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LA CONFÉRENCE DU DÉSARMEMENT EXAMINE UN NOUVEAU PROJET DE DÉCISION SUR SES ORGANES SUBSIDIAIRES ET COORDONNATEURS SPÉCIAUX

Compte rendu de séance


La Conférence du désarmement a tenu ce matin une séance publique consacrée à l'examen d'une nouvelle version révisée d'un projet de décision sur le programme de travail de la Conférence pour 2019. Le Président a indiqué qu’il avait l’intention de soumettre son projet à la Conférence à la séance plénière de jeudi prochain, alors que le mandat de la présidence britannique se termine cette semaine.

Le texte examiné aujourd'hui par les membres de la Conférence prévoit la création de quatre organes subsidiaires chargés, respectivement, de la cessation de la course aux armements nucléaires et désarmement nucléaire, de la prévention de la guerre nucléaire, y compris toutes les questions qui y sont liées; des matières fissiles destinées à la fabrication d'armes nucléaires et d'autres dispositifs nucléaires explosifs; de la prévention d'une course aux armements dans l'espace; et des arrangements internationaux efficaces pour garantir les États non dotés d'armes nucléaires contre l'emploi ou la menace de ces armes. Un calendrier des réunions de ces organes subsidiaires figure dans le projet. Le projet propose également de nommer des coordonnateurs spéciaux chargés respectivement des questions émergentes et des nouvelles technologies et de l’amélioration du fonctionnement de la Conférence et l'élargissement de sa composition (le texte proposé par le Président figure dans un document de travail à distribution limitée CD/WP.619/Rev.2).

Le Président, M. Aidan Liddle du Royaume-Uni, a assuré qu’il avait pour seul objectif de ramener la Conférence à son mandat de négociation. De nombreuses délégations ont relevé que si le texte n’était pas idéal, il était cependant le plus susceptible de recueillir le consensus, et se sont déclarées en sa faveur. D'autres ont regretté son ambiguïté en ce qui concerne le mandat du coordonnateur spécial chargé du fonctionnement de la Conférence; elles ont aussi mis en garde contre le risque d’éloignement de la Conférence de ce qui constitue son mandat fondamental, à savoir la négociation. Une délégation s’est dite préoccupée par la tendance à créer des organes subsidiaires pour éviter que la Conférence n’aborde les questions de fond. Plusieurs délégations ont recommandé que certains points de l’ordre du jour soient traités dans le cadre d’un organe subsidiaire distinct.

Les délégations suivantes sont intervenues au sujet du projet du Président: Australie, Maroc, Canada, Fédération de Russie, Allemagne, États-Unis, République de Corée, France, Japon, Inde, Égypte, Afrique du Sud, Mexique, Cuba, Pakistan, Venezuela, République arabe syrienne, Chine, République islamique d’Iran, Algérie, Turquie, Brésil, Bélarus, Argentine, Pays-Bas et Chili.

Le Pérou, dont la Conférence accueillait la nouvelle Représentante permanente, et la Malaisie, en tant que présidente du troisième comité préparatoire de la Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), ont fait des déclarations sur des questions de fond d'ordre général.


La prochaine réunion plénière publique de la Conférence aura lieu le jeudi 14 mars à 10 heures.


Déclarations

Le Pérou a rappelé que l’année 2019 marquait le cinquantenaire de l’Agence pour l’interdiction des armes nucléaires en Amérique latine et dans les Caraïbes (Organismo para la Proscripción de las Armas Nucleares en la América Latina y el Caribe, OPANAL). Depuis cinquante ans également, « nous travaillons à l’application du Traité de Tlatelolco, aux termes duquel avait été créée la première zone exempte d’armes nucléaires dans une région densément peuplée ». Le Pérou réaffirme son engagement pour la paix, le désarmement et le renforcement de la sécurité internationale, sa priorité étant l’interdiction et l’élimination de toutes les armes de destruction massive.

Le Pérou a ensuite regretté que la Conférence n’ait toujours pas trouvé le consensus au sujet de son programme de travail. Toutefois, a relevé le Pérou, il est possible de poursuivre des délibérations de fond en vue de préparer le terrain pour adopter un programme complet et équilibré.

S’agissant du projet de programme de travail proposé par le Président, le Pérou a jugé très positive la mention d’instruments juridiquement contraignants, qui contribuent au désarmement et à la non-prolifération. Il a ajouté que la création du poste de coordonnateur chargé du fonctionnement et de l’élargissement de la Conférence serait l’occasion de dialoguer et de proposer des mécanismes pour intégrer de nouveaux États membres.

Le Pérou s’est dit convaincu, d’autre part, que l’autonomisation des femmes et l’égalité entre les sexes avaient un effet direct sur la paix et la sécurité. En tant que membre non permanent du Conseil de sécurité, le Pérou défend ce thème transversal dont l’une des composantes importantes est la lutte contre violence sexuelle dans les conflits. La délégation s’est félicitée de la présence de nombreuses femmes au sein de la Conférence.

La Malaisie, en tant que présidente de la troisième session du Comité préparatoire de la Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), a fait savoir que des consultations allaient commencer ces prochains jours en amont de la session du Comité préparatoire. La Malaisie a souligné le lien étroit entre les travaux de la Conférence du désarmement et le TNP. Elle a aussi présenté ses condoléances aux familles et aux amis des victimes de la catastrophe aérienne qui vient de frapper l’Éthiopie.

Examen du projet de programme de travail

Le Président de la Conférence, M. AIDAN LIDDLE (Royaume-Uni), a remercié les délégations qui ont contribué à l'élaboration de son projet de décision sur le programme de travail de la Conférence. Il a indiqué avoir retenu, dans le texte CD/WP.619/Rev.2, plusieurs propositions ayant été faites par les délégations. Le projet contient le calendrier des réunions des organes subsidiaires (huit réunions par organe) et les noms de leurs coordonnateurs. Pour leur part, les coordonnateurs spéciaux décideront eux-mêmes des dates de leurs réunions, a précisé le Président. Ce texte étant le plus susceptible de recueillir le consensus, le Président a indiqué qu’il le soumettrait à la Conférence à la prochaine séance plénière, jeudi 14 mars.

L’Australie a dit soutenir sans réserve le projet de décision. Elle a fait observer que toutes les délégations devraient pouvoir apporter leur contribution dans le cadre défini par le projet de décision.

Le Maroc a déclaré que, vu la complexité de la conjoncture, il estimait que l’adoption du projet de la présidence devrait baliser le terrain vers l’adoption d’un programme et le Maroc salue le fait que M. Liddle ait procédé à de larges consultations pour établir un texte reflétant une volonté d’assurer le bon fonctionnement des organes subsidiaires. Le Maroc juge pertinente la nomination des coordonnateurs spéciaux, s’agissant en particulier de la question de l’élargissement de la Conférence.

Le Canada a salué la méthode employée par la présidence pour élaborer le projet de décision. Il a dit craindre que, faute d’accord cette semaine, la Conférence risquait de se disperser complètement en 2019.

La Fédération de Russie a salué les efforts de la présidence en vue de trouver un compromis sur le projet de décision, notamment l’alignement des mandats des organes subsidiaires sur les points de l’ordre du jour de la Conférence. Mais la Fédération de Russie a regretté que certains points qui lui tiennent à cœur ne se retrouvent pas dans le projet.

Dans une deuxième intervention, la Fédération de Russie a mis en cause la pertinence de l’inclusion de la notion de multiculturalisme figurant dans le préambule du projet, estimant que cette notion n’entrait pas dans le mandat de la Conférence du désarmement. La Fédération de Russie a déploré la manière non transparente et non inclusive dont cette notion est apparue.

L’Allemagne a appelé la Conférence à démontrer, cette semaine, qu’elle était encore en mesure de mener des débats. L’Allemagne a insisté sur le fait que le projet de décision, fruit d’une vaste consultation, portait sur une question de procédure et non sur le fond.

Les États-Unis ont fait part de leur scepticisme quant à une reprise des débats au sein des organes subsidiaires et de leur déception que les propositions initiales à ce sujet aient été diluées. Le projet est le meilleur possible à ce stade, ont cependant estimé les États-Unis. La délégation a exprimé son soutien à la délégation suisse, appelée selon le projet à diriger les travaux sur le fonctionnement de la Conférence.

La République de Corée a soutenu la proposition de la Présidence, notamment parce que M. Liddle s’est efforcé de respecter la diversité géographique et la parité entre les sexes dans la désignation des coordonnateurs.

La France a salué les efforts de la présidence pour remettre la Conférence au travail. Elle a cependant estimé que les propositions initiales reflétaient mieux les préoccupations des délégations. Si le texte n’est pas idéal, il est cependant le plus susceptible de recueillir le consensus. « La France n’ira pas en-deçà de ce texte », a mis en garde la délégation. Elle a jugé excellent le choix des coordonnateurs proposé dans le projet du Président.

Le Japon a recommandé que les coordonnateurs des organes subsidiaires cadrent préalablement les travaux et fixent les objectifs.

L’Inde a notamment demandé des explications sur la définition du « multiculturalisme », qui est mentionné dans le préambule du projet, et sur les modalités de réunion des organes subsidiaires.

L’Égypte a salué l’ajout dans le préambule de la mention, proposée par la Fédération de Russie, de l’importance de mener les travaux de la Conférence « de manière équilibrée et exhaustive ». Elle a demandé que les réunions des organes subsidiaires ne soient pas toutes concentrées sur le mois du ramadan, du 5 mai au 6 juin 2019.

L’Afrique du Sud a dit attendre des instructions de sa capitale, comme la plupart des autres délégations. Elle a plaidé contre l’adoption d’une décision trop rapide.

Le Mexique a attiré l’attention sur la référence faite, dans le projet, aux travaux des organes subsidiaires qui avaient été créés en 2018, et s'est demandé comment elle devait être interprétée.

Cuba a estimé positif que le projet précise que les experts qu’il est proposé de consulter ne devront pas participer aux travaux de nature procédurale. Cuba a mis en garde contre le risque d’éloignement de la Conférence de ce qui constitue son mandat fondamental, à savoir la négociation, et a regretté que les coordonnateurs spéciaux puissent tenir des consultations hors de la présence de tous les membres. Contrairement à la présidence, Cuba a jugé très important de fixer un calendrier des réunions pour les coordonnateurs spéciaux.

Le Pakistan a salué la rationalisation des travaux de la Conférence que prévoit le projet et la valeur des coordonnateurs et coordonnateurs spéciaux qu’il est prévu de nommer. Le Pakistan aurait aimé que le projet porte aussi sur les questions correspondant aux points 5, 6 et 7 de l’ordre du jour. Il a dit attendre avec intérêt un travail de nature technique à la Conférence.

Le Venezuela s’est dit préoccupé par la tendance à créer des organes subsidiaires pour éviter que la Conférence n’aborde les questions de fond. Il a estimé que la question des nouvelles technologies et des questions émergentes devrait être traitée par un organe subsidiaire. Le Venezuela a insisté sur le principe d’égalité souveraine des États, qui oblige la Conférence à traiter tous les États à égalité, et a regretté que certains coordonnateurs qu’il est proposé de nommer ne donnent pas de garanties d’absolue neutralité. Le Venezuela a mis en garde contre le risque de politisation des organes subsidiaires prévus par le projet de décision et a émis plusieurs propositions relatives à la nomination des coordonnateurs et coordonnateurs spéciaux.

La République arabe syrienne a dit craindre que des intentions cachées n’expliquent la décision de présenter maintenant la proposition de décision. La Syrie a assuré qu’elle ne donnerait pas son aval à une proposition qui entraînerait la Conférence dans des débats oiseux, lesquels n’amèneraient pas la Conférence à négocier de traité. Elle a proposé que la Conférence prenne d’abord une décision sur les questions de fond, puis une autre décision sur les questions de forme, autrement dit qu’elle définisse le mandat des organes subsidiaires avant d’en désigner les coordonnateurs; et que les points de l’ordre du jour 5, 6 et 7 soient traités dans le cadre d’un organe subsidiaire distinct.

La Chine a proposé de remplacer « multiculturalisme » par « multilatéralisme » dans le préambule. Elle s’est dite convaincue que les coordonnateurs proposés par la présidence seront respectueux des États et de leurs opinions. La Chine a fait observer que, pendant le débat sur le fonctionnement et l’élargissement de la Conférence, il ne faudra veiller à ce que certains États n'imposent pas leurs points de vue.

La République islamique d’Iran a déclaré que les organes subsidiaires devraient traiter des points à l’ordre du jour de la Conférence, le mandat sur les matières fissiles devant être libellé sur le même modèle que les autres. L’Iran a regretté l’ambiguïté du projet en ce qui concerne le travail du coordonnateur spécial chargé du fonctionnement de la Conférence.

L’Algérie a estimé déterminant de revitaliser la Conférence sur la base de son mandat de négociation. Elle a recommandé que le calendrier serve à mesurer les progrès accomplis et a demandé des précisions supplémentaires sur le choix des coordonnateurs et des coordonnateurs spéciaux.

La Turquie s’est dite satisfaite que les rapports des organes subsidiaires de l’an dernier aient été mentionnés dans le projet en tant que base des travaux des organes qu’il est proposé de créer en 2019. Elle a cependant mis en doute la nécessité de créer un coordonnateur spécial sur sa composition et ses méthodes de travail, qui ne sont pas des facteurs dans l'impasse actuelle dans laquelle se trouve la Conférence.

Le Brésil a assuré qu’il travaillerait comme un facilitateur neutre et impartial au service de la Conférence s’il devait assumer la coordination d’un organe subsidiaire. Il a ensuite relevé un déséquilibre dans le projet s’agissant de la présentation des travaux respectifs des organes subsidiaires et des coordonnateurs spéciaux.

Le Bélarus a dit être souple quant à la manière dont la question des nouvelles technologies et questions émergentes doit être abordée à la Conférence. Il a proposé de modifier le mandat du coordonnateur spécial sur le fonctionnement de la Conférence de manière à répondre aux préoccupations des délégations.

L’Argentine a dit être prête à adopter le texte proposé par la présidence. Elle a assuré qu’elle aborderait son mandat, le cas échéant, dans le même esprit que le Brésil.

Les Pays-Bas ont dit pouvoir accepter le projet en l’état, malgré ses imperfections. Les Pays-Bas ont souscrit aux déclarations du Brésil et de l’Argentine s’agissant de la coordination des organes subsidiaires.

Le Chili a estimé que les coordonnateurs devraient avoir une certaine marge de manœuvre pour gérer leurs travaux, en consultation avec les pays.

Le Président a tenu à préciser que l’alinéa sur le multiculturalisme avait été ajouté sur proposition d’une délégation; et que sa manière de présenter les conclusions des coordonnateurs était inspirée de la pratique de la Conférence au début des années 2000. Le Président a aussi assuré que les coordonnateurs pressentis s’étaient tous engagés à servir la Conférence de manière neutre. Il a ajouté qu’il réfléchirait à toutes les remarques faites par les délégations. M. Liddle a enfin assuré que son projet avait pour seul objet de ramener la Conférence à son mandat de négociation.



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DC/19/19F