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LA RÉUNION SUR LA PALESTINE SE PENCHE SUR LE RÔLE DES PARLEMENTS ET DE LA SOCIÉTÉ CIVILE POUR PROMOUVOIR LE RESPECT DU DROIT INTERNATIONAL

Communiqué de presse

La Réunion internationale des Nations Unies sur la Palestine a entamé ce matin sa deuxième et dernière journée de travaux en se penchant sur le rôle des parlements et de la société civile pour promouvoir le respect du droit international humanitaire et du droit relatif aux droits de l'homme.

Les intervenants ont ainsi examiné les moyens dont disposent les parlements et la société civile, en particulier les médias, pour contribuer à promouvoir le respect du droit international dans le contexte du conflit israélo-palestinien.

Une intervenante a fait observer qu'Israël a abusé du label «fait en Israël» en y associant des produits issus des colonies de peuplement israéliennes; il serait donc judicieux, le cas échéant, que ces produits soient frappés du label «fait dans les implantations» afin que les consommateurs des pays d'exportation, s'ils choisissent de les consommer, le fassent en toute connaissance de cause quant à leur origine. L'accord commercial Union européenne-Israël comporte une clause relative aux droits de l'homme, a-t-il par ailleurs été rappelé; aussi, l'accord pourrait-il être suspendu jusqu'à ce qu'Israël coopère avec les Nations Unies et les enquêtes mandatées par l'ONU en matière de droits de l'homme.

Une intervenante a plaidé en faveur d'un boycott culturel et économique afin qu'Israël commence à payer le prix de l'occupation. Tant qu'Israël ne commencera pas à payer le prix de son occupation des territoires occupés, les choses ne changeront pas, a souligné un autre intervenant, qui a pour sa part précisé que le seul langage compris par Israël est celui du sang. Il a néanmoins attiré l'attention sur une autre méthode pour faire changer les choses, qui consisterait à faire en sorte que les Israéliens commencent à se sentir mal à l'aise avec cette occupation, car actuellement, la majorité des Israéliens sont convaincus qu'il n'y a pas de partenaire palestinien et que leur armée est la plus morale qui soit. L'intervenant a dénoncé la diabolisation et la déshumanisation des Palestiniens et de tous les arabes par les médias israéliens.

Un autre intervenant s'est également penché sur la couverture médiatique du conflit et a fait observer que les médias israéliens sont portés à s'unir derrière le drapeau et à justifier ainsi l'action militaire israélienne. En outre, l'essentiel des informations dont peuvent disposer les médias provient du porte-parole des forces de défense israéliennes, a souligné l'intervenant.

Une intervenante a proposé de se pencher sur la possibilité de faire adopter par l'Assemblée générale - le Conseil de sécurité n'étant pas susceptible de le faire - une résolution demandant qu'une force de protection internationale soit créée et envoyée dans le territoire palestinien occupé en vue de protéger les civils vivant sous occupation. Malgré l'opposition probable d'Israël, cette force de protection, accompagnée de journalistes et d'équipes de prise de vues du monde entier, pourrait se positionner aux frontières jusqu'à Israël accepte de coopérer avec l'ONU, et contribuerait à une évolution probable de l'opinion publique internationale et à des changements de position des gouvernements.

Ont participé à la plénière de ce matin: Mme Phyllis Starkey, membre travailliste du Parlement britannique; M. Yizhar Be'er, Directeur exécutif de Keshev – Centre pour la protection de la démocratie en Israël; Mme Phyllis Bennis, coprésidente du Réseau international de coordination pour la Palestine et Directrice du New Internationalism Project à l'Institut d'études politiques de Washington; M. Nasser Al Laham, rédacteur en chef à l'agence de presse palestinienne Ma'an; et M. Gideon Levy, éditorialiste à Ha'aretz. Ont notamment participé à l'échange de vues qui a suivi ces déclarations les représentants de l'Égypte et des organisations non gouvernementales Third World Network et Centre Europe-Tiers Monde et Union juive française pour la paix.


La plénière sur le rôle des parlements et de la société civile pour promouvoir le respect du droit international humanitaire et du droit relatif aux droits de l'homme se poursuivra cet après-midi, à 15 heures. La séance de clôture de la réunion se tiendra à 17h15.


Plénière III: le rôle des parlements et de la société civile pour promouvoir le respect du droit international humanitaire et du droit relatif aux droits de l'homme

Déclarations

MME PHYLLIS STARKEY, membre travailliste du Parlement britannique, a indiqué que son intérêt pour la situation dans les territoires occupés remonte à 1997 lorsqu'elle s'est rendue dans la région dans le cadre d'une délégation parlementaire pour y constater de visu les effets de l'occupation israélienne. Quand on voit la réalité dans les territoires occupés, cela s'imprime au fer rouge dans votre conscience, a-t-elle ajouté. Du point de vue d'un parlementaire britannique, la politique britannique concernant la situation en Palestine est convenable; mais cela ne débouche malheureusement pas sur une action donnée. Aussi, le rôle du parlementaire est-il de faire pression sur son Gouvernement pour faire bouger les choses. Le fait est que les questions de politique étrangère ne retiennent pas beaucoup l'attention des parlementaires, a fait observer Mme Starkey. Pour qu'un gouvernement manifeste une volonté politique, il faut qu'il pense qu'il peut faire avancer le dossier, a-t-elle poursuivi, ajoutant qu'il faut aussi qu'il pense que cela intéresse les électeurs.

Le Gouvernement travailliste britannique s'est doté d'un système très strict s'agissant des questions relatives aux ventes d'armes, a poursuivi Mme Starkey. Elle a fait observer que récemment, les demandes de licences pour la vente d'un certain nombre de pièces détachées utilisées par l'armée israélienne ont été refusées, car on a appris que ces pièces avaient en fait servi dans le cadre de l'opération «Plomb durci». Le Gouvernement britannique reconnaît que les implantations de colonies sont illégales, a poursuivi Mme Starkey. Or, a-t-elle indiqué, le fait est qu'Israël a abusé du label «fait en Israël» en y associant des produits issus des colonies de peuplement israéliennes; il serait donc judicieux, le cas échéant, que ces produits soient frappés du label «fait dans les implantations» afin que les consommateurs britanniques, s'ils choisissent de les consommer, le fassent en toute connaissance de cause quant à leur origine. L'accord commercial Union européenne-Israël comporte une clause relative aux droits de l'homme, a rappelé Mme Starkey, rappelant que, comme certains l'ont demandé, l'accord pourrait être suspendu jusqu'à ce qu'Israël coopère avec les Nations Unies et les enquêtes qu'elles ont mandatées. Parlementaires et organisations non gouvernementales n'ont pas très bien su coordonner leur action et il faudrait renforcer la coordination en la matière, a conclu Mme Starkey, soulignant que le conflit israélo-palestinien était au cœur de la déstabilisation de toute la région.

M. YIZHAR BE'ER, Directeur exécutif de Keshev – Centre pour la protection de la démocratie en Israël, a indiqué représenter une organisation non gouvernementale israélienne qui s'efforce de se pencher sur le tableau que dressent du conflit les grands médias israéliens, afin de modifier l'angle unilatéral sous lequel ce conflit est couvert. L'instinct des médias israéliens les pousse à être patriotes, militants, à s'unir derrière le drapeau et à justifier ainsi l'action militaire israélienne, a relevé M. Be'er. Projection de unes à l'appui, il a présenté la manière dont les principaux quotidiens israéliens ont couvert le conflit à Gaza. L'un des principaux problèmes qui se pose en matière de couverture médiatique est que l'essentiel des informations dont peuvent disposer les médias provient du porte-parole des forces de défense israéliennes, a souligné M. Be'er.

Prenant l'exemple du massacre de civils palestiniens à l'école de l'UNRWA à Gaza, M. Be'er a fait observer que le principal quotidien israélien, Yedioth Aharonoth, lorsqu'il a finalement parlé de cette tragédie, l'a fait en reléguant l'information en pages intérieures et en disant que les tireurs du Hamas se cachaient lâchement dans les écoles. En fait, il s'agit là uniquement d'une tentative de justifier un massacre de civils, a souligné M. Be'er. Face à de telles attitudes problématiques de la part des médias, il a pris l'exemple de la dernière guerre d'Israël au Liban en faisant observer que lors de la dernière guerre israélo-libanaise, l'accent était mis sur les commentaires qui affirmaient qu'un accord de cessez-le-feu constituerait une défaite pour Israël, exerçant ainsi une pression énorme sur Ehud Olmert. Il a attiré l'attention sur l'importance des titres de une des journaux, faisant observer que le journal qui titrait «Cessez-le-feu sans les soldats kidnappés» aurait pu, plus positivement et judicieusement, titrer «Le Conseil de sécurité approuve le cessez-le feu»; de la même manière, ce journal aurait pu titrer «Forces de défense israéliennes: la guerre jusqu'à la dernière minute» au lieu de «La guerre jusqu'à la dernière minute», afin de bien marquer que ce sont les forces de défense israéliennes qui voulaient poursuivre la guerre jusqu'à la dernière minute et non le Gouvernement.

MME PHYLLIS BENNIS, coprésidente du Réseau international de coordination pour la Palestine et Directrice du New Internationalism Project à l'Institut d'études politiques de Washington, a souligné que le Conseil de sécurité de l'ONU est à la fois l'institution la moins démocratique et la plus puissante de l'Organisation. Actuellement, depuis l'élection du Président Barack Obama, on observe, par rapport à l'ère George W. Bush, un changement de discours qui va fixer les conditions d'une action future, ce qui est indispensable pour que les États-Unis mettent un terme aux conditions qui permettent à Israël de perpétrer toutes ses violations. Se penchant sur la manière de réagir lorsqu'un gouvernement est incapable ou non désireux de protéger sa population, Mme Bennis a relevé qu'en tout état de cause, le Conseil de sécurité doit donner son aval. Aussi, les populations du Sud savent-elles très bien que le concept de responsabilité de protéger est lié au fossé Nord-Sud qui existe depuis la création de l'ONU. Actuellement, le fait est que les plus forts sont privilégiés, a-t-elle souligné.

Mme Bennis a proposé de se pencher sur la possibilité, en contournant le probable veto des États-Unis au Conseil de sécurité, de faire adopter par l'Assemblée générale une résolution demandant qu'une force de protection internationale soit créée et envoyée dans le territoire palestinien occupé en vue de protéger les civils vivant sous occupation, conformément à la quatrième Convention de Genève. Malgré l'opposition probable d'Israël, cette force de protection des Nations Unies se dirigerait alors vers Israël et la Palestine, accompagnée de journalistes et d'équipes de prise de vues du monde entier. Lorsque les militaires israéliens leur refuseraient l'entrée, les membres de cette force de protection annonceraient alors qu'ils n'ont pas l'intention de forcer leur passage mais qu'ils ont pour mandat international de protéger les civils vulnérables et qu'ils comptent bien attendre aux frontières jusqu'à Israël accepte de coopérer avec l'ONU. La suite dépendrait alors des mesures que prendrait Israël, mais elle serait principalement fonction de l'évolution probable de l'opinion publique internationale et des changements de position des gouvernements qui en résulteraient.

M. NASSER AL LAHAM, rédacteur en chef à l'agence de presse Ma'an, a souligné que la guerre à Gaza n'était pas une guerre classique, car les civils ne savaient pas où était l'armée, où étaient les F16 et qui bombardait qui. Les armes à Gaza étaient aveugles, a-t-il souligné. À Gaza, on est victime de la géographie; qui que l'on soit, l'important est d'être situé sur tel ou tel mètre carré où on est ou non en sécurité. C'est une véritable roulette russe. On ne sait pas qui a été tué, ni pourquoi. Tout, dans cette guerre est secret. La règle, c'est tricher: on se sert notamment pour cela des médias, comme le fait d'ailleurs Ben Laden. Même les journalistes israéliens ne savaient pas ce qui se passait. Aucune distinction n'est établie entre civils et militaires, a insisté M. Al Laham. Il a ajouté que le Ministère israélien des affaires étrangères avait suggéré de lancer une bombe atomique sur Gaza, ce qui est un discours tout à fait nouveau du point de vue militaire. Au regard des sommes énormes dépensées en armements par Israël et donc des intérêts économiques en jeu, il est incontestable que les juifs en Israël sont aussi victimes que les Palestiniens de cette machine de guerre israélienne, a conclu M. Al Laham.

M. GIDEON LEVY, éditorialiste à Ha'aretz, a déclaré que tant qu'Israël ne commencera pas à payer le prix de son occupation des territoires occupés, les choses ne changeront pas. En effet, le seul langage compris par Israël est malheureusement celui du sang, a-t-il fait observer. Israël serait toujours au Liban si des centaines d'Israéliens n'avaient pas été tués, a-t-il assuré. Israël ne fait jamais de concessions tant qu'il n'y a pas eu un bain de sang, a-t-il insisté. La seconde manière de faire changer les choses est de faire pression sur Israël, a poursuivi M. Levy. Une autre méthode, a-t-il souligné, consiste à faire en sorte que les Israéliens commencent à se sentir mal à l'aise avec cette occupation; en effet, pour les Israéliens, il n'y a pas d'occupation car on ne parle que peu de cette question, la majorité des gens étant convaincus qu'il n'y a pas de partenaire palestinien et que leur armée est la plus morale qui soit. Sans une collaboration des médias israéliens, l'occupation n'aurait pas duré 42 ans, a estimé M. Levy. Il a ainsi dénoncé la diabolisation et la déshumanisation des Palestiniens et de tous les arabes par les médias israéliens, qui ont incontestablement pénétré les esprits des Israéliens et sans lesquelles l'occupation n'aurait pas duré si longtemps. La proportion, pour ce qui est des victimes du conflit, est de 100 Palestiniens morts pour un Israélien mort, a rappelé M. Levy. Les choses ne changeront pas tant que les médias israéliens ne changeront pas, a-t-il conclu, soulignant qu'aujourd'hui, les jeunes Israéliens de moins de trente ans n'ont jamais vu un Palestinien, sauf sous les traits rapportés d'un kamikaze.

Échange de vues

Saluant la qualité des déclarations faites durant cette réunion, le représentant de l'Égypte a estimé que les intervenants se sont juste trompés d'enceinte, car si l'on veut parler de justice et d'équité, ce n'est pas à l'ONU qu'il faut venir. Le Comité contre la torture qui siège à Genève et qui n'a jamais mis les pieds à Gaza nous a livré un rapport dans lequel il affirme qu'Israël agit en légitime défense, alors que l'ONU est censée protéger les droits de l'homme, a-t-il fait observer.

Pour ce qui est de la responsabilité de protéger, il faut qu'elle vise tout le monde ou personne, a ajouté cet intervenant. Un autre s'est demandé pourquoi la responsabilité ou le droit de protéger ne s'appliquerait pas à tous les droits de l'homme et non pas seulement dans le contexte de la guerre.

S'agissant de la notion de responsabilité de protéger, une intervenante s'est inquiétée du risque de voir se substituer cette notion à celle, fondamentale pour l'ONU, du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes: on irait ainsi protéger des peuples faute d'être capable d'assurer leur droit à l'autodétermination. Le risque est de voir l'ONU «devenir ambulancier ou pompier-pyromane», a-t-elle ajouté.

Il faudrait que soit éclaircie quelque peu la notion de proportionnalité dans le contexte du conflit israélo-palestinien, a-t-il en outre été estimé.

MME STARKEY a insisté sur la nécessité, pour les parlementaires notamment, de continuer à faire savoir que les contribuables, britanniques en l'occurrence, paient le prix d'une aide aux Palestiniens qui est réduite à néant par l'occupant israélien. Il faut continuer à informer le public pour faire changer les choses

M. BE'ER a notamment insisté, lui aussi, sur la nécessité de mieux éduquer les médias et, partant, le public.

MME BENNIS a souligné que le débat sur la responsabilité de protéger, à New York, sera très intéressant. La notion selon laquelle seuls les Israéliens et les Palestiniens devraient négocier est dangereuse, a-t-elle souligné. Il faut faire avancer l'idée que ce qui est en cause c'est la lutte pour les droits de l'homme, a-t-elle insisté. Elle a plaidé en faveur d'un boycott culturel et économique afin qu'Israël commence à payer le prix de l'occupation.

M. LEVY a fait observer qu'il y a deux manières de gérer un toxicomane: soit on continue de lui donner de l'argent pour qu'il puisse se procurer de la drogue, soit on l'envoie suivre une cure de désintoxication, ce qui est la meilleure façon de prouver à cette personne qu'on tient à elle. Un véritable ami d'Israël devrait lever le ton et critiquer l'occupation israélienne et l'État d'Israël, ce qui n'aura rien à voir avec de l'antisémitisme. La seule manière constructive d'aider Israël est d'élever la voix à son encontre, a insisté M. Levy.


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