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Le Conseil des droits de l’homme entend des appels en faveur du rapatriement des enfants qui se trouvent dans des camps dans le nord-est de la Syrie
Le Conseil des droits de l’homme a tenu, cet après-midi, la deuxième partie de sa journée de réunion annuelle consacrée aux droits de l’enfant, en se penchant sur la question du regroupement familial dans le contexte des conflits armés et de la lutte contre le terrorisme. Le Conseil a par ailleurs achevé son dialogue avec la Rapporteuse spéciale dans le domaine des droits culturels, Mme Katarina Xanthaki, et a entamé l’examen du rapport de la Rapporteuse spéciale sur la vente et l’exploitation sexuelle d’enfants, Mme Fatima Singhateh.
Quatre panélistes ont apporté leurs contributions au débat sur les droits de l’enfant et le regroupement familial : Mme Virginia Gamba, Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies pour le sort des enfants en temps de conflit armé ; M. Cornelius Williams, Directeur associé de la protection de l’enfance au Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) ; Mme Fionnuala Ní Aoláin, Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l'homme dans la lutte contre le terrorisme ; et Mme Helen Durham, Directrice du droit international et de la politique internationale au Comité international de la Croix-Rouge (CICR).
Mme Gamba a regretté que les enfants libérés de groupes armés soient souvent traités comme des coupables plutôt que comme des victimes de violations du droit international. Elle a demandé aux États concernés d’organiser le rapatriement des enfants qui se trouvent dans des camps en raison de liens familiaux présumés avec des combattants de Daech.
M. Williams a notamment souligné que, pendant les situations d’urgence, de 3% à 5% des enfants déplacés sont susceptibles d’être séparés ou non accompagnés – ce qui signifie que des dizaines, voire des centaines de milliers d’enfants sont séparés de leur famille chaque année.
Mme Ní Aoláin s’est dite gravement préoccupée par les présomptions selon lesquelles tous les garçons de plus de 10 ans dans la zone de conflit syrienne doivent être considérés comme des « extrémistes violents » ou des « terroristes ».
Mme Durham recommandé que les enfants détenus dans le nord-est de la Syrie soient libérés et réunis avec leurs familles, et que les enfants étrangers soient rapatriés avec les membres de leur famille dans leur pays d'origine.
De nombreuses délégations*** ont pris part au débat qui a suivi ces présentations. Il a été rappelé que les enfants libérés de forces armées et de groupes armés étaient victimes de graves violations des droits de l’homme, et qu’ils devraient faire l’objet d’une réinsertion familiale et communautaire, ainsi que d’une réadaptation à long terme. Il a en outre été souligné que l’agression russe en Ukraine menaçait directement la vie de quelque 7,5 millions d’enfants dans le pays.
Au début de la séance, trois organisations non gouvernementales* ont achevé le dialogue avec la Rapporteuse spéciale dans le domaine des droits culturels, Mme Alexandra Xanthaki. L’Arménie, Cuba et l’Azerbaïdjan ont exercé leur droit de réponse à la suite de déclarations faites dans le cadre du débat, entamé dès hier, avec la Rapporteuse spéciale.
S’agissant du rapport de la Rapporteuse spéciale sur la vente et l’exploitation sexuelle d’enfants, Mme Singhateh a indiqué qu’il proposait des mesures concrètes et des bonnes pratiques recueillies dans le monde entier pour lutter contre la vente d’enfants à des fins de mariage d’enfants et d’exploitation sexuelle des enfants dans la prostitution, dans le contexte des voyages et du tourisme, et en ligne.
Pour la Rapporteuse spéciale, le plus grand défi à relever dans la lutte contre la vente et l’exploitation sexuelle des enfants au niveau national est la mise en œuvre inadéquate des lois et politiques existantes. Elle a encouragé les États à adopter une politique de protection de l’enfance permettant que chaque membre du personnel concerné soit conscient de la manière dont les enfants doivent être traités et de ce qu’il faut faire en cas de suspicion de comportement sexuel inapproprié. L’experte a relevé que les enfants pris dans des conflits, notamment en Ukraine, sont plus vulnérables au fléau des graves violations des droits de l’homme, y compris le risque d’abus sexuels et d’exploitation.
Mme Singhateh a également rendu compte de sa visite de travail au Monténégro en septembre dernier. Les délégations** ont ensuite ouvert le débat avec la Rapporteuse spéciale, après avoir entendu une déclaration du Monténégro à titre de pays concerné.
Demain matin, à partir de 9 heures, le Conseil tiendra une réunion-débat sur le thème « Garantir à tous les pays un accès équitable, rapide et universel, à un coût abordable, aux vaccins mis au point pour lutter contre la pandémie de COVID-19 », avant de poursuivre son dialogue avec Mme Singhateh.
Suite et fin du dialogue avec la Rapporteuse spéciale dans le domaine des droits culturels
Aperçu du débat
L’attention a notamment été attirée sur l’aggravation du pillage, du vol et de la destruction de patrimoines et d’héritages culturels par des groupes extrémistes et terroristes. Les États ont été appelés à augmenter les budgets alloués à la culture, pour une meilleure réhabilitation des patrimoines culturels en péril. Ont par ailleurs été dénoncées des violations des droits culturels du peuple palestinien commises par Israël. L’attention a en outre été attirée sur la nécessité pour l’Iran d’assurer dans les faits la gratuité de l’enseignement pour tous, pourtant garantie par la Constitution.
*Liste des intervenants : Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme (RADDHO), Al-Haq, Association pour la défense des droits de l'homme et des revendications démocratiques et culturelles du peuple Azerbaidjanais-Iran.
Remarques de conclusion de la Rapporteuse spéciale
MME ALEXANDRA XANTHAKI, Rapporteuse spéciale dans le domaine des droits culturels, a d’abord regretté que les ONG n’aient pas pu participer davantage au débat en raison de la COVID-19 et a espéré que les travaux en personne reprendraient bientôt.
La Rapporteuse spéciale a insisté sur l’importance de tenir compte des droits culturels des personnes appartenant à des minorités et de protéger leurs cultures. Elle s’est dite d’accord avec l’idée que la priorité doit être accordée au développement durable. Il ne faut pas inscrire les droits culturels dans une réalité immuable, a-t-elle en outre souligné, estimant que l’exercice de ces droits doit répondre aux volontés et coutumes des communautés concernées.
Dialogue avec la Rapporteuse spéciale sur la vente et l’exploitation sexuelle d’enfants
Le Conseil est saisi du rapport de la Rapporteuse spéciale sur la vente et l’exploitation sexuelle d’enfants (A/HRC/49/51), ainsi que de son rapport sur sa visite au Monténégro (A/HRC/49/51/Add.1)
Présentation
Présentant son rapport, Mme MAMA FATIMA SINGHATEH, Rapporteuse spéciale sur la vente et l’exploitation sexuelle d’enfants, a indiqué que son rapport thématique intitulé « Une approche pratique pour lutter contre la vente et l’exploitation sexuelle d’enfants » est une étude qui fournit un ensemble de mesures concrètes et de bonnes pratiques recueillies dans le monde entier pour lutter contre la vente d’enfants à des fins de mariage d’enfants et d’exploitation sexuelle des enfants dans la prostitution, dans le contexte des voyages et du tourisme, et en ligne.
Elle a relevé que le plus grand défi à relever dans la lutte contre la vente et l’exploitation sexuelle d’enfants au niveau national reste lié à la mise en œuvre inadéquate des lois et politiques existantes. Le présent rapport propose donc une approche plus pratique pour s’attaquer à ce problème afin d’assurer la mise en œuvre efficace de mesures de prévention, de protection et de réadaptation des enfants, a-t-elle indiqué.
Parmi les recommandations de son rapport, la Rapporteuse spéciale a mentionné : l’intensification des mesures de prévention, la garantie que ces mesures atteignent la région la plus reculée et l’encouragement d’une forte participation communautaire à l’élaboration d’alternatives viables pour les enfants et les familles touchés par ce fléau. Mme Singhateh a par ailleurs encouragé les États à promouvoir et à soutenir l’adoption d’une politique de protection de l’enfance dans tous les secteurs publics et privés et plus particulièrement dans les entités travaillant avec les enfants, pour eux ou en contact avec eux, afin de veiller à ce que chaque membre du personnel soit informé et conscient de la manière dont les enfants doivent être traités, de leurs droits et de ce qu’il faut faire en cas de suspicion de comportement sexuel inapproprié.
S’agissant de sa visite au Monténégro, effectuée en septembre 2021, Mme Singhateh a indiqué que malgré diverses mesures positives, il y a dans ce pays un manque de données fiables, centralisées et désagrégées sur les phénomènes d’abus sexuel et d’exploitation sexuelle des enfants, ce qui rend difficile la détermination de la nature et de la prévalence du problème. L’exploitation et les abus sexuels d’enfants étant plus répandus chez les enfants appartenant à des communautés marginalisées, il est nécessaire que le Gouvernement du Monténégro continue d’investir dans des mesures sociales, économiques et autres, en particulier pour ces communautés, a souligné la Rapporteuse spéciale.
Pour conclure, Mme Singhateh a souligné que les enfants pris dans des conflits, notamment en Ukraine, sont plus vulnérables au fléau des graves violations des droits de l’homme, y compris au risque d’abus sexuels et d’exploitation. Une attention et une protection particulières devraient donc leur être accordées, a-t-elle insisté.
Pays concerné
Le Monténégro a remercié la Rapporteuse spéciale pour la visite qu’elle a menée dans le pays en septembre dernier. Le pays a ensuite indiqué avoir ratifié la plupart des principaux traités et conventions internationaux sur les droits de l'homme relatifs à la vente et à l'exploitation sexuelle des enfants, ou y avoir adhéré.
Actuellement, le Code pénal monténégrin traite de la vente d'enfants dans le cadre de la traite des êtres humains, incluant dans les formes d'exploitation « la conclusion d'un mariage illégal » ainsi que « l'esclavage ou les actes similaires à l'esclavage ». Le Code pénal contient également plusieurs dispositions relatives à l'exploitation sexuelle des enfants, qui sont en cours d'adoption. Il définit aussi un certain nombre d'infractions relatives aux phénomènes des mariages précoces et arrangés.
Le Monténégro est néanmoins conscient qu’il devra renforcer son appareil statistique et rationaliser son cadre législatif afin de garantir une conformité totale avec les articles 2 et 3 du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant traitant de ces questions, ainsi qu'avec l'Observation générale de 2021 du Comité des droits de l'enfant sur les droits des enfants en relation avec l'environnement numérique.
Débat
L’explosion du monde numérique a malheureusement facilité la création d'un marché mondial du matériel pédopornographique, un phénomène qui s'est encore accentué pendant la pandémie, a-t-il été observé. Pour faciliter la prévention de ce problème, il faut notamment renforcer la culture numérique des enfants, a-t-il été souligné.
Nombre d’intervenants ont préconisé l’adoption de lois visant à lutter efficacement contre les abus sexuels sur les enfants, y compris des lois exigeant des entreprises concernées qu'elles détectent et signalent aux autorités publiques le matériel pédopornographique.
La traite des personnes, a-t-il été rappelé, est une violation grave des droits de l'homme et des libertés fondamentales, particulièrement préjudiciable aux enfants. De nombreux enfants sont victimes de la traite dans des « ateliers clandestins », réduits en esclavage dans des ménages ou forcés à se prostituer, a-t-il été dénoncé. Le racisme systémique, la discrimination raciale et les crimes de haine dans certains pays ont aggravé le trafic d'enfants, a fait observer un groupe de pays.
Le renforcement de la coopération internationale en matière de protection de l'enfance est un élément crucial pour lutter contre la vente, le trafic et l'exploitation sexuelle des enfants, a-t-il été souligné.
Des délégations ont salué le travail accompli par la Rapporteuse spéciale pour identifier non seulement les causes profondes de la vente, de la prostitution et de la pornographie mettant en scène les enfants, mais aussi que des approches pratiques qui peuvent être exploitées pour résoudre ces problèmes.
**Liste des intervenants : Union européenne, Uruguay (au nom d’un groupe de pays), Lettonie (au nom d’un groupe de pays), Chine (au nom d’un groupe de pays), Paraguay, Égypte, Philippines, Ordre souverain de Malte, Népal, Israël, ONU Femmes, Libye, Fidji, Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Venezuela, France, Malaisie, Iraq, Cuba, Inde et Luxembourg.
Réunion annuelle consacrée aux droits de l’enfant : deuxième partie
Cet après-midi – après une première partie consacrée ce matin au regroupement familial dans le contexte des migrations –, la deuxième partie de la journée de discussion annuelle consacrée aux droits de l’enfant a porté sur le regroupement familial dans le contexte des conflits armés et du contre-terrorisme.
Avant d'écouter les présentations des panélistes, le Conseil a visionné une courte vidéo intitulée « Un enfant rapatrié raconte son histoire », préparée par l'UNICEF et présentant le témoignage d'un enfant sur son expérience vécue de rapatriement transfrontalier et de réunification avec sa famille élargie après avoir perdu ses parents et avoir été blessé lors d'un conflit.
Exposés des panélistes
MME VIRGINIA GAMBA, Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies pour le sort des enfants en temps de conflit armé, a regretté que les enfants libérés de groupes armés qui les avaient enlevés pour les enrôler de force soient souvent considérés, et traités, comme des coupables plutôt que comme des victimes de violations du droit international. Trop souvent, dans leur cas, l'approche antiterroriste est privilégiée par rapport à celle des droits de l'homme, et les droits fondamentaux de ces enfants sont niés pour des raisons de sécurité, a regretté Mme Gamba.
En 2020, a-t-elle poursuivi, les Nations Unies avaient confirmé la détention de plus de 3000 garçons et filles pour leur association présumée avec des groupes armés, y compris avec Daech, ou pour l'association de leurs propres parents avec ces groupes armés. La Rapporteuse spéciale a dénoncé les conditions inhumaines dans lesquelles ces enfants sont souvent détenus – privés d’accès aux services essentiels, notamment à la nourriture, à l'eau, à un abri, à l'éducation, aux soins médicaux, à la santé mentale et au soutien psychosocial.
La communauté internationale doit appliquer une approche fondée sur les droits de l'enfant pour aborder le cas des enfants associés, ou présumés associés, à des groupes armés, a recommandé Mme Gamba. Entre autres droits, ces enfants ne devraient pas être détenus simplement en raison de leur association présumée avec des groupes armés, tandis que les principes de non-discrimination et d'intérêt supérieur de l'enfant, consacrés par les articles 2 et 3 de la Convention relative aux droits de l'enfant, doivent être respectés, a souligné la Représentante spéciale.
Enfin, Mme Gamba a recommandé de privilégier le rapatriement sûr et volontaire des enfants dans leur pays d'origine, conformément aux principes du droit international, notamment le principe de non-refoulement, et d'assurer l'unité familiale et le rapatriement avec les frères et sœurs et les personnes responsables de l'enfant. La Rapporteuse spéciale a demandé aux États concernés d’organiser le rapatriement des enfants qui se trouvent dans des camps en raison de liens familiaux présumés avec des combattants de Daech.
M. Cornelius Williams, Directeur associé de la protection de l’enfance au Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) , a souligné que dans le cadre des conflits armés, des déplacements massifs de population, des contextes de migration et d’autres crises humanitaires, les enfants risquent d’être séparés de leur famille ou d’autres adultes responsables de leurs soins et de leur soutien. Les enfants non accompagnés et séparés sont parmi les enfants les plus vulnérables au monde, a-t-il rappelé. Ayant perdu la protection de leur famille, ils risquent de subir des dommages physiques et psychologiques, d’être enlevés, de se faire recruter par des groupes armés, d’être victimes d’abus et d’exploitation sexuels et de perdre définitivement leur identité et leur nationalité.
Les données issues des crises passées suggèrent que pendant les situations d’urgence, 3 à 5 % des enfants déplacés sont susceptibles d’être séparés ou non accompagnés, a précisé M. Williams. Compte tenu du nombre et de l’ampleur des crises humanitaires dans le monde, cela signifie que des dizaines, voire des centaines de milliers d’enfants sont séparés de leur famille chaque année. En 2020, l’UNICEF et ses partenaires ont enregistré plus de 180 000 enfants non accompagnés et séparés à travers le monde entier ; mais l’invisibilité de ces enfants signifie que le nombre est certainement beaucoup plus élevé.
Les gouvernements et les autres responsables devraient prendre des mesures proactives pour soutenir les familles afin que les enfants restent avec elles autant que possible. Il conviendrait notamment de fournir un soutien social, des possibilités d’éducation et des moyens de subsistance inclusives ; d’élaborer des cadres juridiques et politiques qui soutiennent la résilience familiale, préviennent la séparation et mettent fin à l’institutionnalisation des enfants ; de mettre en place des systèmes permettant d’identifier les enfants non accompagnés et séparés et de retracer rapidement les liens familiaux existants ; et de travailler avec tous les acteurs concernés pour mettre fin à la détention des enfants.
MME FIONNUALA NÍ AOLÁIN, Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l'homme dans la lutte contre le terrorisme, a évoqué la situation de quelque 10 000 enfants détenus dans des camps du nord-est de la Syrie, notamment la situation de plus de 850 adolescents de diverses nationalités « détenus pour de multiples motifs fallacieux », parfois avec des adultes. La Rapporteuse spéciale s’est dite gravement préoccupée par les « présomptions mal fondées » selon lesquelles tous les garçons de plus de 10 ans dans la zone de conflit syrienne doivent être considérés comme des « extrémistes violents » ou des « terroristes ».
Les enfants ne peuvent être placés en détention qu'en dernier recours et pour la durée la plus courte possible, a rappelé Mme Ní Aoláin. L'interdiction absolue de la détention arbitraire est un droit considéré comme si fondamental qu'il reste applicable même dans les situations les plus exceptionnelles, en temps de guerre comme de paix, a insisté la Rapporteuse spéciale.
Mme Ní Aoláin a aussi déploré « la tendance (…) des États à (…) abaisser le seuil légal de déchéance de la nationalité dans le but de cibler les personnes perçues comme étant associées à des groupes terroristes désignés ». La déchéance de nationalité a des séquelles économiques, sociales, culturelles et familiales monumentales, avec des effets particulièrement délétères sur les enfants dont les parents sont privés de leur nationalité, a mis en garde la Rapporteuse spéciale. Elle a demandé l’application d’un moratoire sur cette pratique.
MME HELEN DURHAM, Directrice du droit international et de la politique internationale au Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a cité les causes principales de la séparation d’enfants de leur famille dans le contexte des conflits : déplacements forcés de populations, recrutement par des forces ou groupes armés, détention sans jugement dans le cadre de mesures antiterroristes ou rapatriement d’enfants sans leur mère.
Mme Durham a plaidé pour une application plus efficace des protections existantes au titre du droit international, notamment du droit international humanitaire, qui contient des obligations visant à garantir que les besoins d'un enfant séparé de sa famille lors d'un conflit armé soient satisfaits, ainsi que du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, dont les obligations en matière de réintégration s'appliquent aussi aux groupes armés désignés comme « terroristes ».
Le CICR recommande aux États, avant toute chose, de prévenir la séparation et de tout mettre en œuvre pour identifier rapidement les enfants non accompagnés – car savoir où ils se trouvent permet d’éviter qu’ils soient victimes de recrutement, qu’ils aient recours à des stratégies d'adaptation nuisibles pour répondre à leurs besoins essentiels, et qu'ils soient exposés à l'exploitation et aux abus. Le CICR recommande aussi que les enfants détenus dans le nord-est de la Syrie soient libérés et réunis avec leurs familles, dans les camps ou ailleurs, et que les enfants étrangers soient rapatriés avec les membres de leur famille dans leur pays d'origine.
Aperçu du débat
Chaque enfant, quelle que soit sa nationalité, a les mêmes droits de l’homme, a-t-il été rappelé à plusieurs reprises. Lorsque les enfants sont séparés de leur famille, ils courent un plus grand risque de traite, d’exploitation, de violence, d’abus et de négligence, a-t-il été souligné.
Le monde a été témoin d’une augmentation du nombre d’enfants qui tentent de traverser les frontières, fuyant des situations désespérées de violence et des possibilités économiques et éducatives limitées, a-t-il été observé. Plusieurs intervenants se sont tout particulièrement inquiétés de la situation des filles qui migrent souvent pour échapper aux inégalités de genre, y compris pour échapper aux mutilations génitales féminines ou à l’excision, ainsi qu’aux mariages précoces ou forcés. La migration peut exposer les filles à des situations de vulnérabilité accrue et de violations des droits de l’homme, y compris la violence sexuelle et sexiste, le travail forcé, le recrutement militaire ou par des gangs, a-t-il été rappelé.
De nombreuses délégations ont dénoncé le recrutement et l’utilisation d’enfants par les forces armées et les groupes armés, y compris ceux qui sont désignés comme groupes terroristes, ainsi que les autres violations et abus commis par ces groupes contre des enfants, y compris les meurtres et les mutilations, les enlèvements, les viols et autres formes de violence sexuelle et sexiste.
Les enfants libérés des forces armées et des groupes armés sont victimes de graves violations et abus des droits de l’homme et devraient bénéficier d’une attention particulière, d’une réinsertion familiale et communautaire et d’une réadaptation durable et à long terme, a-t-il été indiqué. Tous les enfants au sein des groupes armés doivent être considérés comme des victimes, ont insisté de nombreuses délégations.
Plusieurs délégations ont par ailleurs dénoncé l’agression russe en Ukraine qui menace directement la vie de 7,5 millions d’enfants dans le pays.
***Liste des intervenants : Union européenne, Portugal (au nom de la communauté des pays de langue portugaise), Qatar, Iraq, Ghana, Azerbaïdjan, Cuba, ONU Femmes, Royaume-Uni, Indonésie, Venezuela, Fédération de Russie, Ouzbékistan, Kazakhstan, Save the Children International, Plan International, Amnesty International, Asociacion HazteOir.org,Beijing Children's Legal Aid and Research Center, et China Soong Ching Ling Foundation.
Réponses des panélistes
MME NÍ AOLÁIN a demandé que les enfants soient toujours considérés comme des victimes du terrorisme, quel que soit le groupe armé qui les prend pour cible. La Rapporteuse spéciale a recommandé d’accorder plus d’attention à la famille dans le contexte de la lutte contre le terrorisme, et d’éviter absolument d’imposer des choix impossibles aux enfants : être séparés de leur mère ou ne pas être rapatriés. Elle a jugé indispensable de traduire en justice les auteurs de violations des droits des enfants. Enfin, la réinsertion et la réhabilitation des enfants sont des processus de long terme, a rappelé la Rapporteuse spéciale.
M. WILLIAMS a confirmé que la COVID-19 avait un impact sur le regroupement familial. L’UNICEF a collecté des bonnes pratiques pour aider les communautés à accompagner le regroupement familial, a-t-il ajouté. M. Williams a en outre appuyé le rapatriement des enfants depuis les zones de conflit dans le respect du principe de non-refoulement.
MME DURHAM a jugé important de ne pas aborder le sort des enfants en fonction de considérations uniquement sécuritaires. Elle a par ailleurs rappelé que tous les enfants recrutés de force ont droit à une protection en vertu du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés et d’autres instruments juridiques.
Le Président du Conseil, M. FEDERICO VILLEGAS, a conclu le débat en faisant observer que si le droit humanitaire, le droit international des droits de l’homme et le droit des réfugiés étaient nés dans des contextes différents et pour des raisons différentes, ils ont cependant un dénominateur commun : la protection de la personne. Dans ce cadre, les enfants doivent bénéficier d’une protection supérieure. Il faut garder à l’esprit la situation que nous connaissons actuellement, a ajouté le Président.
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