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LA RÉUNION INTERNATIONALE DES NATIONS UNIES SUR LA PALESTINE OUVRE SES TRAVAUX CONSACRÉS AU CONFLIT À GAZA

Communiqué de presse
Sont dénoncés les pilonnages au phosphore blanc, les attaques aveugles contre des civils et autres crimes de guerre voire contre l'humanité

Ce matin et pour deux jours, s'est ouverte à Genève la Réunion internationale des Nations Unies sur la Palestine, qui porte sur le thème de la «responsabilité de la communauté internationale de faire respecter le droit international humanitaire en vue de garantir la protection des civils dans le Territoire palestinien occupé à la suite de la guerre à Gaza». Ont particulièrement été dénoncés les pilonnages au phosphore blanc, les attaques aveugles contre des civils et autres crimes de guerre voire, selon certains intervenants, contre l'humanité perpétrés par Israël à Gaza durant son offensive des mois de décembre 2008 et janvier 2009.

Cette réunion est organisée par le Comité pour l'exercice des droits inaliénables du peuple palestinien et présidée par le Président du Comité, M. Paul Badji, qui a notamment souligné qu'elle se tient à un moment où les chances d'un règlement rapide du conflit israélo-palestinien sont faibles, alors que les pourparlers sont dans l'impasse. L'Opération «Plomb durci» menée par Israël durant les mois de décembre 2008 et janvier 2009 a démontré le mépris total d'Israël à l'égard du droit international humanitaire, a affirmé M. Badji. Après avoir entendu plusieurs déclarations d'ouverture, au nombre desquelles les messages adressés pour l'occasion par le Secrétaire général de l'ONU et par le Président de l'Assemblée générale, la Réunion a tenu une première plénière consacrée aux résultats des enquêtes relatives à l'attitude israélienne durant la guerre à Gaza.

Dans son message, M. Ban Ki-moon exhorte Israël à geler les activités de colonisation et la «croissance naturelle». Toutes les parties doivent s'engager à mettre un terme définitif à l'usage de la violence, souligne le Secrétaire général dans un message lu par M. Sergei Ordzhonikidze, Secrétaire général adjoint des Nations Unies et Directeur général de l'Office des Nations Unies à Genève. Le Président de l'Assemblée générale, M. Miguel d'Escoto Brockmann, rappelle dans son message qu'en plein milieu du conflit à Gaza, en janvier dernier, l'Assemblée générale avait demandé un cessez-le-feu immédiat et demandé à tous les États d'apporter un soutien pour alléger la situation économique et humanitaire critique dans la bande de Gaza et, à cette fin, d'assurer l'ouverture des points de passage pour la libre circulation des biens et des personnes vers la bande de Gaza et l'extérieur; or, six mois plus tard, le blocus contre la bande de Gaza persiste, déplore-t-il.

Le Représentant permanent de la Palestine auprès des Nations Unies à Genève, M. Ibrahim Khraishi, a pour sa part fait observer que suite à l'agression israélienne et l'élection d'un gouvernement d'extrême droite, la situation sur le terrain s'est fortement dégradée.

Le Président de l'Assemblée parlementaire de la Méditerranéenne et Vice-Président de l'Assemblée nationale française, M. Rudy Salles, a quant à lui souligné que si c'est en rapprochant les États que nous ferons la paix, c'est en rapprochant les peuples que nous pourrons la pérenniser. Il a indiqué que l'Assemblée parlementaire de la Méditerranée est disposée à accueillir un colloque sur le thème du statut de Jérusalem afin de dégager des propositions concrètes à soumettre aux acteurs du processus de paix. Comme cela a été précisé par la suite, ce colloque se tiendra à Malte au début de 2010.

Participant à la première plénière de la Réunion, consacrée aux résultats des enquêtes relatives à l'attitude israélienne durant la guerre à Gaza, M. John Dugard, Chef de la Commission indépendante d'établissement des faits sur Gaza de la Ligue des États arabes, a présenté les résultats des travaux de la Commission en affirmant qu'il appartient aux États d'engager des poursuites contre des militaires ou des dirigeants ayant participé aux crimes de guerre et crimes contre l'humanité perpétrés à Gaza, auprès des juridictions nationales s'ils considèrent qu'il existe une compétence universelle à cet effet. M. Dugard a proposé de renvoyer la question à la Cour pénale internationale, à l'instar de ce qui a été fait pour le Darfour. Le Président du Comité spécial sur le Moyen-Orient de l'Assemblée parlementaire de la Méditerranée, M. George Vella, a lui aussi convenu qu'il faudrait renvoyer cette question à la Cour pénale internationale.

Ont également participé à cette première plénière M. David Hammerstein, ancien membre espagnol du Parlement européen, qui a notamment fait état de la proposition récente de M. Javier Solana visant à ce que le Conseil de sécurité de l'ONU reconnaisse l'État palestinien et la solution fondée sur deux États après un certain délai, même si Israël et d'autres ne reconnaissent pas cet État; M. Ran Yaron, Directeur du Département en charge des territoires palestiniens occupés à l'organisation Physicians for Human Rights-Israël, qui s'est consacré à démontrer l'inutilité, faute d'objectivité et d'indépendance, des enquêtes menées par Israël au sujet des allégations de violations de droits de l'homme commises à Gaza; et M. Bill Van Esveld, chercheur à la Division Moyen-Orient et Afrique du Nord de Human Rights Watch-Tel Aviv, qui a souligné que l'utilisation délibérée de phosphore blanc par Israël constitue incontestablement un crime de guerre.

Un dialogue sur cette première plénière se dérouleront à 17 heures, cet après-midi, à l'issue de la seconde plénière qui débutera à 15h15 et portera sur le thème de la responsabilité des gouvernements et des organisations intergouvernementales pour ce qui est de faire respecter le droit international.


Déclarations d'ouverture

M. PAUL BADJI, Président du Comité pour l'exercice des droits inaliénables du peuple palestinien, a souligné que cette réunion était organisée conformément aux résolutions 63/26 et 63/27 de l'Assemblée générale et a pour thème la «responsabilité de la communauté internationale à faire respecter le droit international humanitaire en vue de garantir la protection des civils dans le Territoire palestinien occupé à la suite de la guerre à Gaza». Chacun a en mémoire les événements de Gaza de décembre 2008 et janvier 2009; la communauté internationale a été outrée à juste titre par l'usage disproportionné de la force par l'armée israélienne lorsqu'elle a alors envahi une grande partie de la bande de Gaza, a rappelé M. Badji. Le Comité pour l'exercice des droits inaliénables du peuple palestinien avait condamné cela, comme il avait condamné les actes de factions militantes prenant pour cible aveuglément des civils israéliens. Il est regrettable que soixante ans après l'adoption des Conventions de Genève, la mort injustifiée de nombreux civils suite aux récentes opérations militaires israéliennes nous oblige à nous pencher sur la validité de ces importants instruments du droit international humanitaire, a déclaré M. Badji.

M. SERGEI ORDZHONIKIDZE, Secrétaire général adjoint des Nations Unies, Directeur général de l'Office des Nations Unies à Genève et Représentant du Secrétaire général des Nations Unies, a donné lecture du message adressé à la Réunion par M. Ban Ki-moon, Secrétaire général de l'ONU, dans lequel ce dernier rappelle que d'intenses efforts diplomatiques sont actuellement déployés pour contribuer à la prompte reprise et à la conclusion rapide des négociations. Dans ce message, M. Ban exhorte Israël à geler les activités de colonisation et la «croissance naturelle». Toutes les parties doivent s'engager à mettre un terme définitif au recours à la violence, souligne-t-il dans son message. Il faut en outre s'employer davantage à empêcher que des armes soient clandestinement introduites à Gaza. Les Nations Unies réitèrent l'appel lancé à Israël afin qu'il assure la livraison à Gaza des produits et biens de première nécessité en assurant la réouverture de l'accès à Gaza, poursuit M. Ban. Il déplore en outre que le Hamas n'ait pas pour sa part décidé de renoncer à la violence; aussi, exhorte-t-il le Hamas à reconsidérer sa position. Lorsque des civils ont été tués et que des violations du droit international humanitaire sont alléguées, il faut mener des enquêtes et, le cas échéant, établir les responsabilités, souligne le Secrétaire général dans son message.

Reprenant la parole, M. BADJI, Président du Comité pour l'exercice des droits inaliénables du peuple palestinien, a déclaré que les débats de cette réunion entendent permettre qu'il soit répondu au mieux aux événements récents, que l'on fasse respecter le droit international et que soit assurée la protection des civils dans les territoires occupés et dans la bande de Gaza en particulier. Cette réunion se tient à un moment où les chances d'un règlement rapide du conflit israélo-palestinien sont faibles, alors que les pourparlers sont dans l'impasse. Nous avons assisté avec inquiétude à l'augmentation de la violence contre des Palestiniens perpétrée par des colons, parfois avec le silence complice de l'armée israélienne. Il est particulièrement décourageant de constater que des activités comme la création de nouvelles implantations et la construction du mur en Cisjordanie continuent de plus belle, cinq ans après que la Cour international de justice eut rendu un arrêt historique relatif à la question de Palestine. Nous sommes alarmés par les pratiques mises en œuvre par Israël à l'intérieur et autour de Jérusalem: la construction du mur à étendu l'autorité d'Israël sur une large partie du territoire palestinien, ce qui équivaut à une annexion, a déclaré M. Badji. La poursuite de l'occupation par Israël du territoire palestinien est une violation du droit international humanitaire, a-t-il rappelé. L'Opération «Plomb durci» menée par Israël durant les mois de décembre 2008 et janvier 2009 a démontré le mépris total d'Israël à l'égard du droit international humanitaire. Une grande partie de Gaza a été réduit à l'état de ruine; on parle de 600 000 tonnes de ruines qu'il faudra, selon le PNUD, plus d'un an pour déblayer, a souligné M. Badji.

Si la population de Gaza n'a pas sombré dans la famine, c'est grâce aux quantités minimales d'aide humanitaire autorisée à pénétrer au compte goutte dans le territoire, a souligné M. Badji. La communauté internationale a réagi promptement et largement aux violations commises à Gaza; plusieurs enquêtes internationales ont été organisées ou sont en cours et les résultats de deux d'entre elles, d'ores et déjà connus, font état de violations généralisées du droit international humanitaire et de la commission de crimes de guerre par les deux parties, a rappelé M. Badji. Israël a fait pression sur des gouvernements afin qu'ils modifient la législation de leur pays en matière de juridiction universelle, a-t-il par ailleurs fait savoir. Les témoignages récents d'une trentaine de militaires ayant participé à l'Opération «Plomb durci» ont donné une crédibilité aux allégations graves de violations systématiques des droits de l'homme et du droit international humanitaire commises lors de cette Opération, a insisté M. Badji. Les témoignages indiquent en outre que des munitions au phosphore blanc ont été utilisées sans retenue dans la bande de Gaza, a-t-il ajouté.

La communauté internationale doit se garder de toute complaisance face à de telles accusations et doit se mobiliser à tous les échelons pour garantir le respect du droit international humanitaire et du droit international relatif aux droits de l'homme et pour traduire en justice ceux qui en enfreignent les dispositions, a déclaré M. Badji. Israël, pas plus qu'un autre pays, ne doit être au-dessus de la loi, a-t-il poursuivi, rappelant que l'ONU a une responsabilité permanente touchant à tous les aspects de la question de Palestine jusqu'à ce que celle-ci soit réglée conformément aux résolutions de l'Organisation et au respect de la légitimité internationale. Il conviendrait d'inviter l'ONU, en particulier l'Assemblée générale et le Conseil de sécurité, à examiner les moyens de répondre efficacement aux violations du droit international, a indiqué M. Badji. Une solution négociée du conflit israélo-palestinien doit reposer sur les principes du droit international si l'on veut qu'elle soit scrupuleusement appliquée, a-t-il conclu.

M. RUDY SALLES, Président de l'Assemblée parlementaire de la Méditerranéenne et Vice-Président de l'Assemblée nationale française, a rappelé avoir toujours milité et travaillé à un rapprochement entre les peuples, notamment entre les Israéliens et les Palestiniens. C'est en rapprochant les États que nous ferons la paix, mais c'est en rapprochant les peuples que nous pourrons la pérenniser, a-t-il souligné. C'est en 2006 que l'Assemblée parlementaire de la Méditerranée a vu le jour à Amman, en Jordanie, rassemblant tous les pays situés autour de la Méditerranée, du Portugal à la Jordanie, en passant par les Balkans, la Palestine et Israël. M. Salles a indiqué qu'il se rendrait cet automne à New York afin d'étudier avec le Secrétaire général des Nations Unies les moyens de renforcer l'action des Nations Unies et du Parlement de la Méditerranée dans la zone. Insistant sur la nécessité de définir le statut de la ville sainte de Jérusalem, M. Salles a indiqué que l'Assemblée parlementaire de la Méditerranée était disposée à accueillir un colloque sur ce thème afin de dégager des propositions concrètes à soumettre aux acteurs du processus de paix. Il faut repenser la question de Jérusalem afin d'offrir un nouveau point de vue, a-t-il estimé.

M. BADJI a ensuite donné lecture d'un message de M. Miguel d'Escoto Brockmann, Président de la soixante-troisième session de l'Assemblée générale des Nations Unies, qui rappelle que pour le million et demi de civils Palestiniens qui y résident, la guerre de Gaza n'est pas terminée. Au milieu de l'agression de 22 jours d'Israël contre Gaza qui s'est achevée en janvier 2009, l'Assemblée générale avait demandé un cessez-le-feu immédiat et demandé à tous les États d'apporter un soutien pour alléger la situation économique et humanitaire critique dans la bande de Gaza et, à cette fin, d'assurer l'ouverture des points de passage pour la libre circulation des biens et des personnes vers la bande de Gaza et l'extérieur, a rappelé le Président de l'Assemblée générale. Or, six mois plus tard, le blocus contre la bande de Gaza persiste, souligne-t-il dans son message. Tandis que les gouvernements et les Nations Unies restent silencieux, réticents ou incapables d'offrir une aide à Gaza, des militants des droits de l'homme, des parlementaires et des journalistes sont stoppés dans les mers internationales bien au-delà des limites des eaux territoriales israéliennes par les forces navales de la puissance d'occupation, indique dans son message le Président de l'Assemblée générale. L'abus du droit de veto par un membre permanent du Conseil de sécurité a permis à Israël de poursuivre son occupation, rappelle-t-il. Il salue en revanche la récente décision du Royaume-Uni d'annuler cinq contrats de ventes d'armes à destination des militaires israéliens en réaction aux actions menées à Gaza au début de l'année.

M. IBRAHIM KHRAISHI, Représentant permanent de la Palestine auprès des Nations Unies à Genève, a exprimé sa reconnaissance au Comité pour l'exercice des droits inaliénables du peuple palestinien pour avoir convoqué cette réunion importante. Il a rappelé la responsabilité permanente qui incombe aux Nations Unies s'agissant de la question de Palestine. Il est urgent de parvenir à une solution reposant sur la paix et la création de deux États, a-t-il ajouté. Le peuple palestinien reste déterminé à réaliser ses droits de l'homme inaliénables, notamment son droit à l'autodétermination, a-t-il souligné. Un consensus international écrasant existe pour parvenir à une paix durable et complète au Moyen-Orient. La question de Palestine est au cours de la paix et de la sécurité internationales, a insisté M. Khraishi. Trop de temps a été gaspillé et trop de vies ont été perdues du fait de la persistance de ce conflit tragique, a-t-il déclaré. Suite à l'agression israélienne et l'élection d'un gouvernement d'extrême droite, la situation sur le terrain s'est fortement dégradée, a-t-il indiqué. Il convient d'agir pour parvenir à un règlement pacifique du conflit israélien qui aboutisse à la création d'un État palestinien avec Jérusalem-Est pour capitale; il faudra aussi résoudre de façon juste le problème des réfugiés, a poursuivi M. Khraishi. Le blocus illégal de la bande de Gaza par Israël doit cesser immédiatement, a-t-il en outre affirmé, plaidant pour une ouverture immédiate des points de passage, ce qui est essentiel pour favoriser la reconstruction de Gaza. En outre, Israël doit immédiatement mettre fin à sa campagne illégale d'implantation de colonies dans le Territoire palestinien. Il faut aussi qu'Israël cesse de confisquer les terres palestiniennes et respecte l'avis de la Cour internationale de justice concernant le mur.


Plénière I: résultats des enquêtes concernant l'attitude israélienne durant la guerre à Gaza

M. JOHN DUGARD, Chef de la Commission indépendante d'établissement des faits sur Gaza de la Ligue des États arabes, a indiqué que les deux dernières décennies ont été marquées par une importante évolution concernant la question de la responsabilité face aux crimes internationaux et une évolution du droit international humanitaire. Les dirigeants militaires et politiques des États qui commettent des crimes internationaux n'échappent plus au droit et il est important d'appréhender les crimes militaires israéliens à Gaza dans ce contexte, a-t-il déclaré. Nombreux sont les rapports indiquant qu'Israël a perpétré des crimes internationaux à Gaza, a rappelé M. Dugard.

Présentant le rapport de la Commission indépendante d'enquête de la Ligue des États arabes qu'il préside, M. Dugard a indiqué que ce rapport se distingue des autres par le fait qu'il décrit les crimes internationaux qui ont été commis et ne se contente pas, à la différence des autres rapports sur la question, de dire que de tels crimes ont été commis. Quant à l'enquête menée par Israël lui-même, elle n'était pas indépendante et avait omis de consulter des sources palestiniennes, a ajouté M. Dugard. Il a souligné que la Commission qu'il préside était d'avis que l'affirmation d'Israël selon laquelle ce pays se trouvait en état de légitime défense était inacceptable. Il a ajouté que sa Commission, contrairement à Israël, avait décidé qu'il convenait d'établir une distinction entre les branches militaires et civiles du Hamas.

M. Dugard a en outre rappelé que durant le conflit à Gaza, des armes au phosphore blanc ont été utilisées. En outre, les forces de défense israéliennes étaient responsables de la destruction arbitraire de biens, plus de 3000 maisons ayant été détruites. Les forces de défense israéliennes ont pilonné des hôpitaux et empêché l'évacuation de personnes blessées, a poursuivi M. Dugard. Pour ce qui est des crimes contre l'humanité, la Commission que préside M. Dugard a estimé que le comportement des forces israéliennes correspondait à la définition. Elle a en outre estimé que les circonstances justifiaient que l'on examine si l'offensive contre Gaza constituait un génocide, a poursuivi M. Dugard; de ce point de vue, l'intention de l'opération n'était certes pas de détruire le peuple de Gaza mais néanmoins de se livrer à un acte de châtiment collectif contre le peuple palestinien, a-t-il précisé. En conclusion, Israël est responsable de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité, a déclaré M. Dugard. Il appartient aux États d'engager des poursuites contre des militaires ou des dirigeants ayant participé à ces actes, auprès des juridictions nationales s'ils considèrent qu'il existe une compétence universelle à cet effet. M. Dugard a proposé de renvoyer la question à la Cour pénale internationale, à l'instar de ce qui a été fait pour le Darfour, ce qui permettrait d'éviter qu'il y ait une approche de deux poids, deux mesures s'agissant de telles questions.

M. GEORGE VELLA, Président du Comité spécial sur le Moyen-Orient de l'Assemblée parlementaire de la Méditerranée, a souligné que le conflit à Gaza a été marqué par le mépris total des forces attaquantes d'établir une distinction entre cibles militaires et civiles. L'Assemblée parlementaire de la Méditerranée ne pouvait donc qu'organiser une mission d'établissements des faits à Gaza, a-t-il ajouté. Il a précisé que la mission qui a ainsi été organisée n'était toutefois pas la première à laquelle il ait eu à participer. M. Vella a indiqué avoir constaté de visu, durant sa mission à Gaza, des preuves de tirs de mortiers et de tirs de roquette sur des bâtiments civils ayant subi de gros dégâts. Il a en outre indiqué avoir pu constater le manque de services d'hygiène et d'eau potable à Gaza. Nombre de foyers gazaouis ont perdu des proches durant l'attaque israélienne, a-t-il ajouté. Gaza est une ville d'un million de personnes piégées dans un territoire assiégé, a souligné M. Vella. Il n'est pas possible d'apporter l'aide alimentaire et autre requise à Gaza pour la simple raison qu'Israël empêche la livraison de l'aide, a-t-il ajouté. La situation sur le terrain est dramatique et ne peut qu'alimenter plus encore la haine et l'hostilité, a fait observer M. Vella. Le personnel des Nations Unies connaît les difficultés d'accès à la région, a-t-il rappelé. Quel que soit le prisme à travers lequel on aborde la situation à Gaza, cette situation est une tache sur la conscience de la communauté internationale, a déclaré M. Vella. Il a dénoncé, entre autres, les attaques aveugles et disproportionnées contre les civils ainsi que le recours à des armes au phosphore, qui constituent des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité. Il conviendrait donc de renvoyer cette question à la Cour pénale internationale, a insisté M. Vella.

M. Vella a annoncé que le bureau de l'Assemblée parlementaire de la Méditerranée a décidé à l'unanimité de remettre le prix de cette Assemblée parlementaire à l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNWRA). M. Vella a indiqué que l'Assemblée parlementaire de la Méditerranée encourage les membres du Quatuor à veiller à ce que toutes les parties concernées s'engagent à œuvrer à un règlement du conflit. Il a rappelé qu'un colloque allait se tenir à Malte au début de l'année 2010 sur le thème du statut de Jérusalem.

M. DAVID HAMMERSTEIN, ancien membre espagnol du Parlement européen, a indiqué avoir été l'un des huit parlementaires européens qui, en janvier dernier, ont ressenti dans leur corps les vibrations des bombes lancées sur Gaza; nous fûmes les seuls témoins européens directs du conflit et encore ne fûmes nous présents sur le terrain que quelques heures, a-t-il précisé. Alors que nous étions sur place, il était clair que la vie – l'eau, l'électricité, les transports – ne fonctionnait pas, a poursuivi M. Hammerstein. Nous avons vu les tracts jetés par l'aviation israélienne enjoignant la population gazaouie à rejoindre des abris sûrs, mais personne sur le terrain ne savait où il y avait des abris sûrs, a-t-il ajouté. M. Hammerstein a rappelé que ces dernières années, le Parlement européen a appelé, entre autres, à la levée du siège de Gaza et à la fin de la politique de châtiments collectifs à l'encontre du peuple palestinien. Le Parlement européen est également favorable à la fin de la politique de colonisation israélienne, a-t-il rappelé.

Pour sortir du statu quo actuel, M. Hammerstein a fait état de la proposition récente de M. Javier Solana qui a proposé tout récemment, sans que cette proposition ne reçoive d'écho dans les médias, que le Conseil de sécurité de l'ONU reconnaisse l'État palestinien et la solution fondée sur deux États après un certain délai, même si Israël et d'autres ne reconnaissent pas cet État (si tel devait être le cas, le Conseil de sécurité serait amené à prendre les mesures qui s'imposent pour sortir de l'impasse). L'arrivée au pouvoir d'un nouveau Président aux États-Unis offre une fenêtre d'opportunité, a en outre estimé M. Hammerstein.

M. RAN YARON, Directeur du Département en charge des territoires palestiniens occupés à l'organisation Physicians for Human Rights-Israël, s'est concentré sur les enquêtes menées par Israël au sujet des allégations de violations de droits de l'homme commises à Gaza. Il a ajouté que son organisation estime que ces enquêtes ont été complètement inutiles. Toute société démocratique doit examiner et maintenir elle-même l'application du droit, a-t-il souligné. Bien entendu, le comportement du Hamas durant ce conflit doit être aussi examiné au regard du droit international. L'armée israélienne a créé huit commissions d'enquête en son nom propre, a rappelé M. Yaron; elles se sont penchées sur des questions telles que la santé, l'utilisation du phosphore blanc ou les attaques contre les civils, a-t-il précisé. Le principal problème provient du fait que l'armée enquête sur elle-même, de sorte que l'enquête perd de son objectivité et de son indépendance, a souligné M. Yaron. L'enquête portant sur les questions de santé, par exemple, conclut que le Hamas a utilisé de manière systématique des installations médicales et des véhicules de secours transportant des militants du Hamas pour couvrir des opérations militaires; or sur ce dernier point, les conclusions de l'armée se fondent sur un seul témoignage provenant d'un média italien, sans que l'armée elle-même n'ait recueilli, semble-t-il, aucun autre témoignage permettant d'abonder dans ce sens. En outre, les combattants blessés du Hamas ne sont-ils pas de toute façon habilités à recevoir une aide médicale, a demandé M. Yaron? Au cours de son enquête, l'armée n'a pas contacté d'organisations afin de recueillir des informations sur ce qui s'est passé sur le terrain, alors que des organisations disposent d'éléments qui pourraient incontestablement permettre d'éclairer la situation, a-t-il par ailleurs fait observer.

M. BILL VAN ESVELD, chercheur à la Division Moyen-Orient et Afrique du Nord de Human Rights Watch-Tel Aviv, a d'emblée indiqué que les autorités israéliennes continuent d'empêcher son organisation de pénétrer à Gaza. Human Rights Watch est toutefois parvenue à y pénétrer, par Rafah, avec la coopération de l'Égypte, a-t-il indiqué. Ayant enquêté pour voir si les deux parties avaient violé le droit international humanitaire, Human Rights Watch a rappelé que le phosphore blanc est une substance qui vise à obscurcir le mouvement des forces terrestres; ce n'est pas une arme chimique interdite en tant que telle par le droit international; néanmoins, le phosphore blanc, lorsqu'il entre en contact avec la peau humaine, la brûle parfois jusqu'à l'os et peut entraîner des blessures pouvant entraîner la mort. Ainsi, plusieurs personnes en sont mortes durant le conflit à Gaza. Des fonctionnaires de l'UNRWA ont à plusieurs reprises, en vain, appelé les forces de défense israéliennes à mettre un terme aux pilonnages au phosphore blanc. Alors que le phosphore blanc vise à masquer les mouvements des forces terrestres, il a été utilisé sur des lieux d'où les forces israéliennes étaient absentes, a fait observer M. Van Esveld. L'utilisation délibérée de ce phosphore blanc constitue incontestablement un crime de guerre, a-t-il estimé, indiquant que son organisation avait prié les États-Unis de mettre un terme aux transferts de phosphore blanc vers Israël jusqu'à la fin des enquêtes sur cette question. M. Van Esveld a par ailleurs fait état de résultats d'enquêtes montrant que des civils palestiniens qui ne constituaient absolument aucune menace et se contentaient de marcher dans la rue ont été tués au moyen d'armes légères par des militaires israéliens.


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