Fil d'Ariane
Le Conseil des droits de l’homme se penche sur les situations des droits de l’homme en Iran et au Venezuela
Cet après-midi, le Conseil des droits de l’homme a examiné le rapport présenté par M. Javaid Rehman, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran, et a été saisi d’une mise à jour de Mme Michelle Bachelet, Haute-Commissaire aux droits de l’homme, portant sur la situation des droits de l’homme au Venezuela. Auparavant, le Conseil a également achevé son dialogue, entamé ce matin, autour du rapport de Mme Bachelet concernant la situation des droits de l’homme au Bélarus, en entendant les déclarations de plusieurs délégations*.
M. Rehman a indiqué que le thème central de son rapport résidait dans les obstacles qui, depuis des décennies, ont entraîné une impunité persistante pour les violations des droits de l'homme les plus graves en Iran. En effet, la structure constitutionnelle et politique de l'Iran n'est pas conçue pour rendre les gouvernants responsables devant les gouvernés, a expliqué le Rapporteur spécial : d’un côté, l'absence de pluralisme politique et de participation démocratique signifie que les gens ne peuvent pas participer aux prises de décision ; de l’autre, l'absence d'indépendance du pouvoir judiciaire signifie qu’il n’existe aucun recours.
M. Rehman a regretté qu’au moins 280 personnes aient été exécutées en Iran en 2021, dont au moins dix femmes et trois mineurs. La peine de mort a aussi été prononcée contre des personnes ayant participé à des manifestations et pour des affaires liées à la drogue, a constaté le Rapporteur spécial. Il a pointé les processus « très flous » qui précèdent l'imposition de la peine de mort, notamment l'absence d'accès à un avocat et le recours à des aveux forcés obtenus sous la torture et sans enquête ultérieure sur ces allégations.
Dans une déclaration à titre de pays concerné, l’Iran a dit ne pas reconnaître le mandat de M. Rehman et a regretté que son rapport « ne reflète en rien les progrès constants » de l’Iran en matière de promotion des droits humains. De nombreuses délégations** ont ensuite participé au débat avec le Rapporteur spécial.
Dans sa mise à jour concernant la situation des droits de l’homme au Venezuela, Mme Bachelet a jugé prometteuses la réforme du système judiciaire et la restructuration de la police nationale. En particulier, l'interdiction de poursuivre des civils devant des tribunaux militaires, ainsi que les mesures visant à remédier à la surpopulation des centres de détention provisoire et à dissoudre les Forces d'action spéciales, sont conformes aux recommandations précédentes et peuvent conduire à une transformation institutionnelle réelle au Venezuela, a indiqué Mme Bachelet. La Haute-Commissaire a aussi jugé encourageante l’évocation d’une reprise des pourparlers entre le Gouvernement et les membres des partis d'opposition.
Dans le même temps, a poursuivi Mme Bachelet, le Haut-Commissariat constate qu’il existe des lacunes s’agissant du droit à un procès équitable, y compris au regard du droit à un jugement dans un délai raisonnable et du droit d'accès à un avocat de son choix. Mme Bachelet a réitéré que toutes les personnes détenues arbitrairement doivent être remises en liberté. Depuis septembre dernier, a ajouté la Haute-Commissaire, le Haut-Commissariat a documenté 93 incidents liés à des restrictions de l’espace civique et démocratique au Venezuela.
La Haute-Commissaire a en outre plaidé pour la levée des « sanctions sectorielles », afin qu’il puisse être répondu aux besoins des personnes les plus vulnérables parmi la population vénézuélienne. En conclusion, elle a dit accueillir avec satisfaction l’engagement des autorités avec le Haut-Commissariat et s’est dite confiante que cette coopération continuera d’être approfondie pour promouvoir les droits de l’homme dans le pays.
Intervenant en tant que pays concerné, le Venezuela s’est félicité de la reconnaissance par la Haute-Commissaire des réalisations de l'État vénézuélien, mais a attiré l'attention sur le fait que ses remarques négatives n'ont pas pris en considération les informations partagées par l’État. De nombreuses délégations*** ont ensuite pris part au dialogue avec la Haute-Commissaire.
Le Liban, l’Arménie et Israël ont exercé leur droit de réponse en fin de séance.
Demain matin à 10 heures, le Conseil achèvera le débat avec la Haute-Commissaire. Il doit ensuite entendre un compte rendu oral de la mission internationale indépendante d’établissement des faits chargée d’enquêter sur les cas d’exécution extrajudiciaire, de disparition forcée, de détention arbitraire et de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants survenus depuis 2014 au Venezuela, avant d’engager son dialogue avec la Commission sur les droits de l’homme au Soudan du Sud.
Suite et fin du dialogue sur le rapport de la Haute-Commissaire concernant la situation des droits de l'homme au Bélarus
Aperçu du dialogue
De nombreuses délégations ont condamné les limites imposées aux droits civils et politiques au Bélarus, notamment à l’égard des journalistes, des défenseurs des droits de l'homme et des manifestants pacifiques, et ont souligné que les violations qui en découlent ne doivent pas rester impunies. Il est temps que les autorités du Bélarus rendent des comptes, commencent à dédommager les victimes et organisent des élections « véritablement » crédibles et démocratiques, a-t-il été affirmé. Plusieurs intervenants ont témoigné de violences, de harcèlements et de persécutions à l’encontre des journalistes, d’organisations et de membres de la société civile. Cette situation exige que le Conseil prenne des mesures afin que les auteurs de ces actes en répondent, ont insisté bon nombre d’organisations non gouvernementales (ONG).
Plusieurs délégations ont, quant à elles, insisté pour que prévalent la non-politisation et la non-sélectivité dans les questions relatives aux droits de l'homme. Les rapports des Nations Unies doivent s’appuyer sur des sources fiables et crédibles, ont-elles rappelé. Les mécanismes des droits de l'homme doivent s’acquitter de leur fonctions en toute neutralité et indépendance, a-t-il été souligné, certains intervenants dénonçant une politisation des travaux du Conseil et une approche des pays occidentaux empreinte de « deux poids, deux mesures » à l’égard des pays en développement.
*Liste des intervenants : Lettonie, Espagne, Malte, République de Moldova, République démocratique populaire lao, Bulgarie, République islamique d’Iran, Zimbabwe, Royaume-Uni, Pays-Bas, Ukraine, Chypre, Human Rights House Foundation, FIDH, International Bar Association, Right Livelihood Award Foundation, Genève pour les droits de l’homme, Advocates for Human Rights, International Commission of Jurists, World Organisation Against Torture, Human Rights Watch, International Fellowship of Reconciliation, Article 19, CIVICUS et Liberal International.
Réponses et remarques de conclusion de la Haute-Commissaire
MME MICHELLE BACHELET, Haute-Commissaire aux droits de l’homme, a souligné qu’il était fondamental d’analyser les violations des droits de l’homme pour évaluer les réparations à accorder aux victimes et pour éviter que ces violations ne se répètent. En l’état actuel, il y a peu de chances que le Bélarus traduise en justice les personnes responsables des violations commises, a-t-elle affirmé, rappelant que son rapport contient des recommandations à cet égard, y compris la possibilité que d’autres États actionnent la compétence universelle. Le droit international prévoit explicitement que des cas de torture, par exemple, soient poursuivis dans des pays tiers, a insisté Mme Bachelet. Elle a souligné que son rapport
identifie des « schémas qui posent des problèmes » et pourraient constituer des crimes internationaux. Le soutien de la société civile, les documents et témoignages qu’elle peut collecter, sont essentiels pour le Haut-Commissariat, qui continuera de travailler avec les organisations concernées, a indiqué Mme Bachelet.
Dialogue avec le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran
Le Conseil est saisi du rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran (A/HRC/49/75), qui contient des informations recueillies jusqu’au 1er décembre 2021.
Présentation
M. JAVAID REHMAN, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran, a indiqué que son rapport donnait un aperçu des principaux sujets de préoccupation concernant la situation des droits de l'homme en République islamique d'Iran, avec un examen ciblé sur la responsabilité des violations des droits de l'homme. Le Rapporteur spécial a souligné que l'Iran refusait toujours l'accès du pays à son mandat ; il a néanmoins remercié le Gouvernement iranien pour ses commentaires sur le rapport et ses réponses aux communications.
En 2021, a poursuivi M. Rehman, au moins 280 personnes, dont au moins dix femmes, ont été exécutées en Iran. Outre les deux cas d'exécution d'enfants délinquants mentionnés dans le rapport, le Rapporteur spécial été informé, après la publication du rapport, qu'un troisième mineur avait été exécuté en secret l'année dernière. Toujours en 2021, le nombre d'exécutions pour des accusations liées à la drogue a augmenté, bon nombre des personnes exécutées appartenant aux communautés minoritaires baloutche et kurde, notamment. La peine de mort a aussi été prononcée contre des personnes ayant participé à des manifestations, a constaté le Rapporteur spécial. Le rapport mentionne les processus « très flous » qui précèdent l'imposition de la peine de mort, notamment l'absence d'accès à un avocat et le recours à des aveux forcés obtenus sous la torture et sans enquête ultérieure sur ces allégations.
M. Rehman a constaté que la période couverte par le rapport avait vu deux exemples graves d'utilisation de la force excessive ou mortelle lors de rassemblements pacifiques. Les deux cas concernaient des protestations liées à l'accès à l'eau, dans un contexte de pénurie d'eau, et ont entraîné la mort d'au moins huit personnes, dont deux enfants, ainsi que de nombreuses arrestations. Aucune enquête n'a été ouverte sur l'usage excessif de la force et les autres violations commises dans le cadre de ces manifestations, a regretté M. Rehman.
Autre développement très préoccupant, a poursuivi le Rapporteur spécial, le Parlement iranien a adopté, en février 2021, un projet de loi sur le système de réglementation des services en ligne qui constitue une étape majeure vers la consolidation d'un « mur numérique en Iran », qui séparerait en fait l'Iran de l'Internet mondial. De même, a regretté M. Rehman, l'adoption d’une nouvelle loi qui impose de nouvelles restrictions aux droits en matière de santé sexuelle et reproductive et criminalise l'avortement vient-elle annuler certains des progrès de l'Iran dans la lutte contre la propagation du VIH/sida et d'autres maladies sexuellement transmissibles.
M. Rehman a indiqué que le thème central de son rapport résidait dans les obstacles juridiques, structurels et politiques qui, depuis des décennies, ont entraîné une impunité persistante pour les violations des droits de l'homme les plus graves en Iran. Les problèmes à relever à cet égard sont nombreux, à commencer par le fait que la structure constitutionnelle et politique de l'Iran n'est pas conçue pour rendre les gouvernants responsables devant les gouvernés, a affirmé le Rapporteur spécial. D’un côté, a-t-il précisé, l'absence de pluralisme politique et de participation démocratique signifie que les gens ne peuvent pas participer aux prises de décision ; d'un autre côté, l'absence de séparation des pouvoirs et d'indépendance du pouvoir judiciaire signifie qu’il n’existe aucun recours. Des changements et des réformes importants doivent être apportés dans ces deux domaines, a recommandé le Rapporteur spécial – à commencer par la reconnaissance de l’existence même du problème, a-t-il précisé.
M. Rehman a regretté l’impunité pour des assassinats ou tentatives d'assassinat d'intellectuels, de journalistes et de dissidents à l'intérieur et à l'extérieur du pays, et a déploré que des personnes fassent l'objet de poursuites pénales pour avoir seulement réclamé justice.
Enfin, le Gouvernement iranien insiste sur le fait que le système de gouvernance est une question de souveraineté, a constaté le Rapporteur spécial : or, si la souveraineté est en effet un principe fondamental du droit international, il est tout aussi impératif que les États remplissent leurs obligations en vertu du droit international des droits de l'homme, a souligné M. Rehman.
Pays concerné
La République islamique d’Iran a indiqué d’emblée ne pas reconnaître le mandat de M. Rehman, « dont le produit inévitable sera ce rapport fallacieux qui détourne la vérité ». Le mandat, qui n’a pas le consentement de l’État concerné, est infligé au Conseil – notamment par le Royaume-Uni comme fer de lance – dans le cadre d’une campagne de diffamation contre l’Iran qui ne produira certainement pas de résultat crédible, a déclaré la délégation iranienne. Le mandat ne contribue en rien à la promotion et à la protection des droits humains : il s’agit surtout de créer une confrontation, qui empêche le Conseil de tenir des débats de fond, et de dissuader l’État visé de toute interaction fructueuse, a affirmé la délégation.
La délégation iranienne a regretté que ce rapport – qui, selon elle, n’est ni factuel ni équitable et ignore la quasi-totalité des commentaires de l’État – ne reflète en rien les progrès constants réalisés par son pays en matière de promotion des droits humains et n’ait pour seul but que de discréditer le système iranien.
Aperçu du débat
Nombre de délégations se sont dites alarmées par la poursuite des exécutions capitales en Iran, notamment de femmes, de jeunes, d’enfants et de personnes LGBTIQ+, y compris pour des crimes mineurs. Le nombre de crimes passibles de la peine de mort en Iran figure parmi les plus élevés au monde, s’est inquiétée une délégation. Appliquer la peine capitale à un mineur est contraire à la Convention relative aux droits de l’enfant à laquelle l’Iran est partie, a-t-il notamment été souligné. Plusieurs intervenants ont appelé l’Iran à abolir la peine de mort et, dès maintenant, à adopter un moratoire immédiat sur cette peine, en tant que première étape vers une abolition totale.
Les atteintes aux droits fondamentaux des Iraniens sont légion, a-t-il été observé, d’aucuns dénonçant les arrestations d’opposants politiques, de journalistes et de défenseurs des droit de l'homme arrêtés, ou encore la persistance des crimes d’honneur visant les femmes et des mariages juvéniles forcés. Environ 14 000 filles de moins de 13 ans ont été mariées de force l’an dernier, a-t-il été affirmé. Les femmes, ainsi que les minorités ethniques comme les bahaïs, continuent de subir de fortes discriminations, a-t-il été ajouté. Des inquiétudes ont été exprimées s’agissant de la nouvelle loi mentionnée par le Rapporteur spécial, dont l’application devrait limiter encore davantage les droits des femmes, y compris leur droit à la santé sexuelle et reproductive.
L’Iran, en plus de violer les droits de ses propres citoyens, « parraine le terrorisme » et s’immisce dans les affaires internes des États, via le soutien à des groupes, comme le Hezbollah ou encore les milices houthistes au Yémen, ont ajouté certaines délégations.
Il a été demandé à l’Iran de mettre fin à ses politiques et pratiques violant les droits de l'homme. Personne ne devrait être poursuivi ou emprisonné parce qu’il défend ses droits fondamentaux, a insisté une délégation. L’Iran doit abandonner ses lois restrictives, y compris celle qui prévoit l’édification d’un « mur numérique » entre l’Iran et le reste du monde, a-t-il été déclaré.
Il a été demandé au Rapporteur spécial de dire comment, selon lui, la communauté internationale pourrait l’aider dans sa tâche et comment pourrait être assurée l’obligation redditionnelle des auteurs des violations de droits de l'homme en Iran. Beaucoup d’intervenants se sont dits favorables au renouvellement du mandat du Rapporteur spécial.
Plusieurs délégations ont pour leur part condamné « l’approche biaisée » qui prévaut selon elle s’agissant de la question des droits de l'homme en Iran. Cette « manœuvre politique tactique » qui consiste à « harceler » un pays qui cherche son développement par ses propres moyens n’a rien à voir avec les droits de l'homme et doit être rejetée, a-t-il été affirmé. La démarche qui consiste pour des « pays hégémoniques » à imposer des mandats non consensuels qui ne sont pas soutenus par les pays concernés est vouée à l’échec, a-t-il été dit. Certains ont donc demandé qu’il soit mis fin au mandat du Rapporteur spécial. La fin de ce mandat se justifie d’autant plus que la situation des droits de l'homme en Iran continue de rester stable, malgré la campagne de déstabilisation orchestrée par des pays et leurs médias, a insisté une délégation. La véritable violation des droits de l'homme en Iran vient des mesures coercitives unilatérales imposés par les États-Unis, qui empêchent l’Iran de répondre aux besoins de sa population, comme on l’a vu avec la pandémie, a-t-il été affirmé. Il est regrettable que le Rapporteur spécial ne traite pas des effets des sanctions sur la vie et le quotidien des Iraniens, ont déploré plusieurs intervenants, relevant que les pays qui imposent ces sanctions prétendent qu’elles sont ciblées, alors qu’elles touchent aussi les organisations de la société civile et même des enfants.
Une ONG s’est pour sa part offusquée de l’élection de l’Iran à la Commission de la condition de la femme, assurant que cela est comparable à faire d’un « incendiaire le chef des pompiers »
**Liste des intervenants : Union européenne, Islande (au nom d’un groupe de pays), Liechtenstein, Israël, Allemagne, République populaire démocratique de Corée, Cuba, Syrie, Venezuela, Luxembourg, Chine, Pays-Bas, Suisse, Sri Lanka, Fédération de Russie, Australie, Irlande, Bélarus, États-Unis, Belgique, Royaume-Uni, République tchèque, Albanie, Nicaragua, Macédoine du Nord, Malawi, République démocratique populaire lao, Nouvelle-Zélande, Zimbabwe, Yémen, France, Argentine, Ensemble contre la peine de mort, Organization for Defending Victims of Violence, Medical Support Association for Underprivileged Iranian Patients, Article 19, Rahbord Peimayesh Research & Educational Services CooperativeBrithsd HIUmanist Association, Ingénieurs du Monde, Christian Solidarity Worldwide, Centre Zagros, International Bar Association .
Réponses et remarques de conclusion
En tant que pays concerné, l’Iran, a dit déplorer que le Rapporteur spécial ait été obligé de rédiger un tel rapport. L’Iran a estimé que le débat avait été clair : plusieurs États ne soutiennent pas l’approche politisée concernant la situation des droits de l'homme en Iran. En ce qui la concerne, la République islamique d’Iran continuera sa course vers les droits de l'homme et ses réformes et rien ne l’empêchera de poursuivre la voie de la coopération. L’Iran est déterminée à écouter et à coopérer avec ceux qui veulent, a conclu la délégation iranienne.
Concluant à son tour, M. REHMAN a fait observer que son rapport aborde bien la question des conséquences des mesures coercitives unilatérales imposées à l’Iran et y répond même puisque ses recommandations appellent aussi à la levée de ces sanctions. Cela dit, les sanctions n’empêchent pas l’Iran de respecter ses obligations internationales, notamment d’adopter un moratoire sur la peine de mort ou de respecter les droits civils et politiques, a-t-il souligné. De plus, la souveraineté d’un État n’est pas un bouclier pour justifier les violations des droits de l'homme et protèger l’État de toute responsabilité, a ajouté le Rapporteur spécial. M. Rehman a appelé l’Iran à revoir ses politiques et à prendre des mesures afin de résoudre toutes les préoccupation soulevées dans le rapport.
Dialogue sur la mise à jour orale de la Haute-Commissaire concernant la situation des droits de l’homme au Venezuela
Le Conseil est saisi d’une mise à jour orale de la Haute-Commissaire aux droits de l’homme portant sur la situation des droits de l’homme en République bolivarienne du Venezuela et sur la coopération technique apportée à ce pays.
Présentation
Présentant sa mise à jour, MME MICHELLE BACHELET, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, a relevé que, depuis sa dernière mise à jour en septembre 2021, un certain nombre d'initiatives de réforme au Venezuela avaient ouvert de nouvelles perspectives pour la mise en œuvre d'importantes recommandations en matière de droits de l'homme. La réforme du système judiciaire et la restructuration de la police nationale sont ainsi des étapes prometteuses, a-t-elle déclaré. En particulier, l'interdiction de poursuivre des civils devant des tribunaux militaires, ainsi que les mesures pour remédier au surpeuplement dans les centres de détention préventive et pour dissoudre les Forces d'action spéciales, peuvent-elles conduire à une transformation institutionnelle réelle, a estimé Mme Bachelet.
De même, la Haute-Commissaire s’est félicitée de l'extension du délai pour les candidatures à la Cour suprême de justice, qui a permis d’avoir un plus grand nombre de candidats et qui sera – a-t-elle estimé – l'occasion de renforcer l'indépendance du pouvoir judiciaire vénézuélien. Quant à la conclusion d'un protocole d'accord avec le Procureur de la Cour pénale internationale, elle fournit aux autorités du Venezuela une nouvelle opportunité de démontrer leur engagement dans la lutte contre l'impunité au travers d’une action judiciaire et de poursuites rapides, véritables et efficaces, a souligné Mme Bachelet. Elle a aussi indiqué que le Procureur général avait accordé à l’équipe du Haut-Commissariat l'accès à certains dossiers relatifs à des violations des droits de l'homme, ainsi qu’à une audience judiciaire.
Par ailleurs, Mme Bachelet a relevé avec satisfaction que des agents de l'État avaient été condamnés dans au moins trois affaires emblématiques, notamment pour le meurtre et la torture du capitaine de corvette Rafael Acosta Arevalo.
Dans le même temps, le Haut-Commissariat constate qu’il existe des lacunes s’agissant du droit à un procès équitable, y compris au regard du droit à un jugement dans un délai raisonnable et du droit d'accès à un avocat de son choix. Parmi les « cas individuels préoccupants » signalés aux autorités depuis septembre 2021, 18 personnes ont été libérées. Au moins six personnes restent en détention bien qu'elles aient reçu un ordre de libération, et au moins 22 ont demandé leur libération au motif que les limites légales de la détention avaient expiré. Parmi les cas tranchés par le Groupe de travail sur la détention arbitraire, 12 personnes restent en détention. Mme Bachelet a réitéré que toutes les personnes détenues arbitrairement doivent être remises en liberté.
Depuis septembre dernier, a indiqué la Haute-Commissaire, le Haut-Commissariat a documenté 93 incidents liés à des restrictions de l’espace civique et démocratique au Venezuela. Mme Bachelet a fait part de préoccupations liées à des poursuites engagées contre les membres de l’organisation de défense des droits de l'homme Fundaredes ; à 24 cas de stigmatisation de défenseurs des droits humains, de journalistes et d'autres membres de la société civile par des agents de l'État, sur les médias sociaux ou dans des discours publics ; et à la fermeture de huit stations et programmes de radio au cours de l'année dernière, tandis que l'accès aux sites web d'au moins sept médias a été bloqué. D’autre part, malgré l'approbation de la loi sur la transparence et l'accès aux informations d'intérêt public en septembre 2021, aucun budget national n'a été publié depuis 2018, a constaté la Haute-Commissaire.
Mme Bachelet a par ailleurs affirmé que le processus municipal et régional qui s'est déroulé en novembre dernier avait été « dans une grande mesure pacifique ». Elle a également jugé encourageant d'entendre évoquer une reprise possible des pourparlers entre le Gouvernement et les membres des partis d'opposition.
La présence d’acteurs armés non étatiques et de groupes criminels a fait augmenter la violence, en particulier le long de la frontière avec la Colombie, dans les régions minières et dans les centres urbains, a d’autre part relevé Mme Bachelet, demandant aux autorités vénézuéliennes d’enquêter sur toutes les plaintes pour violation des droits de l’homme en accordant une attention spéciale aux droits des peuples autochtones.
Enfin, Mme Bachelet a plaidé pour la levée des « sanctions sectorielles », afin qu’il puisse être répondu aux besoins des personnes les plus vulnérables parmi la population vénézuélienne. En conclusion, elle a dit accueillir avec satisfaction l’engagement des autorités avec le Haut-Commissariat et s’est dite confiante que cette coopération continuera d’être approfondie pour promouvoir les droits de l’homme dans le pays.
Pays concerné
Le Venezuela s’est félicité de la reconnaissance par la Haute-Commissaire des réalisations de l'État vénézuélien, mais a attiré l'attention sur le fait que ses remarques négatives n'ont pas pris en considération les informations partagées par l’État. Le Venezuela « voit encore avec inquiétude la réminiscence d'éléments qui instrumentalisent les droits de l'homme à des fins politiques, ce qui est très éloigné de l’objectif de promotion des droits de l'homme ».
Le Venezuela a regretté d'entendre aujourd'hui des informations sur des violations présumées des procédures judiciaires au détriment des citoyens vénézuéliens, et d'autres informations qui jettent le doute sur la performance de l'État, malgré l'échange constant d'informations avec les fonctionnaires du Haut-Commissariat sur le terrain. Le Venezuela s’est félicité de la mention faite par la Haute-Commissaire de la levée des « sanctions » : on ne peut parler de la situation des droits de l'homme au Venezuela, a-t-il dit, sans évoquer l'impact sur la vie du peuple des quelque 502 mesures coercitives unilatérales imposées par le Gouvernement des États-Unis et d'autres pays « hégémoniques ».
La présence du Haut-Commissariat au Venezuela a été renforcée et les fonctionnaires onusiens exercent leur mandat en toute liberté et avec le soutien des organes étatiques compétents, a poursuivi le Venezuela, rappelant avoir invité quatre procédures spéciales à visiter le pays, notamment les rapporteurs spéciaux sur le logement convenable et sur le droit à l'alimentation.
Aperçu du débat
Il faut que la liberté d’expression et de réunion pacifique soit respectée, a demandé un groupe de pays pour illustrer sa vision de la situation des droits de l'homme au Venezuela. Une délégation a dénoncé une absence d’enquêtes transparentes et d’indépendance du pouvoir judiciaire, ainsi qu’une poursuite des détentions et exécutions arbitraires.
Il a été déclaré que la « crise politique plurielle » de même que la « grave situation humanitaire » que connaît le Venezuela devraient inciter le pays à privilégier le dialogue avec la Haute-Commissaire et avec toutes les parties prenantes au Venezuela, y compris la plate-forme unitaire. Les autorités devraient organiser une élection présidentielle crédible et ouverte, a-t-il été demandé.
Un groupe de pays a salué les nombreux efforts déployés par le Venezuela et a mis en garde contre la présentation de partis pris basés sur des informations non vérifiées et politisées. Le Haut-Commissariat devrait prendre en compte les informations fournies par les gouvernements qui connaissent bien mieux leur pays, a-t-il été affirmé. Ceux qui ont promu la résolution 45/20 du Conseil des droits de l'homme « contre » le Venezuela ont montré leur méconnaissance du pays, notamment du fait que les mesures coercitives unilatérales imposées par les États-Unis au Venezuela compliquent la tâche du pays et portent atteinte à ses capacités à s’acquitter de ses obligations au regard des droits de sa population, a-t-il été affirmé. Plusieurs délégations ont salué la coopération dont le Venezuela a fait preuve avec le Haut-Commissariat et ont assuré que les problèmes que connaît le pays ne pourront être réglés que par le biais du dialogue et du respect mutuel.
***Liste des intervenants : Union européenne, Arabie saoudite (au nom du Conseil de coopération du Golfe), Paraguay, République populaire démocratique de Corée, Équateur, France, Cuba, Syrie, Chine, Espagne, Sri Lanka, Argentine, Fédération de Russie, Cambodge, Chili, Bélarus, Uruguay, États-Unis, Royaume-Uni, Nicaragua, Colombie, Érythrée, Soudan du Sud et Bolivie.
Ce document produit par le Service de l’information des Nations Unies à Genève est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel.
Les versions anglaise et française de nos communiqués sont différentes car elles sont le produit de deux équipes de couverture distinctes qui travaillent indépendamment.
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