentation. Il a regretté que le principe selon lequel la coopération internationale ne se comprend que dans le cadre d'un libre consentement ne soit pas pleinement reflété dans le texte. Il a également déploré que les propositions de sa délégation d'insérer dans le texte des références sur la nécessité d'assurer l'accès à l'assistance humanitaire aient été vaines. Il a toutefois indiqué que son pays ne s'opposerait pas au consensus.


Suite du débat

M. YURY BOICHENKO (Fédération de Russie) a déclaré que son pays a soutenu la convocation de cette séance extraordinaire, étant donné que les institutions des Nations Unies ne sauraient rester en marge des efforts pour concrétiser le droit fondamental à l'alimentation, pierre angulaire de la jouissance de tous les autres droits. L'un des objectifs doit être d'éradiquer la misère et la sous-alimentation qui frappent une grande partie de la population mondiale. La crise alimentaire résulte de nombreux facteurs, le Conseil des droits de l'homme devant pour sa part se concentrer sur le fait que cette crise compromet les droits de l'homme et les droits fondamentaux des populations concernées. Pour rétablir la sécurité alimentaire dans le monde, la communauté internationale doit agir par le biais de la coopération internationale et l'application des mesures correctives nécessaires, a conclu le représentant.

MME ANGELICA NAVARRO LLANOS (Bolivie) a souligné que son pays a soutenu la convocation de la présente session extraordinaire et qu'il est co-auteur du projet de résolution présenté à cette occasion. La crise alimentaire mondiale actuelle constitue une violation directe de nombre de droits de l'homme; elle est une conséquence directe, entre autres, de nombreuses années de privatisations d'institutions étatiques pourtant essentielles. La représentante bolivienne a dénoncé les effets de la libéralisation des marchés axée de manière obsessionnelle sur les exportations, qui a été menée à marche forcée par les institutions de Bretton Woods. Elle a également dénoncé la prépondérance des sociétés multinationales qui ont monopolisé les sources de subsistance des paysans du monde, allant jusqu'à privatiser les semences essentielles pour les agriculteurs du monde entier.

MME MERCY YVONNE AMOAH (Ghana) s'est réjouie de la tenue de cette session extraordinaire soutenue par la quasi-totalité des membres du Conseil. Elle a espéré que les délibérations et le document final que le Conseil adoptera permettront de dégager un accord commun sur les mesures requises pour éliminer les causes de cette crise alimentaire. Ce serait là une réussite importante à l'occasion du soixantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme, célébré cette année. La représentante a regretté que dans le monde actuel, marqué par les progrès et la richesse, un sixième de la population mondiale souffre de la faim, de l'insécurité alimentaire et de la malnutrition, qui favorise à long terme le cycle de la pauvreté. S'agissant des solutions à apporter à cette crise, la représentante ghanéenne a reconnu que la responsabilité première revient aux États. Mais parfois, les meilleurs efforts ne suffisent pas. La coopération et l'assistance internationales revêtent une importance considérable pour assurer la réalisation du droit à l'alimentation. Pour conclure, la représentante a exprimé l'espoir que les institutions financières internationales et les autres institutions spécialisées, dont les politiques ont par le passé produit des effets négatifs sur les pays en développement, pourront s'allier à ces efforts.

MME ENCYLA M. SINJELA (Zambie) a souligné que la communauté internationale, faute d'une maîtrise du coût des aliments, doit craindre que les émeutes constatées ces derniers mois ne s'étendent à d'autres parties du monde, compromettant la paix et la sécurité internationales. La communauté internationale doit donc consentir des efforts concertés et coordonnés pour remédier à cette situation et aux prix trop élevés des denrées alimentaires. Dans le même temps, il convient de s'attaquer au problème du réchauffement climatique qui, par les inondations et la sécheresse qu'il occasionne, est un facteur des pénuries alimentaires. La représentante zambienne a également appelé les donateurs à soutenir l'action des institutions internationales chargées de l'aide alimentaire.

M. ABDULLA FALAH ABDULLA AL-DOSARI (Qatar) a rappelé que le Conseil n'a jamais cessé d'affirmer que tous les droits de l'homme sont universels, interdépendants et indivisibles. La présente session extraordinaire du Conseil a pour objet de discuter d'une situation qui porte sur l'un des droits de l'homme les plus fondamentaux, à savoir le droit à l'alimentation, dans le contexte d'une crise alimentaire mondiale qui résulte notamment de la flambée des prix des denrées alimentaires. Il est paradoxal de voir que cette crise alimentaire intervient alors que le monde est plus riche qu'il ne l'a jamais été, a souligné le représentant. Il a rappelé que le Chef de l'État du Qatar a pris l'initiative de créer un fonds pour le développement associé à l'aide humanitaire d'ensemble apportée par le pays. La communauté internationale doit réfléchir très sérieusement aux mesures qui doivent être prises pour venir en aide aux groupes vulnérables, lesquels n'ont pas besoin de nouveaux engagements mais simplement de voir tenus les engagements déjà pris, a conclu la représentant.

MME REBECCA SAGAR (Royaume-Uni) a fait observer que cette session extraordinaire est à marquer d'une pierre blanche puisqu'elle constitue la première relative à une question thématique. Elle a estimé important que le Conseil donne son point de vue dans le débat global consacré à la crise alimentaire et donne du poids à la question du droit à l'alimentation. Elle a ainsi estimé important que le Conseil se concentre exclusivement sur les aspects de la question relatifs aux droits de l'homme et ne s'engage pas dans des domaines dans lesquels il n'a pas compétence. Les droits de l'homme ne peuvent être réalisés de manière isolée, a-t-elle poursuivi, ajoutant que cela vaut pour le droit à l'alimentation comme pour tous les autres droits de l'homme. La bonne gouvernance, l'état de droit et la liberté d'expression revêtent également une importance considérable pour lutter contre la famine, a-t-elle ajouté. La représentante britannique a fait observer à cet égard que le Conseil doit être prêt à identifier les situations et les pays dont les gouvernements ne sont pas capables de réaliser le droit à l'alimentation de leurs populations. Si certains pays ne sont pas capables de le faire, ils doivent accepter l'aide qui leur est proposée, a-t-elle souligné. Dans la foulée, elle a fait part de sa préoccupation face à la situation qui a cours au Myanmar et rappelé que les autorités doivent faire tout ce qu'elles peuvent pour éviter que la situation s'aggrave et doivent accepter l'aide internationale. S'intéressant ensuite plus particulièrement à la résolution qui a été soumise au Conseil pour adoption, la représentante britannique a estimé qu'en dépit de nombreux bons éléments, mais comporte des lacunes.

M. ALEJANDRO ARTUCIO RODRÍGUEZ (Uruguay) a déclaré que son pays attache une grande importance à cette session extraordinaire, estimant que l'organe suprême en matière de droits de l'homme doit se pencher sur les conséquences des phénomènes dépassant les frontières sur la jouissance des droits de l'homme, et notamment du droit à l'alimentation. Comme l'a relevé l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), des milliers de personnes appartenant aux couches les plus vulnérables meurent chaque jour du fait de la faim et de la pauvreté. Il faut désormais faire face à la demande croissance de nourrit5ure par un renforcement de la production et de la productivité agricoles, une refonte du système actuel du commerce mondial et l'adoption à court terme de mesures d'urgence. L'élimination de la pauvreté, les transferts de technologie et le développement de nouvelles sources d'énergie doivent être des objectifs de la communauté internationale, par le biais de la coopération internationale.

M. MUTAZ FALEH S. HYASSAT (Jordanie) a fait observer que si la crise alimentaire est, certes, une crise structurelle, il s'agit également d'un phénomène lié à des facteurs récents comme les changements climatiques, les catastrophes naturelles et la flambée des prix des denrées alimentaires. Tout en reconnaissant que la responsabilité première d'empêcher et de gérer une telle crise revient aux États, il a déclaré qu'il n'en existe pas moins une responsabilité internationale, notamment du fait que cette crise requiert une coopération internationale. Le représentant jordanien a souligné que le Conseil des droits de l'homme n'est pas une institution spécialisée et, partant, a exhorté toutes les organisations internationales concernées à accorder la plus grande importance au problème urgent et grave de la crise alimentaire. Il a préconisé que l'accent soit mis non seulement sur des réponses à court terme, mais également qu'une attention soit accordée aux moyens à mettre en œuvre pour éviter une aggravation de la crise et sa répétition à l'avenir. En outre, il faudrait veiller à alléger la pression sur les consommateurs pauvres et les économies fragiles. Pour conclure, le représentant a dit placer de grands espoirs dans la réunion de haut niveau prévue à Rome sur la sécurité alimentaire.

M. CHANG DONG-HEE (République de Corée) a souligné que la crise alimentaire actuelle est une crise des droits de l'homme qui menace le droit à une alimentation adéquate. Il s'agit d'une crise humanitaire qui frappe les plus pauvres et les plus faibles. Il s'agit également d'une crise de développement qui menace de réduire à néant tous les efforts déployés en vue de la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement. Il ne fait aucun doute que la situation actuelle requiert une action urgente de la part de la communauté internationale. Le moment est venu d'agir, a insisté le représentant de la République de Corée. Il a indiqué attendre du Conseil qu'il envoie un message politique fort, par le biais de cette session extraordinaire, indiquant que la perspective des droits de l'homme doit être prise en compte dans le contexte du traitement de la crise alimentaire actuelle. La présente session extraordinaire fournit l'occasion de demander aux États de prendre toutes les mesures nécessaires afin d'assurer la réalisation du droit à l'alimentation en tant qu'objectif essentiel du point de vue des droits de l'homme.

M. MOHAMED-SIAD DOUALEH (Djibouti) a souligné que face aux conséquences des pénuries alimentaires, les pays d'Afrique ont multiplié leurs efforts de concertation au niveau du continent pour trouver les moyens de contenir une situation qui risque de remettre en cause les progrès réalisés ces dernières années. Djibouti a pris, de son côté, des mesures pour protéger ses citoyens des pires conséquences de l'augmentation des prix alimentaires. Le représentant a rappelé que l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) n'a cessé de plaider pour le renforcement des capacités agricoles nationales, des appels qui sont, malheureusement, restés lettre morte. Les conséquences de la crise actuelle sont connues, comme il a été relevé dans les interventions de ce matin. Mais le moment de la crise doit aussi être celui de la décision, décision dans le sens de l'adoption de politiques plus favorables aux populations concernées. C'est pour cette raison que Djibouti appuie l'engagement de la Haut-Commissaire dans ce domaine.

M. BLAISE GODET (Suisse) a fait remarquer que la crise s'est aggravée et que la situation devient de plus en plus insoutenable pour des enfants, des femmes et des hommes à bout de ressources. Des pays membres de ce Conseil sont durement touchés par cette crise, a-t-il ajouté. Le Conseil se doit de réagir car les droits humains et notamment le droit à l'alimentation sont affectés par la crise alimentaire. Le représentant suisse a tenu à saluer la clairvoyance de l'ancien Rapporteur spécial, M. Jean Ziegler, qui avait décrit les conditions pouvant mener à une crise majeure. Seule une approche multisectorielle, globale et surtout cohérente de tous les États et des institutions internationales, des acteurs du secteur privé et d'autres groupes concernés permettra d'y répondre de manière efficace. Le Haut-Commissariat aux droits de l'homme doit occuper la place qui lui revient dans ce contexte et porter au centre de toutes les initiatives un message de protection des droits humains. M. Godet s'est dit d'avis que la Haut-Commissaire devrait participer à la Task Force créée par le Secrétaire général et a souhaité qu'elle se rende au sommet de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture à Rome, tout comme le Rapporteur spécial. M. Godet a ensuite fait observer qu'alors que les experts des différentes institutions concernées se penchent sur les causes de la crise alimentaire, les discussions en cours prouvent qu'elles sont multiples et liées entre elles de manière complexe. Il nous incombe maintenant à tous de tirer sans tarder les leçons de cette grave situation et de remplir nos obligations en matière de droits humains en adaptant nos stratégies et nos politiques en matière de sécurité alimentaire, tant au niveau national qu'international. Ajoutant que même s'il est normal que les membres du Conseil aient des perceptions différentiées des causes de la crise alimentaire, le représentant suisse a souligné qu'il faut aujourd'hui remettre l'être humain au centre des préoccupations et replacer les droits humains au centre des enjeux de cette crise.

M. MOHAMMED LOULICHKI (Maroc) a déclaré que l'ampleur de la crise alimentaire mondiale actuelle confirme la centralité du droit à l'alimentation en tant que droit fondamental et inaliénable de tout être humain. Cette crise a montré que ce ne sont pas seulement des vies humaines innocentes qui sont menacées, mais aussi l'équilibre social et même la stabilité politique de plusieurs pays en développement. Chaque augmentation de 1% des prix des denrées de base plonge 16 millions de personnes supplémentaires dans l'insécurité alimentaire. Les efforts entrepris par les pays en développement en vue de développer leur agriculture par la mobilisation de leurs ressources internes demeurent entravés par le manque de moyens financiers, l'augmentation des prix de l'énergie, l'impact des changements climatiques et l'insuffisance de l'aide internationale au développement. Le représentant marocain a exprimé l'espoir que lors du sommet de la FAO qui se tiendra au début du mois prochain, la communauté internationale répondra à cette crise avec la même promptitude, la même détermination et la même imagination que celles dont elle a fait preuve lorsqu'il s'est agi de traiter la catastrophe du tsunami ou la crise de la grippe aviaire. Il convient, pour répondre à cette crise, de combiner des mesures d'urgence d'aide et d'assistance; des mesures à moyen et long terme pour développer l'offre, stabiliser les prix et remédier à la spéculation sur les produits alimentaires; et des actions concrètes pour favoriser la relance du secteur agricole dans les pays en développement.

M. CARLOS PORTALES (Chili) a déclaré que le Conseil des droits de l'homme doit se prononcer de manière claire et constructive sur le problème de l'accès à l'alimentation, un problème dont la persistance est inacceptable compte tenu des capacités techniques permettant de nourrir plus du double de la population actuelle. Dans un contexte de déséquilibre entre offre et demande alimentaire, le représentant chilien a demandé s'il n'était pas temps que les institutions multilatérales prennent à bras le corps le problème de l'ouverture des marchés agricoles. Un autre axe prioritaire doit être l'action en faveur de l'alimentation maternelle et infantile, afin d'éviter que son incidence ne devienne irréversible.

MME BARBARA EKWALL (Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture) s'est félicitée de la tenue de cette session extraordinaire. Elle a rappelé qu'au cours de ces dernières années, le prix des denrées alimentaires a plus que doublé et fait observer que l'impact a été particulièrement grave sur les consommateurs urbains et les pauvres vivant dans les milieux ruraux. En outre, les femmes ont été particulièrement touchées. La représentante de la FAO a déclaré que la crise actuelle soulève des questions techniques complexes liées à la production, l'environnement, l'énergie, l'économie et le développement. L'attention actuelle accordée à la flambée des prix doit être l'occasion de réponse de manière adéquate à la crise et d'améliorer les systèmes de gestion alimentaire à tous les niveaux. Elle a ensuite attiré l'attention sur les lignes directrices identifiées par la FAO pour promouvoir la sécurité alimentaire et a fait remarquer qu'en insistant notamment sur la bonne gouvernance, la responsabilité, la participation et la dignité humaine, nous disposons d'instruments additionnels permettant de s'atteler aux causes profondes de la faim. Une réponse internationale urgente est nécessaire pour aider les pays les plus pauvres à faire face à cette crise, a-t-elle insisté, avant de souligner que la réunion de la FAO prévue en juin offre l'occasion de renforcer l'engagement politique. Elle a à cet égard précisé que la Haut-Commissaire et le Rapporteur spécial ont été invités à cette réunion et que la FAO se réjouit de leur participation active aux discussions.

M. DALY BELGASMI (Programme alimentaire mondial - PAM) a rappelé que le dernier Forum économique mondial de Davos avait souligné l'importance et la gravité de la crise alimentaire mondiale actuelle. Aussi, faut-il se réjouir qu'un consensus général soit trouvé quant à l'importance de cette crise. Le Sommet de la FAO de Rome, mais aussi le G-8 prochainement, vont débattre de cette crise, s'est également félicité le représentant du PAM. Le stock mondial de céréales a atteint un seuil qu'il n'avait jamais atteint depuis 30 ans, a-t-il relevé. Dans le contexte de crise actuel, il serait souhaitable de ne pas perdre l'occasion de souligner l'importance d'une aide d'urgence à 100 millions de personnes qui sont menacées par la crise actuelle, a conclu le représentant du PAM.

MME KELLIE-SHANDRA OGNIMBA (République du Congo) a souligné que la crise alimentaire est la conséquences de certaines stratégies suivies dans le monde, avec pour conséquence que plus de 850 millions de personnes sont aujourd'hui privées de leur droit à l'alimentation. La communauté internationale doit s'attacher à œuvrer pour rétablir ce droit et ainsi garantir la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement.

M. IDRISS JAZAÏRY (Algérie) a fait observer que le droit à l'alimentation est intimement lié au droit à la vie et ne saurait faire l'objet ni de tarification ni de marchandage. Pourtant, la crise place désormais hors de portée les modestes objectifs de la Déclaration du Millénaire de réduire de moitié la proportion de ceux qui ont faim. M. Jazaïry a souligné que cette crise exige une action urgente et concertée de la communauté internationale pour éviter que des régions entières soient soustraites à la production alimentaire tandis que d'autres régions affamées ne deviennent la proie de l'anarchie et de la violence. La présente situation, si elle perdure, sera génératrice de graves menaces à la paix et à la sécurité internationales, a-t-il averti. Le représentant algérien a préconisé que tous les États prennent d'urgence, individuellement et collectivement, des mesures pour assurer la réalisation du droit à une nourriture suffisante pour chacun. Ceci implique l'intégration des principes agréés des droits de l'homme dans leurs politiques et des politiques qui amènent les entreprises privées à tenir le plus grand compte des droits humains en évitant que la spéculation ne devienne attentatoire au droit à l'alimentation. Enfin, M. Jazaïry a souhaité que les institutions financières internationales soient exhortées à intégrer la perspective de la réalisation du droit à l'alimentation dans leurs agendas et leurs politiques, à corriger les erreurs passées en matière de schémas de développement et à accroître leur soutien au secteur vivier familial dans les pays en développement.

M. PHAM QUOC TRU (Viet Nam) a souligné que ces dernières années, le Vietnam a déployé d'importants efforts afin d'accroître sa production alimentaire en vue de réaliser le droit à l'alimentation de sa population et contribuer, de concert avec la communauté internationale, à assurer la sécurité alimentaire mondiale. Le pays a adopté une politique très claire d'exportation de produits alimentaires fondée sur la sécurité alimentaire, l'intérêt des producteurs de riz, le développement économique national et le souci de contribuer à faire face à la crise alimentaire mondiale. Ces dernières années, le Viet Nam est devenu le deuxième plus grand exportateur mondial de riz, a fait valoir le représentant. Cette année, en dépit des circonstances difficiles, le pays a maintenu son plan d'exportation de riz et, au cours de ces quatre derniers mois, en a exporté près de trois millions de tonnes. En outre, en coopération avec la FAO et d'autres partenaires, le Vietnam a mené des projets de production de denrées alimentaires dans davantage de pays, notamment des pays africains. Face à la crise alimentaire mondiale actuelle, le Vietnam poursuit ses efforts afin d'accroître sa production de denrées alimentaires et se joint aux efforts de la communauté internationale pour résoudre cette crise. Le représentant vietnamien a précisé que son pays appuie le projet de résolution qui est soumis dans le cadre de la présente session extraordinaire du Conseil et espère que ce texte pourra être adopté par consensus.

M. GABRIEL IGNACIO SALAZAR PINEDA (Venezuela, au nom de plusieurs États partenaires à l'initiative d'intégration régionale ALBA) s'est dit en faveur de transformations structurelles susceptibles de garantir des processus justes, durables et rationnels de partage des ressources indispensables au bien-être des peuples du monde. Le représentant vénézuélien a attiré l'attention sur les progrès que permettent les actions concrètes pour l'accès aux aliments de base, grâce à l'application de plans de souveraineté alimentaire au sein des différents pays partenaires de l'initiative ALBA. On voit en ce moment se déployer les effets des politiques structurelles libérales nuisibles pour la réalisation du droit à l'alimentation, a déclaré le représentant, appelant le Rapporteur spécial à étudier ces questions et leur impact sur la crise actuelle.

M. AHMET ÜZÜMCÜ (Turquie) a fait observer que la crise alimentaire, qualifiée par certains de tsunami silencieux qui ne connaît pas de frontières, est surtout liée à un excès de la demande par rapport à l'offre. Le manque d'offre a causé une flambée des prix et une crise qui touche des millions de personnes, a-t-il rappelé, regrettant au passage que les personnes les plus pauvres soient les plus touchées. Le droit à l'alimentation est menacé d'une façon sans précédent. Il a préconisé que la communauté internationale s'attelle tout d'abord à faire face aux conséquences humanitaires de la crise et qu'elle prenne également en compte les questions des relatives aux droits de l'homme dans les politiques qu'elle adoptera. Il a relevé l'importance pour la communauté internationale d'apporter une réponse coordonnée, guidée par la responsabilité de tous les États à assurer le respect du droit à l'alimentation. Cette session extraordinaire, a-t-il poursuivi, est opportune et la priorité devrait être d'arriver à un résultat de consensus qui lance un message fort témoignant de la détermination de la communauté internationale. Il a salué la décision du Secrétaire général d'établir une cellule de crise et estimé que le Haut-Commissariat et le Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation devraient coopérer le plus étroitement possible avec cette cellule. Le représentant turc a ensuite souligné qu'il importe de chercher une solution mondiale, par exemple en améliorant les mécanismes de réponse et leur coordination. Nous devons consentir tous les efforts possibles pour assurer la réalisation universelle du droit à l'alimentation, a-t-il conclu.

M. SAMIR LABIDI (Tunisie) a déclaré que dans un monde globalisé et de forte interdépendance, les causes de la crise alimentaire actuelle sont complexes et ses conséquences dévastatrices. Outre les mesures et les moyens qui devront être déployés au plan national et international pour faire reculer cette crise, la Tunisie appelle la communauté internationale à ériger la solidarité internationale comme valeur fondamentale des relations internationales. À ce titre, il y a lieu de rappeler qu'à l'initiative du Président Ben Ali, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté la résolution 57/265 portant création du Fonds mondial de solidarité devant servir d'outil utile pour faire face à l'ampleur et à l'aggravation de cette crise. La Tunisie appelle à l'adoption par consensus et au suivi du projet de résolution présenté à l'occasion de la présente session extraordinaire du Conseil.

M. VEBJORN HEINES (Norvège) a rappelé que si les droits de l'homme sont indivisibles et interdépendants, le droit à l'alimentation est d'une importance toute particulière puisqu'il conditionne la jouissance de tous les autres, notamment le droit à la vie. Il semble clair que les causes de l'augmentation des prix sont structurelles. Cependant, des mesures immédiates doivent être prises. Dans ce cadre, l'action humanitaire de la communauté internationale doit être coordonnée par les Nations Unies avec les gouvernements. Une action trop tardive et trop timide aura de graves conséquences, y compris sur le long terme. Le représentant a insisté sur la nécessité d'adopter une perspective axée sur les droits de l'homme dans la réponse à la crise alimentaire actuelle, et souligné le rôle des Nations Unies à cet égard. Le représentant norvégien a enfin évoqué l'action de son gouvernement en matière d'aide multilatérale et bilatérale, estimant que les pays en voie de développement ne doivent pas assumer seuls le fardeau économique des augmentations de prix des denrées alimentaires.

MME YSSET ROMÁN MALDONADO (République dominicaine) a estimé urgent de mobiliser l'intelligence des responsables techniques, politiques et diplomatiques de tous les pays pour apporter des solutions à la crise et garantir le droit à l'alimentation. Les Nations Unies ont le devoir et la responsabilité d'apporter des solutions appropriées, a-t-elle souligné. L'investissement dans les programmes agricoles à court, moyen et long terme demeure fondamental, a-t-elle ajouté. D'autre part, tout en reconnaissant que cette crise représente une menace immédiate pour le développement, elle a souligné que les pays doivent continuer d'affronter d'autres défis comme les changements climatiques ou des règles commerciales inégales. La représentante a expliqué que la République dominicaine, considérée comme le «grenier» des Caraïbes, s'est rendue compte de l'aide qu'elle pouvait apporter aux pays de la région et assurer la réalisation du droit à l'alimentation. Dans cette perspective, le Gouvernement a proposé de créer un fonds mondial de solidarité alimentaire destiné à aider les pays en développement et plus particulièrement ceux qui sont importateurs nets de denrées alimentaires. Ce fonds serait approvisionné par les pays développés qui ont réduit leur contribution à l'aide publique au développement, a-t-elle précisé, exprimant l'espoir que cette initiative serait bien accueillie.

M. ALBERTO J. DUMONT (Argentine) a souligné que son pays était profondément préoccupé par la situation actuelle d'insécurité alimentaire au niveau mondial et a indiqué que la Présidente argentine allait participer activement à la Conférence de haut niveau sur la sécurité alimentaire mondiale qui doit se tenir à Rome du 3 au 5 juin prochain. Face à la situation actuelle de pénurie et de prix élevés des denrées alimentaires, il convient d'utiliser les ressources du FMI et de la Banque mondiale; d'augmenter les dons et le recours aux ressources budgétaires et de réduire les subventions dans les pays développés, en les canalisant vers l'aide alimentaire et la promotion de l'agriculture dans les pays en développement. Les pays développés qui appliquent des subventions ont une grande responsabilité dans les tendances du commerce agricole mondial, a insisté le représentant argentin. Les mesures légitimes sur les exportations qu'applique l'Argentine ne sont pas la cause de la restriction de l'offre mais aident à contrôler les prix internes, a-t-il en outre déclaré. En effet, depuis qu'elle a mis en place les droits d'exportation en 2002, l'Argentine a accru sa production et ses exportations agricoles et est parvenue à maintenir une certaine stabilité des prix au niveau intérieur qui a contribué à réduire les niveaux de pauvreté et d'indigence.

M. FRANCISCO XAVIER ESTEVES (Portugal) a réitéré l'importance du droit à l'alimentation comme droit fondamental pour la jouissance de tous les droits de l'homme. Il a mis l'accent sur l'aggravation prévisible de la crise alimentaire actuelle, qui pourrait rejeter plus de cent millions de personnes dans la pauvreté. L'expérience montre que les effets de la faim se font sentir de manière disproportionnée sur les plus pauvres, et en particulier sur les femmes et les fillettes. C'est pourquoi un effort particulier doit porter sur la lutte contre la féminisation de la pauvreté et contre les discriminations contre les femmes en matière d'accès à l'alimentation, à l'eau et à la terre, à l'éducation et au travail. Le représentant portugais s'est félicité de la désignation par le Secrétaire général d'une équipe spéciale de haut niveau sur la crise alimentaire mondiale, espérant que cette instance saura conseiller les États sur la manière de concevoir des mécanismes capables de mettre un terme à la crise actuelle.

M. HUBERTUS MATHEUS VAN MEGEN (Saint-Siège) a souligné que la tâche première de la communauté internationale est de mettre au point une réponse cohérente et d'intégrer la crise alimentaire dans le cadre des droits de l'homme. Il a estimé qu'une action urgente et concertée de la communauté internationale est nécessaire pour relever le défi énorme de nourrir la population mondiale. Cette crise, a-t-il poursuivi, est un signal d'alarme sur les conséquences négatives qui affectent le secteur de l'agriculture et met en lumière les déséquilibres du système commercial international à l'heure où 4 millions de personnes par année rejoignent les 854 millions qui souffrent déjà de la faim. Il a ainsi espéré que cette session extraordinaire ouvre les yeux de l'opinion publique sur le coût humain de la famine. D'autre part, il a rappelé que les agences intergouvernementales sont parvenues à la conclusion que la famine n'est pas due à un manque de nourriture, mais bien à un manque d'accès aux ressources agricoles. Il a ainsi plaidé pour la mise au point de politiques efficaces qui assurent l'accès à une alimentation suffisante. Un engagement en faveur du développement agricole est nécessaire, plus particulièrement en Afrique, et le devoir de solidarité envers les plus vulnérables doit être reconnu. Le représentant su Saint-Siège a estimé que les spéculations sur les denrées alimentaires sont inacceptables et que les subventions injustes doivent être éliminées. Il a plaidé pour l'adoption d'une nouvelle mentalité qui place la personne humaine au centre des préoccupations et non le profit économique. Il a également fustigé les sommes immenses consacrées aux armes.

M. LIBÈRE BARARUNYERETSE (Organisation internationale de la Francophonie) a relevé que le droit à l'alimentation est pour l'heure en train d'être gravement compromis par l'escalade des prix des denrées alimentaires dans les pays en développement et met en péril le bien-être et la vie d'un sixième de la population mondiale. Dans ce contexte, a-t-il ajouté, il convient de se mobiliser en faveur d'une intégration de la perspective des droits de l'homme dans les travaux de la réunion de haut niveau organisée au début du mois prochain à Rome sous les auspices de la FAO. Force est de constater que les politiques économiques agricoles mises en œuvre jusqu'à présent, avec des exportations accrues des denrées alimentaires et la production de biocarburants, a compromis la souveraineté alimentaire, a poursuivi le représentant de l'Organisation internationale de la Francophonie. La communauté internationale doit donc prendre de toute urgence les mesures politiques qui permettront de résoudre cette crise dont l'impact pourrait être, à plus ou moins longue échéance, celui d'une catastrophe humanitaire d'une gravité et d'une ampleur sans précédent.

M. BABACAR BA (Organisation de la Conférence islamique, OCI) a rappelé que la crise actuelle met en jeu la survie de plusieurs millions de personnes dans le monde et, au-delà, la paix et la sécurité internationales. C'est pourquoi les comités spécialisés de l'OCI se sont réunis en Turquie ces dernières semaines pour étudier quelles mesures doivent être prises pour résoudre cette crise. Des sommes très importantes ont déjà été dégagées par les membres de l'Organisation de la Conférence islamique pour atténuer les effets immédiats de la crise actuelle. Cependant, la résolution de cette crise nécessitera une action beaucoup plus approfondie, qui doit être axée sur la réalisation du principe de la mise à disposition permanente d'une nourriture en quantité et en qualité satisfaisantes. Le Conseil des droits de l'homme doit jouer un rôle d'agitateur de consciences en faveur de la mise en œuvre des mesures susceptibles d'aller dans ce sens.

M. EVGENY LAZAREV (Bélarus) a estimé que le Conseil peut apporter sa contribution au débat sur la crise alimentaire. Il s'est réjoui que différentes organisations internationales travaillent activement pour surmonter la pénurie des denrées alimentaires et a notamment fait référence à la tenue de la réunion de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture à Rome en juin prochain. Le représentant du Belarus a également souligné l'importance de la prise en considération des aspects de la crise alimentaire relatifs aux droits de l'homme. Cette question ne pourra être résolue sans coopération internationale, a-t-il averti. Il a à cet égard regretté que certains pays enfreignent le droit international et continuent d'appliquer des blocus économiques, des sanctions et autres mesures coercitives unilatérales. Le Conseil doit tenir compte de ces circonstances, a-t-il souligné. Il a ainsi demandé au Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation d'accorder dans son travail une attention toute particulière aux conséquences des mesures coercitives unilatérales sur le droit à l'alimentation.

M. JUAN HOLGUIN (Équateur) a rappelé qu'avant même l'apparition de la présente crise alimentaire mondiale, un sixième de l'humanité souffrait déjà de faim et de malnutrition. La communauté internationale doit agir de toute urgence en faisant preuve de la plus ferme volonté politique à faire face à la crise alimentaire qui est en train de se produire au niveau mondial. Cette crise est due essentiellement à une hausse soutenue des prix des céréales, oléagineux et autres denrées alimentaires en général. Le déséquilibre croissant entre l'offre et la demande mondiales de produits alimentaires est notamment dû à la diminution des récoles résultant de l'action des changements climatiques et de l'utilisation de certains aliments comme biocombustibles. Face à cette situation, une action concertée de la communauté internationale est indispensable, a souligné le représentant équatorien. Il a souligné le rôle fondamental que le Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation peut jouer afin de transmettre dans différentes instances internationales la préoccupation du Conseil face à la crise alimentaire mondiale, d'un point de vue des droits de l'homme. En coordination avec le Haut Commissariat aux droits de l'homme, le Rapporteur spécial peut proposer des politiques et actions à long terme pouvant être engagées par la communauté internationale pour surmonter cette crise grave.

M. SIHASAK PHUANGKETKEOW (Thaïlande) a déclaré que la crise actuelle est le produit de nombreux facteurs interdépendants, notamment une augmentation de la consommation, une perte de productivité, le changement climatique et la flambée du prix de l'énergie. La Thaïlande, premier exportateur mondial de riz, attache une grande importance à la question de la sécurité alimentaire et au renforcement de la coopération internationale. Conscient de ses responsabilités, le pays a décidé, pour ne pas aggraver le problème, de s'abstenir d'intervenir dans les mécanismes du marché et s'efforce plutôt d'augmenter son offre de riz et de favoriser les échanges de savoir-faire afin d'accroître la productivité dans ce secteur. La résorption de la crise actuelle implique que toutes ses causes sous-jacentes soient prises en compte et que la souveraineté politique des États soit respectée. La Thaïlande estime enfin que le Conseil des droits de l'homme peut jouer un rôle important dans ce contexte en attirant l'attention sur la gravité de la crise dans la perspective des droits de l'homme.

M. TAN YORK CHOR (Singapour) a souligné, à l'instar de la Directrice générale de l'Organisation mondiale de la santé, que le monde produit suffisamment d'aliments pour nourrir toute la population mondiale et que trop de personnes sont, en fait, suralimentées. Pourtant, on assiste aujourd'hui à une crise alimentaire alors que les experts ont conclu que les vivres disponibles sont plus que suffisantes pour satisfaire les besoins du monde entier. De même, il y a pour l'instant assez de pétrole et il existe une certaine marge en ce qui concerne les gaz à effet de serre. Le représentant de Singapour a ainsi estimé que les humains font un très mauvais travail de gestion des ressources qu'ils partagent. Il a déploré cette mauvaise utilisation et fait observer que certains gaspillent, alors que d'autres sont forcés de renoncer à s'alimenter. Ces problèmes peuvent notamment mener à des déplacements massifs de populations, a-t-il averti. Il a plaidé pour l'adoption d'une direction nouvelle, d'une autre mentalité et de changements dans l'utilisation de ces ressources partagées.

M. ÁLVARO E. AYALA (Colombie) a déclaré que s'il est important que la communauté internationale prenne des mesures urgentes pour remédier à la grave crise engendrée par la hausse des prix des denrées alimentaires, il est également important et urgent qu'au-delà de ces mesures, soient recherchées et appliquées des solutions de fond. À cet égard, il est important de tenir compte de la Déclaration adoptée le mois dernier à Accra par les États membres de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) et dans laquelle était soulignée la nécessité de déployer les efforts nécessaires afin d'accroître la production alimentaire, en particulier en Afrique, dans les pays les moins développés et dans les pays dépendant de l'importation de denrées alimentaires. Ces efforts doivent s'accompagner de mesures prises au niveau global, en particulier par le biais de la réforme et de la libéralisation du commerce agricole. La Colombie considère comme prioritaire que la communauté internationale dans son ensemble fasse un effort pour conclure les négociations du cycle de Doha, a ajouté le représentant colombien, affirmant que ce cycle offre une occasion valable de corriger les distorsions du marché agricole au niveau mondial et de promouvoir des conditions propices à l'augmentation de la production mondiale d'aliments. La Banque mondiale a elle-même souligné la nécessité de parvenir, au sein de l'OMC, à un accord pour lever les barrières commerciales, ce qui permettrait de dégager des opportunités plus grandes pour que les agriculteurs des pays en développement accroissent leur production. Au niveau national, a poursuivi le représentant, la Colombie a adopté des mesures afin de préserver la sécurité alimentaire du pays, stimulant à cet effet la croissance de la production agricole de produits aussi importants que le maïs, dont l'aire de culture devrait s'accroître cette année de 220 000 hectares.

MME AMY LAURENSON (Nouvelle-Zélande) a souligné que le Conseil des droits de l'homme doit jouer un rôle important pour appuyer les efforts de la communauté internationale dans la recherche de solutions immédiates aussi bien que durables au problème de l'alimentation. La représentante a déploré que la crise compromette des décennies de progrès, au détriment notamment des femmes et des enfants. La crise remet d'autre part en cause la jouissance du droit à l'alimentation et du droit d'être à l'abri de la faim. La représentant a aussi déclaré que la crise est imputable, pour partie, à des problèmes d'accès aux aliments, au moins autant qu'à des difficultés d'offre. Elle a ainsi appelé les États à garantir l'accès de leurs populations à l'aide internationale.

M. JEAN FEYDER (Luxembourg) a attiré l'attention sur les répercussions de cette crise alimentaire qui sont, a-t-il souligné, d'une gravité extraordinaire pour des centaines de millions de personnes, surtout des femmes et des enfants. Il a rappelé qu'avant cette crise dramatique, il y avait déjà sur la planète plus de 800 millions d'affamés. S'intéressant ensuite aux causes de ce problème, il a fait remarquer que beaucoup de pays en développement, souvent autosuffisants sur le plan alimentaire au cours des années 60 et 70, sont tombés dans une dépendance alimentaire croissante. Cette dépendance, a-t-il poursuivi, s'explique par la place trop réduite réservée à l'agriculture vivrière, par la priorité donnée aux produits d'exportation, par les politiques de libéralisation préconisées par les organisations financières internationales. Citant le nouveau Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation, le représentant du Luxembourg a fait remarquer que nous payons vingt années d'erreur. Face à cette crise, il a préconisé que des mesures urgentes soient prises sur le court terme et, à cet égard, indiqué que son pays a d'ores et déjà augmenté ses contributions au Programme alimentaire mondial. À moyen et long terme, il a souligné qu'il importe de modifier le modèle de développement sur une base durable. L'agriculture vivrière mérite une place prioritaire dans toute stratégie nationale de développement, a-t-il insisté. La garantie de prix rémunérateurs et stables, un environnement commercial approprié, une régulation adéquate du marché et la protection contre la concurrence déloyale sont des clés pour sortir à long terme de la crise et de la pauvreté, a-t-il ajouté.

M. USMAN SARKI (Union africaine) a rappelé que le Sommet d'Abuja sur la sécurité alimentaire, organisé par l'Union africaine en décembre 2006, avait abouti à un cadre d'action opérationnel pour revitaliser l'agriculture africaine en vue de la croissance économique et de la réduction de la famine. Il a en outre rappelé que le Conseil avait été alerté ou du moins informé sur la gravité de la situation du point de vue de la réalisation du droit à l'alimentation par l'ancien rapporteur spécial chargé de cette question, M. Jean Ziegler, qui avait attiré l'attention sur les conséquences de certaines pratiques et spéculations dangereuses dans le commerce des produits alimentaires. Mettre l'Afrique à l'abri de la précarité alimentaire structurelle passerait par l'acquisition d'un savoir technique plus important lui permettant, par exemple, de lutter contre la désertification et la sécheresse, de mieux gérer ses ressources en eau, de moderniser son exploitation agricole et de rationaliser l'utilisation de ses ressources naturelles, a précisé le représentant de l'Union africaine.

M. JAVIER GARRIGUES FLÓREZ (Espagne) a déclaré que son pays partage une conception intégrée des droits fondamentaux, tant civils et politiques, qu'économiques, sociaux et culturels. C'est pourquoi l'Espagne est totalement engagée pour la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement et a donc adopté comme priorité la lutte contre la faim et la pauvreté. L'Espagne vise également l'octroi de 0,7% de son PIB à l'aide publique directe au développement. La coopération vise les plus vulnérables, et répond à une approche humanitaire. En quelques années, l'aide à l'Afrique subsaharienne a ainsi quadruplé, à cent millions d'euros. L'action de l'Espagne vise en particulier la souveraineté alimentaire.

M. ALAIN LAMBERT (Programme des Nations Unies pour le développement) a souligné que le PNUD et son Bureau pour la prévention des crises et le relèvement sont extrêmement préoccupés par l'étendue de la crise alimentaire mondiale. La famine est, certes, inacceptable, a-t-il poursuivi, mais ce qui est source d'une plus vive préoccupation est le fait que cette crise survient au moment où la réduction de la vulnérabilité des pauvres est plus que jamais urgente. De surcroît, la faim accroît non seulement la vulnérabilité aux catastrophes, mais crée également les conditions pour des conflits plus violents. Une assistance urgente est essentielle dans ce contexte, mais une attention toute particulière doit également être accordée au travail de prévention. Il a également indiqué que le PNUD et le Bureau pour la prévention des crises et le relèvement ont mis en place des structures dans cette perspective et rappelé qu'ils restent bien placés pour agir localement.

M. ALEX VAN MEEUWEN (Belgique) a déclaré que l'impact de l'augmentation des prix sur les populations vulnérables est important et requiert une réponse immédiate des gouvernements et de la communauté internationale. Les gouvernements doivent garantir en toute circonstance l'accès de l'aide humanitaire aux populations qui sont en danger, a-t-il ajouté. La crise actuelle doit aussi être une opportunité pour revoir nos politiques agricoles et alimentaires, a-t-il affirmé. Dans la révision des politiques nationales, a poursuivi le représentant belge, les droits de l'homme et le droit à l'alimentation doivent être un élément central. Chaque État est responsable de l'élaboration d'une stratégie nationale qui garantisse le droit d'accès à une alimentation saine à ses ressortissants, a-t-il rappelé. Cela implique notamment de protéger la population d'une trop grande volatilité des prix, a-t-il ajouté. Le représentant belge a par ailleurs souligné que la Conférence de Rome à venir permettra de mieux définir l'action internationale et de renforcer la cohérence des politiques des différents pays.

M. THORBJÖRN JÓNSSON (Islande) a souligné que si la forte augmentation des prix des aliments résulte d'abord d'une demande dépassant l'offre, d'autres facteurs – telle la hausse des prix du pétrole – jouent un rôle dans ce phénomène. De même, les spéculations dans les produits de base et les catastrophes naturelles ont des effets non négligeables. L'Islande se félicite de l'instauration par le Secrétaire général des Nations Unies d'une équipe de haut niveau sur la crise alimentaire, espérant qu'elle saura promouvoir une réponse unifiée et durable au défi actuel en matière d'approvisionnement alimentaire. Le représentant a appelé les États membres à participer de manière constructive à la conférence de haut niveau sur la sécurité alimentaire qui se tiendra à Rome du 3 au 5 juin prochain à Rome, sous l'égide de la FAO.

M. ABDUL GHAFOOR MOHAMED (Maldives) a expliqué que son pays, composé d'îles éparses, est fortement dépendant de l'importation de denrées alimentaires. De fait, la situation actuelle rend son pays très vulnérable, a-t-il souligné. Il a fait remarquer que la montée des prix des denrées alimentaires a des répercussions importantes sur le droit de tous à un niveau de vie suffisant et sur le droit à l'alimentation. Cette montée des prix va également entraver la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement, et plus particulièrement le premier de ces objectifs de réduction de la faim et de la pauvreté. Le représentant des Maldives a fait observer que le Conseil seul ne peut résoudre le problème de l'offre de produits alimentaires, tout en soulignant que cela ne signifie pas qu'il doit pour autant rester silencieux. Il s'est dit d'avis que le Conseil doit contribuer à attirer l'attention sur les aspects relatifs aux droits de l'homme de cette crise et encourager une action éthique. Il a appuyé la résolution telle que proposée, et dit apprécier en particulier les références aux facteurs responsables de cette situation, comme les changements climatiques et à la vulnérabilité des pays les moins avancés.

M. PEKKA METSO (Finlande) a relevé que la crise alimentaire actuelle menace la jouissance du droit à l'alimentation et risque d'affecter en particulier les populations les plus vulnérables. Afin de sauver des vies et d'empêcher une aggravation de la crise, il convient d'étendre les programmes d'aide humanitaire et de filets de sécurité existants, en particulier dans les zones de fortes poches de pauvreté et de faibles possibilités de génération de revenus, a poursuivi le représentant finlandais. Il est également essentiel de rester engagé en faveur de la lutte contre les changements climatiques, lesquels risquent d'aggraver les contraintes pesant déjà sur la production et la consommation alimentaires dans de nombreux pays en développement.

M. OMER DAHAB FADOL MOHAMED (Soudan) a déclaré que son pays avait appuyé la convocation de cette session consacrée à la crise alimentaire. Le droit à l'alimentation touche à la dignité humaine et au droit à la vie. L'objectif de la communauté internationale doit être de réduire les injustices en matière de droits économiques, sociaux et culturels. Les victimes de la faim sont plus nombreuses que les victimes de la guerre, a observé le représentant, craignant que le nombre des premières n'augmente encore. L'humanité a le devoir moral d'unir ses efforts et de trouver des solutions pratiques contre la faim et contre les facteurs de l'insécurité alimentaire, dont les causes sont souvent à chercher dans les pays riches.

M. MICHEÁL TIERNEY (Irlande) a déclaré que son pays accorde une priorité à la question de la sécurité alimentaire, laquelle tient une place importante dans la conscience des Irlandais à cause de leur propre histoire. Il s'est réjoui de la tenue de cette session extraordinaire, relevant l'importance de mettre l'accent sur la situation critique des individus les plus affectés par la spirale des prix alimentaires. Il a également estimé que cette session est une préparation appropriée en vue de la prochaine conférence sur la sécurité alimentaire qui se tiendra à Rome le mois prochain et que son pays attend avec impatience. La question de la sécurité alimentaire, a-t-il poursuivi, ne peut être un succès que si elle est accompagnée d'une série d'actions sur le plan local, national et global, en particulier pour accroître la productivité, mettre en valeur les moyens d'existence ruraux, encourager la recherche, supprimer les étranglements politiques et structurels qui empêchent le développement rural. Le représentant irlandais a ainsi estimé important que l'aide de la communauté internationale pour satisfaire aux besoins immédiats soit accompagnée de vigoureux efforts pour s'attaquer aux causes sous-jacentes de la faim chronique. Il a indiqué que son pays continue de donner la plus grande priorité à assister les agences et les organisations, comme le Programme alimentaire mondial notamment. Dans le même temps, l'Irlande s'engage à aider les populations à ne pas sombrer dans le plus grand dénuement et dans la faim, par le biais de programmes bilatéraux

M. BRAD MCDONALD (Fonds monétaire international - FMI) a rappelé que le Directeur général du Fonds, M. Dominique Strauss-Kahn, a déclaré que la croissance rapide des prix alimentaires aux niveaux qui sont atteints aujourd'hui suscite, dans de nombreux pays, à la fois une grave préoccupation du point de vue humanitaire et une instabilité potentielle du point de vue macroéconomique. Pour sa part, le FMI apporte dans ce contexte une contribution axée sur la surveillance et l'analyse, la fourniture de conseils politiques et le financement. Le Fonds contribue en effet à identifier les principaux facteurs à l'origine de la croissance des prix des denrées alimentaires, a notamment souligné le représentant du FMI. Il a par ailleurs indiqué que la Facilité pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance (FRPC), l'un des outils essentiels du soutien financier apporté par le FMI, constitue un instrument valable pour les pays frappés par la crise alimentaire.

M. JEAN-CLAUDE PIERRE (Haïti) a rappelé que son pays figure parmi les plus frappés par la flambée des prix des produits alimentaires. Le prix du riz, aliment de base, a doublé, alors que plus de 75% de la population vit avec moins de 2 dollars par jour et par personne, et n'arrive pas à combler ses besoins alimentaires. L'inflation, la détérioration du PIB, la hausse du prix des carburants, les chocs climatiques, les maladies et l'insécurité se sont révélés les principaux facteurs à la base de la détérioration de la situation alimentaire des ménages. Pour faire face à cette situation catastrophique, les autorités haïtiennes ont annoncé une baisse de 15% du prix du sac de riz, optant pour la relance et la subvention de la production domestique. Le représentant a salué l'octroi d'une aide de 10 millions de dollars par la Banque mondiale et la finalisation d'un plan d'action sur six mois par le Programme des Nations Unies pour le développement. Enfin, le représentant a remercié les pays qui ont pris des mesures d'urgence pour aider Haïti.

M. OBAID SALEM SAEED AL ZAABI (Émirats arabes unis) a expliqué que la crise actuelle a plusieurs causes et que ces dernières ont entravé la réalisation du droit à l'alimentation sur le terrain en dépit de toutes résolutions adoptées sur ce sujet. À cet égard, il a rappelé que le Conseil a déjà adopté une résolution et un rapport sur le droit à l'alimentation. Le représentant des Émirats arabes unis s'est dit d'avis que l'échec de ces initiatives est dû au fait que de nombreux États ont fait une distinction entre ce droit et d'autres et qu'ils ont ignoré son universalité et son indivisibilité. Il s'agit d'un droit essentiel, qui est étroitement lié au droit à la vie, a-t-il insisté. Le représentant a également rappelé qu'il faut veiller à réduire de moitié la proportion des personnes pauvres, conformément aux objectifs du Millénaire pour le développement. Il a espéré que l'enthousiasme et l'espoir suscité aujourd'hui pour des millions de personnes ne se tariront pas. La communauté internationale doit trouver une solution à long terme au fléau de la faim, a-t-il conclu.

MME MUNA RADHI (Bahreïn) a souligné que la communauté internationale doit réagir au problème, fondamental pour la jouissance des droits de l'homme, que constitue la crise alimentaire mondiale actuelle. Cette crise, due essentiellement à la flambée des prix des denrées alimentaires, entrave la jouissance d'un droit fondamental, à savoir le droit à l'alimentation, et affecte de très nombreuses personnes à travers le monde. Cette crise appelle une action concertée au niveau international, a souligné la représentante.

M. RICHARD NEWFARMER (Banque mondiale) a fourni des indications statistiques sur l'ampleur de la crise alimentaire actuelle et indiqué que le Directeur de la Banque mondiale avait appelé à la mise en œuvre d'une politique de «New Deal» pour la politique alimentaire mondiale. À court terme, il faut adopter des mesures ponctuelles de soulagement. À moyen terme, il faudra renforcer la production agricole et s'efforcer de mieux comprendre l'impact des biocarburants. À long terme, la Banque estime impératif de supprimer les subventions agricoles et les barrières commerciales qui empêchent l'accès des pays pauvres au marché international. Plus de 150 pays ont d'ores et déjà adopté ce plan d'action, a fait valoir le représentant. Il a par ailleurs indiqué que la Banque mondiale travaille actuellement à la formulation d'un programme de réaction mondial visant à dégager les ressources financières et le soutien technique nécessaires pour permettre aux pays pauvres de limiter l'impact des prix élevés sur les populations les plus fragiles.

M. . DHARAR ABDUL-RAZZAK RAZZOOQI (Koweït) a fait part de sa préoccupation face à la montée des prix des denrées alimentaires et a fait remarquer que l'impact de cette crise se déplace, pour la première fois, du monde en développement vers le monde développé. Rappelant que la Banque mondiale prévoit que la demande devrait doubler d'ici à 2030, il a fait observer que la situation actuelle est un signal d'alarme. Il a préconisé que la communauté internationale s'abstienne de toute politisation et de tout dessein égoïste dans la gestion de cette crise. Le représentant du Koweït a joint sa voix à celle du Président de la Banque mondiale, ce dernier ayant souligné que l'éradication de la faim semble être devenue un objectif du Millénaire pour le développement oublié. S'intéressant plus particulièrement à son pays, il a expliqué que l'Émir Sheikh Sabah Al-Ahmad Al-Jaber Al-Sabah a récemment établi un Fonds pour une vie décente dans les États islamiques et a annoncé une contribution de 100 millions de dollars pour ce fonds. Son objectif est de créer un partenariat économique entre les pays musulmans, d'éliminer la pauvreté, la faim et la malnutrition et de combattre les maladies, a-t-il précisé.

MME FLORIANA POLITO (Confédération internationale d'organismes catholiques d'action charitable et sociale), au nom de plusieurs organisations non gouvernementales1 a déploré que le premier objectif du Millénaire pour le développement de réduire de moitié le nombre de personnes souffrant de la faim est loin d'être atteint. Cet échec n'est pas seulement imputable à des causes naturelles, mais aussi à des comportements humains qui provoquent des situations sociales, économiques et humaines qui se détériorent, a poursuivi la représentante, comme par exemple les règles commerciales injustes, la pression exercée sur le prix des denrées par la production d'agrocarburants et la spéculation sur les aliments de base. La crise affecte plus de 850 millions de personnes, et ce sont encore une fois les plus vulnérables qui en paient le prix fort. La représentante a rappelé l'obligation de protéger et de respecter la vie humaine qui incombe aux États et par conséquent, l'obligation de faire tout effort possible pour protéger, respecter et garantir le droit à une alimentation adéquate. La représentante a en outre fait valoir la responsabilité morale de défendre ce droit fondamental et de venir en aide aux plus démunis.

M. GIANFRANCO FATTORINI (Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples - MRAP) au nom de plusieurs organisations non gouvernementales2) a déclaré que la crise mondiale de l'alimentation est grave et profonde et n'est pas le fruit de facteurs naturels ou conjoncturels qui se seraient soudainement manifestés conjointement. Nombreux sont les experts qui, depuis des lustres, dénoncent les conséquences néfastes produites par des choix budgétaires qui privilégient souvent le développement de l'appareil militaire et sécuritaire des États au détriment de celui des populations, ainsi que les conséquences néfastes produites par des accords commerciaux internationaux léonins, par des interventions d'urgence qui ne tiennent pas compte des besoins à long terme et par les politiques mises en œuvre par le FMI et la Banque mondiale - qui ont entretenu la spirale de l'endettement des pays en développement et conduit à la perte des outils pouvant assurer la jouissance du droit à l'alimentation. Le MRAP déplore vivement que ni la Haut-Commissaire aux droits de l'homme ni des représentants des victimes de la crise alimentaire n'aient été appelés à faire partie de l'équipe spéciale du Secrétaire général sur la crise alimentaire mondiale.

M. MELIK OZDEM (Centre Europe tiers-monde - CETIM) au nom de plusieurs organisations non gouvernementales3)a fait remarquer que les causes de la crise alimentaire sont connues de tous et a notamment fait référence à la promotion des méthodes agricoles néfastes et des cultures non adaptées, la privatisation des mécanismes publics de régulation et la promotion des exportations des produits agricoles à des prix de dumping. Les réponses apportées à cette crise devraient être à la hauteur de la gravité de la situation et ne peuvent se limiter aux actions humanitaires immédiates, a-t-il souligné. Il a estimé que la composition de la cellule de crise du Secrétaire général n'est pas satisfaisante. Il a appelé les États à revoir leurs politiques économiques, financières et commerciales qui ont conduit à ce désastre. Il a relevé l'urgence de réformer de fond en comble les institutions financières internationales. Il n'est pas tolérable que ces institutions échappent au contrôle démocratique ni que leurs activités contreviennent au droit international, a-t-il insisté, avant d'estimer que ces institutions devraient être comptables de leurs actes.

M. FLAVIO VALENTE (Pour le droit a se nourrir - FIAN) s'est félicité de la tenue de cette session extraordinaire, espérant qu'elle contribuera à une prise de conscience des violations graves du droit à l'alimentation qui sont la cause de la crise actuelle. Le représentant a appelé à une action internationale urgente contre des facteurs aggravants de la crise, tels que la spéculation, la demande croissante en agrocarburants et les projets de développement démesurés qui entraînent des expulsions forcées de populations entières, notamment rurales. Contrairement au diagnostic de l'équipe spéciale du Secrétaire général, le représentant a estimé que la crise a pour origine plusieurs décennies de politiques internationales erronées, ayant entraîné en particulier une diminution des investissements dans les secteurs clés que sont les services de base et la petite agriculture, ainsi qu'une déréglementation du commerce agricole mondial. Le représentant a estimé que certaines de propositions de l'Équipe spéciale risquent d'avoir des conséquences négatives, notamment la promotion en Afrique d'une forme d'agriculture nécessitant de forts investissements et l'accélération du processus de déréglementation. Le représentant a demandé aux gouvernements et organisations intergouvernementales de veiller à ce que la promotion et la protection du droit à l'alimentation soit au centre des efforts internationaux pour résoudre la crise alimentaire actuelle et de prendre des mesures immédiates de soutien aux gouvernements nationaux, de telle sorte que les victimes de la faim soient secourues et aidées dans leur lutte pour la survie. Le représentant a en outre demandé au Conseil des droits de l'homme de se pencher sur le problème des droits des paysans en recommandant à son comité consultatif d'identifier les groupes à risque.

MME SIMIA AHMADI (Fédération internationale des ligues des droits de l'homme) a demandé aux États membres du Conseil de prendre de toute urgence toutes les mesures pour aider les populations qui se trouvent dans le besoin à jouir de leur droit à une alimentation adéquate, soulignant à cet égard que l'aide alimentaire doit être fournie d'une manière qui n'affecte pas de manière négative les productions locales de denrées alimentaires. Elle leur a en outre demandé de prendre toutes les mesures nécessaires afin d'assurer la réalisation du droit à l'alimentation, par le biais de l'adoption de stratégies nationales et de cadres législatifs favorables au droit à l'alimentation et par le biais de l'assistance internationale. Elle leur a également demandé de s'assurer que les politiques internationales, notamment dans le cadre des processus de libéralisation du commerce, n'entravent pas mais au contraire favorisent la réalisation des droits de l'homme et, en particulier du droit à l'alimentation.

M. AHMAD SOUEISSI (Nord-Sud XXI) a fait remarquer que la communauté internationale peut bien dénoncer la crise alimentaire, prendre acte de la situation catastrophique et adopter des différentes résolutions, mais que cela ne va pas ajouter un morceau de pain sur la table des affamés qui sont la majorité de la planète. La mondialisation ultra libérale est responsable de cette nouvelle crise, a-t-il estimé. Il a plaidé en faveur d'une remise en question des institutions internationales, comme le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, qui par leur politique des ajustements structurels ont préparé le terrain pour arriver à cette situation dramatique. Il faut se poser la question de l'effet de la politique de libre échange, imposée par l'Organisation mondiale du commerce, les États-Unis, l'Union européenne et d'autres instances, qui obligent les pays du Sud à ouvrir leurs portes devant l'agriculture subventionnée du Nord, sans aucun droit, ni pouvoir, ni défense. Le vrai coupable de cette nouvelle crise est un système économique mondial qui fait de son modèle de consommation un critère de développement et de civilisation, a-t-il ajouté.

MME MEGHNA ABRAHAM (Amnesty International) a rappelé que la crise alimentaire actuelle est due à des violations des droits de l'homme, dont le droit à l'alimentation. Il est crucial que la communauté internationale réagisse sans délai pour identifier les carences et déterminer les causes de l'insécurité alimentaire. La représentante a relevé plusieurs situations préoccupantes au regard du respect du droit à l'alimentation, dans les territoires palestiniens occupés (en particulier à Gaza), à Myanmar, en République démocratique populaire de Corée, en Somalie, au Soudan (Darfour) et au Zimbabwe. La représentante a exhorté le Conseil des droits de l'homme à enquêter sur le rôle des politiques nationales et internationales et des violations des droits de l'homme dans la création ou l'approfondissement de l'insécurité alimentaire dans un certain nombre de pays. Elle a également demandé au Conseil d'appeler les États à coopérer pleinement avec le Rapporteur spécial pour le droit à l'alimentation, notamment en répondant rapidement à ses demandes de visite et communications, et en tenant dûment compte de ses recommandations.

M. JULIO AVELLA (Fédération syndicale mondiale) a souligné que la présente session du Conseil renvoie au caractère indivisible du droit le plus essentiel, à savoir le droit à la vie. Il a rappelé que des centaines de millions de personnes à travers le monde souffrent de malnutrition. Il a en outre dénoncé le recours au biocombustibles. Aucune politique visant à résoudre la crise alimentaire actuelle ne saurait être viable sans favoriser l'accès à la terre pour les paysans et l'augmentation des revenus des travailleurs agricoles, a notamment souligné le représentant.

M. ELIAS KHOURI (Union des juristes arabes) a fait observer que l'élément qui entrave la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels est la politique de certaines grandes puissances d'agression qui s'arment, menacent de guerre et d'invasion et occupent certains pays dotés des richesses pétrolières et gazières. Il a fustigé la domination exercée par une puissance à deux bras: un bras médiatique pour intoxiquer l'opinion publique et un bras militaire pour frapper et agresser des pays. Il a fait remarquer qu'une petite partie du budget de la guerre et de l'armement, si elle était investie dans des projets de développement ou en faveur de l'environnement, pourrait résoudre de nombreux problèmes. S'intéressant ensuite à la spéculation, il a dénoncé le rôle de certains pays pour influencer les règles du marché. Le baril de pétrole à 130 dollars ne s'explique pas par le manque d'offre mais par la spéculation, a-t-il asséné. Pour conclure, il a espéré que le travail de cette session extraordinaire pourra contribuer à mettre en œuvre des mécanismes adéquats pour assurer la réalisation du droit à l'alimentation.

MME CYNTHIA GERVAIS, of International Centre for Human Rights and Democratic Development - Rights and Democracy, a rappelé que 80% de la population des pays les moins avancés dépend de l'agriculture pour sa survie. Or, l'accès aux produits agricoles dépend de politiques internationales qui les dépassent. La représentante s'est félicitée de la décision de tenir une session extraordinaire sur la situation alimentaire. Elle a recommandé aux États membres d'envisager d'adopter une approche de lutte contre la faim axée sur les droits de l'homme et d'inviter le Rapporteur spécial à se rendre dans leur pays, si nécessaire.

MME CYNTHIA GERVAIS (Centre international des droits de la personne et du développement démocratique - droits et démocratie) a dénoncé l'impact dévastateur de la flambée des prix des denrées alimentaires sur les plus pauvres, en particulier les enfants. Elle a souligné que le prix des céréales a augmenté de 88% entre mars 2007 et mars 2008. Dans les pays à faibles revenus, l'alimentation est un poste budgétaire qui représente entre 40 et 70% des revenus des foyers pauvres. On s'attend donc à ce que les taux de pauvreté croissent de 3% au niveau global, ce chiffre devant être plus élevé dans les zones urbaines. La Banque mondiale estime que la crise alimentaire menace de plonger dans la pauvreté 100 millions de personnes supplémentaires. Les progrès réalisés en matière de développement ces cinq dernières années sont vulnérables à une détérioration si une action urgente n'est pas engagée afin de traiter cette crise alimentaire, a souligné la représentante.

M. LÁZARO PARY (Mouvement indien «Tupaj Amaru», au nom également du Conseil mondial de la paix) a regretté que les déclarations des organisations non gouvernementales ne bénéficient pas de l'interprétation, faisant valoir les difficultés que cela soulève pour les intervenants. Il a également fait part de sa préoccupation s'agissant des règles du Conseil et fait observer qu'il serait normal que le Conseil adopte la résolution après avoir entendu les organisations non gouvernementales. Il a souligné que la crise alimentaire mondiale et la hausse des prix des denrées alimentaires comme le blé touchent avec sévérité les populations, et plus particulièrement les peuples autochtones. Il a affirmé que cette crise est le résultat de la politique ultralibérale menée notamment par le Fonds monétaire international et la Banque mondiale et a fustigé la spéculation des aliments qui se pratique aujourd'hui. Il s'est également dit déçu face à l'égoïsme des politiques dans la lutte contre l'éradication de la pauvreté. Pour conclure, tout en saluant la tenue de cette session extraordinaire, il a fait observer que ce n'est pas par une résolution que la crise alimentaire se résoudra.

M. LUKAS MACHON (Commission internationale de juristes) a notamment rappelé que l'ampleur de la crise alimentaire exige le déploiement d'une aide et d'une coopération internationales. Des transferts de ressources devront être consentis pour développer les capacités de production domestiques. Quant aux États, ils sont tenus, au plan interne, de respecter l'accès existant à l'alimentation, de protéger le droit à l'alimentation en faisant en sorte que ni les entreprises ni les individus ne privent les consommateurs de leur accès à la nourriture, ainsi que de concrétiser le droit à l'alimentation. La Commission des juristes est par ailleurs fortement alarmée par la répression violente des manifestations contre la faim dans plusieurs pays. Elle estime que des mesures devraient plutôt être prises pour remédier aux causes profondes de ces phénomènes.



Conclusion du Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation

M. OLIVIER DE SCHUTTER, Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation, a estimé que beaucoup a pu être appris durant cette session extraordinaire, notamment pour ce qui est du rôle du Conseil. Grâce à la résolution adoptée à l'issue de cette session, le Rapporteur spécial a reçu, ainsi que le Haut Commissariat aux droits de l'homme, un mandat clair pour ce qui est de porter, auprès de nombreuses autres instances ou institutions, le message en provenance des droits de l'homme. Ont notamment été rappelées les obligations nationales des États à l'égard des populations relevant de leur juridiction. A également été souligné le devoir de créer un environnement international permettant aux États de s'acquitter de ces obligations. Il faut travailler sur les causes structurelles et développer des politiques globales pour faire face à la crise alimentaire, a poursuivi le Rapporteur spécial. Les biocarburants peuvent constituer un danger si l'alimentation et les combustibles sont en compétition sur les terres arables, a-t-il par ailleurs relevé.


1Déclaration conjointe: Confédération internationale d'organismes catholiques d'action charitable et sociale; Volontariat international femmes éducation et développement; Dominicains pour justice et paix; Commission internationale catholique pour les migrations; Swiss Catholic Lenten Fund; Bureau international catholique de l'enfance; Franciscain international; et Center for Migration Studies of New York.


2Déclaration conjointe: Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples - MRAP; Centre Europe tiers-monde - CETIM; Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté; et France Libertés – Fondation Danielle Mitterrand.


3Déclaration conjointe:. Centre Europe tiers-monde - CETIM; Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples; Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté; et France Libertés – Fondation Danielle Mitterrand.


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