Fil d'Ariane
LE COMITÉ POUR LA PROTECTION DES DROITS DES TRAVAILLEURS MIGRANTS EXAMINE LE RAPPORT DE LA LIBYE
Le Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport de la Libye sur les mesures prises par ce pays pour donner effet aux dispositions de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.
Présentant ce rapport, M. Khalid Masoud Abraheem Abousalah, Ministre adjoint aux droits de l’homme au Ministère de la justice de la Libye, a rappelé que la Libye était un pays de transit des flux migratoires et des travailleurs migrants et que, malgré ses difficultés actuelles, le Gouvernement collaborait avec les pays voisins et avec les institutions internationales pour rapatrier les migrants qui se trouvent sur son sol et pour éviter qu’ils ne tombent sous la coupe de trafiquants et de criminels. M. Abous
alah a insisté sur le fait que l’objectif des autorités était de protéger les droits des travailleurs migrants tout en faisant respecter la souveraineté nationale.
Le chef de la délégation a indiqué que les employeurs étaient tenus à un certain nombre d’obligations en termes de protection des droits des travailleurs migrants, comme le paiement des frais de rapatriement des dépouilles de travailleur décédés; il a précisé que le Gouvernement avait créé un service d’inspection du travail chargé de faire respecter ces obligations. La Libye a ratifié la Convention de l’Organisation internationale du Travail sur les travailleuses et travailleurs domestiques, a aussi précisé M. Abousalah.
Le Ministre adjoint a indiqué que son Gouvernement entendait rétablir la paix et la sécurité en Libye avec l’aide de la Mission d'appui des Nations unies en Libye (MANUL). Il a enfin regretté que la Convention ne soit pas ratifiée par de nombreux grands pays et a prié le Comité de travailler à la ratification universelle de cet instrument.
La délégation libyenne était également composée, entre autres, de plusieurs représentants des Ministères libyens du travail et des affaires étrangères. Elle a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les experts du Comité s’agissant, notamment, de la place de la Convention dans l’ordre juridique interne; des mesures de sensibilisation aux dispositions de la Convention, de la législation applicable aux migrations irrégulières; de la crise migratoire et de la question de la liberté de mouvement; du terrorisme et de l’instabilité sécuritaire auxquels est confrontée la Libye; des accords bilatéraux conclus par le pays; ou encore du traitement des migrants, en situation régulière ou irrégulière, en Libye. La délégation a assuré qu’il n’y a pas de preuves de l’existence de marchés d’esclaves en Libye et a déploré les exagérations médiatiques dans ce domaine.
Mme Jasminka Dzumhur, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport de la Libye, a fait observer que quelque 161 000 personnes sont arrivées en Europe par la mer au départ de la Libye et a souligné que, vu le grand nombre d’étrangers en transit en Libye en attendant d’aller vers l’Union européenne, une coopération avec cette dernière pour venir en aide à ces personnes était nécessaire.
L’importance du contenu des accords entre la Libye et l’Union européenne est très important dans un contexte où l’Europe s’apprête à dresser un mur virtuel pour empêcher les migrations, a pour sa part souligné un autre membre du Comité.
M. Ermal Frasheri, également corapporteur, a voulu en savoir davantage sur le respect du droit fondamental des migrants de quitter la Libye et a souligné que pour aider la Libye, le Comité a besoin d’informations précises sur la situation exacte qui règne dans le pays et sur les difficultés qu’il rencontre pour donner effets aux droits protégés par la Convention.
Durant le dialogue, une experte a rappelé que le Comité avait, en 2017, alerté la communauté internationale sur le fait que des migrants avaient été vendus comme esclaves en Libye. Un expert s’est quant à lui dit très préoccupé par l’existence en Libye de centres de détention illégaux où des migrants et demandeurs d’asile sont soumis à des conditions inhumaines, y compris la torture et le manque de nourriture et d’hygiène.
Le Comité doit clore les travaux de sa trentième session vendredi prochain, 12 avril, en rendant publiques ses observations finales sur la mise en œuvre de la Convention dans les quatre États parties dont les rapports ont été examinés durant cette session, à savoir l’Albanie, le Guatemala, le Tadjikistan et la Libye.
Présentation du rapport
Le Comité était saisi du rapport initial de la Libye (CMW/C/LBY/1), établi sur la base d’une liste de points à traiter préalablement soumise par le Comité.
Présentant ce rapport, M. KHALID MASOUD ABRAHEEM ABOUSALAH, Ministre adjoint aux droits de l’homme au Ministère de la justice de la Libye, a rappelé que la Libye était un pays de transit des flux migratoires et des travailleurs migrants et que, malgré ses difficultés actuelles, le Gouvernement collabore avec les pays voisins et avec les institutions internationales pour rapatrier les migrants qui se trouvent sur son sol et pour éviter qu’ils ne tombent sous la coupe de trafiquants et de criminels.
Rappelant que la Libye avait ratifié la Convention en 2004 avant de passer des accords bilatéraux avec les pays voisins pour, notamment, lutter contre la traite des êtres humains, M. Abousalah a insisté sur le fait que l’objectif des autorités était de protéger les droits des travailleurs migrants tout en faisant respecter la souveraineté nationale. Il a affirmé que les migrants étaient hébergés et, le cas échéant, recevaient de quoi rentrer chez eux avec leurs enfants.
M. Abousalah a précisé que toute personne qui entre de façon irrégulière en Libye peut, moyennant certaines conditions, demander la régularisation de sa situation. Le chef de la délégation a indiqué que les employeurs étaient tenus à certaines obligations en matière de protection des droits des travailleurs migrants, notamment au paiement des frais de rapatriement des dépouilles de travailleur décédés. Le Gouvernement a créé un service d’inspection du travail chargé de faire respecter ces obligations. La Libye a ratifié la Convention n°189 de l’Organisation internationale du travail (OIT) sur les travailleuses et travailleurs domestiques, a rappelé M. Abousalah.
Le Ministre adjoint a en outre indiqué que son Gouvernement entendait rétablir la paix et la sécurité en Libye avec l’aide de la Mission d'appui des Nations unies en Libye (MANUL). Il a enfin regretté que la Convention ne soit pas ratifiée par de nombreux grands pays et a prié le Comité de travailler à la ratification universelle de cet instrument.
Examen du rapport
Questions et observations des membres du Comité
MME JASMINKA DZUMHUR, corapporteuse du Comité pour l’examen du rapport de la Libye, a relevé que la Libye avait ratifié la Convention très tôt parce qu’elle était certainement consciente de l’importance de la migration en tant que problème concernant tous les pays. Mme Dzumhur a prié la délégation de dire si d’autres instruments internationaux avaient été ratifiés par la Libye depuis 2004 et a demandé des statistiques sur le nombre d’étrangers présents sur le territoire libyen. La corapporteuse a aussi demandé des précisions sur les normes légales relatives aux « immigrants illégaux » et à la définition même de ce statut. Elle a voulu savoir si une loi spéciale était applicable aux requérants d’asile.
La corapporteuse a ensuite fait observer que quelque 161 000 personnes sont arrivées en Europe par la mer au départ de la Libye. Elle s’est enquise des formations dispensées aux gardes-côtes libyens. Elle a voulu savoir si le pays disposait de statistiques sur le nombre de migrants décédés en mer et en quoi consistait la coopération de la Libye avec les organisations internationales qui se chargent des migrants et des migrations. L’experte a aussi prié la délégation de décrire la coopération bilatérale de la Libye avec les pays de destination des migrations en Europe.
Mme Dzumhur a par ailleurs souhaité savoir si la Libye appliquait une stratégie contre la traite des êtres humains. Elle a également prié la délégation de dire si la Libye comptait se doter d’un mécanisme national de prévention de la torture. L’experte a aussi souligné que, vu le grand nombre d’étrangers en transit en Libye en attendant d’aller vers l’Union européenne, une coopération avec cette dernière pour venir en aide à ces personnes était nécessaire. La corapporteuse a insisté sur l’importance de concrétiser les droits garantis par la loi.
M. ERMAL FRASHERI, corapporteur du Comité pour l’examen du rapport de la Libye, a salué l’effort fait par la Libye pour venir à Genève dialoguer avec le Comité. Il a demandé comment les dispositions de la Convention étaient intégrées à la loi libyenne et s’est enquis de la place de cet instrument dans l’ordre juridique interne. M. Frasheri a aussi prié la délégation de dire comment les autorités portaient à la connaissance des fonctionnaires concernés et du grand public la teneur des droits consacrés par la Convention.
Le corapporteur a ensuite voulu en savoir davantage sur le respect du droit fondamental des migrants de quitter la Libye et sur les mesures prises pour faire respecter leur droit à la vie et leur droit de ne pas subir la torture. Le corapporteur s’est aussi enquis de la manière dont les recommandations des acteurs internationaux à l’endroit de la Libye, notamment celles du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, sont appliquées dans ce pays.
Le corapporteur a en outre voulu savoir comment la Libye donnait effet à ses obligations relatives au droit à la santé des migrants et aux conditions dans lesquelles ils peuvent être détenus. À ce propos, M. Frasheri a demandé dans quelle mesure les observateurs internationaux ont accès aux lieux de détention des migrants en Libye.
M. Frasheri a souhaité savoir de quels moyens le Gouvernement se dotait pour respecter ses obligations au titre de la Convention. Il a tenu à ajouter que le Comité était conscient de la situation difficile dans laquelle se trouve la Libye. Il a ajouté que pour aider la Libye, le Comité a besoin d’informations précises sur la situation exacte qui règne dans le pays et sur les difficultés qu’il rencontre pour donner effets aux droits des personnes dont les droits sont protégés par la Convention.
Un autre expert a indiqué que le Comité allait évaluer les restrictions apportées aux droits des migrants et de leurs familles et émettre des recommandations pour y remédier. Il a été souligné que le Comité était là pour aider les États à appliquer la Convention, et non pour les juger, et qu’il pouvait, dans ses recommandations, demander à la communauté internationale d’aider les États à appliquer la Convention.
Une experte a rappelé que le Comité avait, en 2017, alerté la communauté internationale sur le fait que des migrants avaient été vendus comme esclaves en Libye. L’experte a demandé ce que le Gouvernement avait fait en faveur des personnes concernées et, plus généralement, pour mettre fin à de telles pratiques.
Un expert s’est dit très préoccupé par l’existence en Libye de centres de détention illégaux où des migrants et demandeurs d’asile sont soumis à des conditions inhumaines, y compris la torture et le manque de nourriture et d’hygiène. L’expert s’est enquis de la supervision exercée sur ces centres par les pouvoirs publics et des mesures prises par le Gouvernement pour faire respecter le droit des migrants qui sont arrêtés de comparaître rapidement en justice (conformément à l’article 16-6 de la Convention). Le même expert a regretté que les femmes migrantes et les mineurs migrants non accompagnés ne soient pas reconnus par la Libye comme devant bénéficier de mesures de protection renforcée. Il a souligné les risques de violence sexuelle auxquels les femmes migrantes sont exposées.
Un autre expert a observé que certains migrants, originaires généralement de pays voisins, choisissent la Libye comme destination pour le travail: il a voulu savoir si les droits de ces migrants, tels que définis par les accords passés avec les pays concernés, étaient respectés. Quant aux migrants qui se rendent en Libye pour traverser la Méditerranée, a poursuivi l’expert, ils rencontrent des difficultés bien documentées par la presse internationale. L’expert a demandé quels efforts le Gouvernement déployait pour traiter ces migrants d’une manière conforme aux exigences de la Convention.
M. Ahmadou Tall, Président du Comité, a insisté sur la nécessité de protéger la vie des migrants et d’assurer leur sécurité physique. Il a demandé sur quelle assistance diplomatique et consulaire les autorités libyennes pouvaient compter de la part des pays d’origine des migrants pour organiser les rapatriements, le cas échéant. Le Président s’est en outre enquis des mesures prises par les autorités pour lutter contre la détention arbitraire de migrants par des bandes armées. M. Tall a rappelé que le Comité avait été consterné par les informations faisant état de la réduction en esclavage de migrants en Libye.
M. Tall s’est par la suite réjoui qu’un projet de loi soit en préparation aux termes duquel les droits de migrants seront définis conformément aux dispositions de la Convention. Le Président du Comité a rappelé en particulier que l’article 8 de la Convention stipule que « les travailleurs migrants et les membres de leur famille sont libres de quitter tout État ». Il a recommandé de dépénaliser l’immigration irrégulière et d’autoriser tout un chacun à quitter la Libye.
D’autres questions des experts ont porté sur l’indépendance de l’institution nationale de droits de l’homme et sur la possibilité qu’ont ou non les migrants de quitter les « refuges » où ils sont placés.
La question des modalités de coopération entre la Libye et l’Union européenne dans la gestion des migrations a été posée à plusieurs reprises par les experts du Comité, et la délégation a été priée de dire quelle était la priorité de la Libye dans ses accords bilatéraux avec des pays de l’Union européenne. Un expert a souligné que le contenu des accords entre la Libye et l’Union européenne est très important dans un contexte où l’Europe s’apprête à dresser un mur virtuel pour empêcher les migrations.
L’an dernier, 197 migrants en route pour l’Europe sont décédés dans les eaux libyennes, a déclaré un expert, avant de s’enquérir de l’existence de mécanismes permettant de coordonner les opérations de recherche et de sauvetage et, le cas échéant, d’identifier les dépouilles des migrants décédés en mer.
Des rapports de la Mission d'appui des Nations unies en Libye font état de mauvais traitements systématiquement infligés aux migrants détenus, voire d’actes de torture et de mise en esclavage, a rappelé un membre du Comité.
Un expert a fait observer que la présentation de la situation en Libye faite par la délégation était très différente de l’image donnée par d’autres sources dont dispose le Comité. Il a voulu savoir quelles recommandations la délégation émettrait si elle était, elle-même, à la place du Comité.
Réponses de la délégation
La délégation a d’abord remercié les membres du Comité de leur collaboration pour aider la Libye à appliquer la Convention. Elle a ensuite précisé la place de la Convention dans l’ordre juridique interne en indiquant que les conventions internationales, une fois ratifiées par le pays, font partie du droit national et priment sur le droit interne, sauf sur la Constitution, qui reste la référence principale. La Constitution libyenne affirme, entre autres principes de base, le principe de non-discrimination, a souligné la délégation.
La délégation a aussi précisé que toutes les personnes qui séjournent légalement en Libye sont protégés par la loi contre la discrimination telle que définie par la Convention. La disparition forcée est, elle aussi, érigée en crime, a ajouté la délégation.
Après la ratification de la Convention, la législation libyenne a été mises en conformité avec cet instrument, notamment pour ce qui est de la loi sur le travail et des textes relatifs à l’interdiction de la torture.
Les migrations irrégulières ou clandestines sont régies par une loi spécifique depuis 2010; des tribunaux et des parquet spécialisés ont été créés pour appliquer cette loi, a ensuite indiqué la délégation. L’entrée et le séjour en Libye sans document valable sont considérés comme des infractions pénales vu les problèmes que rencontre la Libye en matière d’infiltration par des terroristes, a-t-elle précisé. Un règlement s’applique aux étrangers entrés de manière irrégulière, afin de juguler la criminalité associée à ce phénomène.
Quant à la suite donnée aux recommandations du Haut-Commissariat, la délégation a indiqué que la recommandation portant sur la création d’un Ministère des migrations avait été appliquée. Ce Ministère est aussi responsable des personnes déplacées à l’intérieur du pays.
Le Conseil national des libertés civiles et des droits de l’homme est indépendant du pouvoir exécutif, a en outre indiqué la délégation.
Pour sensibiliser la population, les fonctionnaires et les travailleurs migrants à leurs droits et obligations au titre de la Convention, le Ministère de l’intérieur a décidé de placer la formation au cœur de son action, parallèlement à la stratégie nationale lancée par le Ministère du travail pour informer les travailleurs migrants de leurs droits. Les fonctionnaires en contact avec des migrants en situation irrégulière – et en particulier les gardes-côtes – sont tenus de suivre des formations continues en matière de droits de l’homme, a précisé la délégation.
En dépit des divisions que connaît la Libye, le pouvoir judiciaire libyen – y compris pour ce qui concerne les prud’hommes – est indépendant et accessible gratuitement pour tous les justiciables, a assuré la délégation.
Les mineurs non accompagnés en provenance de Gambie et du Nigéria, en particulier, sont nombreux, a confirmé la délégation en réponse à la question d’une experte. Elle a fait savoir que les autorités libyennes collaboraient avec les ambassades de ces pays pour organiser le retour des jeunes migrants.
La délégation a aussi confirmé que des policiers libyens ont bel et bien été traduits en justice pour avoir exploité des migrants. En outre, une commission est mandatée pour enquêter sur toute accusation de collusion entre des fonctionnaires et des groupes criminels.
La délégation a assuré que les migrants en situation irrégulière ne sont pas placés systématiquement en détention. Les centres d’accueil pour migrants leur prodiguent une aide médicale, entre autres. La plupart de ces centres sont gérés par le Gouvernement en coopération avec le Croissant-Rouge et Médecins sans frontières.
Les migrants en situation irrégulière sont victimes de nombreuses violations de leurs droits, a admis la délégation. Mais elle a assuré que la justice libyenne poursuivait les auteurs de ces violations.
La délégation a assuré qu’il n’y a pas de preuves de l’existence de marchés d’esclaves en Libye. Elle a regretté les exagérations médiatiques dans ce domaine et a assuré que si de tels faits étaient avérés dans des centres, les responsables en seraient punis.
La délégation a ensuite insisté sur le fait que la traite des êtres humains est sanctionnée par le Code pénal et que les victimes de ce crime bénéficient d’une assistance de la part de l’État. La coopération avec les pays d’origine et de destination de la traite consiste en accords bilatéraux avec les pays voisins.
Les migrants en situation régulière bénéficient, si nécessaire, de toutes les garanties en matière de procès équitable, y compris pour ce qui est des services d’interprètes, a poursuivi la délégation. Tous les migrants peuvent contester en justice une décision de refoulement les concernant. Tous les travailleurs migrants en situation régulière jouissent des mêmes droits au travail que les citoyens libyens, a également souligné la délégation.
De même, tous les enfants résidents, y compris les enfants étrangers, ont le droit d’être scolarisés gratuitement. Quant aux soins de santé de base, ils sont gratuits pour tous, sans discrimination.
En outre, si la Libye n’abrite aucun réfugié, il est néanmoins question d’adopter une loi régissant ce statut, a fait savoir la délégation.
Le Comité a aussi été informé de ce que les Libyens expatriés ont le droit de voter lors des scrutins organisés au pays.
La délégation a précisé que la Libye n’avait pas ratifié le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture, qui vise en particulier la création d’un système de visite de lieux de détention. Mais cela n’empêche pas que les autorités libyennes laissent les observateurs internationaux visiter les prisons et autres lieux de détention dans le pays. Les autorités ont aussi créé une commission d’enquête sur les détentions illégales. D’autre part, la loi n° 10 de 2013 criminalise la disparition forcée, a rappelé la délégation.
La délégation a indiqué d’autre part que le Ministère de l’intérieur avait décidé d’autoriser les observateurs internationaux à visiter les refuges pour migrants.
Pour faire face à la crise migratoire, il faut consentir des efforts concertés aux niveaux régional et international en appui à la Libye, a souligné la délégation. Si la liberté de mouvement fait partie des droits de l’homme, elle n’en doit pas moins être encadrée, a-t-elle déclaré. Les pays d’origine des migrations devraient être aidés à améliorer leur situation économique, a-t-elle recommandé.
La délégation a par la suite déclaré que la Libye n’avait pas du tout l’intention de dépénaliser l’entrée et la sortie illégale de son territoire, vu les problèmes sécuritaires qui sont en jeu. Elle a ajouté ne pas connaître de pays qui ait renoncé à demander aux migrants de disposer de papiers en règle pour entrer sur leur territoire.
La Libye est confrontée à des problèmes très importants, notamment le terrorisme et l’instabilité sécuritaire, qui empêchent la réalisation des droits de l’homme, a ensuite rappelé la délégation. L’application de la Convention dépend aussi de la démobilisation des membres des milices et de leur intégration dans un plan de développement, a-t-elle indiqué. La délégation a demandé à la communauté internationale d’apporter à son pays une aide concrète dans ce domaine. Pour unifier la Libye et créer des institutions garantes des droits de l’homme, le dialogue interlibyen doit aboutir, a insisté la délégation.
La stabilité du pays et sa situation sécuritaire conditionnent l’application intégrale par la Libye de ses obligations internationales en matière de droits de l’homme et de libertés fondamentales, a insisté la délégation à plusieurs reprises.
La délégation a déclaré que la plupart des accords bilatéraux de la Libye concernent la migration illégale, contre laquelle le pays s’efforce de lutter dans le respect des normes internationales. L’accord entre la Libye et les pays voisins contre la migration illégale a notamment abouti à l’ouverture, au Tchad, d’un centre d’étude de ce phénomène.
La délégation a enfin indiqué qu’elle ne disposait pas de statistiques sur le nombre de décès de migrants en mer, ni sur le nombre de migrants en situation irrégulière en Libye.
Remarques de conclusion
MME DZUMHUR a espéré que les recommandations du Comité permettraient à la Libye de mieux appliquer la Convention et l’encourageraient à ratifier d’autres instruments internationaux des droits de l’homme. Elle a recommandé que la Libye prenne en compte le fait que le Comité est à sa disposition pour l’aider à remplir ses obligations au titre de la Convention.
M. FRASHERI a salué l’engagement et la bonne volonté de la délégation libyenne, malgré une situation tendue dans le pays. Le corapporteur s’est ensuite dit satisfait de constater que la Libye avait l’intention d’ouvrir l’accès des centres de migrants aux institutions internationales. Il a assuré la délégation de la volonté du Comité d’aider le Gouvernement libyen à renforcer ses capacités.
M. ABOUSALAH a déclaré, en réponse à la question d’un expert, que les recommandations qui pourraient aider son pays devraient porter sur la manière de bloquer les migrations irrégulières venant de la frontière sud du pays; l’octroi de moyens techniques pour identifier les documents falsifiés; et la prévention des départs dans les pays d’origine. Il a espéré que les recommandations du Comité seraient réalistes et pratiques, et qu’elles tiendraient compte de la réalité du terrain. La Libye s’efforce d’assurer la sécurité des migrants, y compris des migrants en situation irrégulière, contre la violence des bandes armées, a assuré le Ministre adjoint.
M. Abousalah a aussi recommandé que la communauté internationale s’attaque aux racines du problème des migrations irrégulières en appliquant, notamment, le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et l’Agenda 2063, « L’avenir que nous voulons » pour l’Afrique.
M. TALL s’est félicité de ce dialogue ouvert avec la délégation et s’est dit convaincu que la Libye continuerait de prendre des mesures pour donner effet aux dispositions de la Convention, de même qu’aux recommandations du Comité.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
CMW/19/5F