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LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS ACHÈVE LES TRAVAUX DE SA TRENTE-CINQUIÈME SESSION

Communiqué de presse
Il adopte des observations finales sur les rapports de la Slovénie, de l'Autriche, de l'Ouzbékistan, de la Bosnie-Herzégovine et de la Libye

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a clos aujourd'hui les travaux de sa trente-cinquième session, qui se tenait à Genève depuis le 7 novembre dernier, en rendant public ses observations finales sur les rapports de la Slovénie, de l'Autriche, de l'Ouzbékistan, de la Bosnie-Herzégovine et de la Libye.

Dans ses observations finales sur la Slovénie, si le Comité se félicite de l'interdiction de la discrimination entre hommes et femmes et de l'adoption de la loi sur l'égalité des chances, il constate en revanche que les femmes slovènes n'occupent toujours pas une position favorable au sein de la société. Il fait part de sa vive préoccupation au sujet de discriminations à leur égard quant à l'accès à l'emploi, à un salaire égal, au montant de leur pension de vieillesse inférieur à celui des hommes, à leur faible participation dans la prise de décision et à leur faible présence à des postes publics importants. Le Comité est également préoccupé par le harcèlement sexuel sur le lieu de travail qui ne fait toujours pas l'objet d'une législation spécifique.

Concernant l'Autriche, le Comité accueille avec satisfaction l'adoption de diverses mesures visant à protéger la situation des femmes, tels que des programmes pour combattre la violence domestique, le trafic humain et l'exploitation sexuelle des femmes, mais aussi des enfants. Toutefois, le Comité se dit aussi préoccupé par le fait que 13 % de la population et 18 % des familles nombreuses sont exposés à la pauvreté et que certains salaires fixés par des conventions collectives n'atteignent parfois pas même 50 % du salaire net moyen du marché du travail.

S'agissant du rapport initial de l'Ouzbékistan, si le Comité se félicite de constater la création d'organes visant à promouvoir et protéger les droits de l'homme, tel que le Médiateur, le Comité est en revanche préoccupé au sujet du niveau de pauvreté de la population, dont 28% vit en dessous du seuil de pauvreté et ne peut pas satisfaire aux besoins vitaux. Il s'inquiète également des effets négatifs de la privatisation des soins médicaux à l'égard des personnes les plus vulnérables, en particulier les personnes à faibles revenus et la population rurale.

Concernant la Bosnie-Herzégovine, le Comité a conscience des difficultés rencontrées par ce pays pour appliquer pleinement les dispositions du Pacte suite au conflit armé. Toutefois, il apprécie l'adoption des lois sur les minorités nationales et sur l'égalité des sexes. Le Comité exprime sa vive préoccupation au sujet du retour des personnes déplacées qui appartiennent à des minorités et qui ne parviennent pas à bénéficier pleinement des droits économiques, sociaux et culturels. Le Comité s'inquiète également du non-respect des obligations contractuelles par certains employeurs privés, et demande l'amélioration des services d'inspection du travail.

S'agissant de la Libye, le Comité relève dans ses observations finales l'absence de nombreuses réponses à des questions traitant de points fondamentaux, tels que le chômage, le salaire minimum, le droit syndical. Il regrette également l'absence de lois interdisant la discrimination raciale. En revanche, le Comité est satisfait au sujet de la mission d'assistance technique de l'Organisation internationale du travail (OIT) qui s'est tenue en Libye en juillet 2005 afin d'encourager la mise en œuvre des engagements de la Libye en vertu de plusieurs conventions.

Au cours de la session, le Comité a également adopté deux observations générales qui visent à aider les États parties à s'acquitter de leurs obligations en vertu des différentes dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels: l'observation générale n°17 sur le paragraphe 1 c) de l'article 15 du Pacte, relatif aux droits d'auteur, et l'observation générale n°18 sur l'article 6, relatif au droit au travail.

L'observation générale sur les droits d'auteur invite les États parties à prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la protection efficace des intérêts moraux et matériels des auteurs et s'opposer à toute déformation, mutilation ou autre modification de ces productions ou à toute autre atteinte qui serait préjudiciable à leur honneur ou à leur réputation.

Quant à l'observation générale sur le droit au travail, le texte insiste sur les trois niveaux d'obligations juridiques incombant aux États parties: l'obligation de respecter le droit au travail, celle de le protéger et celle de le mettre en œuvre, tout en rappelant que «la principale obligation consiste à agir en vue d'assurer progressivement le plein exercice du droit au travail, ce qui impose l'obligation de progresser aussi rapidement que possible vers l'objectif de plein emploi».

Par le passé, le Comité a adopté des observations générales portant notamment sur le droit à l'eau, le droit au meilleur état de santé possible, le droit à l'éducation, le droit à une alimentation suffisante, le droit à un logement convenable, le droit des personnes âgées, des personnes handicapées.


Au cours de sa prochaine session, qui se tiendra du 1er mai au 19 mai 2006, le Comité doit examiner les rapports de Monaco, du Liechtenstein, du Maroc, du Canada et du Mexique.



Observations finales

Le Comité a adopté des observations finales sur les cinq pays dont les rapports ont été examinés au cours de la session, à savoir, la Slovénie, l'Autriche, l'Ouzbékistan, la Bosnie-Herzégovine et la Libye.


Dans ses observations finales sur le rapport initial de la Slovénie, le Comité note avec satisfaction les efforts du pays pour s'acquitter de ses obligations à l'égard du Pacte. Les dispositions du Pacte ont été incorporées au droit national et peuvent ainsi être invoquées devant les tribunaux. Le Comité se félicite également du bon fonctionnement de l'institution du Médiateur et de constater que ce dernier est compétent pour soumettre des plaintes de violations des droits de l'homme à la Cour Constitutionnelle. Le Comité note aussi avec satisfaction l'interdiction de la discrimination entre hommes et femmes, l'entrée en vigueur en 2002 de la loi sur l'égalité des chances et la création du Bureau de l'égalité des chances. Toutefois, au sujet des discriminations, le Comité reste préoccupé de la situation des Roms, encore victimes de ségrégations, qui ne peuvent pas pleinement jouir de leurs droits culturels ni d'une éducation dans leur langue maternelle, à la différence d'autres minorités qui bénéficient de ce droit en vertu d'accords bilatéraux. Le Comité se dit également préoccupé à plusieurs égards au sujet des femmes. Malgré les mesures adoptées pour améliorer leur statut, la situation des femmes n'est toujours pas très favorable au sein de la société. Elles sont encore victimes de discriminations quant à l'accès à l'emploi, à un salaire égal, au montant de leur pension de vieillesse qui est inférieur à celui des hommes, à leur faible participation dans la prise de décision et à leur faible nombre à des postes publics importants. Le Comité regrette également que le harcèlement sexuel sur le lieu de travail ne dispose pas d'une protection légale spécifique. Le Comité fait aussi part de sa préoccupation au sujet du trafic des femmes et des enfants car la Slovénie fait figure de pays d'origine, de passage et de destination pour le trafic. À ce sujet, le Comité regrette l'absence d'une législation spécifique pour combattre ce phénomène. Il se dit enfin préoccupé au sujet de l'absence de dispositif légal pour traiter des questions de violence conjugale.

Le Comité fait part de sa préoccupation concernant le taux de chômage élevé chez les jeunes, les membres de minorités et les personnes handicapées. Il relève aussi la précarité de l'emploi à l'égard des personnes embauchées avec des contrats de courte durée, lesquels sont de plus en plus fréquents. Le Comité est aussi préoccupé par la persistance des disparités régionales significatives qui ne permettent pas une application, sur un pied d'égalité, des droits économiques, sociaux et culturels tels que l'emploi, l'assistance sociale et les services sociaux. Enfin, le Comité est préoccupé par la situation des ressortissants de l'ex-Yougoslavie qui ont été «effacés» des registres de la population en 1992 et qui ont donc perdu leur nationalité slovène et leur droit de résidence, et par suite conséquent ne peuvent plus pleinement bénéficier des droits sociaux et économiques, notamment les droits au travail, à la sécurité sociale, à la santé et à l'éducation. À cet égard, le Comité invite la Slovénie à prendre toutes les mesures nécessaires pour remédier à cette situation, notamment en restituant, en application des décisions de la Cour constitutionnelle, le statut de résident permanent à toutes les personnes concernées.


S'agissant du troisième rapport périodique de l'Autriche, le Comité note avec satisfaction la publication, en février 2005 par le Ministère fédéral des finances, d'un plan d'action pour améliorer la cohérence entre l'approche des droits de l'homme et les politiques des institutions financières internationales. Le Comité se félicite également des programmes adoptés pour combattre la violence domestique, le trafic des personnes et l'exploitation sexuelle des enfants et des femmes. Le Comité relève aussi avec satisfaction le pourcentage très élevé de femmes parmi les Ministres: 50 % des portefeuilles ministériels, dont des postes clé, sont effectivement occupés par des femmes. Néanmoins, le Comité note avec préoccupation que le Pacte n'est pas directement applicable et que, par conséquent, les droits reconnus dans le Pacte ne peuvent pas être directement invoqués par les citoyens devant les tribunaux. À ce sujet, le Comité invite l'Autriche à s'assurer que les formations à l'intention du personnel judiciaire et administratif prennent en compte l'applicabilité directe des dispositions du Pacte afin de promouvoir son utilisation en tant que source du droit.

Par ailleurs, le Comité exprime ses profondes inquiétudes concernant la persistance d'attitudes racistes et xénophobes à l'égard de certaines parties de la population. Le Comité regrette également qu'aucune des lois constitutionnelles autrichiennes ne contienne une disposition sur l'égalité des sexes. Le Comité regrette aussi l'absence de mesures efficaces pour faciliter le retour des femmes sur le marché du travail suite à un congé parental. Le Comité s'est aussi dit préoccupé par le fait que des salaires fixés par certaines conventions collectives n'atteignent parfois pas même 50% du salaire net moyen du marché du travail. Il est aussi profondément inquiet de constater que 13% de la population et 18% des familles nombreuses sont exposés à la pauvreté et que si l'Autriche n'accordait pas des prestations sociales, l'ampleur de la pauvreté parmi la population serait bien plus alarmante. Au sujet des avantages sociaux, le Comité est préoccupé de constater que les aides sociales apportées aux demandeurs d'asile sont souvent considérablement inférieures à celles perçues par les citoyens autrichiens. Le Comité fait aussi part de sa préoccupation face à l'introduction de frais d'inscription universitaires en 2001 et de la diminution du nombre d'étudiants inscrits en première année. Enfin, le Comité recommande à l'Autriche d'adopter un plan d'action national sur les droits de l'homme et d'établir dans ce cadre une institution des droits de l'homme afin de promouvoir le rôle de la société civile dans la protection des droites économiques, sociaux et culturels.


En ce qui concerne le rapport initial de l'Ouzbékistan, le Comité accueille avec satisfaction la création du poste de Médiateur parlementaire et du Centre national des droits de l'homme, compétent entre autres pour les droits économiques, sociaux et culturels. Le Comité se félicite par ailleurs de l'adoption de mesures qui favorisent l'égalité entre hommes et femmes, en particulier la création du Comité des femmes et l'établissement d'un quota minimum de 30% de femmes sur les listes électorales des députés. Toutefois, le Comité regrette de constater la réapparition de stéréotypes traditionnels à l'encontre des femmes et de phénomènes comme la polygamie ou les mariages forcés. Il demeure également préoccupé au sujet des inégalités persistantes entre hommes et femmes dans les domaines de la formation professionnelle et de l'emploi et aussi au sujet de la faible représentation des femmes à des postes importants dans les secteurs public et privés.

Le Comité se dit en outre préoccupé par le manque d'indépendance du pouvoir judiciaire. Il s'inquiète aussi de constater que le salaire minimum est insuffisant pour assurer un niveau de vie décent, d'autant plus que dans la pratique, ce salaire minimum n'est pas toujours appliqué. Il regrette également que les faibles montants des retraites et des allocations chômage ne permettent pas de vivre décemment. Au final, le Comité s'inquiète de voir que 28% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté et ne peut pas satisfaire aux besoins vitaux. Le Comité est aussi préoccupé par le faible niveau d'aide sociale, en particulier pour les personnes vulnérables, comme les mères célibataires, les personnes handicapées et les réfugiés. En matière de soins, le Comité s'est dit préoccupé par le fait que la privatisation des services de santé et l'introduction d'une assurance médicale privée aient des effets négatifs sur les personnes à faibles revenus et sur la population rurale.


Le Comité apprécie les efforts de la Bosnie-Herzégovine, qui présentait son rapport initial, pour rédiger ce rapport et sa franchise au sujet des difficultés rencontrées pour appliquer les dispositions du Pacte. Le Comité a conscience que la Bosnie-Herzégovine souffre toujours des conséquences du grave conflit qu'elle a connu de 1992 à 1995, dont le découpage constitutionnel du pays qui ne facilite pas l'harmonisation des législations et des procédures. Le Comité note avec satisfaction l'adoption en 2003 d'une loi sur la protection des minorités nationales qui reconnaît 17 minorités dans le pays, ainsi que la loi sur l'égalité des sexes qui établit entre autres une Agence nationale pour l'égalité des sexes. Le Comité est également satisfait de constater que la plupart des personnes déplacées suite à la guerre et qui avaient perdu leurs biens les ont retrouvés suite à des décisions judiciaires. Toutefois, le Comité exprime ses profondes inquiétudes au sujet des personnes déplacées qui appartiennent en particulier aux minorités à qui l'on refuse souvent l'accès à la protection sociale, la santé, l'éducation et à d'autres droits économiques, sociaux et culturels, empêchant ainsi tout retour durable.

Le Comité apprécie également la priorité accordée aux politiques préventives de santé, par exemple en formant les médecins de famille qui assurent les premiers soins et conseillent les patients sur les risques de santé. En revanche, le Comité est profondément préoccupé par le taux de chômage élevé, en particulier parmi les jeunes, les femmes, les personnes handicapées, les Roms et d'autres membres de minorités ethniques. Le Comité est également inquiet de voir que plus d'un tiers de la main d'œuvre est employé dans le secteur non formel. Le Comité relève également que suite aux privatisations, les employeurs ne respectent pas toujours leurs obligations contractuelles. Ainsi, les employés sont licenciés sans réel motif, les salaires ne sont pas payés et les cotisations sociales ne sont pas à jour. A cet égard, le Comité exprime son inquiétude au sujet de l'inspection du travail qui ne dispose pas de ressources suffisantes pour combattre ce phénomène. Le Comité est également profondément préoccupé par l'ampleur de la pauvreté, particulièrement dans les secteurs ruraux et parmi les personnes déplacées, les réfugiés, les familles monoparentales, les victimes de violences sexuelles lors du conflit, les personnes âgées, les Roms et des membres d'autres minorités ethniques. Leurs besoins spécifiques ne sont pas assez pris en compte.


Dans ses observations finales sur le deuxième rapport périodique de la Libye, le Comité note avec satisfaction le fait que la Libye ait accueilli une mission d'assistance technique de l'Organisation internationale du travail (OIT) en juillet 2005 dans le but d'encourager la mise en œuvre des engagements auxquels elle a souscrit en vertu de plusieurs conventions en matière de sécurité sociale. Le Comité se réjouit également de savoir que les femmes peuvent maintenant voyager librement à l'étranger. Il est aussi satisfait de savoir que la Libye a le taux d'instruction le plus élevé d'Afrique du Nord et que les filles sont nombreuses à l'école. Mais le Comité regrette que beaucoup des questions qu'il a posées soient restées sans réponse, en particulier s'agissant de la situation relative au chômage, au salaire minimum, à la pauvreté, au droit syndical. Le Comité recommande donc à la Libye de fournir, dans son prochain rapport, une liste détaillée de renseignements sur tous ces points. De plus, le Comité regrette que ses précédentes observations finales n'aient pas non plus été prises en compte et que la Libye ne soit toujours pas en mesure de présenter des cas de jurisprudence démontrant l'application des dispositions du Pacte dans le droit interne.

Le Comité note aussi avec préoccupation que la Libye n'a pas encore mis en place une institution indépendante des droits de l'homme conforme aux Accords de Paris. Il relève également que les organisations non gouvernementales qui traitent des questions relevant du Pacte ne sont pas libres de leurs actions. Le Comité est également préoccupé par l'absence de législation interdisant la discrimination raciale et regrette que la Libye n'ait pas fourni des informations suffisantes sur les mesures adoptées qui garantissent que les travailleurs migrants soient traités dans le respect des principes de non-discrimination. D'autant plus que des informations font état de discriminations raciales à l'égard des Noirs Africains, lesquelles ont conduit à quelques occasions à des actes de violence à leur égard. Le Comité s'inquiète également de savoir que 28% de la population n'a pas accès à l'eau potable. Il est également préoccupé au sujet des limitations imposées pour l'accès à l'internet. Par ailleurs, le Comité exprime de profondes inquiétudes concernant la loi qui interdit l'utilisation d'autres langues que l'arabe et l'enregistrement de noms non arabes pour les nouveau-nés. À cet égard, le Comité recommande vivement à la Libye de supprimer cette loi ainsi que le Comité de correction des noms.

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

ESC05021F