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Les autorités policières et judiciaires sont le reflet de nos sociétés et pour mettre fin à l’injustice raciale, il faut comprendre les racines des inégalités actuelles, souligne Michelle Bachelet
Pour mettre fin à la violence policière, il faut comprendre que l'impunité pour les violences commises par la police à l'encontre des personnes d'ascendance africaine n'existe pas dans le vide et que les autorités policières et judiciaires sont le reflet de nos sociétés. Pour mettre fin à l'injustice raciale dans l'application de la loi, il faut aussi comprendre les racines des inégalités actuelles ; il faut se pencher sur les séquelles de l'esclavage et du colonialisme, et avoir conscience des siècles de politiques et de systèmes discriminatoires sur le plan racial qui ont suivi l'abolition officielle de l'esclavage.
C’est ce qu’a expliqué ce matin la Haute-Commissaire aux droits de l’homme, Mme Michelle Bachelet, en présentant au Conseil des droits de l’homme une mise à jour orale concernant l’état d’avancement de son rapport sur « le racisme systémique et les violations du droit international des droits de l’homme commises dont les Africains et les personnes d’ascendance africaine sont victimes de la part des forces de l’ordre, en particulier les faits qui ont entraîné la mort de George Floyd et d’autres Africains et personnes d’ascendance africaine ».
Si le procès du meurtre de George Floyd s’ouvre maintenant, dix mois après les faits, cette occasion cruciale d'obtenir justice est cependant refusée à d'innombrables autres familles, a souligné la Haute-Commissaire.
Le Conseil était aussi saisi ce matin du rapport du Groupe de travail inter-gouvernemental sur l’application effective de la Déclaration et du Programme d’action de Durban sur les travaux de sa dix-huitième session, qui a été présenté par le Représentant permanent du Lesotho à Genève, M. Thabang Matjama, au nom du Président-Rapporteur du Groupe, M. Refiloe Litjobo. Il a notamment indiqué que le Groupe de travail avait noté avec inquiétude que le manque de connaissances du public constitue un obstacle sérieux à la création d'une volonté politique pour l’application de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.
Le Conseil a ensuite ouvert le débat général sur le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en entendant les interventions de plusieurs délégations**. Il importe de prendre conscience de l'héritage des transgressions passées, qui se manifestent souvent par un racisme systémique, et d’y remédier, a-t-il notamment été affirmé. Le racisme et la discrimination sont exacerbés par la crise de la COVID-19, ce dont il faut tenir compte dans la riposte à la pandémie, a-t-il par ailleurs été souligné à plusieurs reprises.
Auparavant, le Conseil avait achevé le débat général sur la Déclaration et le Programme d’action de Vienne, entamé hier. Les délégations* qui ont pris part à ce débat ont une nouvelle fois insisté sur l’indivisibilité et l’interdépendance de tous les droits de l’homme. Dans le contexte de la pandémie actuelle de COVID-19, plusieurs délégations ont dénoncé le « nationalisme vaccinal » qui empêche l’ensemble des pays d’avoir un accès équitable aux vaccins. Des organisations non gouvernementales ont regretté que certains États n’aient pas respecté leurs obligations en matière des droits de l’homme au prétexte de la pandémie.
Les pays suivants ont exercé leur droit de réponse s’agissant de déclarations faites pendant ce débat : Arménie, Maroc, Brésil, Chine, Azerbaïdjan, Algérie et Ukraine.
À 15 heures, le Conseil doit achever son débat général sur le racisme et la discrimination raciale, avant de tenir un dialogue renforcé au sujet de la situation des droits de l’homme en République démocratique du Congo avec la Haute-Commissaire et l’Équipe d’experts internationaux sur la situation au Kasaï.
Suite du débat général sur le s uivi et l’application de la Déclaration et du Programme d’action de Vienne
Plusieurs délégations ont rappelé que l’adoption de la Déclaration et du Programme d’Action de Vienne a traduit un fort engagement de la communauté internationale en faveur de la promotion et de la protection des droits de l’homme. Ces deux documents mettent notamment en exergue l’ambition de la communauté internationale de lutter contre toutes les formes de discrimination et c’est pourquoi il est du devoir de chaque État de s’efforcer de tout mettre en œuvre pour éradiquer ce fléau, a-t-il été souligné. Plus de 25 ans après l’adoption de la Déclaration et du Programme d’action de Vienne, il est regrettable que le racisme et l’intolérance continuent d’être une réalité partout dans le monde et soient même à l’agenda de certains États, a déploré une délégation.
Nombre de délégations ont insisté sur l’importance des principes d’universalité et d’indivisibilité de tous les droits de l’homme tels qu’ils ont été réaffirmés à Vienne. Plusieurs intervenants ont estimé que le droit au développement devait être une priorité car il est une condition à la jouissance des autres droits, y compris civils et politiques.
Dans le contexte de la pandémie de COVID-19, a-t-il été affirmé, il faut que des mesures soient prises pour alléger le service de la dette ou annuler la dette des pays en voie de développement.
Plusieurs organisations non gouvernementales (ONG) ont regretté que certains États n’aient pas respecté leurs obligations en matière de droits de l’homme en utilisant le prétexte de la pandémie. A par ailleurs été maintes fois dénoncé le « nationalisme vaccinal » qui empêche l’ensemble des pays de bénéficier d’un accès équitable aux vaccins. L’initiative « Covax », qui vieille à approvisionner en vaccins les pays les plus pauvres, a toutefois été saluée.
L’objectif du Programme de développement durable à l’horizon 2030, qui est de « ne laisser personne de côté », appelle clairement à protéger les personnes âgées dans le contexte de la pandémie, a souligné une délégation. D’autres ont insisté sur l’attention particulière qu’il convient de porter aux droits des personnes handicapées.
Plusieurs délégations ont dénoncé les violences croissantes à l’encontre des femmes et des enfants dans le contexte de la COVID-19 et ont invité les Etats à prendre davantage de mesures pour les protéger.
Certaines délégations ont en outre déploré que les relations homosexuelles soient toujours criminalisées dans certains pays et ont dénoncé le fait qu’elles y soient même parfois encore passibles de la peine de mort.
Une délégation a regretté que certains Etats utilisent le principe de non-ingérence [dans les affaires intérieures d’un État] pour ne pas rendre de comptes devant le Conseil pour les violations des droits de l’homme commises sur leur territoire.
De nombreux intervenants ont dénoncé de graves violations des droits de l’homme dans différents pays et régions du monde.
*Liste des intervenants : Soudan, Cuba, Israël (au nom d’un groupe de pays), Fédération de Russie, Bahreïn, Israël, Suède, Iran, Algérie, Azerbaïdjan, Syrie, Géorgie, Tunisie, Etats-Unis, Australie, Malawi, Action Canada pour la population et le développement, China Soong Ching Ling Foundation, The Next Century Foundation, Federation for Women and Family Planning , Chinese Association for International Understanding, Asociacion HazteOir.org, International Humanist and Ethical Union, Alsalam Foundation, Zéro pauvre A, European Centre for Law and Justice, The / Centre Européen pour le droit, la justice et les droits de l'homme, Conectas Direitos Humanos, Institute for NGO Research, Association internationale pour l'égalité des femmes,Congregation of Our Lady of Charity of the Good Shepherd, International Human Rights Association of American Minorities (IHRAAM), Synergie féminine pour la paix et le développement durable, International Action for Peace & Sustainable Development, International Federation for the Protection of the Rights of Ethnic, Religious, Linguistic & Other Minorities , Khiam Rehabilitation Center for Victims of Torture, Global Institute for Water, Environment and Health, Commission africaine des promoteurs de la santé et des droits de l'homme, Villages Unis (United Villages), Congrès du monde islamique,Americans for Democracy & Human Rights in Bahrain Inc, Community Human Rights and Advocacy Centre, Institut international pour les droits et le développement, Ingénieurs du monde, Geo Expertise Association, ABC Tamil Oli, iuventum e.V., Sikh Human Rights Group , Association Thendral, Association Bharathi Centre culturel franco-tamoul, Tourner la page, Association culturelle des Tamouls en France,Society for Development and Community Empowerment,World Barua Organization (WBO),Sociedade Maranhense de Direitos Humanos, Liberation, Integrated Youth Empowerment - Common Initiative Group (I.Y.E. – C.I.G.), Organisation internationale pour les pays les moins avancés (OIPMA), Global Welfare Association, Center for Africa Development and Progress, Association des étudiants tamouls de France, Alliance Creative Community Project, Le Pont.
Racisme, discrimination raciale, xénophobie et intolérance qui y est associée : suivi et application de la Déclaration et du Programme d’action de Durban
Présentation de rapports
Le Conseil est saisi du rapport concernant les travaux de la dix-huitième session du Groupe de travail intergouvernemental chargé de faire des recommandations en vue de l’application effective de la Déclaration et du Programme d’action de Durban , qui s’est tenue du 12 au 23 octobre 2020 (A/HRC/46/66).
Au nom de M. REFILOE LITJOBO, Président-Rapporteur du Groupe de travail intergouvernemental chargé de faire des recommandations en vue de l'application effective de la Déclaration et du Programme d'action de Durban, M. THABANG MATJAMA, Représentant permanent du Lesotho auprès des Nations Unies à Genève, a indiqué que le Groupe de travail avait noté avec inquiétude que le manque de connaissances du public constituait un obstacle sérieux à la création d'une volonté politique pour l’application de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.
Le Groupe de travail s’est par ailleurs particulièrement inquiété des effets de la pandémie de COVID-19, qui touche de manière disproportionnée les individus et les groupes confrontés au racisme. Le racisme systémique aggrave encore l'inégalité d'accès aux soins de santé, ce qui entraîne de graves disparités raciales dans les résultats sanitaires et un taux de mortalité plus élevé parmi les minorités et groupes raciaux et ethniques, notamment les personnes d'ascendance africaine, les peuples autochtones et les migrants.
Le Groupe de travail demande aux États, entre autres recommandations figurant dans le rapport, de s'attaquer au racisme systémique et aux préjugés raciaux dans l'administration des systèmes de justice, en concevant des politiques efficaces pour prévenir et détecter les comportements répréhensibles des policiers motivés par le racisme et veiller à ce qu'ils répondent de leurs actes.
Le Conseil est également saisi d’une mise à jour orale de la Haute-Commissaire aux droits de l’homme concernant l’avancée de l’établissement de son rapport sur « le racisme systémique et les violations du droit international des droits de l’homme commises dont les Africains et les personnes d’ascendance africaine sont victimes de la part des forces de l’ordre , en particulier les faits qui ont entraîné la mort de George Floyd et d’autres Africains et personnes d’ascendance africaine ». Le Conseil avait prié la Haute-Commissaire de préparer ce rapport en mars 2020.
Présentant cette mise à jour orale, MME MICHELLE BACHELET, Haute-Commissaire aux droits de l’homme, a indiqué qu’aux fins de l’application de ce mandat qui lui a été confié par le Conseil en vue de l’établissement de ce rapport, de vastes consultations avaient été menées auprès de personnes d'ascendance africaine, en particulier les victimes et leurs familles. Mme Bachelet a précisé avoir rencontré personnellement des membres des familles de femmes, d'hommes et d'enfants d'ascendance africaine tués par des agents des forces de l'ordre.
Si le procès du meurtre de George Floyd s’ouvre maintenant, dix mois après les faits, cette occasion cruciale d'obtenir justice est cependant refusée à d'innombrables autres familles, a fait observer la Haute-Commissaire. Nombre de familles consultées ont le sentiment que leurs gouvernements ne font pas assez pour reconnaître ou contrer le racisme systémique dans l'application de la loi et la justice, et que les agents responsables de violations des droits de l'homme ne sont pas tenus de rendre des comptes, a ajouté Mme Bachelet.
Refus d’accès aux preuves, refus d’informations, refus d’écouter leurs doléances, et même refus de l'autorisation de récupérer les dépouilles de leurs proches, tout cela donne aux familles le sentiment de ne pas être entendues et d’être déshumanisées, a poursuivi Mme Bachelet. Des membres des familles de victimes et des victimes elles-mêmes ont fait part d'intimidations et de harcèlement, ainsi que d'allégations troublantes selon lesquelles des preuves ont été fabriquées et des parjures commis afin d'éviter que la police ne soit tenue pour responsable, a regretté Mme Bachelet.
Pour mettre fin à la violence policière, il faut comprendre que l'impunité pour les violences commises par la police à l'encontre des personnes d'ascendance africaine n'existe pas dans le vide et que les autorités policières et judiciaires sont le reflet de nos sociétés, a déclaré la Haute-Commissaire. Le racisme systémique nécessite un examen approfondi des structures qui renforcent l'inégalité dans tous les aspects de nos vies et qui sont autant de facteurs contribuant au problème de la violence policière, a-t-elle souligné, citant à cet égard la discrimination en matière de logement, d'éducation, d'emploi et de santé.
Pour mettre fin à l'injustice raciale dans l'application de la loi, il faut aussi comprendre les racines des inégalités actuelles, a déclaré la Haute-Commissaire. Il faut se pencher sur les séquelles de l'esclavage et du colonialisme, et avoir conscience des siècles de politiques et de systèmes discriminatoires sur le plan racial qui ont suivi l'abolition officielle de l'esclavage, a-t-elle indiqué. Il faut enfin lancer une action transformatrice qui, en examinant le passé, nous permettra d’aller de l’avant, a-t-elle ajouté.
Mme Bachelet a indiqué que le rapport qu’elle présenterait au Conseil en juin prochain recommandera un programme de changement transformateur pour démanteler le racisme systémique et la brutalité policière à l'encontre des Africains et des personnes d'ascendance africaine, et pour faire progresser l’obligation redditionnelle ainsi que la réparation pour les victimes. Il analysera également les réponses des gouvernements aux manifestations récentes, en grande majorité pacifiques, en faveur de la justice raciale – y compris des informations crédibles faisant état d'un usage inutile et disproportionné de la force par la police contre des manifestants, des passants et des journalistes, a précisé la Haute-Commissaire.
Débat général
Les délégations ont demandé que le racisme et la discrimination soient combattus sans relâche grâce à des mesures adéquates et généralisées. La lutte contre les préjugés et l'incitation à la haine ne pourra être menée à bien que par un leadership gouvernemental fort, en étroite coopération avec toutes les parties prenantes concernées, y compris la société civile, a-t-il été souligné.
Il importe également de prendre conscience de l'héritage des transgressions passées, qui se manifestent souvent par un racisme systémique, et d’y remédier, a-t-il été affirmé. Il s'agira de réviser activement des pratiques et des politiques de longue date afin de s'assurer qu'elles traitent tous les individus de manière égale, et d'éliminer les obstacles à la participation politique et, ce faisant, de renforcer les fondements de la démocratie, a-t-on précisé.
En cette année de célébration du vingtième anniversaire de la Conférence de Durban, il est très important de mobiliser la volonté politique aux fins d’une mise en œuvre complète et efficace de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, ont estimé nombre d’intervenants. Vu le manque de connaissances du public quant au contenu réel de ces deux documents, a notamment été recommandée la publication d'un matériel promotionnel simplifié sur ce contenu, afin qu'il soit disponible pour le grand public.
D’autre part, le Président-Rapporteur du Groupe de travail intergouvernemental a été félicité pour ses efforts inlassables en vue de trouver un terrain d'entente entre les États Membres.
Une délégation a par ailleurs dit rejeter toute tentative de certains pays européens d’ancrer dans la loi des mesures discriminatoires contre les communautés arabes et musulmanes, sous couvert de lutte contre le terrorisme et en dépit des contributions importantes que ces communautés apportent aux sociétés dans lesquelles elles vivent.
Le racisme et la discrimination sont exacerbés par la crise de la COVID-19, ce dont il faut tenir compte dans la riposte à la pandémie, a-t-il par ailleurs été souligné à plusieurs reprises.
Enfin, les États qui ne l’ont pas encore fait ont été appelés à ratifier sans délai la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.
** Liste des intervenants : Suède (au nom des pays nordiques et baltes), Portugal (au nom de l'Union européenne), Pakistan (au nom de l'Organisation de la coopération islamique), Cameroun (au nom du Groupe des États africains), Azerbaïdjan (au nom du Mouvement des pays non alignés), Libye (au nom du Groupe des États arabes), Brésil (au nom d'un groupe de pays) et États-Unis (au nom d'un groupe de pays).
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