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LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT TIENT UN DÉBAT THÉMATIQUE SUR LE DÉSARMEMENT NUCLÉAIRE

Compte rendu de séance

La Conférence du désarmement a entendu aujourd'hui les interventions de 17 délégations dans le cadre du premier d'une série de débats sur chacun des points de son ordre du jour. Le débat de cette semaine est consacré aux points 1 et 2 de l'ordre du jour de la Conférence, qui portent, respectivement, sur la cessation de la course aux armements nucléaires et le désarmement nucléaire, et sur la prévention de la guerre nucléaire, y compris toutes les questions qui y sont liées.

La Fédération de Russie et les États-Unis ont notamment attiré l'attention sur les efforts menés par les deux pays pour réduire leurs arsenaux nucléaires. Plusieurs membres de la Conférence ont souligné la responsabilité des puissances nucléaires, qu'il s'agisse de celles qui sont parties au Traité de non-prolifération nucléaire que celles qui ne le sont pas notamment en ce qui concerne la transparence s’agissant de leurs stocks d’armes nucléaires.

Les membres de la Conférence du désarmement ont souligné leurs priorités s'agissant des travaux de la Conférence dans le domaine du désarmement nucléaire, plusieurs estimant que la négociation d'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires ou autres dispositifs explosifs nucléaires (TIPMF) doit être la prochaine étape dans les travaux de fond de la Conférence s'inscrivant dans ses efforts dans le domaine du désarmement nucléaire. D'autres ont insisté sur la création d'un comité spécial chargé d'examiner quant au fond la question du désarmement nucléaire.

Outre les États-Unis et la Fédération de Russie, des déclarations ont été faites par les pays suivants: Syrie, Italie, Égypte, Argentine, Iraq (au nom du Groupe des 21 pays en développement membres de la Conférence), Brésil, France, Australie, Japon, Israël, Suède, Pays-Bas, Mexique, Norvège et Nouvelle-Zélande.

En début de séance, le Président de la Conférence, l'Ambassadeur Park In- kook, a exprimé ses sincères condoléances aux peuples et aux Gouvernements de la Fédération de Russie et du Bangladesh pour les nombreuses victimes d'effondrements d'édifices dans ces deux pays.


À sa prochaine séance plénière, le jeudi 2 mars à 10 heures, la Conférence du désarmement devrait se pencher sur les mesures futures de désarmement.

Déclarations

M. BASHAR JAAFARI (Syrie) a déploré les reculs préoccupants de l'an dernier marqués par l'incapacité de parvenir à l'adoption de mesures de désarmement nucléaire dans le cadre de la Conférence d'examen du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) et du Sommet mondial. Il a rappelé qu'entre les Conférences d'examen de 1995 et de 2000, tous les États arabes qui ne l'avaient pas fait sont devenus parties au TNP. Il a aussi rappelé qu'en 2005, l'Assemblée générale a de nouveau appelé à la création d'une zone exempte d'armes nucléaires. En dépit de ces développements internationaux et régionaux, Israël demeure le seul État du Moyen Orient qui n'ait pas ratifié le TNP et refuse de soumettre ses installations au régime de garanties de l'Agence internationale de l'énergie atomique. En même temps, d'importantes puissances nucléaires continuent de fournir à Israël une technologie nucléaire de pointe. En outre, Israël continue d’ignorer la volonté de la communauté internationale et rejette ses déchets nucléaires dans le Golan syrien. La Syrie continue d'œuvrer avec détermination à faire du Moyen Orient une zone exempte d'armes de destruction massive.

La Syrie est disposée à entamer des travaux d'ensemble sur un programme de travail en se fondant sur la proposition des cinq ambassadeurs, qui reste la meilleure base de travail. Le désarmement nucléaire continue d'être la première priorité de la Syrie et la création d'un organe subsidiaire sur le désarmement nucléaire constitue pour elle une exigence minimum.

M. CARLO TREZZA (Italie) a rappelé les succès remportés par le passé par la Conférence, en particulier dans le domaine des armes de destruction massive. Il a souligné que c'est à Genève qu'on est parvenu au Traité de non-prolifération nucléaire devant mettre fin à la prolifération horizontale des armes nucléaires et à limiter à cinq le nombre d'États autorisés à maintenir des arsenaux nucléaires. Néanmoins, le terrorisme nucléaire demeure une menace possible. Il a aussi déploré qu'un pays ait annoncé récemment son retrait du TNP et déclaré qu'il possédait des armes nucléaires, et que des activités nucléaires clandestines aient fait surface. Les résultats mitigés obtenus jusqu'à présent et les difficultés persistantes porte l'Italie à estimer que, malheureusement, une interdiction complète des armes nucléaires par le biais d'un unique engagement multilatéral n'est pas encore à notre portée. Une approche par étapes serait plus réaliste.

Au cours des dernières années, de nouvelles menaces sont apparues, a poursuivi le représentant italien; le terrorisme international a fait la démonstration de ses capacités tragiques, et les activités et le trafic nucléaires clandestins ont fait surgir les risques que représenterait la maîtrise du cycle complet de la production de combustible nucléaire. L'Italie partage par conséquent l'aspiration de ceux qui prônent davantage d'efforts visant à éliminer les armes nucléaires. Elle souhaite la création, au sein de la Conférence, d'organes subsidiaires, dont l'un serait chargé du désarmement nucléaire. La négociation d'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles demeure en outre une priorité pour l'Italie.

M. SAMEH SHOUKRY (Égypte) a déclaré que l'Égypte fait partie des pays qui souhaitent préserver le cadre multilatéral dans le domaine du désarmement. Il a regretté à cet égard le manque de volonté politique de la part de certains États membres. Il a souligné que pour que la Conférence puisse avancer, il faut s'assurer que les intérêts et priorités de toutes les parties soient pris en compte. Pour l'Égypte, la priorité demeure le désarmement nucléaire aux plans régional et international. Tant qu'il y aura des armes nucléaires, il n'y aura pas de paix et de stabilité dans le monde.

L'Égypte est convaincue de l'importance du Traité de non-prolifération nucléaire en tant qu'élément essentiel des efforts à mener dans le domaine du désarmement. Pour leur part, les pays arabes on rejeté l'option nucléaire en adhérant au TNP et ils appuient l'établissement d'une zone exempte d'armes nucléaires au Moyen Orient. M. Shoukry a rappelé les appels lancés à Israël pour qu'il adhère au TNP et qu'il place ses installations sous le régime de garanties de l'Agence internationale de l'énergie atomique. C'est pourquoi l'Égypte est attachée à l'adoption de mesures concrètes visant à assurer l'universalisation du TNP.

M. VALÉRY LOSHININ (Fédération de Russie) a déclaré que sa délégation ne rejetterait pas la proposition des «cinq ambassadeurs» à condition qu'un consensus puisse être obtenu sur cette base. Elle ne rejette pas non plus le mandat proposé concernant les travaux sur le désarmement nucléaire. La Russie est consciente de l'importance de cette question pour la communauté internationale et confirme son engagement en faveur de l'article 6 du Traité de non-prolifération nucléaire. M. Loshinin a souligné que la mise en œuvre des obligations de la Russie s'agissant de la réduction de son arsenal nucléaire se poursuit à la fois dans le cadre des accords intervenus avec les États-Unis et de manière unilatérale. Ainsi, quantitativement, des progrès importants sont en train d'être réalisés en matière de désarmement nucléaire, la Fédération de Russie ayant divisé par cinq ses stocks d'armes nucléaires depuis 1991.

M. Loshinin a par ailleurs souligné que la Russie accorde une importance particulière à l'entrée en vigueur du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires, qu'elle a pour sa part ratifié. Ce traité est à même de renforcer le caractère irréversible des réductions en cours des arsenaux nucléaires et revêt une grande importance pour la sécurité internationale et la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive. La Fédération de Russie reste attachée à un renforcement du TNP et à respecter ses engagements en vertu de l'article 6 du Traité, qui est un élément irremplaçable de la paix et de la sécurité internationales. Les nouvelles menaces qui pèsent sur le TNP doivent être levées sur la base de ses propres dispositions, a suggéré le représentant russe. La Russie lance un appel à tous les États afin qu'ils respectent leurs obligations en vertu du Traité.

M. MARCELO VALLE FONROUGE (Argentine) a souhaité commenter et réaffirmer les déclarations faites précédemment par son pays sur la question du désarmement nucléaire. Il a rappelé que les États dotés de l'arme nucléaire doivent tenir compte de l'engagement sans équivoque en faveur des objectifs du désarmement nucléaire. Un ensemble de mesures pratiques peut être pris dans le cadre d'un effort systématique et progressif pour mettre en œuvre l'élimination totale des armes nucléaires, notamment les appels aux signatures et ratifications nécessaires à l'entrée en vigueur du Traité d'interdiction complète d'essais nucléaires et le commencement immédiat de négociations d'un traité en interdisant la production de matières fissiles. Le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires ne met pas fin à la prolifération mais offre le plus important système de détection et de surveillance sur d'éventuels centres de fabrication et son «annulation» enverrait de mauvais signaux aux «proliférateurs». L'Argentine incite les États à prendre aussi rapidement que possible les mesures nécessaires en vue de l'universalisation de ce Traité et réitère la nécessité de maintenir un moratoire sur les essais d'armes nucléaires. Un accord sur un «non recours en premier à l'arme nucléaire» est la première mesure et la condition sine qua non pour parvenir au désarmement nucléaire général et complet.

L'Argentine rejette les arguments qui conditionnent les avancées dans le domaine du désarmement nucléaire aux progrès dans le domaine des armes classiques. Elle déplore en outre les doctrines de sécurité qui envisagent le recours aux armes nucléaires. De telles politiques peuvent nuire à l'efficacité des efforts en matière de non-prolifération horizontale. Le représentant argentin a par ailleurs souligné que la mesure la plus appropriée contre terrorisme nucléaire est encore le désarmement nucléaire général et complet. En outre, les zones exemptes d'armes nucléaires contribuent de manière décisive à la paix et à la sécurité internationales et l'Argentine appelle à une adhésion pleine et entière à l'établissement de zones exemptes d'armes nucléaires, tant des États appartenant aux régions concernées que des puissances nucléaires. De l'avis de l'Argentine, le recours aux armes nucléaires comme défense légitime en réponse à une attaque ayant recours à des armes conventionnelles ne peut pas être entérinée par le droit international car il ne respecte pas le principe de proportionnalité des mesures de défense reconnues par la Charte des Nations Unies. M. Valle Fonrouge a lancé un appel aux États dotés de l'arme nucléaire afin qu'ils revoient leurs déclarations interprétatives formulées à l'occasion de la signature des Protocoles additionnels au Traité de Tlatelolco, en vue de les retirer. L'Argentine est par ailleurs favorable à la création, au sein de la Conférence du désarmement, d'un comité spécial sur les garanties négatives de sécurité.

M. BAHA AL-SHIBIB (Iraq, au nom du Groupe des 21) a souligné que la question du désarmement nucléaire revêtait une importance particulière pour le «Groupe des 21» (groupe de pays en développement). Ces pays regrettent que la communauté internationale n'ait pu parvenir l'an dernier à des accords sur les questions de désarmement et de non-prolifération nucléaires. Pour eux, la seule existence d'armes nucléaires et la possibilité d'y recourir ou la menace d'y recourir représentent un danger permanent pour l'humanité. Le Groupe des 21 souligne que le désarmement nucléaire demeure la priorité la plus élevée de la Conférence. Ils regrettent le manque de volonté politique qui a empêché la Conférence d'examen de 2005 du TNP de réaliser des résultats substantiels. Ils invitent tous les États à pleinement respecter leurs engagements en matière de désarmement nucléaire et de non-prolifération nucléaire et de s'abstenir de tout acte qui pourrait mener à une nouvelle course aux armements nucléaires, telle que le développement de nouvelles armes nucléaires ou de nouveaux types des armes nucléaires
ou de leur modernisation.

En conclusion, M. Al-Shibib a souligné que le Groupe des 21 était vivement préoccupé par l'impasse dans laquelle la conférence continue de s'enfermer et appelle de nouveau les États membres de faire preuve de la volonté politique qui permettra à la Conférence de reprendre ses travaux de fond en créant immédiatement un comité spécial sur la question urgente du désarmement nucléaire.

M. CARLOS ANTONIO DA ROCHA PARANHOS (Brésil) a déploré qu'aussi peu de progrès ait été réalisé ces dernières années sur la question du désarmement nucléaire. Le manque de volonté politique dans un petit nombre de capitales de respecter ne serait-ce que ce qui avaient été convenu au sein de la Conférence dans les années 90 a été le principal obstacle à tout progrès dans ses travaux, comme en témoigne le fait que le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires ne soit pas encore entré en vigueur, et que la Conférence n'ait pas été en mesure de mettre sur pied un comité spécial pour négocier un traité d'interdiction de la production de matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires. L'absence de résultats au sein de la Conférence est la conséquence évidente d'un manque de volonté politique.

La situation s'est encore aggravée du fait que les États non dotés de l'arme nucléaire constatent chez les puissances nucléaires se démarquent clairement des engagements qu'ils ont pris en matière de désarmement nucléaire, a souligné le représentant brésilien, qui a rappelé que le fait de rendre compte de la mise en œuvre de leurs engagements en matière de désarmement nucléaire n'est pas une «concession» de la part des puissances nucléaires mais une obligation. La transparence dans le partage de l'information et la volonté politique devraient être les éléments principaux de toute évolution dans ce domaine.

M. FRANÇOIS RIVASSEAU (France) a déclaré que, dans le cadre du calendrier de débats structurés et approfondis envisagés pour 2006, il fallait éviter de répéter encore une fois des positions bien connues sur un des points génériques de l'ordre du jour qui n'a fait l'objet d'aucune proposition identifiée de sujet concret, à l'exception du traité d'interdiction de la production de matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires ou autres dispositifs explosifs nucléaires (TIPMF). Le représentant français a souligné que sa délégation n'avait pas de difficultés de substance à venir aujourd'hui encore informer la Conférence du désarmement de son bilan en terme de désarmement nucléaire qui s'inscrit dans le cadre des obligations contractées dans le Traité de non-prolifération nucléaire. M. Rivasseau a qualifié de prometteuse la voie qui identifierait les véritables défis du jour en matière nucléaire. Les crises de prolifération nucléaire constituent aujourd'hui un des principaux défis à la sécurité internationale; au cours des deux dernières décennies, plusieurs États parties du TNP, non dotés d'armes nucléaires, ont violé leurs obligations et développé des programmes nucléaires clandestins. Le représentant français a suggéré que la Conférence du désarmement pourrait être encouragée à jouer pleinement son rôle dans ce domaine. La France quant à elle reste pleinement déterminé à poursuivre l'application de l'ensemble des dispositions du TNP et de ses trois piliers (désarmement, non prolifération et usages pacifiques) et à travailler à son universalité.

Un thème paraît avoir été identifié comme étant le plus mûr et le plus propice au lancement prochain d'une négociation: le TIPMF. La France considère que le «Cut-off» [interdiction de toute production future de matières fissiles - ndlr] constitue logiquement la prochaine avancée tangible et concrète à laquelle peut contribuer la Conférence s'agissant du désarmement nucléaire. Il a reconnu que le «Cut-off» ne satisfera que marginalement les attentes en matière de non prolifération, en particulier de la part des États non dotés de l'arme nucléaire. L'établissement des protocoles additionnels qui, avec le système de garanties généralisées, constituent désormais le standard de la vérification, d'une part, les essais nucléaires en Asie du Sud, d'autre part, dessinent un nouveau paysage. La vérification de la non prolifération s'exerce désormais indépendamment du TIPMF. Quant aux États d'Asie du Sud, leur situation relève dorénavant d'une problématique de désarmement nucléaire. Le «Cut-off» apparaît d'abord comme un traité de désarmement nucléaire à l'égal du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires. Ainsi, pour la France, le désarmement nucléaire c'est le «Cut-off». «Relique d'une situation qui n'existe plus, la revendication d'un comité ad hoc sur le désarmement nucléaire parallèle à celui sur le Cut-off n'a guère de sens à nos yeux», a précisé le représentant français. Pour certains États toutefois, la création d'un comité spécial sur le désarmement nucléaire, de par son caractère de surenchère, conserve un avantage tactique. La France respecte cette approche qui repose sur des perceptions de sécurité nationales légitimes. Mais, M. Rivasseau a souligné que «c'est lorsque nous pourrons discuter avec franchise les réserves que le lancement du Cut-off inspire à certains d'entre nous, pour des raisons respectables, que nous pourrons chercher à les lever».

M. CRAIG MACLACHLAN (Australie) a souligné que son pays est attaché à l'objectif du désarmement nucléaire par étapes équilibrées et progressives. Tous les États ont eu un rôle à jouer, mais il revient aux États dotés de l'arme nucléaire de prendre les devants en réduisant leurs arsenaux. Il est important de noter que plusieurs de ces États ont pris des mesures en faveur du désarmement nucléaire, mais ils devraient mener davantage efforts, en toute transparence et de manière irréversible, vers l'élimination des armes nucléaires, et ainsi respecter leur part de l'accord qu'ils ont passé avec les États non dotés de l'arme nucléaire en vertu du Traité de non-prolifération nucléaire.

Pour sa part, l'Australie a soutient depuis longtemps les efforts visant à favoriser le désarmement nucléaire, et estime qu'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles renforcerait le désarmement et la non-prolifération en plafonnant la production de matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires. L'entrée en vigueur du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires contribuerait en outre au désarmement nucléaire par une interdiction permanente des essais d'armes nucléaires. Les moratoires sont souhaitables, mais ils ne sauraient se substituer au Traité.

M. YOSHIKI MINE (Japon) a déclaré que tous les États membres de la Conférence doivent unir leurs efforts pour améliorer la situation actuelle au sujet du désarmement nucléaire. Le Japon accorde la plus haute importance au désarmement nucléaire; étant le seul pays à avoir souffert la dévastation nucléaire, le pays est investi d'une responsabilité morale envers la communauté internationale pour faire activement campagne en faveur de l'élimination des armes nucléaires. La prochaine Conférence d'examen du TNP en 2010 fournira une excellente occasion pour les États-Unis et la Russie de prendre de nouvelles mesures en matière de désarmement en vertu du Traité de Moscou et de procéder à des réductions de leurs armes nucléaires au-delà des dispositions dudit traité. Le Japon espère que d'autres États dotés de l'arme nucléaire feront également des efforts pour réduire leurs arsenaux nucléaires. En outre, il faut davantage de transparence en matière de désarmement nucléaire, et la Conférence offre une bonne possibilité aux États dotés de l'arme nucléaire d'informer les membres sur des efforts de réduction des arsenaux nucléaires.

Pour sa part, le Japon estime que la Conférence devrait commencer les négociations sur un traité d'interdiction de la production de matières fissiles aussitôt que possible, car il s'agit de la mesure multilatérale de désarmement la plus réaliste envisagée à l'heure actuelle. En conclusion, le Japon a invité tous les États qui ne sont pas parties au TNP à y adhérer en tant qu'États non dotés de l'arme nucléaire, sans retard et sans conditions. De même, tous les États qui ne sont pas parties au Traité d'interdiction complète des essais nucléaires devraient le signer et le ratifier le plus tôt possible en vue de son entrée en vigueur.

M. THOMAS CYNKIN (États-Unis), revenant sur les efforts communs de la Russie et des États-Unis en matière de réduction des armements, a souligné que, depuis 1992, les États-Unis ont dépensé plus que 9 milliards de dollars d'aide dans le domaine de la non-prolifération et de la réduction des risques dans les États d'ex-Union soviétique.

Les États-Unis mènent leurs propres programmes de désarmement nucléaire, et M. Cynkin, dans un souci de transparence, a notamment indiqué que son pays avait démantelé plus de 13 000 armes nucléaires depuis 1988. Quand le traité de START a été signé en 1991, les États-Unis et la Russie avaient chacun déployé plus de 10 000 ogives stratégiques, et tous les deux ont ramené ce nombre en dessous de 6000 en 2001. Les ogives nucléaires stratégiques opérationnelles actuellement déployées par les États-Unis et la Russie seront réduites encore entre 1700 et 2200 d'ici 2012. Lorsque les réductions prévues par le Traité de Moscou, auront été achevées le nombre d'ogives nucléaires stratégiques des États-Unis ne représentera plus que le cinquième de celui de 1991. Au cours de la même période, le volume total des stocks nucléaires des États-Unis se sont réduits. Au total, les armes nucléaires non-stratégiques des États-Unis dans le cadre de l'OTAN ont été réduites de presque 90% depuis la chute du mur de Berlin. Les bâtiments de surface de la marine des États-Unis ne transportent plus d'armes nucléaires. Et les réductions se poursuivent. L'automne dernier, lorsque les États-Unis ont annoncé qu'ils désactivaient leurs missiles balistiques intercontinentaux «Peacekeeper», une seule délégation, celle du Bangladesh, en avait pris acte. Cela montre bien que, alors que la Conférence continue d'entendre de nombreux discours vides sur le peu de progrès accomplis en matière de désarmement nucléaire, de telles déclarations sont prononcées en dépit des faits. Tout examen objectif des faits devrait mener à la conclusion que les mesures prises par les États-Unis au cours des 20 dernières années aboutissent à un bilan enviable en matière de désarmement nucléaire.

M. ITZHAK LEVANON (Israël) a déclaré que les informations inexactes et répétitives fournies par le premier orateur de ce matin contraignait sa délégation à apporter des éclaircissements. L'affirmation répétée qu'Israël était opposé à la création d'une zone exempte d'armes de destruction massive au Moyen Orient est inexacte et ne reflète pas la réalité. Israël tient à rappeler à la Conférence qu'il s'associe chaque année au consensus international autour de la résolution sur la création d'une zone exempte d'armes de destruction massive au Moyen Orient. Israël a toutefois maintes fois réitéré les circonstances précises qui sont requises pour la création de cette zone.

M. BASHAR JAAFARI (Syrie) a déclaré que chaque fois que son pays s'efforçait de faire la lumière sur les problèmes du Moyen Orient, il se retrouvait confronté à cette déclaration répétitive d'Israël. Il a souligné que ce n'était pas la Syrie qui affirmait qu'Israël était opposé à la création d'une zone exempte d'armes de destruction massive au Moyen Orient, mais l'arsenal de résolutions internationales sur la question. L'affirmation selon laquelle Israël s'est associé au consensus sur la résolution est inexacte en soi. M. Jaafari a par ailleurs souligné qu'aucune condition ne peut être imposée à un État pour le contraindre à s'associer à la priorité de sauver la paix et la sécurité dans le monde. La première condition exigée par Israël est qu'il doit garder l'arme nucléaire sous la protection de certaines puissances qui ont pourtant affirmé leur attachement au désarmement nucléaire, alors que d'autres États de la région ne pourraient pas acquérir les moyens d'utiliser l'énergie nucléaire à des fins pacifiques. Israël affirme parfois qu'une d'une zone exempte d'armes de destruction massive au Moyen Orient était liée au processus de paix. M. Jaafari a pourtant rappelé que, lors du Sommet arabe à Beyrouth en 2002 tous les États arabes s'étaient engagés à soutenir le processus de paix. La seule partie à rejeter cette attitude est Israël. Il y aurait beaucoup à dire sur la propagande trompeuse d'Israël, a conclu M. Jaafari.

M. ITZHAK LEVANON (Israël) a déclaré qu'Israël ne pensait pas que la Conférence du désarmement était le lieu adéquat pour des échanges sur des questions politiques. Il a par ailleurs précisé qu'Israël avait fait état de circonstances et non de conditions.

MME ELISABET BORSIIN BONNIER (Suède) a rappelé que son pays favorisait l'établissement d'un bilan franc et transparent des efforts déployés par le passé et en cours dans le domaine du désarmement et un débat sur le rôle des armes nucléaires dans les doctrines militaires et sécuritaires. Elle a attiré l'attention sur le risque que des terroristes pourraient acquérir des armes nucléaires, le risque de terrorisme nucléaire. Les États non dotés de l'arme nucléaire peuvent-il avoir des assurances que les installations nucléaires sont entièrement sécurisées? Il y existe par ailleurs le risque de la prolifération, la possibilité que davantage d'États acquièrent l'arme nucléaire. La prolifération a eu lieu et, encore une fois, la possession d'armes nucléaires n'a eu aucune incidence pour prévenir la prolifération.

S'agissant des arsenaux existants, en dépit de sérieux efforts de désarmement, il reste presque 30 000 armes nucléaires dans le monde, dont plus de 25 000 aux États-Unis et dans la Fédération de Russie. Et, plus de dix ans après la fin de la guerre froide, une partie importante des arsenaux stratégiques demeurent en alerte et peuvent être lancés en quelques minutes, avec les risques de lancement non autorisé ou accidentel que cela comporte. Quant aux États dotés de l'arme nucléaire, il a longtemps été estimé qu'il était impératif de maintenir un seuil très élevé pour le recours possible et de favoriser une norme de non-recours. Est-ce bien toujours le cas, s'est demandé la représentante suédoise ? Elle s'est félicitée des interventions faites aujourd'hui par des États dotés de l'arme nucléaire et a invité les autres à faire de même.

M. JOHANNES LANDMAN (Pays Bas) a indiqué les Pays Bas continueraient d'engager les États dotés de l'arme nucléaire à parvenir à l'élimination totale de leurs armes nucléaires. Les Pays Bas reconnaissent l'importance des mesures prises jusqu'ici par des États dotés de l'arme nucléaire, mais estiment qu'il faut faire davantage, étant donné l'importance des arsenaux encore existants. Les informations qui continuent de nous parvenir sur la prolifération dans des pays au bilan suspect, le risque d'armes nucléaires tombant entre les mains d'acteurs non-étatiques, le commerce illicite de matériaux destinés à la fabrication d'armes nucléaires pourraient aboutir à une catastrophe si rien n'est fait.

M. Landman a souligné que les Pays Bas appuient l'établissement d'un organe subsidiaire au sein de la Conférence pour examiner plus avant la question du désarmement nucléaire, dans le cadre d'un processus par étapes. Il a jugé que cela devrait commencer par la négociation d'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles, car un tel traité offre le moyen le plus efficace de réduire la menace de la prolifération illicite de matières fissiles tout en imposant des restrictions sur les États dotés de l'arme nucléaire.

M. PABLO MACEDO (Mexique) a souligné que son pays aimerait entendre des propositions spécifiques dans le cadre de ces débats sur les questions de fond. Il a ajouté que, si des progrès ont été réalisés dans le domaine du désarmement nucléaire, ils restent insuffisants. Le Mexique salue les informations fournies aujourd'hui par les États-Unis et la Fédération de Russie, mais cette information n'était pas uniforme et elle était insuffisante. Il faudrait plus d'informations notamment sur l'état d'alerte et le nombre d'armes existantes, pour avoir une idée claire de ce qu'il reste faire dans ce domaine.

S'adressant à la Conférence en français pour réagir à l'intervention faite ce matin par la France, qui avait estimé que «la revendication d'un comité ad hoc sur le désarmement nucléaire parallèle à celui sur le Cut-off n'a guère de sens à nos yeux», le représentant mexicain a déclaré qu'il ne pouvait accepter cette conclusion. Pour le Mexique, l'établissement d'un comité spécial sur le nucléaire est nécessaire que la Conférence ait entamé ou non les négociations sur un traité d'interdiction de la production de matières fissiles. Il s'agit très précisément de leur complément sauf, bien évidemment, si ces négociations portent aussi sur l'élimination des arsenaux existants. La logique exprimée ce matin par le représentant de la France échappe au Mexique.

M. KJETIL PAULSEN (Norvège) a lui aussi estimé qu'une plus grande transparence serait une précieuse mesure de renforcement de la confiance. La Norvège salue les informations fournies par les États-Unis et la Fédération de Russie sur des mesures spécifiques de désarmement, et les a invités à faire preuve de transparence de manière plus systématique s'agissant de leurs efforts dans le domaine du désarmement. Il faudrait établir un inventaire des armes nucléaires, il doit y avoir des registres. Les États non dotés de l'arme nucléaire on du mal à comprendre pourquoi les informations sur ces armes ne pourraient pas être rendues publiques. Le Traité sur la réduction des armements stratégiques offensifs a été salué et il serait souhaitable qu'il soit renforcé avec des mesures d'irrévocabilité.

M. TIM CAUGHLEY (Nouvelle Zélande) a rappelé que de nombreux engagements juridiques ont été pris au cours des ans, favorisant des progrès effectifs dans le domaine du désarmement nucléaire. Malheureusement, on attend toujours des avancées concertées s'agissant des instruments existants de la part des États dotés de l'arme nucléaire. Mais combien faut-il donc de ces armes hautement destructives et toxiques pour exercer une dissuasion sur un ennemi potentiel, a demandé M. Caughley? Des dizaines de milliers comme aujourd'hui, des milliers comme ce sera peut-être le cas en 2012, des centaines, une poignée? Il fau se pencher non seulement sur les différentes doctrines de sécurité, mais également sur les alliances stratégiques. Des progrès en matière de désarmement nucléaire ne manqueraient pas d'améliorer la sécurité internationale en ce qui concerne la prolifération.

Dans le cadre de tout débat sur le désarmement nucléaire, les principes de transparence et d'irrévocabilité sont des éléments essentiels de négociations de bonne foi, a poursuivi le représentant néo-zélandais. La Nouvelle Zélande salue la conclusion du Traité de Moscou de 2002 en tant que première étape encourageante dans le cadre des processus de désarmement nucléaire. Les États non dotés de l'arme nucléaire ont également leur contribution à apporter au renforcement de la confiance dans le domaine du désarmement nucléaire. Ainsi, outre le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires, la création de zones exempte d'armes nucléaires constituent un symbole puissant pour démontrer à la communauté internationale le renoncement aux armes de destruction massive.

Si des différences demeurent quant aux priorités dans le domaine du désarmement et de la non-prolifération, il est logique d'avancer vers des négociations qui sont à même d'apporter des bénéfices aux deux parties au débat. Pour sa part, la Nouvelle-Zélande estime qu'un traité d'interdiction de la production de matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires ou autres dispositifs explosifs nucléaires constituerait non seulement un acquis important en faveur de la non-prolifération, mais il rapprocherait aussi la Conférence de ses objectifs en matière de désarmement nucléaire.

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