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Le Comité des disparitions forcées ouvre les travaux de sa vingt-huitième session

Compte rendu de séance

 

Le Comité des disparitions forcées a ouvert ce matin les travaux de sa vingt-huitième session, qui se tient à Genève jusqu’au 4 avril prochain et au cours de laquelle il examinera notamment, lors de séances publiques, les rapports initiaux soumis par la Gambie, la République centrafricaine et Malte en application de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées ; deux rapports préparés à sa demande par la Serbie et la Belgique, contenant des renseignements complémentaires sur l’application de la Convention ; et un rapport remis par le Pérou en réponse à une demande ponctuelle du Comité.

La documentation relative à la présente session, en particulier les rapports soumis par les États, est disponible sur la page du site web du Haut-Commissariat aux droits de l’homme consacrée à cette vingt-huitième session.

Dans une déclaration d’ouverture, M. Antti Korkeakivi, Chef de la branche des traités des droits de l’homme au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, a notamment souligné l'importance de la procédure d’action urgente, qui permet au Comité de demander à un État partie de prendre des mesures immédiates pour rechercher une personne disparue et enquêter sur sa disparition. Depuis la dernière session, le Comité a ainsi enregistré 120 nouvelles actions urgentes, ce qui porte le nombre total d'actions urgentes enregistrées depuis 2012 à 2003. Parmi ces cas, 518 ont été classés après la localisation de la personne disparue, y compris 410 personnes retrouvées vivantes, a précisé M. Korkeakivi.

M. Korkeakivi a ensuite souligné que le Congrès mondial sur les disparitions forcées, organisé à Genève il y a deux mois, avait constitué un tournant de la lutte contre les disparitions forcées et encouragé la ratification de la Convention. Le Congrès a abouti à des recommandations concrètes et à des engagements pris par les partenaires du Congrès, notamment par seize États et cinq organisations régionales et internationales.

Pour sa part, M. Olivier de Frouville, Président du Comité, a déploré que le « budget ridicule » alloué au programme des droits humains des Nations Unies compromette, en particulier, le suivi régulier de la procédure d’actions urgentes du Comité – une procédure qui est comme une ligne de vie pour beaucoup de victimes, un habeas corpus international, a-t-il souligné.

Le Comité a enfin entendu le témoignage d’un parent de deux victimes de disparition forcée en Syrie, qui a présenté son parcours depuis quinze ans pour que la lumière soit faite sur ces disparitions – un parcours reflétant la volonté d’utiliser les outils juridiques pour faire face aux crimes contre l’humanité.

 

Demain matin, à partir de 10 heures, le Comité examinera le rapport de la Serbie.

 

Aperçu des déclarations

Ouvrant la session au nom du Secrétaire général des Nations Unies, M. ANTTI KORKEAKIVI, Chef de la branche des traités des droits de l’homme au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, a souligné que, les disparitions forcées restant une violation généralisée des droits de l'homme, il importait d’œuvrer à la ratification universelle de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Dans ce contexte, il s’est félicité que la Pologne soit devenue le soixante-dix-septième État partie à la Convention [en décembre 2024].

M. Korkeakivi a ajouté que la tenue du Congrès mondial sur les disparitions forcées, il y a deux mois à Genève, avait constitué un tournant de la lutte contre les disparitions forcées et encouragé la ratification de la Convention. Le Congrès a rassemblé plus de 620 participants et 1392 en ligne, provenant de 118 pays. Il a abouti à des recommandations concrètes et à des engagements pris par les partenaires du Congrès, notamment par seize États et cinq organisations régionales et internationales. Au titre des activités de suivi du Congrès, M. Korkeakivi a mentionné la création d'un réseau régional en Afrique dirigé par des victimes, l'organisation de réunions de femmes à la recherche de leurs proches, des contributions de la société civile aux sessions du Comité et la création d'un réseau mondial de jeunes contre les disparitions forcées.

Le Congrès, a souligné M. Korkeakivi, a mis en évidence le rôle central des familles des disparus ainsi que des femmes dans la lutte contre les disparitions forcées. Cette réalité, bien connue du Comité, doit être mieux reconnue par tous les acteurs concernés, a-t-il insisté, se réjouissant que le Comité ait commencé les travaux en vue d'élaborer une observation générale sur les femmes et les filles et les disparitions forcées.

M. Korkeakivi a ensuite indiqué que, depuis sa session de septembre 2024, le Comité avait effectué une visite en Colombie, visitant cinq centres de détention et suivant des opérations dans des cimetières, où se trouvaient des corps non identifiés, ainsi que dans un crématorium. Il a ensuite rappelé ce que serait le programme de travail du Comité pour la présente session.

M. Korkeakivi a souligné l'importance de la procédure d’action urgente, qui permet au Comité de demander à un État partie de prendre des mesures immédiates pour rechercher une personne disparue et enquêter sur sa disparition. Depuis la dernière session, le Comité a enregistré 120 nouvelles actions urgentes, ce qui porte le nombre total d'actions urgentes enregistrées depuis 2012 à 2003. Parmi ces cas, 518 ont été classés après la localisation de la personne disparue, y compris 410 personnes retrouvées vivantes. Cela signifie que 1481 actions urgentes restent actives et nécessitent un suivi de la part du Comité.

M. Korkeakivi a mis en évidence le rôle de passerelle que le Comité peut jouer entre les victimes et l'État partie, en relayant des éléments de preuve et des informations que leurs détenteurs ne se sentent pas suffisamment en sécurité pour fournir directement aux autorités.

M. Korkeakivi a par ailleurs regretté que les problèmes de ressources continuent d'affecter le Comité de même que l'ensemble du système des organes de traités. Le Haut-Commissariat fait tout son possible pour que le Comité et les autres organes de traités puissent réaliser leurs mandats, a assuré M. Korkeakivi. Il a cependant souligné que tout indique que la situation de liquidité resterait difficile dans un avenir prévisible. Il a ensuite donné d’autres informations concernant le processus de renforcement des organes conventionnels qui est en cours à New York.

M. Korkeakivi a conclu son allocution en rappelant que l'éradication et la prévention des disparitions forcées exigeaient un engagement sans faille et une action concertée. À cet égard, et comme l'a montré le Congrès mondial, la prise de conscience du problème est en hausse, un réseau mondial se forme et les demandes des victimes à la recherche de leurs proches ne faiblissent pas, a constaté M. Korkeakivi. Le travail du Comité est au cœur de ces efforts : malgré des circonstances difficiles, cet organe fait tout son possible pour obtenir des réponses sur le sort des personnes disparues, en demandant des comptes et des solutions concrètes ; et il cherche avant tout à empêcher les disparitions, a souligné M. Korkeakivi.

M. OLIVIER DE FROUVILLE, Président du Comité, a rappelé que les organes conventionnels, comme les procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme, étaient composés d’experts qui ne sont pas payés par les Nations Unies mais qui dédient une partie de leur temps, en plus de leurs obligations professionnelles, à la mise en œuvre de procédures créées par les États, et dont le travail de fond, au jour le jour, est réalisé par les membres du Haut-Commissariat, qu’il a remerciés.

M. de Frouville a ensuite déploré le fait que les droits humains soient actuellement confrontés à une rhétorique particulièrement vicieuse. Des idéologues nous expliquent ainsi que les faits scientifiques relèvent d’une théorie du complot, et qu’au contraire leur propagande mensongère, fondée sur des faits « alternatifs », est véridique ; ils affirment que défendre les minorités contre la persécution est une forme d’intolérance et qu’au contraire leurs discours de haine qui incitent à la violence relèvent de la liberté d’expression ; ils accusent les juges d’être contre le peuple, et l’État de droit d’être contre la démocratie. Ils disent aussi que le droit international et la justice internationale sont cause de guerres, et que le « deal » sous la contrainte militaire ou économique est un meilleur moyen de faire la paix. Ils prétendent que ce sont eux qui défendent les droits humains, et que les défenseurs des droits humains sont des « terroristes » ou des « ennemis du peuple ».

Or, celles et ceux qui ont travaillé aux côtés des familles de disparus ne sont que trop familiers de cette rhétorique trompeuse, a poursuivi M. de Frouville : les disparus sont bien souvent stigmatisés comme des « nuisances » pour la société voire comme des criminels. En Argentine, les militaires traitaient les mères de disparus de « folles » ; mais ces mères ont continué de brandir les portraits des disparus sur la Place de Mai et aujourd’hui, nous savons très bien que la Raison était de leur côté, que les fous étaient ceux qui étaient capables d’enlever et de torturer 30 000 de leurs concitoyens au nom d’une prétendue « sécurité nationale », a rappelé M. de Frouville.

M. de Frouville a souligné l’importance de continuer à témoigner et de faire résonner cette mémoire. À cet égard, le premier Congrès mondial sur les disparitions forcées a été une extraordinaire démonstration de force et de résilience du mouvement mondial contre les disparitions forcées, a-t-il affirmé. L’expert s’est félicité de l’engagement des acteurs du Congrès : familles de disparus, qui sont venues nombreuses de tous les continents pour témoigner, mais aussi pour échanger leurs expériences, pour partager leurs émotions, leurs défis, leurs combats, l’adversité à laquelle elles font face et les moyens pour la surmonter ; grandes organisations non gouvernementales internationales, particulièrement celles qui ont accompagné et promu la rédaction de la Convention ; organes régionaux de protection des droits de l’homme ; et les seize États qui sont venus publiquement à l’ouverture annoncer leurs engagements pour l’après-Congrès.

Le Congrès est une réussite mais n’est pas une fin en soi ; il est avant tout un processus en cours, qui doit se poursuivre au-delà du mois de janvier, a déclaré M. de Frouville.

On parle beaucoup de réarmement en ce moment, a fait remarquer l’expert. Mais parallèlement à ce réarmement, et de manière indissociable, il faut aussi réhumaniser, a-t-il souligné. La sécurité ne peut pas tenir lieu, à elle seule, de politique ; il ne peut y avoir de développement sans paix, de paix sans développement, et il ne peut y avoir aucun des deux sans les droits humains.

M. de Frouville a déploré que le « budget ridicule » alloué au programme des droits humains des Nations Unies compromette, en particulier, le suivi régulier de la procédure d’actions urgentes du Comité – une procédure qui est comme une ligne de vie pour beaucoup de victimes, un habeas corpus international, a-t-il souligné.

Dans d’autres remarques relatives au renforcement des organes de traités, M. de Frouville a insisté sur le rôle joué par les organisations de la société civile dans l’évaluation éclairée et objective de la situation dans un pays donné. Ainsi, à cette session, nous examinerons des informations de suivi et des renseignements complémentaires fournis par le Panama, la Serbie et la Belgique, mais aussi par le Pérou et l’Argentine – pour ces deux derniers États dans le cadre d’une demande spéciale, faite au regard de développements nouveaux intervenus récemment dans ces deux pays, a-t-il indiqué.

M. de Frouville a enfin cité l’écrivain argentin Julio Cortázar qui, lors d’un colloque à Paris en 1981, évoquait la « présence invisible des milliers de disparus (…) dans cette salle où ils ne sont pas, où ils sont évoqués comme thème de travail […] » et affirmait que « [ces disparus] nous devons les sentir présents et proches, assis au milieu de nous, nous regardant, nous parlant. »

Hommage rendu par le Comité aux victimes de disparition forcée 

M. OBEIDAH DABBAGH, frère et oncle de deux victimes de disparition forcée en Syrie, a remercié le Comité de lui permettre de décrire le combat qu’il a mené pendant quinze ans pour tenter de retrouver ses deux parents, citoyens franco-syriens arrêtés par les autorités syriennes en 2013, victimes ensuite de disparition forcée et d’un calvaire marqué par des tortures atroces, avant qu’ils ne soient déclarés morts par les autorités en 2018.

M. Dabbagh a décrit les démarches entreprises par sa famille auprès des autorités françaises et d’organisations non gouvernementales internationales, ainsi que la plainte qu’elle a déposée auprès de la justice française en 2016. Cette plainte a abouti à une ordonnance de mise en accusation en 2023, renvoyant trois hauts responsables du régime syrien devant les assises pour complicité de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre. Le procès, qui a eu lieu en 2024, a envoyé un message fort : l’impunité des crimes contre l’humanité ne sera pas éternelle. La justice française a qualifié ces crimes et a établi la responsabilité des trois hauts dirigeants en les condamnant à une réclusion criminelle à perpétuité pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre.

M. Dabbagh a insisté sur le fait que son parcours, pour que la lumière soit faite et que justice soit rendue, était avant tout celui d’un combat acharné contre l’oubli, l’impunité et la terreur orchestrée par le régime syrien ; il reflète aussi une volonté inébranlable d’utiliser les outils juridiques français et internationaux pour faire face à des crimes contre l’humanité. M. Dabbagh a espéré que ce procès inciterait d’autres familles de victimes syriennes à poursuivre leur quête de justice, malgré les obstacles.

Enfin, M. Dabbagh a espéré que sa famille pourrait, dans un proche avenir, connaître le lieu où son frère et son neveu ont été inhumés et récupérer leurs dépouilles afin de leur offrir une inhumation digne.

M. FIDELIS KANYONGOLO, membre du Comité, a souligné que le témoignage de M. Dabbagh devait rappeler aux membres du Comité la lourde responsabilité qui est la leur, et celle des autres organes créés en vertu d'instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. Le témoignage de M. Dabbagh montre en effet que le travail des membres du Comité concerne la vie réelle de personnes réelles, et que le Comité doit tenir les États responsables de leurs obligations, en vertu des traités, de respecter et de protéger les droits de l'homme.

De plus, a fait remarquer l’expert, le parcours de M. Dabbagh montre l’utilité de la notion de compétence extraterritoriale dans la poursuite des crimes de disparition forcée, alors que la Syrie n’a pas souscrit au Statut de Rome de la Cour pénale internationale.

 

 

Ce document produit par le Service de l’information des Nations Unies à Genève est destiné à l'information ; il ne constitue pas un document officiel. 

 

 

 

 

CED25.001F

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