Fil d'Ariane
LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME A CLOS LES TRAVAUX DE SA SESSION D'ÉTÉ
Le Comité des droits de l'homme a conclu aujourd'hui sa cent-deuxième session, qui s'est ouverte à Genève le 11 juillet dernier et au cours de laquelle il a examiné les rapports présentés par l'Éthiopie, la Bulgarie et le Kazakhstan, adoptant des «observations finales» sur chacun de ces rapports. Le Comité a également adopté à la présente session, après deux ans de travaux, une observation générale sur la liberté d'opinion et d'expression.
Dans ses observations finales sur le rapport périodique de l'Éthiopie, le Comité salue l'adoption d'un Code pénal révisé pénalisant tout acte de torture, de traitements cruels, inhumains et dégradants, de violence sexuelle de même que les pratiques traditionnelles préjudiciables. Il encourage le pays à ne pas ménager ses efforts en vue d'améliorer, dans la pratique, l'accès des femmes à l'emploi, à la vie publique, au logement et à la santé et ce, dans toutes les régions du pays. D'autre part, la polygamie devrait être interdite et faire l'objet de poursuites et des efforts de sensibilisation déployés. Tout en relevant une récente diminution des cas de mutilation génitale féminine et autres pratiques traditionnelles préjudiciables, le Comité exhorte à plus d'efforts en vue de la prévention, de l'élimination et de la sanction des telles pratiques. Préoccupé par la prévalence de la traite de la personne humaine en Éthiopie, le Comité prie le pays de veiller au renforcement des mesures de lutte contre ce phénomène. Il encourage aussi à la dépénalisation des relations sexuelles entre adultes du même sexe (consentants); il faudrait aussi mettre fin à la stigmatisation sociale des homosexuels. Tout en reconnaissant la nécessité pour l'Éthiopie d'adopter des mesures pour combattre les actes de terrorisme, le Comité regrette la définition imprécise de certaines infractions et est préoccupé par la portée de certaines de dispositions, y compris la criminalisation de l'encouragement et l'incitation au terrorisme au moyen de publications, ce qui peut conduire à des abus contre les médias. Le Comité note avec préoccupation les nombreuses informations reçues au sujet des graves violations des droits de l'homme commises dans l'État régional somali d'Éthiopie par les membres de la police et l'armée, y compris les meurtres, le viol, les disparitions forcées, les détentions arbitraires, la torture, la destruction de biens, les déplacements forcés et les attaques contre la population civile, ainsi que les récentes informations sur des détentions de journalistes étrangers dans la région. Il note aussi avec préoccupation les nombreuses informations selon lesquelles la torture et les traitements cruels, inhumains ou dégradants sont répandus dans le pays, en particulier à l'égard de membres présumés de groupes d'insurgés armés actifs dans certaines régions. Tout en reconnaissant le moratoire de facto sur la peine de mort, le Comité reste préoccupé par les condamnations à mort sont encore prononcées par les tribunaux pour des crimes qui semblent avoir une dimension politique.
Le Comité se félicite du dialogue constructif avec la délégation de haut niveau venue présenter le rapport de la Bulgarie et salue les nombreuses mesures législatives prises pour aligner la législation nationale sur les dispositions du Pacte, dont les amendements constitutionnels judiciaires de 2007, la création d'une Cour suprême judiciaire, ainsi que l'adoption, en 2010, d'une Stratégie intégrée de lutte contre la criminalité et la corruption. La Bulgarie devrait également se doter de nouvelles politiques favorisant l'égalité des sexes et adopter, puis mettre en œuvre une législation plus spécifique en la matière, reconnaissant ainsi officiellement la nature particulière de la discrimination à l'égard des femmes. Ce faisant, la Bulgarie devrait également s'efforcer d'adopter les mesures visant à mettre fin aux stéréotypes fondés sur le sexe au sein de la société. De la même manière, la Bulgarie devrait poursuivre ses efforts en vue de l'élimination des stéréotypes et de la large discrimination à l'égard des Roms, entre autres, par le truchement de campagnes de sensibilisation à la tolérance et au respect de la diversité. À cet égard, la Bulgarie devrait adopter des mesures de promotion de l'égalité des chances des Roms dans l'accès aux services dans tous les domaines et à tous les niveaux, par des mesures destinées à supprimer les inégalités. La Bulgarie devrait veiller à ce que les cas de discrimination fassent systématiquement l'objet d'enquêtes, que leurs auteurs comparaissent devant la justice et soient punis, et que les victimes bénéficient de réparations adéquates. Le Comité demeure préoccupé par le surpeuplement des prisons et les conditions sanitaires des établissements de détention. Le pays devrait en outre intensifier ses efforts pour combattre la corruption dans toutes les sphères de la société et donner plein effet à sa stratégie intégrée sur la lutte contre la criminalité et la corruption. Le Comité est préoccupé par les manifestations de discours de haine et d'intolérance dans le domaine public, qui sont repris par certains médias, et estime que la Bulgarie devrait renforcer les mesures pour prévenir et interdire la promotion de discours de haine, d'intolérance et de discrimination.
S'agissant du Kazakhstan, le Conseil salue les mesures législatives et institutionnelles qui ont été prises par le pays, notamment la création de la Commission nationale des affaires féminines et de politique démographique et familiale et la promulgation de la loi de 2009 sur les garanties de l'État en matière d'égalité des droits et des chances pour les hommes et les femmes. Le pays devrait toutefois adopter des mesures pour s'assurer que les activités des représentants de la loi dans la lutte contre le terrorisme ne ciblent pas les individus uniquement en fonction de leur état ou de leurs convictions religieuses; il devrait en outre s'assurer que toutes les mesures pour combattre le terrorisme sont compatibles avec le Pacte. Le pays devrait également veiller à examiner plus attentivement les assurances diplomatiques fournies en cas de retour de ressortissants étrangers vers des pays où ils sont susceptibles d'être soumis à la torture ou à de graves violations des droits de l'homme. Le Comité est par ailleurs préoccupé par les incohérences dans les catégories de crimes passibles de la peine de mort et encourage le pays à abolir la peine de mort. Il est en outre préoccupé par les informations faisant état d'une augmentation du nombre de cas de torture et d'un faible taux d'enquêtes. Le Comité déplore l'augmentation du nombre de crimes signalés liés à la traite des êtres humains et estime que le pays devrait intensifier ses efforts dans ce domaine, notamment en s'attaquant aux causes profondes de la traite. Le Kazakhstan devrait prendre des mesures urgentes pour remédier au surpeuplement dans les centres de détention et les prisons. Il devrait par ailleurs abolir l'obligation de visa de sortie et s'assurer que l'exigence d'enregistrer son lieu de résidence soit en pleine conformité avec les dispositions du Pacte. Le Comité exprime sa préoccupation s'agissant d'informations selon lesquelles la corruption est généralisée dans le système judiciaire, ainsi que devant l'absence d'un pouvoir judiciaire indépendant. Le Comité exprime sa préoccupation devant les informations selon lesquelles le Kazakhstan ne respecte pas le droit à la liberté d'expression et le droit à la liberté de réunion, ainsi qu'à propos de l'application de la loi sur l'enregistrement des partis politiques, qui impose des restrictions excessives sur l'enregistrement des partis politiques et associations publiques.
Les textes complets des observations finales sont disponibles sur la page Internet de la session (voir la colonne Concluding Observations en regard du pays concerné): http://www2.ohchr.org/english/bodies/hrc/hrcs102.htm.
L'observation générale n°34 (CCPR/C/GC/34, à paraître en français) sur l'article 19 du Pacte, relatif à la liberté d'opinion et d'expression, est axée sur les restrictions admissibles à la liberté d'expression et examine en particulier la légitimité des législations sur le blasphème, le «devoir de mémoire», la trahison, la lutte contre le terrorisme, la notion de lèse majesté, la désobéissance à l'autorité, la diffamation du Chef de l'État et la protection de l'honneur des fonctionnaires publics. L'observation générale n°34 indique clairement que la protection de la liberté d'opinion et d'expression s'étend également aux nouveaux acteurs intervenant sur les moyens et réseaux électroniques, en particulier aux blogueurs. Elle met l'accent sur l'obligation des États de favoriser l'existence de moyens d'information solides, libres et pluralistes, ainsi que l'accès aux nouvelles plateformes dans ce domaine (voir aussi notre communiqué CT/11/12).
Au cours de cette session, le Comité a également examiné, dans le cadre de séances à huis clos, des communications qui lui étaient adressée par des particuliers qui estiment être victimes de violations de leurs droits, en vertu du Pacte, par un État partie au Pacte. À cet égard, le rapporteur spécial chargé du suivi des constatations adoptées à ce titre a rendu compte de ses activités, de même que le rapporteur spécial chargé du suivi des observations finales. Les experts se sont aussi réunis à plusieurs reprises pour examiner les méthodes de travail du Comité.
Lors de sa prochaine session, qui se tiendra à Genève du 17 octobre au 4 novembre 2011, le Comité a prévu d'examiner les rapports de la Jamaïque, du Koweït, de la Norvège et de l'Iran. Le Comité a également prévu d'examiner la situation en Côte d'Ivoire, cet État partie ayant accumulé un important retard dans la présentation de son rapport.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
CT11/015F