Fil d'Ariane
LE FORUM SUR LA GOUVERNANCE D’INTERNET ENTEND LES CONTRIBUTIONS DES PARTIES PRENANTES ACTIVES SUR LE TERRAIN
Ce matin, des représentants des coalitions dynamiques du Forum ont présenté, en plénière, les résultats de leurs travaux réalisés depuis la précédente session du Forum (2016), sur le thème général « contribuer à l’avenir numérique ».
M. Markus Kummer, ancien Vice-Président de l’Internet Society, a expliqué que les coalitions dynamiques (dynamic coalitions, DC), qui comptent parmi les plus anciens groupements communautaires associés au Forum, sont chargées de réfléchir sur le long terme aux principaux thèmes intéressant la gouvernance d’Internet, notamment: les responsabilités des acteurs concernés, l’accessibilité par les personnes handicapées, les valeurs fondamentales d’Internet, la liberté d’expression et des médias, le changement climatique, la neutralité des réseaux – ou encore, sur un plan plus technique, le système blockchain de validation des transactions.
La modératrice de cette séance de travail, Mme Tatiana Tropina, chercheuse au Max Planck Institute, a orienté d’emblée le débat sur les valeurs fondamentales d’Internet. Le représentant de la coalition dynamique chargée de cette question, M. Olivier Crépin-Leblond, a indiqué que l’argument avancé par certains États selon lequel limiter la liberté d’expression sur Internet ne présente pas de danger fondamental pour le réseau avait été longuement étudié et a précisé que la coalition travaille à l’instauration d’un cadre déontologique pour Internet. M. Maarten Botterman a pour sa part souligné que la transparence est la condition de la reddition des comptes, et donc de la confiance des usagers dans les produits et services Internet, notamment les objets connectés. Internet ne remet pas en cause la pertinence des lois nationales s’agissant de la sécurité, a ajouté l’expert. M. Vlad Zamfir a quant à lui donné évoqué le processus de gouvernance qui devrait entourer la validation des transactions et l’utilité de la blockchain dans ce contexte.
Quant à la protection des enfants en ligne, la modératrice a observé que le document de travail de la coalition dynamique chargée de cette question s’inspirait de prises de position du Saint-Siège. Le représentant de cette coalition, M. John Carr, a précisé que de nombreuses synergies avaient en effet été trouvées entre les membres de la coalition et le groupe de travail du Vatican sur la protection des enfants, « le Pape François étant un leader incontesté dans ce domaine ». L’objectif n’est pas de promouvoir les thèses du Vatican, mais de faire avancer les travaux autour d’objectifs partagés, a précisé M. Carr. La coalition est très attentive aux problèmes de l’obtention de l’assentiment des internautes. En matière d’accès des personnes handicapées à Internet, il a été indiqué que la coalition dynamique représentée par M. Shadi Abou-Zahra avait travaillé non seulement sur les modalités d’accessibilité mais aussi sur leurs avantages pour la société en général: on sait par exemple que le surtitrage pour les sourds a des effets positifs pour la pluralité linguistique.
Une coalition a travaillé sur différents moyens de déléguer les responsabilités gouvernementales aux plates-formes, pour mieux faire respecter les droits de l’homme sur Internet, a indiqué son représentant, M. Nicolo Zingales. La coréglementation est une solution possible, dans certaines limites, tout comme la responsabilité secondaire et l’autoréglementation. Toutes ces options supposent cependant que les États mettent en place des mécanismes de recours efficaces. Mais tous les comportements ne peuvent pas faire l’objet de réglementation, a relevé la coalition sur le genre et Internet, représentée par Mme Bishakha Datta, citant notamment les modalités d’expression de l’assentiment individuel sur Internet. Plates-formes et développeurs doivent trouver des solutions techniques à ce problème, a-t-elle observé.
Mme Tropina ayant relevé que la coalition sur les droits et les principes d’Internet avait publié un guide pratique, la représentante de cette coalition, Mme Minda Moreira a indiqué qu’il s’agissait d’une véritable charte basée sur le droit international pertinent. Ce document, traduit, a été intégré à plusieurs lois nationales (notamment au Brésil et en Italie) et la coalition travaille maintenant à adapter les 21 articles de la charte aux besoins spécifiques des régions et des pays, à l’intention des enseignants, des législateurs et même des techniciens.
La coalition sur la connectivité communautaire, représentée par M. Luca Belli, n’a pas hésité pour sa part à postuler l’existence d’un droit à « l’autodétermination des réseaux de communautés », autrement dit le droit pour elles de s’unir pour partager des informations et faire avancer des projets. Cette idée n’est pas neuve et se fonde, en réalité, sur les articles pertinents du droit international qui reconnaissent le droit à l’autodétermination, a précisé M. Belli. S’agissant de l’accès des communautés aux bibliothèques, la représentante de la coalition en charge de cette question, Mme Esmeralda Moscatelli, a indiqué que son travail est de sensibiliser les pouvoirs publics à cette question et d’évaluer les besoins des acteurs concernés – notamment deux millions de bibliothèques dans le monde.
M. Christopher Yoo, représentant la coalition sur la connexion des personnes déconnectées, a indiqué que cette coalition entendait analyser le grand nombre d’expériences et de bonnes pratiques répertoriées dans ce domaine, en vue de convaincre les décideurs à tous les niveaux. Deux milliards de personnes ne sont toujours pas connectées; parmi elles, bon nombre ne connaissent tout simplement pas les avantages de la connectivité. La coalition collabore notamment avec des organisations très actives sur le terrain en Afrique du Nord.
La coalition sur la neutralité des réseaux a effectué un vaste travail de cartographie dans quatre pays, en vue d’engager la participation des régulateurs, a indiqué M. Belli. Le projet a déjà permis de constater que le manque de législation nuit aux consommateurs.
Quant à la coalition chargée du commerce sur Internet, représentée par M. Jeremy Malcolm, elle œuvre à la transparence des transactions commerciales. Le consensus est difficile à trouver s’agissant de l’inclusion, dans les traités commerciaux, de limites à la liberté des flux de données en ligne. Mais la coalition accueille désormais un représentant de gouvernement, ce qui est un progrès, a constaté M. Malcolm.
Pendant le débat, il a été relevé qu’il ne suffisait pas d’informer les internautes de leurs droits sur Internet: ils doivent aussi être rendus attentifs aux conséquences de leurs comportements en ligne. La question est particulièrement pertinente étant donné l’anonymat qui prévaut souvent sur Internet, avec ses dérives, et soulève d’autres questions importantes s’agissant du degré de responsabilité juridique des plates-formes vis-à-vis des contenus qu’elles diffusent. L’Union européenne vient justement de légiférer dans ce domaine, a-t-il été relevé.
Un représentant de la Coalition du Golfe pour les droits de l’homme a demandé s’il existait des initiatives qui couvrent des régions sous-représentées, par exemple la Méditerranée orientale et l’Afrique du Nord. Un panéliste a expliqué que si les initiatives ne sont pas régionales, mais bien mondiales, chacun peut toutefois s’arrimer à l’une d’entre elles, quelle que soit son origine. Certains représentants ont souligné que leurs coalitions étaient actives au niveau régional, y compris dans les pays arabes, par le biais d’organisations de la société civile actives sur le terrain.
À partir de 11 h 30, le Forum se penche sur les rapports des initiatives nationales et régionales.
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